Vu la requête, enregistrée le 7 novembre 2008, présentée pour le SERVICE DEPARTEMENTAL D'INCENDIE ET DE SECOURS (SDIS) DU FINISTERE, représenté par son président en exercice, par Me Gourvennec, avocat au barreau de Brest ; le SDIS DU FINISTERE demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement nos 05-3458 et 08-438 en date du 4 septembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Rennes l'a condamné à payer à M. Daniel X la somme de 9 905,14 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date de réception de la demande préalable du 18 avril 2005, correspondant à la différence entre la rémunération perçue par celui-ci dans le cadre du régime d'équivalence horaire mis en oeuvre au titre des services de garde qu'il a effectués durant la période du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2007 et celle qu'il aurait dû percevoir ;
2°) de rejeter la demande de M. X ;
3°) subsidiairement, de condamner l'Etat à le garantir des sommes qu'il pourrait être condamné à payer à M. X ;
4°) de condamner M. X à lui payer la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics ;
Vu la loi n° 82-213 du 2 mars 1982 modifiée ;
Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, modifiée, portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
Vu le décret n° 2000-815 du 25 août 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l'Etat ;
Vu le décret n° 2001-623 du 12 juillet 2001 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique territoriale ;
Vu le décret n° 2001-1382 du 31 décembre 2001 relatif au temps de travail des sapeurs-pompiers professionnels ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 juin 2009 :
- le rapport de M. Faessel, rapporteur ;
- les conclusions de M. Villain, rapporteur public ;
- et les observations de Me Gourvennec, avocat du SERVICE DEPARTEMENTAL D'INCENDIE ET DE SECOURS DU FINISTERE ;
Considérant que dans le cadre de son activité de sapeur-pompier professionnel au SDIS DU FINISTERE, M. X a été conduit à effectuer des gardes de 24 heures consécutives, comportant alternativement des périodes d'activité et des périodes de simple présence sur le lieu de service ; que le SDIS DU FINISTERE interjette appel du jugement en date du 4 septembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Rennes l'a condamné à payer à M. X la somme de 9 905,14 euros correspondant à la différence entre la rémunération perçue par celui-ci dans le cadre du régime d'équivalence horaire mis en oeuvre au titre des services de garde de 24 heures qu'il a effectués durant la période du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2007 et celle qu'il aurait dû percevoir ;
Sur les conclusions relatives aux rémunérations dues à M. X au titre des périodes d'activité antérieures au 1er janvier 2002 :
En ce qui concerne les périodes de service s'étendant du 1er janvier au 31 décembre 2001 :
Considérant qu'aux termes de l'article 87 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée : Les fonctionnaires régis par la présente loi ont droit, après service fait, à une rémunération fixée conformément aux dispositions de l'article 20 du titre 1er du statut général. (...) ;
Considérant, en premier lieu, que la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Rennes tendait à la condamnation du SDIS DU FINISTERE à lui verser les rémunérations qu'il estimait lui être dues au titre des durées de service effectif qu'il avait accomplies et non à la réparation d'un préjudice résultant d'une faute que le conseil d'administration du SDIS aurait commise en prévoyant, par sa délibération du 14 février 2000 annulée par un premier jugement du 7 novembre 2003 du Tribunal administratif de Rennes, que les périodes de garde de 24 heures effectuées par les sapeurs-pompiers professionnels en unités opérationnelles seraient assimilées à des durées de travail effectif de 15 heures ; que, par suite, en ce que les conclusions de la requête du SDIS DU FINISTERE concernent les périodes de service s'étendant du 1er janvier au 31 décembre 2001, les moyens invoqués par cet établissement public et relatifs à l'existence de cette faute ainsi qu'aux conséquences pécuniaires de celle-ci, ne peuvent qu'être écartés ;
Considérant, en second lieu, que si le SDIS DU FINISTERE soutient que les compléments de rémunération réclamés par M. X ont été inexactement évalués par les premiers juges à la somme de 6 461,34 euros, il n'apporte toutefois aucun élément de nature à remettre en cause ce montant ;
En ce qui concerne l'appel en garantie de l'Etat :
Considérant, en premier lieu, que les carences de l'Etat dans l'exercice du contrôle de légalité des actes des collectivités locales ou de leurs établissements publics, prévu par les dispositions de la loi du 2 mars 1982 susvisée, ne sont susceptibles d'engager la responsabilité de l'Etat que si elles constituent une faute lourde ; qu'en l'espèce, en s'abstenant de déférer au tribunal administratif la délibération susévoquée du 14 février 2000 du conseil d'administration du SDIS DU FINISTERE, le préfet du Finistère n'a, en tout état de cause, pas commis une telle faute ;
Considérant, en second lieu, qu'à supposer même qu'une faute puisse être imputée à l'Etat pour avoir tardé à prendre les dispositions réglementaires permettant d'instaurer des régimes d'équivalence horaire au sein des SDIS, le SDIS DU FINISTERE ne saurait, en tout état de cause, prétendre que c'est à raison de cette faute de l'Etat qu'il se serait trouvé illégalement dans l'obligation de payer à M. X un complément de rémunération ;
Considérant ainsi que les conclusions du SDIS DU FINISTERE tendant à ce que l'Etat le garantisse de sa condamnation à payer à M. X la somme de 6 461,34 euros, ne pouvaient qu'être rejetées ;
En ce qui concerne les conclusions de l'appel incident de M. X relatives à ses rémunérations au titre des périodes d'activité antérieures au 1er janvier 2001 :
Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 susvisée : Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis. / Sont prescrites, dans le même délai et sous la même réserve, les créances sur les établissements publics dotés d'un comptable public. ; qu'aux termes de l'article 2 de la même loi : La prescription est interrompue par : (...) Tout recours formé devant une juridiction, relatif au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, quel que soit l'auteur du recours et même si la juridiction saisie est incompétente pour en connaître, et si l'administration qui aura finalement la charge du règlement n'est pas partie à l'instance (...) ;
Considérant que le fait générateur de la créance dont se prévaut M. X n'est pas constitué par l'annulation, par le jugement du 7 novembre 2003 du Tribunal administratif de Rennes, de la délibération du 14 février 2000 du conseil d'administration du SDIS prévoyant un régime de décompte spécifique des durées de travail en période de garde, mais par le service fait par l'intéressé au cours des périodes concernées ; qu'ainsi, cette annulation est sans influence sur la détermination de l'exercice auquel doit être rattachée ladite créance ; que, pour la même raison, la demande présentée par le syndicat CGT du personnel du SDIS DU FINISTERE devant le Tribunal administratif de Rennes aux fins d'annulation de cette délibération du conseil d'administration du SDIS DU FINISTERE ne peut être regardée comme étant relative au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance litigieuse, au sens des dispositions précitées de la loi du 31 décembre 1968, dès lors que l'existence de ladite délibération n'empêchait pas l'intéressé, s'il estimait avoir été privé d'une partie de sa rémunération, d'en réclamer le paiement à l'autorité compétente et, s'il n'obtenait pas satisfaction, de saisir la juridiction administrative à fin que cet établissement public soit condamné à lui verser les sommes qu'il estime lui être dues ; que, par suite, le président du SDIS DU FINISTERE a pu à juste titre opposer à M. X la prescription quadriennale à la créance dont ce dernier se prévalait pour la période antérieure au 1er janvier 2001 ;
Sur les rémunérations dues à M. X au titre des périodes d'activité postérieures au 1er janvier 2002 :
Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret du 31 décembre 2001 relatif au temps de travail des sapeurs-pompiers professionnels : La durée de travail effectif des sapeurs-pompiers professionnels (...) comprend : 1. Le temps passé en intervention ; 2. Les périodes de garde consacrées au rassemblement qui intègre les temps d'habillage et déshabillage, à la tenue des registres, à l'entraînement physique, au maintien des acquis professionnels, à des manoeuvres de la garde, à l'entretien des locaux, des matériels et des agrès ainsi qu'à des tâches administratives et techniques, aux pauses destinées à la prise de repas ; 3. Le service hors rang, les périodes consacrées aux actions de formation définies par arrêté du ministre de l'intérieur dont les durées sont supérieures à 8 heures, et les services de sécurité ou de représentation. ; qu'aux termes de l'article 2 dudit décret : La durée de travail effectif journalier définie à l'article 1er ne peut excéder 12 heures consécutives (...) ; qu'aux termes de l'article 3 du même décret : Compte tenu des missions des services d'incendie et de secours et des nécessités de service, un temps de présence supérieur à l'amplitude journalière prévue à l'article 2 peut être fixé à 24 heures consécutives par le conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours après avis du comité technique paritaire. (...) Lorsque la durée du travail effectif s'inscrit dans un cycle de présence supérieur à 12 heures, la période définie à l'article 1er ne doit pas excéder 8 heures. Au-delà de cette durée, les agents ne sont tenus qu'à effectuer les interventions. ; qu'enfin, aux termes de l'article 4 de ce décret : Lorsqu'il est fait application de l'article 3 ci-dessus, une délibération du conseil d'administration après avis du comité technique paritaire fixe un temps d'équivalence au décompte annuel du temps de travail. (...) ;
Considérant que, par une délibération du 31 janvier 2002, le conseil d'administration du SDIS DU FINISTERE a prévu que, pour un agent à temps plein, le décompte du temps de travail est réalisé sur la base d'une durée annuelle de travail effectif de 1 540 heures en précisant toutefois que Pour les Sapeurs-Pompiers Professionnels assurant des cycles de présence mixtes de 12 heures et 24 heures consécutives, le temps d'équivalence au décompte du temps de travail annuel est égal à 2 310 heures. (...) ; que, ce faisant, le SDIS DU FINISTERE ne peut être regardé, contrairement à ce qu'il soutient, que comme ayant instauré, dans le cadre des dispositions précitées du décret du 31 décembre 2001, un régime d'équivalence horaire de travail impliquant, au cours d'un cycle de présence de 24 heures consécutives, une prise en compte différenciée des périodes de travail effectif et des périodes de simple présence sur le lieu de travail ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et n'est d'ailleurs pas contesté par le SDIS, que, postérieurement à l'entrée en vigueur des dispositions précitées du décret du 31 décembre 2001 et de la délibération du 31 janvier 2002, M. X a été amené à travailler par cycles de présence de 24 heures consécutives devant en principe s'inscrire, pour 8 heures de travail effectif et 16 heures de simple présence, dans le cadre de la durée d'équivalence annuelle de 2 310 heures ; qu'il est constant que l'intéressé a, à certaines époques, été conduit à effectuer des interventions qui ont porté à plus de 8 heures la durée de service effectif accomplie au cours de cycles de 24 heures d'activité ; qu'ayant ainsi accompli une durée de service totale excédant le temps d'équivalence annuel de 2 310 heures correspondant à sa rémunération normale, il pouvait prétendre, ainsi que l'a, à bon droit, estimé le Tribunal administratif de Rennes, au versement d'un complément de rémunération ; que, toutefois, les services effectifs supplémentaires ainsi accomplis ayant déjà été comptabilisés et rémunérés au titre des périodes de simple présence, M. X ne pouvait se voir allouer que la somme correspondant à la différence entre la rémunération afférente aux périodes de travail effectif et celle correspondant normalement aux périodes de simple présence sur le lieu de travail ;
Considérant, en revanche, que, contrairement à ce que soutient M. X par la voie de l'appel incident, les périodes de garde dénommées heures stationnaires, qui n'imposent à l'agent qu'une attente dans l'éventualité d'un appel pour une intervention, ne peuvent être regardées comme constituant un temps de travail effectif au sens des dispositions précitées du 31 décembre 2001 ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, dans ces conditions, le montant que le SDIS devait être condamné à payer à M. X au titre de complément de rémunération pour les services accomplis entre le 1er janvier 2002 et le 31 décembre 2007, devait être fixé à la somme de 1 721,90 euros et non à celle de 3 443,80 euros retenue par les premiers juges ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le jugement attaqué du Tribunal administratif de Rennes, lequel est suffisamment motivé, doit être réformé dans la seule mesure où il condamne le SDIS DU FINISTERE à payer à M. X une somme totale supérieure à 8 183,24 euros, laquelle sera majorée des intérêts au taux légal à compter de la date de réception de la demande préalable du 18 avril 2005 ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de laisser à la charge des parties les frais exposés par chacune d'elles et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le montant du complément de rémunération que le SDIS DU FINISTERE est condamné à payer à M. X est ramené à la somme de 8 183,24 euros (huit mille cent quatre vingt trois euros et vingt quatre centimes), laquelle sera majorée des intérêts au taux légal à compter de la date de réception de la demande préalable du 18 avril 2005.
Article 2 : Les conclusions de l'appel incident de M. X sont rejetées.
Article 3 : Le jugement susvisé nos 05-3458 et 08-438 du 4 septembre 2008 du Tribunal administratif de Rennes est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête du SDIS DU FINISTERE est rejeté.
Article 5 : Les conclusions de M. X tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié au SERVICE DEPARTEMENTAL D'INCENDIE ET DE SECOURS DU FINISTERE, à M. Daniel X et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.
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N° 08NT03064
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