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19/04/2010 | FRANCE | N°09NT01723

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 19 avril 2010, 09NT01723


Vu la requête, enregistrée le 10 juillet 2009, présentée pour la SA SODIFRANCE, dont le siège est Parc d'activités La Bretèche, avenue Saint Vincent à Saint Grégoire (35760), par Mes Renard et Loup, avocats au barreau des Hauts-de-Seine ; la SA SODIFRANCE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 06-3327, 06-3328 en date du 14 mai 2009 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt auxquelles elle a été assujettie

au titre de l'exercice clos le 30 juin 2001 ainsi que des pénalités y affére...

Vu la requête, enregistrée le 10 juillet 2009, présentée pour la SA SODIFRANCE, dont le siège est Parc d'activités La Bretèche, avenue Saint Vincent à Saint Grégoire (35760), par Mes Renard et Loup, avocats au barreau des Hauts-de-Seine ; la SA SODIFRANCE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 06-3327, 06-3328 en date du 14 mai 2009 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos le 30 juin 2001 ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 mars 2010 :

- le rapport de Mme Specht, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Hervouet, rapporteur public ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que le Tribunal administratif de Rennes a été saisi de deux demandes distinctes, l'une émanant de la société SODIFRANCE, ayant trait aux impositions de ladite société à l'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos le 30 juin 2001, la seconde émanant de la SA Sodifrance Isis, et ayant trait aux suppléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre de la même année ; que compte tenu de la nature de l'impôt sur les sociétés et quels que fussent en l'espèce les liens, de fait et de droit, entre les impositions en cause, le tribunal administratif devait statuer par des décisions séparées, sur chacune des demandes des deux personnes morales ; que c'est en méconnaissance de cette règle d'ordre public qu'il a prononcé la jonction des instances ; que, dès lors, le jugement attaqué en date du 14 mai 2009 doit être annulé en tant qu'il concerne la SA SODIFRANCE ; qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de cette société dans les limites de ses conclusions d'appel ;

Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles 38 et 209 du code général des impôts, le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion commerciale normale ; que la cession par une société d'un élément d'actif à un prix inférieur à sa valeur vénale ne relève pas, en règle générale d'une gestion normale, sauf s'il apparaît qu'en consentant un tel avantage, l'entreprise a agi dans son propre intérêt ; que, s'il appartient à l'administration d'apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer qu'une telle cession constitue un acte anormal de gestion, elle est réputée apporter cette preuve dès lors que cette entreprise n'est pas en mesure de justifier qu'elle a bénéficié en retour de contreparties ;

Considérant que la SA SODIFRANCE a cédé le 15 mai 2001 à sa filiale la SA Sodifrance Isis au prix de 177 606 euros, les 2 685 titres qu'elle détenait de la société Mysis sur les 2 690 titres constituant le capital social de cette société soit 66,15 euros le titre et qu'elle avait acquis en décembre 1998 au prix de 190 697 euros, soit 70,89 euros le titre ; qu'à l'issue d'une vérification de comptabilité dont la société SODIFRANCE a fait l'objet, l'administration a remis en cause le prix de vente des titres au motif que l'évaluation de la société Mysis ne prenait pas en compte la valeur du fonds de commerce créé par cette société et qui était exploité depuis le 1er juillet 1999 en location gérance par la société Sodifrance Isis en contrepartie d'une redevance annuelle de 900 000 francs (137 204 euros), a porté le prix de vente des titres à 451 504 euros soit 168 euros par titre après réintégration de la valeur du fonds de commerce arrêtée à 274 408 euros et a réintégré l'écart de valeur dans les résultats imposables de la SA SODIFRANCE au motif que la vente des titres à un prix fortement minoré constituait un acte anormal de gestion ;

Considérant, en premier lieu, que si la SA SODIFRANCE soutient que la vente des titres a été réalisée pour un prix sensiblement équivalent au prix d'acquisition versé deux ans auparavant, il résulte de l'instruction qu'eu égard au temps écoulé depuis la transaction initiale en 1998 et aux changements intervenus dans la situation économique et financière de la société depuis cette date, ladite transaction ne s'imposait pas à l'administration ; que cette dernière était dès lors fondée à rechercher la valeur patrimoniale de la société Mysis en prenant en compte la valeur du fonds de commerce créé par cette société qui ne figurait pas dans l'évaluation de l'entreprise effectuée par le commissaire aux apports à l'occasion de l'opération de fusion absorption du 30 juin 2001 de la société Mysis par la SA Sodifrance Isis ; que si la société requérante conteste le montant de la valorisation du fonds de commerce effectuée par l'administration en faisant valoir que le contrat de location gérance conclu à l'intérieur du groupe SODIFRANCE ne reflétait pas les prix du marché, il résulte de l'instruction que l'administration a tenu compte des liens entre les parties au contrat en fixant finalement la valeur du fonds de commerce à deux fois le montant annuel de la redevance de location gérance au lieu du coefficient de cinq initialement retenu ; que par suite l'administration était fondée à fixer la valeur mathématique de la société Mysis à 452 346 euros correspondant à une valeur unitaire de la part sociale de 168 euros ;

Considérant, en deuxième lieu, que si, dans la décision de rejet de la réclamation de la société requérante, l'administration a recoupé la valeur mathématique avec la valeur de productivité de l'entreprise, elle a écarté la valeur unitaire en résultant, qui était supérieure à celle découlant de la valeur mathématique ; que, par suite, les moyens soulevés par la société requérante pour critiquer le principe de l'utilisation de la valeur de productivité sont inopérants ;

Considérant, en troisième lieu, que la société requérante propose la combinaison de la valeur mathématique avec la valeur de rendement ; que toutefois une telle méthode qui s'applique à l'égard d'entreprises pratiquant une politique régulière de distribution et a pour but d'apprécier plus particulièrement la valeur des titres minoritaires, n'apparaît pas pertinente lorsque, comme en l'espèce, il s'agit d'une transmission d'entreprise ; qu'en outre la société requérante applique cette méthode en retenant un taux de capitalisation de 8,70 % au bénéfice moyen distribué alors que ce taux utilisé par l'administration dans le calcul de la valeur de productivité était fondé sur les bénéfices dégagés et ne peut être utilement appliqué aux distributions, lesquelles, en l'espèce, ne représentent pas l'essentiel des bénéfices dégagés ; que, par ailleurs, en se bornant à faire valoir l'absorption par la SA Sodifrance Isis de la société Mysis peu de temps après l'opération litigieuse, elle ne justifie pas le bien-fondé d'un taux d'abattement de 50 % pour absence de liquidité des titres au lieu du taux de 30 % habituellement retenu en la matière ; que, par suite, la SA SODIFRANCE ne critique pas utilement la valeur du titre établie par l'administration à partir de la valeur mathématique de l'entreprise Mysis ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'administration doit être regardée comme établissant que le prix vente de 66,15 euros le titre des parts de la société Mysis par la SA SODIFRANCE a été minoré et que le prix unitaire de 168 euros doit être retenu ; que si la société requérante soutient que l'opération avait pour objet de rationaliser les structures du groupe en les simplifiant, était économiquement justifiée et ne provoquait aucun déséquilibre financier au niveau du groupe, ces circonstances sont insuffisantes pour justifier d'un intérêt propre de la SA SODIFRANCE expliquant la différence de prix ; que, par suite, l'administration apporte la preuve qui lui incombe que la cession litigieuse des titres de la société Mysis à la SA Sodifrance Isis à un prix notablement inférieur à leur valeur réelle constitue, à concurrence de l'insuffisance de prix, un avantage consenti par la SA SODIFRANCE sans contrepartie, constitutif d'un acte anormal de gestion ;

Considérant, enfin, que lorsqu'une société mère cède un élément d'actif à l'une de ses filiales moyennant un prix inférieur à sa valeur vénale réelle, elle consent, dans la mesure de la minoration constatée, une libéralité ; qu'une telle libéralité est, au regard de la loi fiscale, assimilable à une distribution immédiate de fonds sociaux et est imposable dans les conditions de droit commun ; que dès lors, la demande présentée à titre subsidiaire par la société SODIFRANCE de soumettre l'insuffisance de prix constatée au régime d'imposition des plus-values à long terme ne peut qu'être rejetée ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les conclusions de la demande de la SA SODIFRANCE présentées devant le Tribunal administratif de Rennes ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la SA SODIFRANCE demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n°s 06-3327, 06-3328 du 14 mai 2009 du Tribunal administratif de Rennes est annulé.

Article 2 : La demande de la SA SODIFRANCE présentée devant le tribunal administratif et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société SODIFRANCE et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.

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N° 09NT01723 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 09NT01723
Date de la décision : 19/04/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. LEMAI
Rapporteur ?: Mme Frédérique SPECHT
Rapporteur public ?: M. HERVOUET
Avocat(s) : LOUP

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2010-04-19;09nt01723 ?
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