Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 16 avril 2004, présentée pour M. Gilles X, demeurant ..., par Me Rossinyol, avocat au barreau de Nantes ; M. X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 993435 en date du 21 novembre 2003 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1994 et 1995, ainsi que des pénalités dont ils ont été assortis ;
2°) de prononcer les décharges demandées ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 avril 2006 :
- le rapport de Mme Michel, rapporteur ;
- et les conclusions de M. Hervouet, commissaire du gouvernement ;
Considérant que M. X, qui exerce la profession de professeur de yoga et de formateur-psychothérapeute à Sainte-Luce-sur-Loire (Loire-Atlantique), a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle au titre de l'année 1994 et du 1er janvier au 3 octobre 1995, date de son mariage ; que M. et Mme X ont fait l'objet d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle pour la période du 4 octobre au 31 décembre 1995 ; que M. X a par ailleurs fait l'objet au titre de son activité d'une vérification de comptabilité qui a porté en matière de bénéfices non commerciaux sur les années 1994 et 1995 et en matière de taxe sur la valeur ajoutée sur la même période ; qu'à l'issue de ce contrôle, le service a rehaussé le bénéfice professionnel entrant dans les bases de l'impôt sur le revenu ; que les redressements ont été notifiés le 28 novembre 1997 ; que les redressements consécutifs à l'examen de la situation fiscale personnelle ont été notifiés le même jour par deux notifications distinctes pour chacune des périodes ; que M. X forme appel du jugement du Tribunal administratif de Nantes qui a rejeté sa demande de décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1994 et 1995 à raison de ses bénéfices non commerciaux ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que la vérification de comptabilité s'est déroulée dans les locaux où M. X exerce son activité professionnelle ; que le vérificateur s'est rendu sur place à six reprises aux jours et heures convenus avec le contribuable qui était présent à chaque intervention ; qu'une réunion de synthèse s'est tenue le 2 juin 1997 en présence de l'intéressé et de son expert comptable ; que M. X ne démontre pas que le vérificateur se serait refusé à tout échange de vues avec lui ou son représentant ; que le moyen tiré de ce qu'il aurait été privé de débat oral et contradictoire doit par suite être écarté ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L.48 du livre des procédures fiscales : “A l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu ou d'une vérification de comptabilité, lorsque des redressements sont envisagés, l'administration doit indiquer, avant que le contribuable présente ses observations ou accepte les redressements proposés, dans la notification prévue à l'article L.57, le montant des droits, taxes et pénalités résultant de ces redressements (…)” ; qu'il résulte de ces dispositions qu'en cas de mise en oeuvre à l'encontre d'un même contribuable d'une vérification de comptabilité et d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle, les dispositions de l'article L.48 s'appliquent indépendamment pour chaque procédure de redressement ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite de l'achèvement, le 2 juin 1997, des opérations de vérification sur place de la comptabilité de l'activité exercée par M. X, une notification lui a été adressée, le 28 novembre 1997, pour lui faire connaître les redressements que le vérificateur proposait d'apporter notamment aux bénéfices non commerciaux déclarés au titre des années 1994 et 1995 ; que par deux notifications datées du même jour, M. X a été informé des conséquences sur le montant de son revenu global imposable au titre respectivement de la période du 1er janvier 1994 au 4 octobre 1995 et de la période du 4 octobre 1995 au 31 décembre 1995 résultant des rehaussements apportés aux seuls bénéfices non commerciaux et du montant des droits et pénalités qu'il aurait à acquitter en cas d'acceptation de ces rehaussements ; que M. X ne contestant pas avoir reçu ces trois notifications le même jour, a été, en l'espèce, régulièrement informé en temps utile des conséquences financières de son acceptation des redressements, quand bien même cette information n'aurait pas été également portée dans la notification concernant ses bénéfices non commerciaux ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L.57 du livre des procédures fiscales : “L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (…) Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée.” ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que les notifications de redressements indiquaient clairement la nature et le montant des redressements résultant de la remise en cause de la déduction de certaines dépenses professionnelles et comportaient, quant aux motifs de ces redressements, des indications suffisantes pour permettre au contribuable, comme il l'a d'ailleurs fait, d'engager valablement une discussion avec l'administration ;
Considérant, en quatrième lieu, que M. X soutient que l'administration n'a répondu qu'aux observations qu'il avait formulées à l'encontre des redressements établis selon la procédure contradictoire à la suite de la vérification de comptabilité dont il a fait l'objet mais pas à celles qu'il avait formulées à l'encontre des redressements notifiés à l'issue du contrôle personnel ; que l'administration aurait ainsi méconnu les dispositions de l'article L.57 du livre des procédures fiscales ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que si M. X a accusé réception le 20 avril 1998 et le 28 avril 1998 de trois envois de la direction générale des impôts des Pays de la Loire portant chacun un numéro différent, il n'établit pas qu'il aurait formulé des observations propres aux redressements notifiés à l'issue des deux procédures d'examen de sa situation fiscale personnelle ; que le moyen tiré de l'absence de réponse aux observations du contribuable n'est donc pas fondé ; que M. X ne soutient pas, par ailleurs, que la réponse de l'administration à ses observations sur les redressements établis à l'issue de la vérification de comptabilité n'était pas suffisamment motivée ; que, par suite, les moyens tirés de la violation des dispositions de l'article L.57 du livre des procédures fiscales doivent être écartés ;
Considérant, en cinquième lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article L.192 du livre des procédures fiscales qui prévoient que l'avis rendu par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires n'a d'influence que sur la charge de la preuve, que les vices de forme ou de procédure dont serait entaché l'avis de cette commission n'affectent pas la régularité de la procédure d'imposition et ne sont, par suite, pas de nature à entraîner la décharge de l'imposition établie à la suite des rectifications ou redressements soumis à l'examen de la commission ; qu'il suit de là que le moyen tiré par M. X de ce que l'administration aurait refusé de lui adresser une copie du rapport qu'elle destinait à la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires est inopérant au soutien de sa demande en décharge des impositions en litige ;
Considérant, enfin, que M. X ne saurait utilement invoquer, sur le fondement de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales, les dispositions de l'instruction du 27 août 1979 reprise dans la documentation administrative 13 M 2522, qui porte sur la procédure d'imposition, et ne comporte pas d'interprétation formelle de la loi fiscale ;
Sur le bien-fondé des impositions :
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 93 du code général des impôts : “1. Le bénéfice à retenir dans les bases de l'impôt sur le revenu est constitué par l'excédent des recettes totales sur les dépenses nécessitées par l'exercice de la profession (…)” ;
Considérant que M. X conteste la réintégration, dans la base de l'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre des années 1994 et 1995, de dépenses qu'il soutient avoir exposées dans l'exercice de sa profession ;
Considérant que, quelle qu'ait été la procédure d'imposition suivie par l'administration, il appartient dans tous les cas au contribuable, en application des dispositions précitées, de fournir des éléments propres à justifier que les dépenses qu'il a portées dans ses charges déductibles étaient “nécessitées par l'exercice de la profession” ;
Considérant que M. X qui exerce la profession de professeur de Qi Jong et Tai Chi Chuan, n'établit pas, par ses seules allégations, que les frais engagés en 1994 pour l'achat de “shorts”, de “tee-shirts”, d'une veste en cuir et de gants de moto auraient été rendus nécessaires par l'exercice de sa profession ; qu'en ce qui concerne les dépenses de téléphone afférentes aux appels effectués à son domicile, la seule allégation du requérant selon laquelle l'exiguïté de son local professionnel l'obligerait à travailler chez lui ne permet pas de le regarder comme apportant la preuve dont il a la charge ; que s'agissant des frais de restaurant, M. X fait valoir que, dans l'organisation de son travail, il a été amené à inviter au restaurant des stagiaires pendant les périodes de formation, son épouse qui travaille avec lui, ainsi que d'autres personnes avec lesquelles il partage ses locaux professionnels ; que, cependant, M. X n'établit pas que sa femme participait à son activité professionnelle ; que le vérificateur a écarté les autres frais de restaurant au motif non contesté qu'aucun nom n'est mentionné sur les notes délivrées par les restaurants ; qu'enfin, le contribuable ne démontre pas que des dépenses consistant en l'achat de bouteilles d'eau ou en cours d'étirement et de stretching étaient nécessaires pour l'exercice de sa profession ; qu'en revanche, M. X doit être regardé comme justifiant par la production de factures, que des dépenses exposées pour l'achat de certains ouvrages présentent un tel caractère, à hauteur de 569,02 euros (3 732,50 F) pour 1994 et de 58,24 euros (382 F) pour 1995 ; que les frais d'acquisition des autres ouvrages pour lesquels M. X n'a pas produit de justificatif ou des factures suffisamment précises ne peuvent pas être admis en déduction ;
Considérant, par ailleurs, que M. X ne conteste pas le bien fondé des rappels d'impôt sur le revenu qui lui ont été réclamés au titre des années 1994 et 1995 ; que la circonstance que, par un arrêt du 26 juin 2003, la Cour administrative d'appel de Nantes ait annulé la décision en date du 22 janvier 1999 du préfet de la région des Pays de la Loire confirmant la caducité, à compter du 1er janvier 1996, de la déclaration de M. X au titre des organismes dispensateurs de formation professionnelle, ne concerne que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée, et est, par suite, en tout état de cause, sans portée utile pour la solution du litige ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nantes a rejeté la totalité de sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante pour l'essentiel dans la présente instance, soit condamné à payer à M. X la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La base de l'impôt sur le revenu assignée à M. X au titre de l'année 1994 est réduite de 569,02 euros (cinq cent soixante-neuf euros deux centimes) et, au titre de l'année 1995, de 58,24 euros (cinquante-huit euros vingt-quatre centimes).
Article 2 : M. X est déchargé des droits et pénalités correspondant à la réduction de la base d'imposition définie à l'article 1er.
Article 3 : Le jugement du Tribunal administratif de Nantes du 21 novembre 2003 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Gilles X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
N° 04NT00469
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