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23/04/2007 | FRANCE | N°05NT01562

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 23 avril 2007, 05NT01562


Vu, I, la requête, enregistrée le 16 septembre 2005 sous le n° 05NT01562, présentée pour M. et Mme Thierry X, demeurant ..., par Me Pailhes, avocat au barreau de Paris ; M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 02-2654 en date du 19 juillet 2005 en tant que le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des droits supplémentaires en matière de contributions sociales mis à leur charge au titre de l'année 1999 ;

2°) de prononcer les décharges demandée

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Vu, II, le recours, enregistré l...

Vu, I, la requête, enregistrée le 16 septembre 2005 sous le n° 05NT01562, présentée pour M. et Mme Thierry X, demeurant ..., par Me Pailhes, avocat au barreau de Paris ; M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 02-2654 en date du 19 juillet 2005 en tant que le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des droits supplémentaires en matière de contributions sociales mis à leur charge au titre de l'année 1999 ;

2°) de prononcer les décharges demandées ;

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Vu, II, le recours, enregistré le 18 novembre 2005, sous le n° 05NT01803 présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le ministre demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 02-2654 en date du 19 juillet 2005 en tant que le Tribunal administratif d'Orléans a prononcé la décharge des pénalités de mauvaise foi auxquelles M. et Mme X ont été assujettis au titre de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu et des droits supplémentaires en matière de contributions sociales pour l'année 1999 ;

2°) de remettre ces pénalités à la charge de M. et Mme X ;

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Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 mars 2007 :

- le rapport de Mme Specht, rapporteur ;

- les observations de Me Pailhes, avocat de M. et Mme X ;

- et les conclusions de M. Hervouet, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la requête susvisée n° 05NT01562 présentée par M. et Mme X et le recours n° 05NT01803 présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE sont dirigés contre un même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Sur la requête de M. et Mme X :

Considérant que M. et Mme X ont fait l'objet d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle au titre de la période du 1er août 1998 au 31 décembre 1999 à l'issue duquel l'administration a, au titre de l'année 1999, d'une part, taxé d'office sur le fondement de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales des crédits bancaires d'origine indéterminée pour un montant de 1 675 807 F et, d'autre part, a imposé d'autres crédits bancaires d'un montant de 795 151 F dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ; que par ailleurs, à l'issue de la vérification de comptabilité de la SARL Immo Renov dont M. X était le gérant, une somme de 239 347 F a été imposée comme revenus distribués, également au titre de l'année 1999 ;

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales : “En vue de l'établissement de l'impôt, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements (...) Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés (...)” ; qu'aux termes de l'article L. 16 A : “(…) Lorsque le contribuable a répondu de façon insuffisante aux demandes d'éclaircissements ou de justifications, l'administration lui adresse une mise en demeure d'avoir à compléter sa réponse dans un délai de trente jours en précisant les compléments de réponse qu'elle souhaite.”; qu'aux termes de l'article L. 69 du même livre : “(…) Sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes (…) de justifications prévues à l'article L. 16” ; que l'administration, constatant un écart très important entre les revenus bruts déclarés de 313 000 F au titre de l'année 1999 et les crédits figurants sur les comptes bancaires pour un montant de plus de 2,7 millions de francs, a adressé le 8 août 2000 à M. et Mme X une demande de justifications ; que la réponse des contribuables du 5 octobre 2000 a permis de justifier une faible partie des crédits litigieux ; qu'en réponse à la mise en demeure du 13 décembre 2000, M. X a fourni des explications complémentaires et produit des documents permettant d'identifier l'origine d'autres sommes ; que, toutefois, pour des crédits d'un montant de 1 675 807 F, provenant selon M. X d'encaissements émanant ou concernant les sociétés CMC, CMTP et CMCTP, qui étaient précédés ou suivis de versements destinés à des tiers et au règlement de charges afférentes à ces trois sociétés, les explications avancées n'étaient pas vérifiables, les pièces produites n'ayant pas permis d'établir la cause juridique des crédits encaissés ni des versements effectués ; que si M. X invoque les difficultés rencontrées pour obtenir la restitution de documents ayant fait l'objet d'une saisie judiciaire, il ne résulte pas de l'instruction qu'il aurait entrepris des démarches pour obtenir la communication des pièces nécessaires, et qu'un refus de communication ou de restitution lui aurait été opposé ; qu'ainsi, les éléments communiqués ne constituaient pas, contrairement à ce que soutiennent les requérants, un faisceau d'indices qui aurait permis à l'administration de qualifier les sommes en litige de non imposables ; que les requérants ne peuvent utilement faire valoir que l'exercice par l'administration de son droit de communication aurait permis d'effectuer les vérifications nécessaires ; que l'administration n'a pas méconnu les articles L. 16 et L. 69 précités du livre des procédures fiscales en taxant d'office M. et Mme X à raison de revenus d'origine indéterminée au titre de l'année 1999 pour un montant de 1 675 807 F ;

Considérant, en second lieu, que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, les redressements en matière de revenus de capitaux mobiliers ont été notifiés dans le cadre d'une procédure contradictoire ;

En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :

S'agissant des revenus d'origine indéterminée :

Considérant qu'en application des dispositions de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales, il appartient à M. et Mme X, qui ont été régulièrement taxés d'office, d'apporter la preuve de l'exagération de l'imposition qu'ils contestent ;

Considérant que l'administration a taxé d'office, en tant que revenus d'origine indéterminée, les sommes de 1 318 754 F portées au crédit des comptes bancaires de M. X et identifiés par lui comme provenant des sociétés CMC, CMCTP durant la période du 1er janvier au 30 juin 1999 durant laquelle il n'était ni associé ni gérant de ces sociétés et de 357 052 F dont ni l'origine ni la nature n'ont été identifiées ; que, pour justifier de la nature de ces sommes, les requérants font valoir que M. X a exercé une activité de prête-nom en encaissant les sommes litigieuses à la demande des dirigeants des sociétés susmentionnées et en les reversant à des tiers, soit dans le cadre de détournements de fonds soit pour assurer le paiement des charges de ces sociétés et qu'ainsi les sommes en cause, qui n'auraient fait que transiter par ses comptes, ne seraient pas imposables ; qu'il résulte de l'instruction qu'au vu des pièces produites, peut seul être admis comme non imposable un crédit de 60 000 F du 3 juillet 1999 qui a été suivi d'un versement à un tiers de la même somme le 5 juillet 1999 ; que, toutefois, en ce qui concerne les autres sommes en litige, en l'absence de corrélation de date et de montant entre les crédits encaissés et les paiements effectués, lesquels ne sont, en tout état de cause, assortis d'aucune justification probante concernant la cause et les destinataires, M. X n'établit pas le caractère non imposable des crédits bancaires ; qu'en particulier les sommes qui auraient été versées au titre de salaires ne sont pas appuyées par les bulletins de salaires correspondants ; que, par ailleurs, M. X n'apporte aucun élément permettant d'identifier et de justifier des crédits d'un montant de 357 052 F ; que la circonstance qu'une procédure pénale soit en cours impliquant certains bénéficiaires des versements ne permet pas, à elle seule, de justifier les mouvements de transit allégués ni les reversements effectués et d'établir ainsi le caractère non imposable des sommes en litige ; qu'ainsi, si une somme de 60 000 F (9 146,94 euros) peut être admise en réduction de la base imposable, M. et Mme X n'apportent pas, pour le surplus des sommes en litige, la preuve qui leur incombe de l'exagération de l'imposition à titre de revenus d'origine indéterminée ;

S'agissant de l'imposition des revenus de capitaux mobiliers :

Considérant qu'aux termes de l'article 111 du code général des impôts : “Sont notamment considérés comme revenus distribués : (…) c) Les rémunérations et avantages occultes ; (…)” ; qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : “1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; 2°) Toutes sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices ; (…)” ; qu'aux termes de l'article 110 du même code : “Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109, les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés. (...)” ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration a imposé, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, comme revenus distribués sur le fondement des dispositions précitées de l'article 111 c) du code général des impôts, des crédits bancaires d'un montant de 795 151 F provenant des sociétés CMC, CMCTP et Immo Renov pendant la période où M. X en était le gérant ou l'associé et, d'autre part, sur le fondement de l'article 109-1-10 du même code les sommes réintégrées dans les résultats de la société Immo Renov et regardées comme des omissions de recettes qui ont porté le résultat fiscal de la société pour l'exercice clos en 1999 à 239 347 F ; que M. X a été désigné par la société comme le bénéficiaire de ces bénéfices qui n'ont pas été mis en réserve ni incorporés au capital de la société ; que si les requérants reprennent l'argumentation développée ci-dessus selon laquelle l'ensemble de ces sommes a été encaissé par M. X à titre de prête-nom, n'a fait que transiter sur ses comptes et était destiné à être reversé soit à des tiers dans le cadre de détournements de fonds soit afin d'assurer le paiement de certaines charges, ces allégations ne sont assorties d'aucune justification permettant d'établir l'origine des crédits ou la cause et les destinataires des versements effectués ; qu'ainsi l'administration doit être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe de la nature de revenus distribués des sommes en cause ;

Considérant, en dernier lieu, que l'instruction de la direction générale des impôts référencée sous le numéro “13 L 6 76” en date du 4 août 1976 se borne à énoncer des recommandations aux vérificateurs en leur préconisant de recourir à une seconde méthode en vue de recouper les résultats initialement obtenus ; que cette instruction, qui ne contient aucune interprétation d'un texte fiscal, ne peut être invoquée sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté la totalité de leur demande ;

Sur le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE :

Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : “1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionné à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 % si la mauvaise foi de l'intéressé est établie (…)” ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, si M. et Mme X ne pouvaient ignorer l'origine et la nature des sommes portées au crédit de leurs comptes bancaires provenant de virements ou de remises de chèques effectués par des sociétés tierces dans lesquelles M. X a assuré les fonctions de gérant et que les revenus d'origine indéterminée représentaient près de huit fois le montant des revenus déclarés au titre de la même année, l'intention délibérée de M. et Mme X d'éluder leur imposition personnelle n'est pas établie ; que le ministre n'est donc pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a prononcé la décharge des pénalités pour mauvaise foi ;

DÉCIDE :

Article 1er : La base imposable de l'impôt sur le revenu au titre de l'année 1999 au titre des revenus d'origine indéterminée est réduite de 9 146,94 euros (neuf mille cent quarante-six euros quatre-vingt-quatorze centimes).

Article 2 : M. et Mme X sont déchargés des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu pour l'année 1999 et des droits supplémentaires en matière de contribution sociale généralisée, de prélèvement social de 2 % et de contribution au remboursement de la dette sociale formant surtaxe par rapport à ceux résultant de l'article 1er.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme X est rejeté.

Article 4 : Le recours du ministre est rejeté.

Article 5 : Le jugement du 19 juillet 2005 du Tribunal administratif d'Orléans est réformé en ce qu'il est contraire au présent arrêt.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Thierry X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

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N°s 05NT01562...

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 05NT01562
Date de la décision : 23/04/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. LEMAI
Rapporteur ?: Mme Frédérique SPECHT
Rapporteur public ?: M. HERVOUET
Avocat(s) : PAILHES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2007-04-23;05nt01562 ?
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