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26/05/2006 | FRANCE | N°06NT00775

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, Reconduite a la frontiere, 26 mai 2006, 06NT00775


Vu la requête, enregistrée le 14 avril 2006, présentée pour M. Benouada X, demeurant chez M. Haouari Y, ..., par Me Olivier Renard, avocat au barreau de Nantes ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 06-1267 du 17 mars 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 mars 2006 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a décidé sa reconduite à la frontière et a fixé l'Algérie comme pays de destination ;

2°) d'annuler ledit arrêté pour excès de

pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire de réexaminer sa situation ad...

Vu la requête, enregistrée le 14 avril 2006, présentée pour M. Benouada X, demeurant chez M. Haouari Y, ..., par Me Olivier Renard, avocat au barreau de Nantes ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 06-1267 du 17 mars 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 mars 2006 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a décidé sa reconduite à la frontière et a fixé l'Algérie comme pays de destination ;

2°) d'annuler ledit arrêté pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire de réexaminer sa situation administrative ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………………………...

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision du 26 janvier 2005 par laquelle le président de la Cour a délégué M. Martin pour statuer sur les appels interjetés contre les jugements rendus par les présidents de tribunaux administratifs ou leurs délégués en matière de reconduite à la frontière ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;

Vu le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifié, portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 mai 2006 :

- le rapport de M. Martin, magistrat délégué,

- les observations de Me Vaultier substituant Me Renard, avocat de M. X,

- et les conclusions de M. Mornet, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) - 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé, ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;

Considérant que M. X, de nationalité algérienne, est entré en France le 22 mars 2005 muni d'un passeport en court de validité et d'un visa de court séjour d'une durée de quatre vingt dix jours ; qu'il a présenté une demande de titre de séjour temporaire en qualité d'étranger malade ; que, toutefois, le médecin inspecteur départemental de la santé publique ayant estimé que l'intéressé pouvait effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, le préfet de Maine-et-Loire a notifié à M. X, le 10 décembre 2005, un refus d'autorisation au séjour, ainsi qu'une invitation à quitter le territoire ; que la même autorité a rejeté, par lettre du 20 janvier 2006, notifiée le 24 janvier 2006, un recours gracieux de l'intéressé ; que M. X s'est maintenu sur le territoire français au-delà du délai d'un mois à compter de la notification du refus de séjour ; qu'il entrait, ainsi, dans le champ d'application de la disposition précitée ;

Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant que, si M. X fait valoir que la motivation de l'arrêté du 7 mars 2006 ordonnant sa reconduite à la frontière est stéréotypée, et que le préfet de Maine-et-Loire n'a pas examiné sa situation personnelle, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté contesté comporte l'indication des motifs de droit et de fait, eu égard notamment à l'état de santé du requérant, à sa situation familiale et privée, et aux risques que comporterait pour lui son retour en Algérie, qui en constituent le fondement ; qu'il est, ainsi, suffisamment motivé ;

Considérant qu'aux termes de l'article 6 7° de l'accord franco-algérien susvisé du 17 décembre 1968, modifié : Le certificat de résidence d'un an portant la mention « vie privée et familiale » est délivré de plein droit : - (…) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays ;

Considérant que M. X, âgé de 42 ans, souffre d'un diabète insulinodépendant, d'une insuffisance rénale, d'hypertension artérielle, de phénomènes inflammatoires éthymoïdo-maxilaires bilatéraux et d'une cardiomyopathie hypertrophique asymétrique ; qu'il n'est pas contesté que son état de santé nécessite une prise en charge et une surveillance régulière, dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; qu'il ressort cependant des pièces du dossier, et, notamment, de l'avis du médecin inspecteur en date du 28 novembre 2005 que ne contredisent pas les certificats médicaux produits par l'intéressé, que celui-ci pourrait faire l'objet d'un traitement approprié en Algérie ; que, par suite, M. X n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté de reconduite à la frontière en cause aurait méconnu les stipulations précitées de l'accord franco-algérien du 17 décembre 1968 ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (…) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X ne justifie pas avoir d'attaches en France, alors que sa femme réside en Algérie, ainsi que sa mère et ses frères et soeurs ; que les circonstances que son grand-père maternel était un ancien combattant de l'armée française durant la seconde guerre mondiale, que son père a été policier de la sûreté nationale française en Algérie, et que sa mère est toujours en possession d'une carte d'identité française établie en 1957, ne sont pas de nature à démontrer l'existence de liens personnels avec la France ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et, notamment, de la durée et des conditions de son séjour en France, l'arrêté de reconduite à la frontière du 7 mars 2006 n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ledit arrêté a été pris ; que, par suite, M. X n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté de reconduite à la frontière a été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant que l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière d'un étranger n'a pas pour objet de fixer le pays de destination, lequel est déterminé par une décision distincte ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que l'étranger courrait des risques pour sa sécurité s'il devait revenir dans son pays d'origine ne peut être utilement invoqué au soutien de conclusions dirigées contre cet arrêté ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Nul ne peut être soumis à la torture, ni a des peines ou traitements inhumains ou dégradants ;

Considérant que M. X, qui n'a jamais présenté, depuis son entrée en France, de demande tendant à obtenir le statut de réfugié, a invoqué pour la première fois à l'occasion du recours gracieux susmentionné, les risques que comporterait pour lui son retour en Algérie ; qu'il fait valoir qu'il aurait été victime d'attentats et de menaces en raison de ses opinions politiques et religieuses modérées et de la carrière de plusieurs membres de sa famille au sein des forces militaires et policières françaises ; que, cependant, les documents produits à l'appui de ses allégations ne sont pas de nature à justifier des risques personnels qu'il pourrait encourir en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, M. X n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant l'Algérie comme pays à destination duquel il doit être reconduit, a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que la présente décision, qui rejette la requête de M. X, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de Maine-et-Loire de délivrer à l'intéressé un titre de séjour doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à M. X la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Benouada X et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire. Une copie sera transmise au préfet de Maine-et-Loire.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : Reconduite a la frontiere
Numéro d'arrêt : 06NT00775
Date de la décision : 26/05/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Laurent MARTIN
Rapporteur public ?: M. MORNET
Avocat(s) : RENARD

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2006-05-26;06nt00775 ?
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