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28/11/2005 | FRANCE | N°03NT00335

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre b, 28 novembre 2005, 03NT00335


Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 5 mars 2003, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9804054 en date du 19 novembre 2002 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a déchargé la SA FERRETTE des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et à la contribution à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 1995 ;

2°) de rétablir la SA FERRETTE a

u rôle de l'impôt sur les sociétés et de la contribution audit impôt, à raison des ...

Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 5 mars 2003, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9804054 en date du 19 novembre 2002 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a déchargé la SA FERRETTE des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et à la contribution à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 1995 ;

2°) de rétablir la SA FERRETTE au rôle de l'impôt sur les sociétés et de la contribution audit impôt, à raison des droits et pénalités dont la décharge a été prononcée par les premiers juges ;

……………………………………………………………………………………………………...

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le décret n° 49-1473 du 14 novembre 1949, modifié ;

Vu le décret n° 86-567 du 14 mars 1986 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 octobre 2005 :

- le rapport de M. Degommier, rapporteur ;

- et les conclusions de M. Hervouet, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 39-1 du code général des impôts, applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : “Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant... notamment : 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice” ; qu'aux termes de l'article 38 sexies de l'annexe III au même code, dans sa rédaction alors en vigueur : “La dépréciation des immobilisations qui ne se déprécient pas de manière irréversible, notamment, les terrains, les fonds de commerce, les titres de participation, donne lieu à la constitution de provisions dans les conditions prévues au 5° de l'article 39 du code général des impôts” ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'une entreprise peut valablement porter en provision et déduire des bénéfices imposables d'un exercice, des sommes correspondant à des pertes qui ne seront supportées qu'ultérieurement par elle, à la condition que ces pertes soient nettement précisées quant à leur nature et susceptibles d'être évaluées avec une approximation suffisante, qu'elles apparaissent comme probables eu égard aux circonstances constatées à la date de clôture de l'exercice et qu'elles se rattachent aux opérations de toute nature déjà effectuées, à cette date, par l'entreprise ; qu'il appartient à celle-ci de justifier, dans leur principe comme dans leur montant, les écritures comptables par lesquelles elle constate une telle provision ;

Considérant que le décret susvisé du 14 mars 1986 relatif aux transports routiers de marchandises a prévu le remplacement des licences de transport délivrées selon un régime de contingentement au niveau national, en application des dispositions du décret susvisé du 14 novembre 1949, par des autorisations de transport délivrées par les préfets de région en fonction des besoins et qui ne sont pas cessibles indépendamment du fonds de commerce ; que si le même décret du 14 mars 1986 a prévu que les licences de transport de zone longue délivrées sous l'empire de l'ancienne réglementation resteraient valables jusqu'au 1er janvier 1996 et seraient échangées à cette date nombre pour nombre par des autorisations d'une durée également illimitée, son entrée en vigueur a ouvert aux entreprises de transport routier la possibilité de se créer ou de se développer sans avoir à acquérir des licences auprès d'autres entreprises ; que, dans ces conditions, ce changement de réglementation pouvait constituer, pour les entreprises qui, comme la SA FERRETTE, détenaient jusqu'alors de telles licences acquises sous l'empire de l'ancienne réglementation, un événement ayant pu rendre probable au cours des années suivantes la dépréciation de ces licences de transport ; que, dès lors, c'est à bon droit que les premiers juges ont déchargé l'imposition litigieuse, l'administration n'ayant opposé en première instance qu'un refus de principe à la déduction de cette provision ;

Considérant, toutefois, qu'il résulte de l'instruction que la SA FERRETTE a provisionné à 100 % de leur valeur d'inscription au bilan de l'exercice clos en 1995 les licences de transport dont elle était titulaire ; qu'en appel le ministre entend seulement contester le montant de cette provision ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.59 du livre des procédures fiscales : “Lorsque le désaccord persiste sur les redressements notifiés, l'administration, si le contribuable le demande, soumet le litige à l'avis (…) de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires” ; qu'aux termes de l'article L.59 A du même livre : “La commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires intervient… lorsque le désaccord porte… sur le montant du bénéfice industriel et commercial…” ;

Considérant que si l'administration peut, à tout moment de la procédure, et notamment en appel, invoquer un nouveau motif de droit propre à justifier l'imposition, une telle substitution de base légale ne saurait avoir pour effet de priver le contribuable de la faculté, prévue par les articles L.59 et L.59 A précités, de demander la saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, lorsque celle-ci est compétente pour connaître du différend ; qu'il en va de même lorsque l'administration invoque, sur le même fondement légal, un nouveau motif propre à justifier l'imposition ;

Considérant que le motif initialement retenu par l'administration au cours de la procédure de redressement, tiré de ce que les licences de transport ne pouvaient en aucun cas faire l'objet de provisions, ne soulevait aucune question de fait susceptible d'être utilement soumise à la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que celle-ci n'avait par suite pas à être saisie ; que désormais et ainsi qu'il a été dit ci-dessus, pour fonder le redressement en litige, le ministre entend se fonder sur le moyen tiré de ce que le mode de calcul de la provision en cause ne permettait pas d'évaluer avec une approximation suffisante le montant de la perte subie ; que ce différend quant au montant de la provision est en revanche au nombre des questions qui relèvent de la compétence de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que, dans ces conditions, sauf à priver la société de la garantie que constitue la consultation de ladite commission, le ministre n'est pas fondé à demander cette substitution de motifs ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nantes a accordé à la SA FERRETTE la décharge du complément d'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 1995 à raison de la réintégration d'une provision de 120 000 F ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que dans les circonstances de l'espèce il y a lieu, en application de ces dispositions, de condamner l'Etat à payer à la SAS GIRAUD OUEST une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le recours du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera à la SAS GIRAUD OUEST, venant aux droits de la SA FERRETTE, une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) en application des dispositions de l'article L.761 ;1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et à la SAS GIRAUD OUEST, venant aux droits de la SA FERRETTE.

N° 03NT00335

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre b
Numéro d'arrêt : 03NT00335
Date de la décision : 28/11/2005
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : Mme MAGNIER
Rapporteur ?: M. Sébastien DEGOMMIER
Rapporteur public ?: M. HERVOUET
Avocat(s) : SARRAZIN

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2005-11-28;03nt00335 ?
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