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14/12/2009 | FRANCE | N°06NT01786

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 14 décembre 2009, 06NT01786


Vu la requête, enregistrée le 10 octobre 2006, présentée pour la société FINDLUX SA, dont le siège était 18 Val Sainte Croix à Luxembourg (L 1371), représentée par Me Céline X, agissant en qualité de curateur, demeurant 9 avenue Guillaume à Luxembourg (L 1651), par Me Baranez, avocat au barreau de Paris, au cabinet duquel elle élit domicile ; la société FINDLUX SA demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 03-156 et 03-157 du 6 juillet 2006 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes tendant à la décharge, d'une part, des rappels de

taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes mises à sa charge ...

Vu la requête, enregistrée le 10 octobre 2006, présentée pour la société FINDLUX SA, dont le siège était 18 Val Sainte Croix à Luxembourg (L 1371), représentée par Me Céline X, agissant en qualité de curateur, demeurant 9 avenue Guillaume à Luxembourg (L 1651), par Me Baranez, avocat au barreau de Paris, au cabinet duquel elle élit domicile ; la société FINDLUX SA demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 03-156 et 03-157 du 6 juillet 2006 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes tendant à la décharge, d'une part, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes mises à sa charge au titre de la période du 1er janvier 1998 au 31 décembre 2000, d'autre part des cotisations d'impôt sur les sociétés et de contributions forfaitaires sur cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos le 31 décembre 1998, enfin, des cotisations d'imposition forfaitaire annuelle auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1999 et 2000 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention fiscale conclue entre la France et le Grand Duché de Luxembourg tendant à éviter les doubles impositions et à établir des règles d'assistance administrative réciproque en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, signée le 1er avril 1958, modifiée par l'avenant du 8 septembre 1970 ;

Vu la sixième directive n° 77/388/CEE du Conseil des communautés européennes du 17 mai 1977 en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires ;

Vu la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 novembre 2009 :

- le rapport de Mlle Wunderlich, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Hervouet, rapporteur public ;

- et les observations de Me Rudeau, avocat de la société FINDLUX SA ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, sur requête des services fiscaux sollicitant la mise en oeuvre du droit de visite et de saisie prévu à l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales à l'encontre des sociétés FINDLUX SA et SARL RG Diffusion, le juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de Nantes a, par ordonnance en date du 21 mai 2001, autorisé les inspecteurs et contrôleurs des impôts à procéder aux visites et saisies nécessitées par la recherche de la preuve d'agissements présumés frauduleux dans les locaux professionnels susceptibles d'être occupés par ces deux sociétés à Vigneux-de-Bretagne ainsi qu'au domicile de leur dirigeant, M. Y, à Vay ; que ces opérations se sont déroulées le 22 mai 2001, suivant procès-verbaux de visite, saisie et inventaire du même jour ; que le service, estimant au vu des éléments recueillis que l'activité de la société FINDLUX SA, sise au Luxembourg, était effectivement exercée en France, a alors invité M. Y à souscrire des déclarations fiscales en matière d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée pour les années 1998, 1999 et 2000, puis engagé une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle ont été mis à la charge de la société requérante des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, des cotisations d'impôt sur les sociétés et de contributions forfaitaires sur cet impôt ainsi que des cotisations d'imposition forfaitaire annuelle ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales dans sa rédaction issue de l'article 164 de la loi susvisée du 4 août 2008 de modernisation de l'économie : I. Lorsque l'autorité judiciaire, saisie par l'administration fiscale, estime qu'il existe des présomptions qu'un contribuable se soustrait à l'établissement ou au paiement des impôts sur le revenu ou sur les bénéfices ou de la taxe sur la valeur ajoutée (...) elle peut, dans les conditions prévues au II, autoriser les agents de l'administration des impôts, ayant au moins le grade d'inspecteur et habilités à cet effet par le directeur général des impôts, à rechercher la preuve de ces agissements, en effectuant des visites en tous lieux, même privés, où les pièces et documents s'y rapportant sont susceptibles d'être détenus et procéder à leur saisie, quel qu'en soit le support. II. Chaque visite doit être autorisée par une ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance dans le ressort duquel sont situés les lieux à visiter. (...) L'ordonnance peut faire l'objet d'un appel devant le premier président de la cour d'appel. (...) Suivant les règles prévues par le code de procédure civile, cet appel doit être exclusivement formé par déclaration remise ou adressée, par pli recommandé ou, à compter du 1er janvier 2009, par voie électronique, au greffe de la cour dans un délai de quinze jours. Ce délai court à compter soit de la remise, soit de la réception, soit de la signification de l'ordonnance. Cet appel n'est pas suspensif. (...) L'ordonnance du premier président de la cour d'appel est susceptible d'un pourvoi en cassation, selon les règles prévues par le code de procédure civile. Le délai du pourvoi en cassation est de quinze jours. (...) III. (...) Le premier président de la cour d'appel connaît des recours contre le déroulement des opérations de visite ou de saisie. (...). Suivant les règles prévues par le code de procédure civile, ce recours doit être exclusivement formé par déclaration remise ou adressée, par pli recommandé ou, à compter du 1er janvier 2009, par voie électronique, au greffe de la cour dans un délai de quinze jours. Ce délai court à compter de la remise ou de la réception soit du procès-verbal, soit de l'inventaire, mentionnés au premier alinéa. Ce recours n'est pas suspensif. L'ordonnance du premier président de la cour d'appel est susceptible d'un pourvoi en cassation, selon les règles prévues par le code de procédure civile. Le délai de pourvoi en cassation est de quinze jours (...) ; qu'aux termes du IV du même article 164 : 1. Pour les procédures de visite et de saisie prévues à l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales pour lesquelles le procès-verbal ou l'inventaire mentionnés au IV de cet article a été remis ou réceptionné antérieurement à la date d'entrée en vigueur de la présente loi, un appel contre l'ordonnance mentionnée au II de cet article, alors même que cette ordonnance a fait l'objet d'un pourvoi ayant donné lieu à cette date à une décision de rejet du juge de cassation, ou un recours contre les opérations de visite ou de saisie peut, dans les délais et selon les modalités précisées au 3 du présent IV, être formé devant le premier président de la cour d'appel dans les cas suivants : (...) d) Lorsque, à partir d'éléments obtenus par l'administration dans le cadre d'une procédure de visite et de saisie, des impositions ont été établies (...) et qu'elles font (...) l'objet, à la date d'entrée en vigueur de la présente loi, d'une réclamation ou d'un recours contentieux devant le juge, sous réserve des affaires dans lesquelles des décisions sont passées en force de chose jugée. Le juge, informé par l'auteur de l'appel ou du recours ou par l'administration, sursoit alors à statuer jusqu'au prononcé de l'ordonnance du premier président de la cour d'appel (...) 3. Dans les cas mentionnés aux 1 et 2, l'administration informe les personnes visées par l'ordonnance ou par les opérations de visite et de saisie de l'existence de ces voies de recours et du délai de deux mois ouvert à compter de la réception de cette information pour, le cas échéant, faire appel contre l'ordonnance ou former un recours contre le déroulement des opérations de visite ou de saisie. Cet appel et ce recours sont exclusifs de toute appréciation par le juge du fond de la régularité du déroulement des opérations de visite et de saisie. Ils s'exercent selon les modalités prévues respectivement aux articles L. 16 B et L. 38 du livre des procédures fiscales et à l'article 64 du code des douanes. En l'absence d'information de la part de l'administration, ces personnes peuvent exercer, selon les mêmes modalités, cet appel ou ce recours sans condition de délai. (...) ;

Considérant, d'une part, que l'article 164 de la loi susvisée du 4 août 2008 a modifié les dispositions -dont il a été fait application à l'encontre de la société requérante- de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales en conséquence de l'arrêt Ravon et autres c/ France du 21 février 2008 par lequel la Cour européenne des droits de l'homme a jugé que les voies de recours alors ouvertes aux contribuables pour contester la régularité des visites et saisies opérées sur le fondement dudit article ne garantissaient pas l'accès à un procès équitable au sens du paragraphe 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il a, en particulier, instauré un appel devant le premier président de la cour d'appel contre l'ordonnance autorisant la visite et un recours devant ce même juge contre le déroulement des opérations de visite et de saisie, soumis aux règles du code de procédure civile, les ordonnances rendues en appel étant susceptible d'un pourvoi en cassation ; que le d) précité du 1. du IV de l'article 164 a par ailleurs prévu que cet appel et ce recours étaient rétroactivement ouverts pour les procédures de visite et de saisie ayant permis, comme en l'espèce, à l'administration d'obtenir des éléments à partir desquels des impositions faisant l'objet d'un recours contentieux ont été établies ; que si le caractère rétroactif de cette faculté a pour effet de rendre inopérant le moyen tiré par la société requérante de l'incompatibilité des dispositions de l'article L. 16 B, dans leur rédaction antérieure à la date d'entrée en vigueur de la loi du 4 août 2008, avec le droit à un procès équitable garanti par l'article 6 paragraphe 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le IV de l'article 164 n'a pas pour objet de valider rétroactivement l'ordonnance et la procédure de visite et de saisie contestées, dont le premier président de la cour d'appel est susceptible de constater l'irrégularité ; que la possibilité pour les contribuables de contester par tout moyen le bien-fondé des impositions mises à leur charge ne s'en trouve nullement affectée ; que la société FINDLUX SA n'est par suite pas fondée à soutenir que ces dispositions législatives, qui permettent aux contribuables ayant fait l'objet d'une procédure de visite et de saisie sur le fondement de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales avant leur entrée en vigueur, d'exercer les voies de recours nouvellement instaurées pour assurer la compatibilité dudit article avec la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, nonobstant leur portée rétroactive, auraient pour conséquence de modifier, au détriment des contribuables et en violation du droit de toute personne à un procès équitable garanti par cette convention, les règles que le juge de l'impôt doit appliquer ;

Considérant, d'autre part, que la société FINDLUX SA soutient que les dispositions du IV de l'article 164 précité de la loi susvisée du 4 août 2008 sont, en tant qu'elles prévoient l'application rétroactive des nouvelles dispositions de l'article L. 16 B, incompatibles avec l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales relatif au droit au respect des biens de toute personne physique ou morale ; que, cependant, la société ne saurait prétendre au bénéfice de ces stipulations que si elle peut faire état de la propriété d'un bien qu'elles ont pour objet de protéger et à laquelle il aurait été porté atteinte ; qu'à défaut de créance certaine, l'espérance légitime d'obtenir la restitution d'une somme d'argent doit être regardée comme un bien au sens de ces stipulations ; que toutefois, si la société se prévaut en l'espèce de l'état du droit résultant de la décision susmentionnée Ravon de la Cour de justice des communautés européennes, qui aurait dû conduire à la décharge des impositions en litige dès lors qu'elle permettait au contribuable d'obtenir de la Cour qu'elle tire les conséquences de ce que les éléments à partir desquels ont été établies lesdites impositions ont été obtenus à l'issue d'une procédure de visite et de saisie dépourvue de base légale, elle ne se trouve nullement privée, par l'effet des dispositions contestées de l'article 164, de la possibilité d'obtenir dans la présente instance la décharge de ces impositions en suite, notamment, de l'annulation par le premier président de la Cour d'appel, dûment saisi, de l'ordonnance autorisant la visite et les saisies domiciliaires ;

Considérant enfin que la société FINDLUX SA justifie devant la Cour de ce que le recours prévu par les dispositions précitées de l'article 164 de la loi du 4 août 2008, dont il n'y a pas lieu, ainsi qu'il vient d'être dit, d'écarter l'application, a été exercé devant le premier président de la Cour d'appel de Rennes contre l'ordonnance du 21 mai 2001 autorisant la visite sur le fondement de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales ainsi que contre les opérations de visite et de saisies elles-mêmes, qui sont à l'origine des impositions qu'elle conteste ; qu'il y a lieu, par suite, pour la Cour administrative d'appel saisie de la contestation de ces impositions, de surseoir à statuer sur ce litige en application de ces dispositions jusqu'au prononcé de l'ordonnance du premier président de la Cour d'appel statuant sur l'appel contre l'ordonnance autorisant la visite et le recours contre le déroulement des opérations ;

DÉCIDE :

Article 1er : Il est sursis à statuer sur la requête de la société FINDLUX SA jusqu'au prononcé de l'ordonnance du premier président de la Cour d'appel statuant sur l'appel contre l'ordonnance autorisant la visite et le recours contre le déroulement des opérations.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société FINDLUX SA et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.

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N° 06NT01786

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 06NT01786
Date de la décision : 14/12/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. LEMAI
Rapporteur ?: Mme Anne-Catherine WUNDERLICH
Rapporteur public ?: M. HERVOUET
Avocat(s) : BARANEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2009-12-14;06nt01786 ?
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