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24/02/2006 | FRANCE | N°05NT01800

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, Reconduite a la frontiere, 24 février 2006, 05NT01800


Vu la requête, enregistrée le 21 novembre 2005, présentée par le préfet du Finistère ; le préfet du Finistère demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 02-4249 et 05-4250 du 20 octobre 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Rennes a annulé ses arrêtés, en date du 12 octobre 2005, décidant la reconduite à la frontière de M. et Mme Karim X et fixant l'Algérie, ou tout autre pays dans lequel les intéressés seraient admissibles, comme pays à destination duquel ils devaient être reconduits ;

2°) de rejeter

les demandes présentées par M. et Mme X devant le Tribunal administratif de Rennes ;

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Vu la requête, enregistrée le 21 novembre 2005, présentée par le préfet du Finistère ; le préfet du Finistère demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 02-4249 et 05-4250 du 20 octobre 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Rennes a annulé ses arrêtés, en date du 12 octobre 2005, décidant la reconduite à la frontière de M. et Mme Karim X et fixant l'Algérie, ou tout autre pays dans lequel les intéressés seraient admissibles, comme pays à destination duquel ils devaient être reconduits ;

2°) de rejeter les demandes présentées par M. et Mme X devant le Tribunal administratif de Rennes ;

……………………………………………………………………………………………………...

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 janvier 2006 :

- le rapport de M. Vandermeeren, président de la Cour ;

- et les conclusions de M. Mornet, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) - 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa … ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X, de nationalité algérienne, est entrée en France le 23 mars 2005 sous couvert d'un visa de court séjour de trente jours, prolongé de soixante jours par une décision du préfet du Finistère, en date du 3 mai 2005 ; que M. X, de même nationalité, est entré pour la dernière fois en France le 5 juillet suivant sous couvert d'un visa de court séjour de trente jours ; que M. et Mme X se sont maintenus sur le territoire français au-delà de la durée de validité de leurs visas ; qu'ils entraient, ainsi, dans le champ d'application de la disposition précitée ;

Considérant que, lorsqu'un étranger se trouve dans l'un des cas où, en vertu de l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet peut décider qu'il sera reconduit à la frontière, et que cet étranger n'est pas au nombre de ceux qui, en vertu de l'article L.511-4 du même code, ne peuvent légalement faire l'objet d'une décision de reconduite, il appartient, en outre, au préfet d'apprécier si la mesure d'éloignement envisagée à l'encontre de l'intéressé n'est pas de nature à comporter, pour sa situation personnelle ou familiale, des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; qu'il incombe au juge de l'excès de pouvoir de contrôler si ladite appréciation n'est pas entachée d'une erreur manifeste ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. et Mme X sont suivis, depuis leur entrée en France, par des médecins du centre d'études et de la fertilité du couple du ... en vue d'une fécondation in vitro suivant la technique particulière ICSI ; que M. X a fait l'objet, en mai 2005, d'une intervention chirurgicale en vue du prélèvement de spermatozoïdes, qui ont été congelés en quinze paillettes ; que la fécondation in vitro, qui nécessite la présence continue de Mme X en France pendant plusieurs mois, devait débuter en novembre 2005 ; que l'exécution des arrêtés du 12 octobre 2005 du préfet du Finistère ordonnant la reconduite à la frontière de chacun des intéressés, aurait pour effet d'interrompre ce traitement, lequel constitue pour Mme X, qui est âgée de 32 ans et qui a déjà subi sans succès une fécondation in vitro avec ICSI en Algérie, une chance de procréer ; qu'ainsi, et alors que la présence du mari aux côtés de son épouse n'est pas sans incidence sur la réussite du traitement projeté, le préfet, en ordonnant la reconduite à la frontière de M. et Mme X, a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation personnelle et familiale du couple ; qu'il n'est, par suite, pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Rennes a annulé ses arrêtés du 12 octobre 2005 ;

Sur les conclusions à fin de régularisation de la situation administrative des intéressés :

Considérant qu'à la suite de l'annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière, il incombe au préfet, en application des dispositions de l'article L.512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, non seulement de munir l'intéressé d'une autorisation provisoire de séjour mais aussi, qu'il ait été ou non saisi d'une demande en ce sens, de se prononcer sur son droit à un titre de séjour ; que, dès lors, il appartient au juge administratif, lorsqu'il prononce l'annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière et qu'il est saisi de conclusions en ce sens, d'user des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 911-2 du code de justice administrative pour enjoindre au préfet de réexaminer la situation de l'intéressé au vu de l'ensemble de la situation de droit et de fait existant à la date de ce réexamen ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'enjoindre au préfet du Finistère de délivrer à M. et Mme X des autorisations provisoires de séjour, dans le délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt, et de lui prescrire de se prononcer, dans le même délai, sur la situation des intéressés ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de condamner l'État à payer à M. et Mme X une somme globale de 1 500 euros au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du préfet du Finistère est rejetée.

Article 2 : Le préfet délivrera des autorisations provisoires de séjour à M. et Mme X et réexaminera leur situation, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'État versera à M. et Mme X une somme globale de mille cinq cents euros (1 500 euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Karim X, à Mme Malika X et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire. Une copie sera transmise au préfet du Finistère.

N° 05NT01800

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : Reconduite a la frontiere
Numéro d'arrêt : 05NT01800
Date de la décision : 24/02/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. le Prés Roland VANDERMEEREN
Rapporteur public ?: M. MORNET
Avocat(s) : RAJJOU

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2006-02-24;05nt01800 ?
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