Vu le recours, enregistré le 14 septembre 2007, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE ; le ministre demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 03-4323 du 9 mai 2007 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu mises à la charge de M. et Mme Yves X au titre des années 1999, 2000 et 2001 et des pénalités y afférentes ;
2°) de rétablir M. et Mme X au rôle de l'impôt sur le revenu au titre des années 1999, 2000 et 2001 à concurrence des dégrèvements prononcés en première instance ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er septembre 2008 :
- le rapport de M. Ragil, rapporteur ;
- et les conclusions de M. Hervouet, commissaire du gouvernement ;
Sur la fin de non-recevoir opposée au recours :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 200-18 du livre des procédures fiscales : “A compter de la notification du jugement du tribunal administratif qui a été faite au directeur du service de l'administration des impôts ou de l'administration des douanes et des droits indirects qui a suivi l'affaire, celui-ci dispose d'un délai de deux mois pour transmettre, s'il y a lieu, le jugement et le dossier au ministre chargé du budget. Le délai imparti pour saisir la cour administrative d'appel court, pour le ministre, de la date à laquelle expire le délai de transmission prévu à l'alinéa précédent ou de la date de la signification faite au ministre.” ; qu'il résulte de l'instruction que le recours susvisé du ministre a été enregistré dans le délai d'appel de deux mois courant à compter de l'expiration du délai de deux mois imparti au service local pour lui transmettre le jugement attaqué et le dossier de l'affaire ; que la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté du recours doit, dès lors être écartée sans que l'administration ait à justifier de la transmission du dossier ;
Au fond :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme X a acquis le 22 septembre 1997 avec M. André Y, son père, et son frère, M. Manuel Y et la société Ateca les 33 600 parts composant le capital social de la SARL Mahey, laquelle exerce une activité de fabrication de mobilier ; que, par acte sous seing privé du 23 septembre 1997, MM. Y et Mme X ont, en outre, acquis de la société Peabody GCI, cédante de la majorité des parts de la SARL Mahey, moyennant, pour chacun d'entre eux, le franc symbolique, une créance d'une valeur nominale de 5 676 192 F que cette société détenait sur la SARL Mahey ; qu'ainsi, la SARL Mahey est devenue débitrice de Mme X, à concurrence d'une somme de 1 892 064,06 F, laquelle a été inscrite au crédit du compte-courant de l'intéressée, pour cette valeur nominale, le 30 septembre 1997 ; que, selon une convention en date du 1er octobre 1997, Mme X a consenti, avec les autres associés, un abandon de créance de 1 600 000 F, sous réserve de retour à meilleure fortune ; que le 3 février 1998, la même société Peabody a cédé à M. Manuel Y et à Mme X, pour un franc chacun, une créance de 778 024,59 F qu'elle continuait à détenir sur cette société ; que le 30 décembre 1998, la SA Ateca a cédé à ces deux derniers les 29 100 parts qu'elle détenait dans le capital de la SARL Mahey ; que, lors de la vérification de comptabilité de la SARL Mahey, le service a constaté qu'en application de la clause de retour à meilleure fortune prévue par la convention susmentionnée du 1er octobre 1997, Mme X avait vu son compte courant crédité d'une somme de 538 690,70 F en 1999, de 602 065 F en 2000 et de 459 244,28 F en 2001 ; que l'administration a jugé que le profit réalisé par Mme X était imposable en application de l'article 92-1 du code général des impôts et a, par suite, réintégré la somme dans les revenus imposables du contribuable au titre des années 1999, 2000 et 2001 ; que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont déchargé Mme X des cotisations supplémentaires qui lui avaient été assignées au titre de ces trois années ;
Considérant qu'aux termes de l'article 12 du code général des impôts : “L'impôt est dû chaque année à raison des bénéfices ou revenus que le contribuable réalise ou dont il dispose au cours de la même année” ; que, selon les dispositions de l'article 92 du code général des impôts : “Sont considérés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des professions libérales, des charges et offices dont les titulaires n'ont pas la qualité de commerçants et de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus (...)” ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'activité déployée par Mme X, en sa double qualité d'associée et de cogérante doit être regardée comme l'ayant conduit, quelle qu'ait été l'étendue de son pouvoir de décision, à participer effectivement à l'opération de restauration de la situation financière de la société débitrice des créances rachetées pour le franc symbolique ; que cette activité a constitué une “exploitation lucrative” dont les profits sont assimilés à des bénéfices non commerciaux par les dispositions précitées de l'article 92 du code général des impôts ;
Considérant qu'il résulte des dispositions combinées des articles 12, 13 et 93 du code général des impôts que les sommes à retenir au titre d'une année déterminée pour l'assiette de l'impôt sur le revenu sont celles qui, au cours de ladite année, ont été mises à la disposition du contribuable soit par voie de paiement, soit par voie d'inscription à un compte courant sur lequel l'intéressée a opéré ou aurait pu en droit ou en fait opérer un prélèvement au plus tard le 31 décembre de ladite année ;
Considérant que l'administration fait valoir, devant la Cour, qu'en raison de la situation financière particulièrement difficile dans laquelle se trouvait la SARL Mahey, tout prélèvement sur le compte courant des associés était impossible au cours de l'année 1997 ; que le résultat de cette société demeurait déficitaire de 2 332 415 F, même après la prise en compte, en produits exceptionnels, de l'abandon de créances ci-dessus analysé à hauteur de 4 800 000 F ; que ses dettes à un an s'élevaient à un montant de 6 201 002 F alors que ses disponibilités étaient de 8 974 F au 30 septembre 1997 ; qu'ainsi, l'administration établit que Mme X ne pouvait être regardée comme ayant eu la disposition de la somme litigieuse durant l'année 1997 et que c'est, par suite, à tort que le tribunal administratif a prononcé la décharge des impositions litigieuses en se fondant sur le motif que ladite somme était disponible dès son inscription sur le compte courant de l'intéressée, à savoir dès 1997 ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme X devant le Tribunal administratif de Nantes et la Cour ;
Considérant que la contribuable fait valoir qu'à raison de l'existence d'un acte de cautionnement donné par les acquéreurs le jour de l'acquisition des parts au profit des sociétés cédantes Peabody et David Lange, la présomption de disponibilité doit être écartée en ce qui concerne les exercices 1999 et 2000 ; que le ministre a admis dans ses écritures, d'une part, “que l'acte de cautionnement, antérieur à l'acquisition de la créance, interdisait dès sa conclusion, un quelconque prélèvement des sommes inscrites au compte courant des associés jusqu'à apurement de la dette envers la société Peabody et, d'autre part, que la créance envers cette dernière société a été soldée au 31 décembre 2000” ; qu'il s'ensuit que Mme X ne pouvait, dès lors, être regardée comme ayant eu la disposition de la somme litigieuse durant les années 1999 et 2000 ;
Considérant, en revanche, en ce qui concerne l'année 2001, dès lors qu'il n'est pas contesté par Mme X que les conditions d'application de la clause de retour à meilleure fortune étaient en l'espèce remplies, que c'est à juste titre que le profit résultant du recouvrement de la créance antérieurement acquise pour le franc symbolique a été imposé au titre de l'année 2001, année au cours de laquelle le compte courant de l'intéressée a été crédité d'une somme de 459 244,28 F (70 011,34 euros) correspondant à cette créance ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nantes a fait intégralement droit à la demande de Mme X ;
Sur les conclusions de Mme X tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de condamner l'Etat à payer à Mme X une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Mme X est rétablie au rôle de l'impôt sur le revenu au titre de l'année 2001 à raison de l'imposition d'une somme de 70 011,34 euros (soixante-dix mille onze euros trente-quatre centimes).
Article 2 : Le surplus des conclusions du recours du ministre est rejeté.
Article 3 : Le jugement du Tribunal administratif de Nantes du 9 mai 2007 est réformé en ce qu'il est contraire au présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera à Mme X une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE et à M. et Mme Yves X.
N° 07NT02879
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