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10/04/2008 | FRANCE | N°06NT01998

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 10 avril 2008, 06NT01998


Vu la requête, enregistrée le 29 novembre 2006, présentée pour M. et Mme X, demeurant ..., par Me Arion, avocat au barreau de Rennes ; M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 02-834 du 12 octobre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande tendant à la condamnation du centre hospitalier Pierre Le Damany de Lannion à payer à Mme X-Y les sommes de 34 782,84 euros et 20 652,46 euros, et à M. X la somme de 2 286,74 euros, en réparation de leurs préjudices respectifs ;

2°) de faire droit à leur demande tendant à la

condamnation du centre hospitalier Pierre Le Damany de Lannion à payer les s...

Vu la requête, enregistrée le 29 novembre 2006, présentée pour M. et Mme X, demeurant ..., par Me Arion, avocat au barreau de Rennes ; M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 02-834 du 12 octobre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande tendant à la condamnation du centre hospitalier Pierre Le Damany de Lannion à payer à Mme X-Y les sommes de 34 782,84 euros et 20 652,46 euros, et à M. X la somme de 2 286,74 euros, en réparation de leurs préjudices respectifs ;

2°) de faire droit à leur demande tendant à la condamnation du centre hospitalier Pierre Le Damany de Lannion à payer les sommes de 37 160,40 euros et 20 652,46 euros à Mme X-Y et 2 286,74 euros à M. X ;

3°) d'ordonner une nouvelle mesure d'expertise judiciaire destinée à permettre de quantifier les préjudices subis par Mme X-Y du fait de l'algoneurodystrophie dont elle est atteinte ;

4°) de déclarer la décision à intervenir commune et opposable aux organismes sociaux ;

5°) de condamner le centre hospitalier Pierre Le Damany de Lannion à leur régler une somme de 3 050 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

6°) de condamner le centre hospitalier Pierre Le Damany de Lannion aux dépens de l'instance ;

..................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 mars 2008 :

- le rapport de M. Millet, président ;

- les observations de Me Arion, avocat de M. et Mme X ;

- et les conclusions de M. Geffray, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le 3 mars 1997, Mme X-Y, alors âgée de cinquante et un ans, a été hospitalisée d'urgence au centre hospitalier Pierre Le Damany de Lannion pour une crise aiguë de l'hypocondre droit, évoquant une colique hépatique ; qu'après y avoir subi une ablation de la vésicule biliaire, elle a été orientée le 19 mars 1997 vers la clinique d'Armor et Argoat de Guingamp pour y subir une sphinctérotomie endoscopique de réalisation difficile, avec diagnostic d'oddite scléreuse ; que le 4 avril 1997, suite à une cessation brutale d'émission de bile dans le drain placé sur la voie biliaire principale, Mme X-Y a subi au centre hospitalier Pierre Le Damany de Lannion une dérivation entre la voie biliaire principale et l'intestin grêle sous forme d'une anastomose cholédo-jéjunale latéro-latérale, destinée à contourner l'obstacle de la jonction cholédo-duodénale, rapportée à l'existence de l'oddite scléreuse ; qu'elle a quitté le centre hospitalier Pierre Le Damany de Lannion le 14 avril 1997 pour le centre de convalescence Chateaubriand, situé à Hyères, où elle a continué de présenter des douleurs abdominales importantes ; que des examens pratiqués au centre hospitalier universitaire (CHU) de Rennes les 21 et 22 juillet 1997, ont montré une opacification de la voie biliaire principale par cathétérisme rétrograde du bas cholédoque ; que le 29 juillet 1997, il a été procédé dans cet établissement à la transformation de l'anastomose latéro-latérale entre le cholédoque et l'anse grêle en anastomose termino-latérale ; qu'au cours de cette même intervention, il a été procédé à la résection du cartilage de l'appendice xiphoïde, situé à l'extrémité inférieure du sternum ; qu'à l'occasion de cette intervention du 29 juillet 1997 Mme X-Y a signalé, lors de l'ablation du cathéter placé dans la veine jugulaire droite du cou, une vive douleur de la voie latérale droite du cou se propageant à l'épaule et au membre supérieur droit ; qu'une scintigraphie osseuse pratiquée le 17 octobre 1997 au centre hospitalier de Saint-Brieuc a confirmé l'existence d'une algodystrophie active loco-régionale du membre supérieur droit ; qu'au terme des opérations expertales, M. et Mme X ont saisi le Tribunal administratif de Rennes, afin qu'il soit jugé qu'ils étaient bien fondés à rechercher la responsabilité pour faute du centre hospitalier Pierre Le Damany de Lannion à raison des complications nées de l'intervention du 4 avril 1997 ; que M. et Mme X et la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) des Côtes-d'Armor relèvent appel du jugement du 12 octobre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demande et conclusions ;

Sur la responsabilité du centre hospitalier Pierre Le Damany de Lannion ;

En ce qui concerne l'intervention du 4 avril 1997 :

Considérant que si M. et Mme X soutiennent qu'une dérivation bilio-digestive par anastomose cholédo-jéjunale sur anse en Y était d'indication très discutable, en l'absence de nouvelle tentative de sphinctérotomie endoscopique, traitement habituel de l'oddite scléreuse, une première sphinctérotomie endoscopique réalisée le 21 mars 1997 avait été prudemment interrompue en raison d'hémorragies qui auraient pu entraîner des complications majeures ; que le caractère incomplet de cette sphinctérotomie explique la persistance d'un obstacle partiel à la jonction cholédo-duodénale, et a conduit à réaliser une intervention de dérivation bilio-digestive ; que, toutefois, le fait d'avoir renoncé à tenter un agrandissement de la sphinctérotomie, comme initialement envisagé, n'a eu d'autre objet que d'éviter un risque, et n'a donc pu revêtir un caractère fautif ; que si l'anastomose cholédo-jéjunale latéro-latérale a été préférée de manière discutable, selon l'expert, à l'anastomose termino-latérale, la communauté scientifique n'avait pas, à l'époque des faits, marqué sa préférence pour l'un ou l'autre de ces procédés de dérivation ; que le procédé utilisé n'était ainsi pas contraire aux règles de l'art ; que, dès lors, si les complications abdomino-digestives ressenties par Mme X-Y sont la conséquence directe et certaine de cette intervention, elles ne sont pas, pour autant, le résultat d'une faute médicale ;

Considérant que si M. et Mme X se plaignent de ce qu'un cliché radiologique réalisé au centre hospitalier Pierre Le Damany de Lannion, pendant l'intervention latéro-latérale, et prouvant que le passage du bas cholédoque était impossible, aurait disparu du dossier de la patiente, les requérants n'établissent pas que cette disparition, à la supposer établie et imputable au centre hospitalier Pierre Le Damany de Lannion, aurait concouru au dommage ; que, dès lors, les séquelles de Mme X-Y ne trouvent pas leur origine dans une faute dans l'organisation ou le fonctionnement du service ;

Considérant que si les requérants indiquent qu'ils n'ont pas été informés des risques inhérents à chaque mode opératoire, de sorte qu'ils n'ont pas été mis à même de choisir le mode termino-latéral, les praticiens du centre hospitalier Pierre Le Damany de Lannion n'avaient d'autre obligation que d'informer les patients des risques connus, même s'ils étaient exceptionnels, de décès ou d'invalidité que pouvait entraîner l'acte médical envisagé ; que les troubles limités dont souffre Mme X-Y ne constituent pas une invalidité ; que rien ne permet de considérer qu'ils seraient une conséquence et a fortiori un risque connu de cette opération et en particulier du mode opératoire retenu ; qu'ainsi ces troubles ne sont pas liés à un risque qui se serait réalisé à l'occasion de l'intervention pratiquée le 4 avril 1997, mais à la nature de la maladie ayant rendu nécessaire cette intervention ; que dans ces conditions, les praticiens du centre hospitalier Pierre Le Damany de Lannion n'ont pas manqué à leur obligation d'information ;

En ce qui concerne l'intervention du 29 juillet 2007 :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme X-Y, souffrant de troubles fonctionnels pouvant se rapporter à la technique d'anastomose utilisée le 4 avril 1997, il a été procédé, le 29 juillet 1997, au CHR de Rennes, à la transformation de l'anastomose latéro-latérale entre le cholédoque et l'anse grêle, en anastomose termino-latérale ; que si M. et Mme X soutiennent qu'il existe, toutefois, une chronologie concordante entre l'intervention du 29 juillet 1997, et la survenue de manifestations évocatrices d'une algodystrophie du membre supérieur droit, qui n'aurait pu être observée chez l'intéressée si l'anastomose termino-latérale avait été pratiquée d'emblée au centre hospitalier Pierre Le Damany de Lannion, il résulte de l'instruction que les douleurs ressenties par Mme X-Y au niveau du cou et du bras droit, lors de l'ablation du cathéter de sa veine jugulaire, ont une origine purement rhumatismale et ne sauraient, en tout état de cause, être imputées au centre hospitalier Pierre Le Damany de Lannion ; que ces nouvelles douleurs, étant sans lien avec les douleurs digestives traitées avec succès au CHU de Rennes, ne peuvent être regardées comme révélant une faute du centre hospitalier Pierre Le Damany de Lannion à l'égard de Mme X-Y ; que le moyen tiré de l'existence d'une présomption de faute de cet établissement doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une nouvelle expertise, que M. et Mme X et la CPAM des Côtes-d'Armor ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demande et conclusions ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que le centre hospitalier Pierre Le Damany de Lannion, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à M. et Mme X la somme de 3 050 euros et à la CPAM des Côtes-d'Armor la somme de 1 000 euros qu'ils demandent respectivement au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme X et les conclusions de la CPAM des Côtes-d'Armor sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme X, à la CPAM des Côtes-d'Armor, au centre hospitalier Pierre Le Damany de Lannion, au ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative, ainsi qu'à l'expert.

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N° 06NT01998

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 06NT01998
Date de la décision : 10/04/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LOOTEN
Rapporteur ?: M. Jean-Frédéric MILLET
Rapporteur public ?: M. GEFFRAY
Avocat(s) : ARION

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2008-04-10;06nt01998 ?
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