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17/04/2006 | FRANCE | N°04NT00085

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ere chambre, 17 avril 2006, 04NT00085


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 23 janvier 2004, présentée pour M. Bruno X, demeurant ..., par Me Chauvin, avocat au barreau de Rennes ; M. Bruno X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 01-4379 et 01-4380 du 2 décembre 2003 par lequel le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté ses demandes tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu qui lui ont été assignés au titre des années 1996 et 1997 ;

2°) de prononcer la décharge de ces suppléments d'imposition ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de

2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 23 janvier 2004, présentée pour M. Bruno X, demeurant ..., par Me Chauvin, avocat au barreau de Rennes ; M. Bruno X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 01-4379 et 01-4380 du 2 décembre 2003 par lequel le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté ses demandes tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu qui lui ont été assignés au titre des années 1996 et 1997 ;

2°) de prononcer la décharge de ces suppléments d'imposition ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………………………..

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 mars 2006 :

- le rapport de Mme Magnier, rapporteur ;

- les observations de M. X ;

- les conclusions de M. Lalauze, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que, lorsqu'il est saisi, postérieurement à la clôture de l'instruction et au prononcé des conclusions du commissaire du gouvernement, d'une note en délibéré émanant d'une des parties à l'instance, il appartient dans tous les cas au juge administratif d'en prendre connaissance avant la séance au cours de laquelle sera rendue la décision ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X a produit une note en délibéré assortie de pièces justificatives, reçue par le Tribunal administratif le 27 novembre 2003, soit avant la date de lecture du jugement attaqué ; que ladite note n'a pas été visée dans le jugement ; que, dans ces conditions, les premiers juges ne peuvent être regardés comme ayant pris connaissance de cette note ; que M. X est, par suite, fondé à soutenir que le jugement a été pris à la suite d'une procédure irrégulière et doit être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de M. X présentée devant le Tribunal administratif d'Orléans ;

Sur l'année 1996 :

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'en 1995, la société Bruno X restait débitrice envers la banque CEPME de la somme de 545 803,12 F (83 207,15 euros) représentant le solde d'un emprunt et que cet emprunt a été totalement remboursé par un chèque émis par l'indivision successorale X en octobre 1995 ; que, suite à ce remboursement, la société Bruno X a annulé cette dette et crédité de la même somme le compte courant de M. X, son dirigeant et associé ; que l'administration a réintégré la somme en question dans le bénéfice imposable de la société, en application de l'article 38-2 du code général des impôts, au motif que l'opération constituait un abandon de créance augmentant d'autant son actif net et a, en outre, considéré que la somme réintégrée devait être regardée comme constituant des revenus distribués imposables en application des dispositions du 1 de l'article 109 du code général des impôts ;

Considérant qu'il est constant que le changement du titulaire de la créance n'a pas fait l'objet d'un acte de cession de créance selon les formalités prévues par l'article 1690 du code civil ; qu'il résulte toutefois de l'instruction, et notamment de l'acte authentique de partage du 12 avril 1996, que M. X, membre de l'indivision successorale X, devait notamment recevoir la somme de 1 100 000 F ; qu'il ressort d'une attestation en date du 30 octobre 1995, émise par les notaires chargés de la succession et dont une erreur matérielle a été corrigée par une nouvelle attestation en date du 12 octobre 1999, que l'indivision a remboursé la banque au moyen d'un acompte à valoir sur les droits de M. X sur la succession ; que, dans ces conditions, le requérant doit être regardé comme établissant qu'il a personnellement acquitté la dette sociale à l'égard de la banque sans que l'administration puisse utilement faire valoir les circonstances que l'indivision aurait procédé à la vente de SICAV pour financer le remboursement et que l'acte authentique de partage de l'indivision est postérieur au remboursement litigieux ; que cette prise en charge de la dette par le contribuable justifie son inscription au crédit du compte courant de l'intéressé ; que, dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête concernant cette année, c'est à tort que l'administration a considéré que ladite somme constituait un bénéfice imposable distribué à M. X ; que la base de l'impôt sur le revenu de M. X doit, par suite, être réduite, au titre de l'année 1996, de la somme de 83 207,15 euros ;

Sur l'année 1997 ;

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article L.57 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à l'espèce : L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation… ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une notification de redressement doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la notification de redressements adressée à M. X le 30 septembre 1999 comportait la nature de l'impôt et sa base légale, l'année et la base d'imposition et la référence à la notification de redressements de la société Chaussures Arnaud dont la copie était annexée ; qu'en outre, l'administration a indiqué que M. X avait été désigné comme bénéficiaire des distributions litigieuses ; que le moyen tiré de la violation des dispositions précitées de l'article L.57 du livre des procédures fiscales doit, par suite, être écarté ; que le contribuable ne saurait, par ailleurs, utilement invoquer l'instruction du 1er avril 1995 (13 L-1513) laquelle traitant de la procédure d'imposition ne comporte pas d'interprétation de la loi fiscale au sens de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales ;

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

Considérant qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : 1 - Sont considérés comme revenus distribués : 1°) tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital… ;

Considérant qu'il est constant que la société Chaussures Arnaud, société filiale de la société Bruno X était débitrice de la société Clodic Varella d'une somme de 487 587,29 F représentant le solde d'opérations diverses de cessions de parts ; que l'administration a constaté que la société Chaussures Arnaud avait débité de cette somme le compte courant de la société Clodic Varella et crédité le compte courant de M. X de la même somme en invoquant un transfert de sa dette de la société Clodic Varella vers M. X ; que le contribuable, associé de la société Chaussures Arnaud, soutient qu'il a pris à sa charge la dette litigieuse ; qu'il est toutefois constant que le changement de titulaire de la créance n'a pas fait l'objet d'un acte de cession de créance selon les formalités prévues par l'article 1690 du code civil ; que si M. X fait valoir que la société n'était pas tenue de respecter les formalités prévues par l'article 1690 du code civil, dès lors qu'il avait été procédé à un paiement pour le compte d'autrui au sens de l'article 1236 du même code, il n'établit pas, en tout état de cause, qu'il aurait été procédé à une telle opération ; que le moyen tiré de ce que les écritures commerciales de la société Chaussures Arnaud sont régulières et sincères est sans portée utile ;

Considérant que M. X fait toutefois valoir qu'il ne peut être imposé à raison de cette distribution au motif qu'il n'aurait pas eu la disposition de cette somme en raison d'une convention de blocage de son compte courant d'associé ouvert dans les écritures de la société Chaussures Arnaud passée par acte sous seing privé le 31 janvier 1997, soit à la clôture de l'exercice ; que cet acte, qui n'a, au surplus, pas date certaine, ne bloque cependant le compte de M. X qu'à hauteur de 500 000 F alors qu'il présente un solde créditeur de 2 177 458 F ; qu'en outre, la seule circonstance que ce compte soit bloqué n'est pas de nature à faire regarder les sommes en cause, eu égard aux fonctions de dirigeant des sociétés du groupe exercées par M. X, comme n'ayant pas été à la disposition de l'intéressé ; qu'enfin, contrairement à ce que soutient le contribuable, il y a bien eu désinvestissement de la part de la société du seul fait de l'inscription au crédit de son compte courant d'associé de la somme correspondante ;

En ce qui concerne les intérêts de retard :

Considérant que l'intérêt de retard institué par les dispositions de l'article 1727 du code général des impôts vise essentiellement à réparer les préjudices de toute nature subis par l'Etat à raison du non respect par les contribuables de leurs obligations de déclarer et payer l'impôt aux dates légales ; que si l'évolution des taux du marché a conduit à une hausse relative de cet intérêt depuis son institution, cette circonstance ne lui confère pas pour autant la nature d'une sanction, dès lors que son niveau n'est pas devenu manifestement excessif au regard du taux moyen pratiqué par les prêteurs privés pour un découvert non négocié ; qu'il s'ensuit que, contrairement à ce que soutient M. X, les intérêts de retard litigieux n'avaient pas à être motivés, y compris pour la part de leur montant excédant celui des intérêts calculés au taux légal ; que le contribuable ne saurait, par ailleurs, utilement invoquer une réponse faite à Mme IDRAC, députée (AN 23 novembre 1998) sur le fondement de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales, lequel ne concerne que l'assiette de l'impôt ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, que M. X est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que l'administration a rejeté sa demande tendant à la décharge de l'imposition supplémentaire qui lui a été notifiée au titre de l'année 1996 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de condamner l'Etat à payer à M. X une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif d'Orléans du 2 décembre 2003 est annulé.

Article 2 : La base de l'imposition à l'impôt sur le revenu de M. X au titre de l'année 1996 est réduite de la somme de 83 207,15 euros (quatre-vingt-trois mille deux cent sept euros et quinze centimes).

Article 3 : M. X est déchargé des cotisations d'impôt sur le revenu formant surtaxe par rapport à celles résultant de l'application de l'article 2 du présent arrêt.

Article 4 : Le surplus de la demande et des conclusions de la requête de M. X en tant qu'il concerne l'année 1997 de M. X est rejeté.

Article 5 : L'Etat versera à M. X une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. Bruno X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

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N° 04NT00085

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ere chambre
Numéro d'arrêt : 04NT00085
Date de la décision : 17/04/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. LEMAI
Rapporteur ?: Mme Françoise MAGNIER
Rapporteur public ?: M. LALAUZE
Avocat(s) : CHAUVIN

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2006-04-17;04nt00085 ?
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