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15/04/2010 | FRANCE | N°06NT02157

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 15 avril 2010, 06NT02157


Vu l'arrêt en date du 6 mars 2008 par lequel la Cour a, avant de statuer sur la requête, enregistrée le 26 décembre 2006, présentée pour le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL ET UNIVERSITAIRE (CHRU) DE RENNES, dont le siège est 2, rue Henri Le Guilloux à Rennes Cedex 9 (35033), par Me Le Prado, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, tendant à l'annulation du jugement nos 02-2325 et 05-1688 du 26 octobre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Rennes l'a déclaré responsable des conséquences dommageables de l'infection développée par M. Laurent X à la suite de son hosp

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Vu l'arrêt en date du 6 mars 2008 par lequel la Cour a, avant de statuer sur la requête, enregistrée le 26 décembre 2006, présentée pour le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL ET UNIVERSITAIRE (CHRU) DE RENNES, dont le siège est 2, rue Henri Le Guilloux à Rennes Cedex 9 (35033), par Me Le Prado, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, tendant à l'annulation du jugement nos 02-2325 et 05-1688 du 26 octobre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Rennes l'a déclaré responsable des conséquences dommageables de l'infection développée par M. Laurent X à la suite de son hospitalisation dans cet établissement du 9 au 20 juillet 2000, ordonné une expertise médicale ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu l'arrêté du 1er décembre 2009 relatif aux montants de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 mars 2010 :

- le rapport de Mme Dorion, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Hervouet, rapporteur public ;

- et les observations de Me Robin, substituant Me Doucet, avocat de M. X et de la MSA des Côtes-d'Armor ;

Considérant que, par un arrêt du 6 mars 2008, la cour a, avant de statuer sur la requête présentée pour le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL ET UNIVERSITAIRE (CHRU) DE RENNES, tendant à l'annulation du jugement du 26 octobre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Rennes l'a condamné à réparer les conséquences dommageables de l'infection développée par M. X à la suite de son hospitalisation dans cet établissement du 9 au 20 juillet 2000, et sur les recours incidents de M. X et de la mutualité sociale agricole (MSA) des Côtes-d'Armor sollicitant une majoration de leurs indemnités, ordonné une expertise médicale ;

Sur la responsabilité :

Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment des conclusions de l'expert désigné par la cour, que M. X, alors âgé de vingt-six ans, a été victime le 8 juillet 2000 vers 23 heures 30 d'un accident de la circulation ; qu'à son admission dans le service de réanimation chirurgicale du CHRU DE RENNES, il présentait notamment une rupture du diaphragme, une plaie occipitale et une fracture complexe du bassin ; que, pour le traitement de cette fracture, a été mise en place une traction trans-condylienne, remplacée le 17 juillet 2000 par une broche trans-tibiale ; qu'une arthrite septique du genou gauche à staphylocoque doré multi-sensible est apparue le 28 juillet 2000 sur le trajet de l'ancienne broche trans-condylienne ; que cette infection a rendu nécessaires une reprise chirurgicale pour mise à plat de l'abcès réalisée le 30 juillet 2000, associée à une antibiothérapie intensive, et une arthrolyse réalisée le 11 janvier 2002 ; que la complication infectieuse dont a été victime M. X, qui résulte de l'introduction accidentelle de germes dans l'organisme de celui-ci, lors des perforations réalisées pour le traitement orthopédique de sa fracture-luxation de la hanche gauche, révèle une faute dans l'organisation ou le fonctionnement du service public hospitalier ; que c'est, par suite, à bon droit que le Tribunal administratif de Rennes a déclaré le CHRU DE RENNES responsable des conséquences dommageables de l'infection nosocomiale dont a été victime M. X ;

Sur les préjudices subis par M. X et sur les droits de la MSA des Côtes-d'Armor :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la complication infectieuse dont a été victime M. X a été à l'origine d'une reprise chirurgicale le 30 juillet 2000 pour lavage et nettoyage du foyer infectieux, d'une antibiothérapie, d'un séjour en rééducation fonctionnelle de longue durée, de l'apparition d'une raideur de la jambe gauche imputable à une algoneurodystrophie et d'une dernière hospitalisation pour arthrolyse chirurgicale le 11 janvier 2002 ; que l'état de santé de l'intéressé peut être considéré comme consolidé au 2 décembre 2002, date de la fin des soins de rééducation, avec un taux d'incapacité permanente partielle de 7 % ;

Considérant que la MSA des Côtes-d'Armor exerce sur les réparations dues au titre du préjudice subi par M. X, le recours subrogatoire prévu à l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ; qu'il y a lieu de statuer poste par poste sur ce préjudice et sur les droits respectifs de la victime et de la caisse ;

En ce qui concerne les préjudices à caractère patrimonial :

Quant aux dépenses de santé :

Considérant que la MSA des Côtes-d'Armor justifie avoir exposé pour son assuré des débours, au titre des hospitalisations nécessitées par l'infection nosocomiale, d'un montant total de 46 354,98 euros, ainsi que des frais médicaux et pharmaceutiques, soins infirmiers, frais de transport et soins de kinésithérapie, tous postérieurs au 28 juillet 2000, pour un montant de 17 682,22 euros ; que la caisse primaire peut prétendre au remboursement de ces sommes ; que les frais futurs dont il est demandé l'indemnisation ne présentent pas, en revanche, ainsi qu'en ont décidé les premiers juges, un caractère certain, dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction que M. X doive recevoir une prothèse totale de genou, ni qu'il bénéficie pour l'avenir d'un suivi orthopédique annuel et de séances de rééducation ; que les dépenses de santé devant être mises à la charge du centre hospitalier s'élèvent par conséquent à la somme de 64 037,20 euros ;

Quant aux pertes de revenus :

Considérant qu'il résulte des conclusions des experts que la période supplémentaire d'incapacité temporaire totale imputable à l'infection nosocomiale dont le CHRU DE RENNES est responsable s'étend du 8 février 2001 au 16 avril 2002 ; que la MSA des Côtes-d'Armor a versé à M. X durant cette période 6 454,08 euros d'indemnités journalières dont elle est fondée à demander le remboursement ; que M. X, dont le contrat de travail à durée déterminée était arrivé à échéance le 31 août 2000, ne justifie pas de pertes de revenus sur la même période ;

Quant à l'incidence professionnelle du dommage corporel :

Considérant que si M. X fait valoir qu'il a été reçu en juillet 2000 en vue de son recrutement par la société Canal + sur un poste de Chargé système de gestion commerciale et que, n'ayant pu donner suite à un troisième entretien d'embauche en raison de son état de santé, il a perdu une chance de voir se concrétiser ce recrutement, il ne résulte pas de l'instruction que la procédure de recrutement en cause était sur le point d'aboutir, ni que sa candidature a été écartée en raison de l'allongement de la période d'incapacité temporaire totale imputable à l'infection nosocomiale ; que, dans ces circonstances, le lien de causalité entre la perte de chance professionnelle alléguée et la faute reprochée au centre hospitalier ne peut être regardé comme établi ;

En ce qui concerne les préjudices à caractère personnel :

Considérant que les troubles dans ses conditions d'existence subis par M. X du fait de l'incapacité temporaire totale subie du 8 février 2001 au 16 avril 2002 peuvent être évalués à 4 200 euros ; qu'eu égard à son âge à la date de consolidation des blessures, au taux d'incapacité permanente de 7 % et au préjudice d'agrément consécutif à l'impossibilité ou à la difficulté de pratiquer certains de ses loisirs habituels, notamment le football, il sera fait une juste appréciation des troubles dans les conditions d'existence de la victime liés à son déficit fonctionnel permanent en les évaluant à 7 800 euros ; que le préjudice esthétique, évalué à 1,5 sur une échelle de 7 par l'expert, et le préjudice résultant des souffrances endurées, chiffrées à 4 sur la même échelle, peuvent être évalués respectivement à 1 000 euros et 5 000 euros ;

Sur la détermination définitive des droits de la victime et de la MSA :

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le CHRU DE RENNES doit être condamné

à verser à M. X la somme de 18 000 euros et à la MSA des Côtes-d'Armor la somme de 70 491,28 euros ;

Sur les intérêts et les intérêts des intérêts :

Considérant que M. X a demandé que la somme au paiement de laquelle est condamné le CHRU DE RENNES soit assortie des intérêts légaux, capitalisés, à compter du 15 avril 2005, date de sa requête introductive de première instance ; que la somme de 18 000 euros portera intérêts au taux légal à compter du 15 avril 2005 ; qu'à cette date, une année d'intérêts n'était pas encore échue ; que les intérêts seront capitalisés au 15 avril 2006 et à chaque échéance annuelle ultérieure pour produire eux mêmes intérêts ;

Considérant que la MSA des Côtes-d'Armor a droit à ce que la somme de 70 491,28 euros qui lui est accordée porte intérêts à compter du 19 septembre 2006, date d'enregistrement au greffe du tribunal de son mémoire en intervention ;

Sur l'indemnité forfaitaire due à la MSA des Côtes-d'Armor :

Considérant que la MSA des Côtes-d'Armor a droit à l'indemnité forfaitaire régie par les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, pour le montant de 966 euros auquel elle a été fixée par l'arrêté interministériel du 1er décembre 2009 ; que cette caisse est, par suite, fondée à demander, par la voie de l'appel incident, que l'indemnité de 760 euros qui lui a été allouée à ce titre par le jugement attaqué soit portée à ce montant ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le CHRU DE RENNES n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le Tribunal administratif de Rennes l'a déclaré responsable de l'infection nosocomiale subie par M. X ; que M. X et la MSA des Côtes-d'Armor sont en revanche fondés à demander, pour le premier, que la somme de 13 500 euros au paiement de laquelle le CHRU DE RENNES a été condamné en première instance soit portée à 18 000 euros, pour la seconde que la somme mise à la charge du CHRU DE RENNES soit assortie des intérêts légaux à compter du 19 septembre 2006 et que l'indemnité forfaitaire de gestion soit portée à 966 euros ; que le jugement du 26 octobre 2006 du Tribunal administratif de Rennes doit être réformé dans cette mesure ;

Sur les frais d'expertise :

Considérant qu'il y a lieu de laisser au CHRU de RENNES la charge définitive des frais de l'expertise ordonnée en appel ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge du CHRU DE RENNES le versement à M. X de la somme de 2 000 euros et à la MSA des Côtes-d'Armor de la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du CHRU DE RENNES est rejetée.

Article 2 : La somme que le CHRU DE RENNES est condamné à verser à M. X par l'article 2 du jugement du 26 octobre 2006 du Tribunal administratif de Rennes est portée à 18 000 euros (dix-huit mille euros). Cette somme portera intérêts à compter du 15 avril 2005. Les intérêts échus le 15 avril 2006 seront capitalisés à cette date et à chaque échéance annuelle ultérieure pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 3 : La somme de 70 491,28 euros (soixante-dix mille quatre cent quatre-vingt-onze euros et vingt-huit centimes) que le CHRU DE RENNES est condamné à verser à la MSA des Côtes-d'Armor par l'article 4 du jugement du 26 octobre 2006 du Tribunal administratif de Rennes portera intérêts au taux légal à compter du 19 septembre 2006.

Article 4 : La somme que le CHRU DE RENNES est condamné à verser à la MSA des Côtes-d'Armor, au titre de l'indemnité forfaitaire prévue à l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, est portée à 966 euros (neuf cent soixante-six euros).

Article 5 : Le jugement nos 02-2325 et 05-1688 du 26 octobre 2006 du Tribunal administratif de Rennes est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 6 : Le CHRU DE RENNES supportera la charge définitive des frais d'expertise taxés et liquidés par ordonnance du 7 janvier 2010 à la somme de 900 euros (neuf cents euros).

Article 7 : Le surplus des conclusions d'appel incident de M. X et de la MSA des Côtes-d'Armor est rejeté.

Article 8 : Le CHRU DE RENNES versera à M. X la somme de 2 000 euros (deux mille euros) et à la MSA des Côtes-d'Armor la somme de 1 000 euros (mille euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 9 : Le présent arrêt sera notifié au CHRU DE RENNES, à M. Laurent X, à la MSA des Côtes-d'Armor et au ministre de la santé et des sports.

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N° 06NT02157 2

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Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. LOOTEN
Rapporteur ?: Mme Danièle THOLLIEZ
Rapporteur public ?: M. GEFFRAY
Avocat(s) : LE PRADO

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Date de la décision : 15/04/2010
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 06NT02157
Numéro NOR : CETATEXT000022363965 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2010-04-15;06nt02157 ?
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