La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/01/2005 | FRANCE | N°03NT01073

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre b, 31 janvier 2005, 03NT01073


Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la Cour le 11 juillet 2003 et le 22 août 2003, présentés par la société SAUR France dont le siège est 1 avenue Freyssinet à Saint-Quentin-en-Yvelines (78064) ; la société SAUR France demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 99-2745 du 6 mai 2003 par lequel le Tribunal administratif de Nantes ne lui a accordé qu'une réduction partielle de la taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre des années 1994 à 1996 dans les rôles de la commune de Basse-Goulaine ;

2°)

de lui accorder la réduction de l'imposition restant en litige ;

3°) de condamner l...

Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la Cour le 11 juillet 2003 et le 22 août 2003, présentés par la société SAUR France dont le siège est 1 avenue Freyssinet à Saint-Quentin-en-Yvelines (78064) ; la société SAUR France demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 99-2745 du 6 mai 2003 par lequel le Tribunal administratif de Nantes ne lui a accordé qu'une réduction partielle de la taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre des années 1994 à 1996 dans les rôles de la commune de Basse-Goulaine ;

2°) de lui accorder la réduction de l'imposition restant en litige ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés ;

……………………………………………………………………………………………………..

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 janvier 2005 :

- le rapport de Mme Stefanski, rapporteur ;

- et les conclusions de M. Hervouet, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par traité de gérance conclu le 26 mars 1997, le syndicat mixte des collectivités du sud-est de la Loire-Atlantique et le syndicat intercommunal d'alimentation en eau potable de la région de Vertou ont confié à la société SAUR aux droits de laquelle vient la société SAUR France, l'exploitation d'une usine de production et distribution d'eau potable ; que l'administration a redressé les bases d'imposition de la société à la taxe professionnelle en ce qui concerne les biens passibles de taxe foncière ; que la société SAUR France, qui admet désormais le principe de son imposition à la taxe professionnelle, demande la réformation du jugement attaqué en tant que le Tribunal administratif de Nantes ne lui a accordé qu'une réduction partielle de la taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre des années 1994 à 1996 ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne les bases de l'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article 1467 du code général des impôts : “La taxe professionnelle a pour base… a) la valeur locative, telle qu'elle est définie aux articles 1469, 1518 A et 1518 B, des immobilisations corporelles dont le contribuable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle pendant la période de référence…” ; que les immobilisations dont la valeur locative est ainsi intégrée dans l'assiette de la taxe professionnelle sont les biens placés sous le contrôle du redevable et que celui-ci utilise matériellement pour la réalisation des opérations qu'il effectue ;

Considérant, d'une part, qu'il résulte notamment de l'article 2 de la convention susmentionnée que le syndicat mixte des collectivités du sud-est de la Loire-Atlantique et le syndicat intercommunal d'alimentation en eau potable de la région de Vertou mettent à la disposition de leur cocontractant l'ensemble des installations du réseau de production et de distribution d'eau et que celui-ci assure seul la fourniture des services ; qu'en application de l'article 17 de la convention, le cocontractant prend en charge les installations, dont il assure le fonctionnement et le bon état de marche et qu'en vertu de l'article 19, il assure le renouvellement d'une grande partie du matériel, le renouvellement des ouvrages de génie civil et des canalisations externes étant à la charge de la collectivité ; qu'il perçoit les redevances auprès des usagers ; que, dans ces conditions, quelle que soit la nature juridique des contrats conclus entre les syndicats et la société requérante, celle-ci doit être regardée comme ayant eu, au cours des années en cause, la disposition de l'ensemble de ces biens pour la réalisation des opérations qu'elle effectue ; que, par suite, c'est par une exacte application des dispositions précitées de l'article 1467 du code général des impôts, que la valeur locative de l'ensemble de ces immobilisations a été intégrée dans les bases d'imposition de la taxe professionnelle de la société SAUR France ;

Considérant, d'autre part, que l'article 1467 du code général des impôts se fonde sur le critère de la mise à disposition des biens pour définir la base d'imposition de la taxe professionnelle du contribuable et non sur la qualité de propriétaire ou non de ces biens ; que, dès lors qu'au regard de ce critère de mise à disposition, le concessionnaire et le fermier se trouvent dans la même situation, la société SAUR France ne peut soutenir que les stipulations combinées de l'article 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 1er de son premier protocole additionnel seraient méconnues, en ce qu'un fermier, qui n'est pas propriétaire de ces biens, serait imposé selon les mêmes modalités qu'un concessionnaire qui en serait propriétaire ;

Considérant que la société requérante ne saurait utilement se prévaloir, sur le fondement des dispositions de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales, des dispositions du paragraphe 2 de la documentation administrative 6-C-211 qui ne concernent que les propriétaires de ce type d'installations ;

En ce qui concerne le calcul de la valeur locative des différents éléments entrant dans la base d'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article 1469 du code général des impôts : “La valeur locative est déterminée comme suit : 1° Pour les biens passibles d'une taxe foncière, elle est calculée suivant les règles fixées pour l'établissement de cette taxe…” ; que les règles suivant lesquelles est déterminée la valeur locative des biens passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties sont différemment définies, notamment, à l'article 1499 en ce qui concerne les “immobilisations industrielles” et à l'article 1498 en ce qui concerne les biens autres que les locaux d'habitation ou à usage professionnel et les établissements industriels ;

Considérant que la société SAUR France fait valoir, en premier lieu, que les biens passibles de taxe foncière dont elle dispose, étant affectés à un service public, ne peuvent être regardés comme des biens industriels et doivent être exonérés en application du 1° de l'article 1382 du code général des impôts ; que les immeubles dont elle dispose ne sont toutefois pas au nombre de ceux dont le texte donne la liste ; que la société requérante ne peut davantage invoquer à son profit ni les dispositions de l'article 1449 du code général des impôts, qui exonèrent de taxe professionnelle les collectivités locales et les ports autonomes, ni celles de l'article 1463 qui concernent les concessionnaires de mines, ni enfin et en tout état de cause, celles de l'article 1654 du même code qui assujettissent les établissements publics aux impôts et taxes de toute nature auxquels sont assujetties les entreprises privées ;

Considérant, en second lieu, que la société SAUR France soutient que si elle doit être prise en compte, la valeur locative des biens passibles de la taxe foncière doit être calculée conformément aux dispositions du 3° de l'article 1498 du code général des impôts relatif aux locaux commerciaux et biens divers ; que toutefois le caractère industriel de l'activité d'une entreprise s'apprécie au regard de la nature des opérations qu'elle effectue ainsi que de l'importance des moyens techniques qu'elle met en oeuvre ; qu'il résulte de l'instruction que l'activité de la société requérante comporte des opérations de transformation des eaux afin de produire de l'eau potable ; qu'il est constant qu'elle a disposé, au cours des années litigieuses, d'outillages et matériels importants ; qu'ainsi, les opérations qu'effectue la société requérante présentent, eu égard à leur nature et à l'importance des moyens techniques mis en oeuvre, un caractère industriel au sens de l'article 1499 du code général des impôts ;

Considérant enfin que les instructions 6 E-131, 6 C-112, 6 C-123 et 6 C-1213 ainsi que le III du A de la note 6 M-10-73 du 14 août 1973 et le paragraphe 41 de l'instruction 6 E-7-75 du 30 octobre 1975 ne concernent pas, en tout état de cause, l'exploitation de services de production d'eau potable par une entreprise de droit privé réalisant des opérations à caractère lucratif ; que la société ne saurait, dès lors, utilement s'en prévaloir sur le fondement de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales ; qu'en tout état de cause, l'instruction 6 E-7-75 susmentionnée est un document interne à l'administration, qui n'ayant pas fait, de la part de celle-ci, l'objet d'une diffusion destinée aux contribuables, ne peut être regardée comme comportant une interprétation formelle d'un texte fiscal ;

S'agissant de l'application de la loi fiscale aux constructions :

Considérant qu'aux termes de l'article 1501 du code général des impôts : “Des modalités particulières d'évaluation peuvent être fixées par décret en Conseil d'Etat pour des catégories de locaux, établissements ou installations de caractère industriel ou commercial, lorsqu'il existe dans différentes communes des biens de cette nature présentant des caractéristiques analogues” ; que l'administration a fait application de ces dispositions pour déterminer la valeur locative des installations de production et de distribution d'eau potable et a retenu les indications du tarif prévu par l'arrêté interministériel du 9 janvier 1976 pris en application de l'article 310 M de l'annexe II au code général des impôts ;

Considérant que le moyen tiré par la société SAUR France de ce que l'article 1501 du code général des impôts ne serait pas applicable au cas d'espèce au motif que les installations qu'elle exploite ne seraient pas de nature industrielle doit être écarté dès lors que, comme il vient d'être dit, les installations litigieuses sont bien de nature industrielle ;

Considérant de la même manière, qu'à supposer même que le château d'eau mis à la disposition de la société SAUR serait situé sur une parcelle éloignée de celle de l'usine de production d'eau potable, cette circonstance est sans incidence en l'espèce, dès lors que le tarif prévu par l'article 1501 s'applique aux bâtiments comme aux réservoirs destinés à la production d'eau potable, quelle que soit leur situation géographique ;

Considérant que les taux d'intérêts et abattements prévus par les articles 324 AB et 324 AC de l'annexe III au code général des impôts s'appliquent aux évaluations effectuées en vertu de l'article 1498 du même code et non dans le cadre de l'article 1501, le barème prévu par cet article ayant déjà intégré de telles atténuations ;

S'agissant de l'application de la loi fiscale aux outillages et matériels :

Considérant que, contrairement à ce que soutient la société SAUR France, la valeur des outillages et matériels ne peut être regardée comme comprise dans la valeur locative des locaux ; que l'administration était par suite fondée à en calculer la valeur locative spécifique pour la comprendre dans la base de la taxe litigieuse ;

S'agissant du bénéfice de l'interprétation de la loi fiscale donnée par l'administration :

Considérant, d'une part, que la société requérante ne peut invoquer, pour l'évaluation de la valeur locative de l'usine de production d'eau potable et de ses matériels et outillages, sur le fondement de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales, les dispositions des documentations administratives de base 6 B-1211, 6 C-112, 6 C-1212, 6 C-1213, 6 C-123, 6 C-124, 6 C-211, 6 C-2331, 6 C-2332, 6 C-2333, 6 C-2532, 6 C-262 et du paragraphe 41 de l'instruction 6 E-7-75 qui ne donnent pas d'autre interprétation de la loi fiscale que celle dont il est fait application dans le présent arrêt ; qu'elle ne saurait davantage utilement invoquer la réponse ministérielle faite à M. Arthuis, sénateur (Sénat, 4 avril 1991) dès lors que celle-ci concerne des biens d'un autre type ;

Considérant, d'autre part, que, comme il a été dit ci-dessus, la société SAUR France perçoit directement les redevances acquittées par les usagers ; qu'elle ne peut, dès lors, utilement se prévaloir de la lettre du 6 février 1976, dans les prévisions de laquelle elle n'entre pas, et par laquelle l'administration a fait savoir au président du syndicat professionnel des distributeurs d'eaux et exploitants de réseaux d'assainissement que, lorsqu'une société, exploitant un réseau de distribution d'eau ou d'assainissement, n'a pas financé les équipements et ne supporte pas la charge de leur renouvellement ou des grosses réparations, et que la redevance acquittée par les usagers est perçue par la commune qui rémunère la société, celle-ci doit être regardée comme se comportant “en prestataire de service”, et a admis que les équipements non financés par elle ne sont, en conséquence, pas pris en considération pour le calcul de la taxe professionnelle ;

Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à la société SAUR France la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société SAUR France est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société SAUR France et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

N° 03NT01073

2

1


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre b
Numéro d'arrêt : 03NT01073
Date de la décision : 31/01/2005
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : Mme MAGNIER
Rapporteur ?: Mme Colette STEFANSKI
Rapporteur public ?: M. HERVOUET
Avocat(s) : LAURENT

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2005-01-31;03nt01073 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award