La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/12/2006 | FRANCE | N°05NT01881

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 05 décembre 2006, 05NT01881


Vu la requête enregistrée le 8 décembre 2005, présentée pour la fédération française motonautique, représentée par son président en exercice, dont le siège est 49, rue de Boulainvilliers à Paris (75016) et l'association Jet Club de la Côte d'Opale, représentée par son président en exercice, dont le siège est à Mirmont (62155), par Me Voisard et Me Plateaux, avocats au barreau de Nantes ; la fédération française motonautique et l'association Jet Club de la Côte d'Opale demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0402401 du 11 octobre 2005 par lequel le Tr

ibunal administratif de Caen a rejeté 1eur demande tendant à l'annulation de l'...

Vu la requête enregistrée le 8 décembre 2005, présentée pour la fédération française motonautique, représentée par son président en exercice, dont le siège est 49, rue de Boulainvilliers à Paris (75016) et l'association Jet Club de la Côte d'Opale, représentée par son président en exercice, dont le siège est à Mirmont (62155), par Me Voisard et Me Plateaux, avocats au barreau de Nantes ; la fédération française motonautique et l'association Jet Club de la Côte d'Opale demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0402401 du 11 octobre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté 1eur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 mars 2004 par lequel le préfet maritime de la Manche et de la mer du Nord a interdit la circulation des véhicules nautiques à moteur, dans les limites qu'il détermine, dans les estuaires de la Somme et de l'Authie ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ledit arrêté ;

3°) de condamner l'Etat à leur verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………………………..

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive n° 79/409 du 2 avril 1979 du conseil des communautés européennes ;

Vu la directive 94/25/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 juin 1994 concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des Etats membres relatives aux bateaux de plaisance ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu la loi n° 83-583 du 5 juillet 1983 sur la sauvegarde de la vie humaine en mer, l'habitabilité à bord des navires et la prévention de la pollution ;

Vu le décret n° 86-606 du 14 mars 1986 relatif aux commissions nautiques ;

Vu le décret n° 96-611 du 4 juillet 1996 relatif à la mise sur le marché des bateaux de plaisance et des pièces et éléments d'équipement ;

Vu le décret n° 2004-112 du 6 février 2004 relatif à l'organisation de l'action de l'Etat en mer ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 novembre 2006 :

- le rapport de Mme Buffet, rapporteur ;

- les observations de Me Voisard, avocat de la fédération française motonautique et de l'association Jet Club de la Côte d'Opale ;

- et les conclusions de M. Artus, commissaire du gouvernement ;

Considérant que par jugement du 11 octobre 2005, le Tribunal administratif de Caen a rejeté la demande conjointe de la fédération française motonautique et de l'association Jet club de la Côte d'Opale tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 mars 2004 par lequel le préfet maritime de la Manche et de la mer du Nord a interdit la circulation des véhicules nautiques à moteur dans les limites qu'il détermine dans les estuaires de la Somme et de l'Authie ; que la fédération française motonautique et l'association Jet club de la Côte d'Opale interjettent appel de ce jugement ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête :

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Sur la légalité externe :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 1er du décret du 14 mars 1986 susvisé : “Des commissions nautiques sont instituées pour l'examen (…) de toute affaire nécessitant la consultation des navigateurs maritimes (…). Les commissions nautiques comprennent la grande commission nautique et les commissions nautiques locales” ; qu'il ressort des pièces du dossier que la commission nautique locale de la baie de la Somme et de la baie de l'Authie, dont le président de l'association Jet club de la Côte d'Opale faisait partie en qualité de représentant de la fédération française de motonautisme, a été consultée et a émis, le 11 juin 2003, à l'unanimité, un avis favorable au projet d'interdiction de la circulation des véhicules nautiques à moteur dans les estuaires de la Somme et de l'Authie ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'impose au préfet maritime, dans le cadre des pouvoirs de police qu'il tient de l'article 1er du décret du 6 février 2004 susvisé relatif à l'organisation de l'action de l'Etat en mer, sur la base duquel a été pris l'arrêté contesté, le respect d'une autre procédure de consultation ou de concertation préalable ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que “ni la fédération française de motonautisme, ni la direction départementale de la jeunesse et des sports, n'ont été associées, ni même consultées” préalablement à l'émission de l'arrêté du 16 mars 2004 contesté, ne peut qu'être écarté ;

Considérant, d'autre part, que ledit arrêté du 16 mars 2004, qui a le caractère d'un acte réglementaire, n'est pas au nombre des décisions qui doivent être motivées par application de la loi du 11 juillet 1979 susvisée sur la motivation des actes administratifs ;

Considérant, enfin, qu'une omission ou une erreur dans les visas d'un acte administratif n'est pas de nature à en affecter la régularité ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté du 16 mars 2004 du préfet maritime de la Manche et de la mer du Nord ne vise pas le code de l'environnement dont, au demeurant, les dispositions précises dont l'indication ferait plus particulièrement défaut ne sont nullement spécifiées, est inopérant et ne peut qu'être écarté ; qu'en outre, en tout état de cause, ledit arrêté comporte le visa de l'arrêté du 23 novembre 1987 modifié relatif à la sécurité des navires et, notamment, sa division 224, et se réfère nécessairement, ce faisant, aux arrêtés du 5 juillet 1989 et du 1er juin 2001 qui l'ont modifié ;

Considérant qu'il suit de ce qui précède que l'arrêté du 16 mars 2004 contesté n'est pas entaché des irrégularités alléguées ;

Sur la légalité interne :

Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret du 6 février 2004 susvisé, dans sa rédaction alors applicable : “Le représentant de l'Etat en mer est le préfet maritime (…). Son autorité s'exerce à partir de la laisse de basse mer, sauf dans les ports à l'intérieur de leurs limites administratives et dans les estuaires en deçà des limites transversales de la mer (…). Investi du pouvoir de police générale, il a autorité dans tous les domaines où s'exerce l'action de l'Etat en mer, notamment en ce qui concerne (…) la protection de l'environnement (…).” ; qu'aux termes de l'article 224-1.04 du chapitre 224-1 de la division 224 du règlement annexé à l'arrêté du 23 novembre 1987 modifié, dans sa rédaction alors applicable : “(…) - Sont considérés comme véhicules nautiques à moteur : 1- les engins types scooter ou moto sur lesquels le pilote se tient à califourchon ou en équilibre dynamique dont la puissance propulsive maximale autorisée dépasse 3 kilowatts ; 2 - Les étanches à moteur, les engins de vague dont la puissance propulsive maximale autorisée dépasse 3 kilowatts. 3 - Tout engin de vitesse ou de sport à carénage total ou partiel dont la puissance propulsive maximale autorisée dépasse 3 kilowatts et dont le programme d'utilisation ne permet pas le classement dans l'une des catégories prévues à l'article 224-1.02.” ;

Considérant que l'arrêté du 16 mars 2004 contesté du préfet maritime de la Manche et de la mer du Nord interdit, sur le fondement des dispositions précitées de l'article 1er du décret du 6 février 2004, le stationnement et la circulation des véhicules nautiques à moteur dans les limites qu'il détermine dans les estuaires de la Somme et de l'Authie, en vue d'assurer la préservation de cette partie du littoral picard ; qu'il est constant que les baies de la Somme et de l'Authie sont inscrites à l'inventaire des zones naturelles d'intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF) de types I et II, qu'elles constituent une zone humide d'importance internationale comme habitat des oiseaux d'eau au titre de la convention de Ramsar et qu'elles figurent à l'inventaire des zones importantes pour la conservation des oiseaux (ZICO), en application de la directive susvisée du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages ; que ces deux sites étaient également proposés, à la date de l'arrêté contesté, au titre des sites reconnus d'intérêt communautaire en application de la directive 92/43/CEE du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels, de la faune et de la flore sauvage dite “Natura 2000” ; qu'une réserve naturelle, créée par décret du 21 mars 1994 dans la baie de la Somme, abrite, notamment, une population de phoques “veau-marin”, espèce figurant sur la liste des mammifères marins protégés fixée par l'arrêté ministériel du 27 juillet 1995 ; qu'il ressort des pièces du dossier que les véhicules nautiques à moteur qui constituent, ainsi que le reconnaissent les requérantes, “la plus grande partie du parc des navires de plaisance”, eu égard, tant à leurs caractéristiques, notamment, leur faible tirant d'eau, leur grande mobilité et leur niveau sonore, qu'à leur mode d'utilisation, sont de nature à porter atteinte à la conservation de la faune et de l'avifaune de cet espace naturel exceptionnel ; qu'ainsi, la mesure d'interdiction édictée par l'arrêté du 16 mars 2004 contesté a été prise, conformément aux dispositions précitées du décret du 6 février 2004, en vue d'assurer la protection du patrimoine naturel des estuaires de la Somme et de l'Authie et est appropriée au regard de l'objectif de protection poursuivi que n'aurait pu atteindre une simple mesure de limitation de la vitesse des véhicules nautiques à moteur qu'elle vise ;

Considérant qu'aux termes des articles 2 et 3 de l'arrêté contesté, la mesure d'interdiction édictée dans les secteurs ci-dessus décrits limités aux baies de la Somme et de l'Authie ne s'applique, ni aux engins destinés au secours, à la police ou à la surveillance en mer, ni aux véhicules nautiques à moteur, lorsque la sécurité de ces engins et de leurs occupants l'exige ; que l'article 4 dudit arrêté prévoit, également, que des dérogations à cette interdiction peuvent être accordées à l'occasion de compétitions sportives ou de manifestations nautiques ; qu'ainsi, une telle mesure de police ne revêt pas le caractère d'une interdiction générale et absolue ;

Considérant que les véhicules nautiques à moteur sont définis par le règlement annexé à l'arrêté ministériel du 23 novembre 1987, lequel est visé par l'arrêté préfectoral du 16 mars 2004 de sorte que, contrairement à ce que soutiennent les requérantes, les embarcations concernées par la mesure d'interdiction sont identifiées avec une précision suffisante par ledit arrêté ; que la circonstance que ces véhicules soient, également, des navires au sens de la loi du 5 juillet 1983 susvisée sur la sauvegarde de la vie humaine en mer, l'habitabilité à bord des navires et la prévention de la pollution, et qu'ils soient tenus de se conformer aux exigences de sécurité, de santé et de protection de l'environnement prévues par le décret du 4 juillet 1996 susvisé, relatif à la mise sur le marché des bateaux de plaisance et des pièces et éléments d'équipement, pris en application de la directive 94/25/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 juin 1994 susvisée, ne fait nullement obstacle à ce que, eu égard à leurs caractéristiques techniques et à leurs conditions d'utilisation, ils fassent l'objet d'une mesure de police particulière en vue d'assurer, ainsi qu'il a été dit plus haut, la préservation du site naturel exceptionnel constitué par les estuaires de la Somme et de l'Authie ; que, pour les mêmes raisons, le moyen tiré du “caractère discriminatoire” de la mesure de police contestée, ne peut qu'être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la fédération française motonautique et l'association Jet club de la Côte d'Opale Y ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à la fédération française motonautique et l'association Jet club de la Côte d'Opale la somme que ces dernières demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la fédération française motonautique et de l'association Jet club de la Côte d'Opale est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la fédération française motonautique, à l'association Jet club de la Côte d'Opale et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.

N° 05NT01881

2

1

3

1


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 05NT01881
Date de la décision : 05/12/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DUPUY
Rapporteur ?: Mme Catherine BUFFET
Rapporteur public ?: M. ARTUS
Avocat(s) : VOISARD

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2006-12-05;05nt01881 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award