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17/06/2005 | FRANCE | N°05NT00561

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, Reconduite a la frontiere, 17 juin 2005, 05NT00561


Vu la requête, enregistrée le 7 avril 2005, présentée pour M. Durbaba X, élisant domicile chez Mme Nelly Y, ..., par Me Marie-France Jaguenet, avocat au barreau de Rennes ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 05-948 du 11 mars 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 7 mars 2005 du préfet d'Ille-et-Vilaine ordonnant sa reconduite à la frontière et fixant la Turquie comme pays de destination de sa reconduite et, d'autre part,

de la décision du même jour dudit préfet décidant qu'il serait maintenu provis...

Vu la requête, enregistrée le 7 avril 2005, présentée pour M. Durbaba X, élisant domicile chez Mme Nelly Y, ..., par Me Marie-France Jaguenet, avocat au barreau de Rennes ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 05-948 du 11 mars 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 7 mars 2005 du préfet d'Ille-et-Vilaine ordonnant sa reconduite à la frontière et fixant la Turquie comme pays de destination de sa reconduite et, d'autre part, de la décision du même jour dudit préfet décidant qu'il serait maintenu provisoirement dans tout local de rétention pendant un délai de quarante-huit heures ;

2°) d'annuler cet arrêté et cette décision pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet d'Ille-et-Vilaine de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de condamner l'État à payer à son avocat une somme de 1 500 euros au titre de l'article 37 de la loi n° 91-947 du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, moyennant renonciation de l'avocat à percevoir la contribution de 128,06 euros hors taxes versée par l'État au titre de l'aide juridictionnelle ;

5°) en cas de rejet de sa demande d'aide juridictionnelle, de condamner l'État à lui verser une somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………………………...

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision du 26 janvier 2005 par laquelle le président de la Cour a délégué M. Martin pour statuer sur les appels interjetés contre les jugements rendus par les présidents de tribunaux administratifs ou leurs délégués en matière de reconduite à la frontière ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 juin 2005 :

- le rapport de M. Martin, magistrat délégué,

- les observations de Me Maugin, substituant Me Jaguenet, avocat de M. X,

- et les conclusions de M. Mornet, commissaire du gouvernement ;

Sur l'appel incident du préfet d'Ille-et-Vilaine :

Considérant que, par son jugement susvisé en date du 11 mars 2005, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Rennes a intégralement rejeté la requête de M. X tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 7 mars 2005 ordonnant sa reconduite à la frontière et fixant la Turquie comme pays de destination de sa reconduite et, d'autre part, de la décision du même jour dudit préfet décidant qu'il serait maintenu provisoirement dans tout local de rétention pendant un délai de quarante-huit heures ; que, par suite, le préfet d'Ille-et-Vilaine est sans intérêt et partant sans qualité pour poursuivre l'annulation du jugement entrepris, en tant qu'il aurait été prononcé par une juridiction incompétente ;

Sur l'appel principal formé par M. X :

Considérant qu'aux termes l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ;

Considérant qu'il est constant que M. X, de nationalité turque, est entré irrégulièrement en France et n'était pas, à la date de l'arrêté attaqué, en possession d'un titre de séjour en cours de validité ; que, par suite, il se trouvait dans le cas prévu à l'article L.511-1 du code susmentionné, où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Sur la légalité de l'arrêté de reconduite :

Considérant que, par un arrêté du 10 mai 2004 régulièrement publié au recueil des actes administratifs, le préfet d'Ille-et-Vilaine a donné à M. Gilles Z, secrétaire général de la préfecture, délégation à l'effet de signer tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports, correspondances et documents relevant des attributions de l'État dans le département d'Ille-et-Vilaine, à l'exception des arrêtés de conflit ; que, par suite, le moyen tiré de ce que M. Z n'avait pas compétence pour signer l'arrêté contesté manque en fait ;

Considérant que, si l'arrêté contesté ne comporte pas de référence expresse aux changements intervenus dans la situation de M. X depuis l'intervention du précédent arrêté de reconduite dont il a fait l'objet le 2 juillet 2002, il ressort d'une lettre adressée le 13 janvier 2005 par le préfet d'Ille-et-Vilaine à la compagne de M. X qui avait sollicité la régularisation du séjour de l'intéressé, que ledit préfet a examiné la situation du requérant telle qu'elle se présentait avant qu'il ordonne le 7 mars 2005 de le reconduire à la frontière ;

Considérant que, si M. X soutient qu'il a séjourné en France de 1983 à 1988 et de 1990 à 1993, qu'il y vit de manière ininterrompue depuis 1997, que de nombreux membres de sa famille, dont son fils aîné, résident en France et le soutiennent financièrement, qu'il a divorcé de son épouse résidant en Turquie depuis le 2 novembre 2004, qu'il entretient une relation stable depuis octobre 2003 avec une ressortissante française, qu'il dispose d'une promesse d'embauche, et que le centre de ses intérêts matériels et moraux se situe à présent en France, il ressort des pièces du dossier qu'il a conservé de fortes attaches familiales dans son pays d'origine où vivent, chez sa mère, cinq de ses six enfants ; que, dans ces circonstances, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite, l'arrêté attaqué n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, les moyens tirés de ce qu'il devrait se voir attribuer une carte de séjour temporaire de plein droit au titre de l'article L.313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de ce que le préfet aurait en ordonnant sa reconduite à la frontière violé l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peuvent qu'être écartés ;

Considérant que, si M. X fait état de menaces qui pèseraient sur lui en cas de retour dans son pays en soutenant que la famille de son ex-épouse, qui n'a pas accepté leur divorce, aurait l'intention d'exercer contre lui des représailles, il n'apporte à l'appui de ses allégations aucun élément permettant de considérer que ses craintes sont justifiées et qu'il ne pourrait, en tout état de cause, bénéficier de la protection des autorités de son pays ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué serait illégal en ce qu'il fixe la Turquie comme pays de destination de la reconduite de M. X, doit être écarté ;

Sur la légalité de la décision plaçant M. X en rétention administrative :

Considérant que, pour demander l'annulation de la décision ordonnant son maintien en rétention, M. X soulève les moyens tirés, d'une part, de l'incompétence du signataire de la décision contestée et, d'autre part, de ce que la rétention n'était pas nécessaire, dès lors qu'il justifiait d'une adresse à Combourg ;

Considérant, en premier lieu, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, que le préfet d'Ille-et-Vilaine a donné à M. Gilles Z, secrétaire général de la préfecture, délégation à l'effet de signer tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports, correspondances et documents relevant des attributions de l'État dans le département d'Ille-et-Vilaine, à l'exception des arrêtés de conflit ; que, par suite, le moyen tiré de ce que M. Z n'avait pas compétence pour signer la décision contestée manque en fait ;

Considérant que, si à la date à laquelle la décision de rétention a été prise, M. X justifiait d'un domicile connu, il est constant qu'il ne disposait pas d'un passeport en cours de validité ni de ressources propres ; qu'eu égard à la nécessité de prendre les mesures qu'exigeait l'organisation matérielle de son retour dans son pays d'origine, le préfet d'Ille-et-Vilaine a pu légalement décider, sans commettre ni erreur de droit ni erreur de fait, que l'intéressé serait retenu pendant une durée de quarante-huit heures ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté et de la décision susmentionnés ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt qui rejette la requête de M. X n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de délivrer à M. X une autorisation provisoire de séjour doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à M. X la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de l'appel incident du préfet d'Ille-et-Vilaine sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Durbaba X, au préfet d'Ille-et-Vilaine

et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

N° 05NT00561

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : Reconduite a la frontiere
Numéro d'arrêt : 05NT00561
Date de la décision : 17/06/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Laurent MARTIN
Rapporteur public ?: M. MORNET
Avocat(s) : JAGUENET

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2005-06-17;05nt00561 ?
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