Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 17 mars 2003, présentée par la CAISSE D'EPARGNE CENTRE VAL DE LOIRE, dont le siège est situé ..., représentée par le président de son directoire ; la CAISSE D'EPARGNE CENTRE VAL DE LOIRE demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement n°s 99.2872 et 00.41 en date du 20 décembre 2002 du Tribunal administratif d'Orléans en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de ses demandes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1989, 1990, 1991, 1992 et 1993 à raison du rattachement à ces exercices, selon un mode progressif, des loyers versés par la SNCF au GIE OLIVIA X... ;
2°) de prononcer la décharge des impositions restant en litige ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 5 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 mars 2006 :
- le rapport de M. Luc Martin, rapporteur ;
- et les conclusions de M. Lalauze, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le GIE OLIVIA X... a, par voie de crédit-bail d'une durée de quinze ans, mis des rames de TGV Atlantique à la disposition de la SNCF contre paiement par celle-ci d'un loyer annuel ; que l'administration a procédé à une vérification de la comptabilité de ce GIE et remis en cause, d'une part, l'amortissement sur quinze ans des rames de TGV et, d'autre part, le choix du GIE de rattacher les loyers aux différents exercices selon un mode progressif ; que la société régionale de financement (Sorefi) du Centre, dont les droits et obligations ont été dévolues, après sa dissolution, en 1992, à la CAISSE D'EPARGNE CENTRE VAL DE LOIRE et à la Caisse d'Epargne du Val de France Orléanais, était membre du GIE OLIVIA X... ; que, par suite, la CAISSE D'EPARGNE CENTRE VAL DE LOIRE a été assujettie de ce double chef à des suppléments d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 1989, 1990, 1991, 1992 et 1993 ; qu'elle fait appel du jugement du Tribunal administratif d'Orléans en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande relatives au mode de rattachement des loyers ; que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie forme recours incident contre le même jugement en tant qu'il a accordé à la société requérante, au titre des exercices clos en 1992 et 1993, une réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés correspondant à la remise en cause de la durée d'amortissement des rames de TGV ;
Sur l'étendue du litige :
Considérant que, par deux décisions postérieures à l'introduction de la requête, le délégué interrégional des impôts a prononcé le dégrèvement, en droits et pénalités, d'une part, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles la CAISSE D'EPARGNE CENTRE VAL DE LOIRE a été assujettie au titre des exercices clos en 1989, 1990 et 1991, d'autre part, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles cette même caisse a été assujettie au titre des exercices clos en 1992 et 1993 à raison de la remise en cause du mode de rattachement à ces exercices des loyers versés par la SNCF au GIE OLIVIA X... ; que, par suite, les conclusions de la requête de la CAISSE D'EPARGNE CENTRE VAL DE LOIRE tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1989, 1990, 1991, 1992 et 1993 à raison de la remise en cause du mode de rattachement à ces exercices des loyers versés par la SNCF au GIE OLIVIA X... sont devenues sans objet ;
Sur le recours incident :
Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts : “1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant… notamment : … 2°… les amortissements réellement effectués par l'entreprise, dans la limite de ceux qui sont généralement admis d'après les usages de chaque nature d'industrie, de commerce ou d'exploitation…” ; qu'aux termes de l'article 39 C du même code : “L'amortissement des biens donnés en location est réparti sur la durée normale d'utilisation suivant des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat” ; qu'aux termes de l'article 30 de l'annexe II audit code, pris pour l'application des dispositions précitées : “Les biens donnés en location sont amortis sur leur durée normale d'utilisation, quelle que soit la durée de la location” ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, d'une part, depuis l'origine, les rames de TGV ont été amorties sur vingt ans, durée d'ailleurs proche de celle retenue pour l'amortissement de la plupart des rames utilisées par la SNCF ; que cette pratique doit être regardée comme un usage au sens des dispositions précitées du 2° du 1 de l'article 39 du code général des impôts, auquel il convient de se référer, malgré les innovations techniques que comportent les rames de TGV Atlantique et qui ne suffisent pas à en faire des biens d'une nature différente des rames des précédents TGV ; que, d'autre part, ni les conditions d'exploitation des rames de TGV Atlantique, ni les innovations techniques mentionnées ci-dessus ne constituent des circonstances particulières qui justifieraient de déroger à la durée d'amortissement de vingt ans correspondant à l'usage susmentionné ; que c'est par suite à tort que le Tribunal administratif d'Orléans a déchargé la CAISSE D'EPARGNE CENTRE VAL DE LOIRE des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1992 et 1993 à raison des amortissements pratiqués par le GIE OLIVIA X... sur une durée de quinze ans en se fondant sur le motif qu'eu égard aux innovations techniques que comportaient les rames de TGV Atlantique et au caractère encore mal défini de leur impact sur la durée d'utilisation de ce matériel, lesdites rames pouvaient être amorties sur une durée de quinze ans ;
Considérant qu'il appartient toutefois à la Cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens relatifs à ce chef de redressement soulevés tant en première instance qu'en appel par la CAISSE D'EPARGNE CENTRE VAL DE LOIRE ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'examen de la notification de redressements adressée le 30 novembre 1995 à la CAISSE D'EPARGNE CENTRE VAL DE LOIRE que celle-ci comporte une référence aux rehaussements apportés aux bénéfices réalisés par le GIE OLIVIA X... et indique à la société requérante le montant de la part de ces bénéfices à raison de laquelle elle sera personnellement imposée ; que cette notification était ainsi suffisamment motivée ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré par la société requérante de ce que le défaut de motivation de la notification de redressements qui lui a été adressée constituerait une irrégularité substantielle au sens de l'article L.80 CA du livre des procédures fiscales doit être écarté ; que la CAISSE D'EPARGNE CENTRE VAL DE LOIRE ne peut utilement invoquer, sur le fondement de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales, la documentation administrative 13 L-1513 qui concerne la procédure d'imposition et ne contient, dès lors, aucune interprétation de la loi fiscale au sens dudit article ;
Considérant, en second lieu, que la CAISSE D'EPARGNE CENTRE VAL DE LOIRE ne saurait se prévaloir utilement, sur le fondement de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales, de la documentation administrative de base 4 D-262 du 1er mai 1990, dès lors que celle-ci se borne à indiquer qu'une entreprise qui donne en location des biens doit amortir dans les mêmes conditions que les entreprises qui exploitent directement les biens de même nature dont elles sont propriétaires ; qu'elle ne peut non plus se prévaloir utilement de l'instruction administrative 4 D-1-88 du 29 février 1988 qui ne donne pas de la loi fiscale une interprétation différente de celle dont il vient d'être fait application ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 1er du jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Orléans a déchargé la CAISSE D'EPARGNE CENTRE VAL DE LOIRE des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés qui lui ont été assignées au titre des exercices clos en 1992 et 1993 à raison de la remise en cause de la durée des amortissements pratiqués par le GIE OLIVIA X... ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de condamner l'Etat à verser à la CAISSE D'EPARGNE CENTRE VAL DE LOIRE une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête tendant à la décharge des cotisations d'impôt sur les sociétés auxquelles la CAISSE D'EPARGNE CENTRE VAL DE LOIRE a été assujettie au titre des exercices clos en 1989, 1990, 1991, 1992 et 1993 à raison de la remise en cause du mode de rattachement à ces exercices des loyers versés par la SNCF au GIE OLIVIA X....
Article 2 : Les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles la CAISSE D'EPARGNE CENTRE VAL DE LOIRE a été assujettie au titre des exercices clos en 1992 et 1993 à raison de la remise en cause de la durée d'amortissement des rames de TGV et dont elle a été déchargée par le jugement attaqué sont remises à sa charge.
Article 3 : Le jugement du Tribunal administratif d'Orléans en date du 20 décembre 2002 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera à la CAISSE D'EPARGNE CENTRE VAL DE LOIRE une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la CAISSE D'EPARGNE CENTRE VAL DE LOIRE et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
N° 03NT00404
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