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24/05/2006 | FRANCE | N°06NT00729

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, Reconduite a la frontiere, 24 mai 2006, 06NT00729


Vu la requête, enregistrée le 7 avril 2006, présentée par le préfet de la Vendée ; le préfet de la Vendée demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 06-1041 du 6 mars 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Nantes a annulé son arrêté du 2 mars 2006 décidant la reconduite à la frontière de M. Tolga X et la décision du même jour fixant la Turquie comme pays de destination ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Nantes ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision du 2 janvier 2006 par laquelle le pré...

Vu la requête, enregistrée le 7 avril 2006, présentée par le préfet de la Vendée ; le préfet de la Vendée demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 06-1041 du 6 mars 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Nantes a annulé son arrêté du 2 mars 2006 décidant la reconduite à la frontière de M. Tolga X et la décision du même jour fixant la Turquie comme pays de destination ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Nantes ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision du 2 janvier 2006 par laquelle le président de la Cour a délégué M. Cadenat pour statuer sur les appels interjetés contre les jugements rendus par les présidents de tribunaux administratifs ou leurs délégués en matière de reconduite à la frontière ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 mai 2006 :

- le rapport de M. Cadenat, magistrat délégué,

- les observations de Me Rouxel, avocat de M. X,

- et les conclusions de M. Millet, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) - 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé, ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité turque, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 10 septembre 2002, de la décision du préfet de la Vendée, en date du 6 septembre 2002, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il entrait, ainsi, dans le champ application de la disposition précitée ;

Considérant que M. X fait valoir qu'il n'a plus de famille dans son pays d'origine, et qu'il entretient depuis deux ans une relation sérieuse avec une jeune femme qu'il a épousée religieusement le 6 mars 2005 ; que, toutefois, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et, notamment, de l'absence de mariage civil et du caractère récent de la vie maritale de M. X, qui n'a débuté qu'à compter du mariage religieux, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté contesté n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris, et n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Nantes s'est fondé sur la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour annuler l'arrêté du préfet de la Vendée du 2 mars 2006 ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X devant le Tribunal administratif de Nantes ;

Considérant, en premier lieu, que si M. X, qui s'estime persécuté dans son pays d'origine, soutient qu'il risquerait de subir des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour en Turquie, il n'apporte à l'appui de ses allégations aucun élément susceptible d'établir la réalité des risques auxquels il serait exposé, risques dont l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Commission des recours des réfugiés n'ont d'ailleurs pas reconnu l'existence ; qu'il ressort, par ailleurs, des pièces du dossier que les autorités turques ont enregistré la plainte déposée par l'intéressé qui faisait état de pressions exercées sur lui-même et sa famille afin de les contraindre à renoncer aux poursuites qu'ils avaient l'intention d'engager contre l'armée turque, responsable, selon eux, de la mort du frère de M. X, décédé durant son service militaire ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'eu égard à la durée de la vie maritale de M. X avec la compatriote qu'il n'a pas épousée civilement, l'arrêté litigieux n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Vendée est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nantes a annulé sa décision en date du 2 mars 2006 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que la présente décision, qui rejette la requête de M. X, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de l'intéressé tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de lui délivrer un titre de séjour doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Nantes du 6 mars 2006 est annulé.

Article 2 : La demande présentée devant le Tribunal administratif de Nantes par M. X est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Tolga X et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire. Une copie sera transmise au préfet de la Vendée.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : Reconduite a la frontiere
Numéro d'arrêt : 06NT00729
Date de la décision : 24/05/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Patrick CADENAT
Rapporteur public ?: M. MILLET
Avocat(s) : ROUXEL

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2006-05-24;06nt00729 ?
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