Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour le 4 septembre 2002, présentée pour Mme Anne X, demeurant ..., par Me Dubourg, avocat au barreau de Rennes ; Mme X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 97-2793 du 20 juin 2002 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 septembre 1997 par lequel le maire de Lancieux (Côtes d'Armor) a accordé à la société civile immobilière (SCI) Lancieux un permis de construire une maison d'habitation ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ledit arrêté ;
3°) de condamner la commune de Lancieux à lui verser une somme de 750 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 novembre 2004 :
- le rapport de M. Artus, rapporteur ;
- les observations de Me Bourges, substituant Me Dubourg, avocat de Mme X ;
- les observations de Me Louvel, substituant Me Bois, avocat de la commune de Lancieux ;
- les observations de Me Bonnat, substituant Me Cressard, avocat de la SCI Lancieux ;
- et les conclusions de M. Coënt, commissaire du gouvernement ;
Considérant que Mme X demande à la Cour d'annuler le jugement du 20 juin 2002 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 septembre 1997 par lequel le maire de Lancieux (Côtes d'Armor) a accordé à la société civile immobilière (SCI) Lancieux un permis de construire une maison d'habitation 44 bis, boulevard de la Mer ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 146-4-II du code de l'urbanisme : “L'extension limitée de l'urbanisation des espaces proches du rivage ou des rives de plans d'eau intérieurs désignés à l'article 2 de la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 précitée doit être justifiée et motivée, dans le plan d'occupation des sols, selon des critères liés à la configuration des lieux ou à l'accueil d'activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau. Toutefois, ces critères ne sont pas applicables lorsque l'urbanisation est conforme aux dispositions d'un schéma directeur ou d'un schéma d'aménagement régional ou compatible avec celles d'un schéma de mise en valeur de la mer. En l'absence de ces documents, l'urbanisation peut être réalisée avec l'accord du représentant de l'Etat dans le département. Cet accord est donné après que la commune a motivé sa demande et après avis de la commission départementales des sites, appréciant l'impact de l'urbanisation sur la nature” ; qu'il résulte de ces dispositions que lorsqu'un plan d'occupation des sols n'a pas fixé de critères spécifiques justifiant l'extension de l'urbanisation des espaces proches du rivage, et en l'absence d'un schéma directeur ou d'un schéma d'aménagement régional ou d'un schéma de mise en valeur de la mer, une construction constituant une extension limitée de l'urbanisation dans un espace proche du rivage ne peut être autorisée qu'avec l'accord du préfet après consultation de la commission départementale des sites ; que ces dispositions sont applicables indépendamment du caractère urbanisé ou non de l'espace dans lequel se situent les terrains d'assiette des constructions envisagées ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette de la construction projetée par la SCI Lancieux sur le territoire de la commune de Lancieux, au lieudit “Pointe de Lancieux” où il est cadastré à la section AE sous le n° 5, est situé à environ 40 mètres du rivage dont il n'est séparé que par une construction et d'où il est parfaitement visible ; qu'il constitue, dès lors, un espace proche du rivage au sens des dispositions précitées du II de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme ; que ledit terrain est compris dans un compartiment de terrain de faible superficie délimité, au sud par le boulevard de la Mer, à l'est par le prolongement du boulevard du Panorama et à l'ouest et au nord par le rivage de la mer ; que ce petit compartiment de terrain qui constitue la pointe de la baie de Lancieux et où ont déjà été édifiées cinq maisons d'habitation dans le cadre d'un ancien lotissement, ne saurait accueillir une nouvelle construction individuelle, quand bien même son terrain d'assiette serait un lot demeuré inoccupé de l'ancien lotissement précité, sans qu'un tel projet ne contribue à accroître significativement l'urbanisation existante au sein de ce très faible espace littoral et, en conséquence, ne puisse être regardé que comme ayant le caractère d'une extension de l'urbanisation au sens des dispositions de l'article L. 146-4 II du code de l'urbanisme ; qu'à défaut, dans le plan d'occupation des sols approuvé le 29 août 1986 alors applicable à la suite de l'annulation, par jugement du 29 octobre 1998 du Tribunal administratif de Rennes, de la délibération du 27 novembre 1992 du conseil municipal de Lancieux approuvant le POS révisé, de critères justifiant l'extension limitée de l'urbanisation des espaces proches du rivage et en l'absence d'un schéma directeur, d'un schéma d'aménagement régional ou d'un schéma de mise en valeur de la mer, il appartenait au préfet des Côtes d'Armor, après avis de la commission départementale des sites, d'apprécier, sur la demande de la commune, si une telle extension pouvait être autorisée ; qu'il est constant que la demande de permis de construire déposée par la SCI Lancieux n'a pas été soumise à l'appréciation du préfet des Côtes d'Armor ; qu'il suit de là que l'arrêté du 4 septembre 1997 par lequel le maire de Lancieux a autorisé la SCI Lancieux à construire une maison individuelle 44 bis, boulevard de la Mer, est entaché d'illégalité ;
Considérant pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, qu'aucun autre moyen ne paraît de nature, en l'état de l'instruction, à justifier l'annulation prononcée par le présent arrêt ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 septembre 1997 du maire de Lancieux ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant, d'une part, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de condamner la commune de Lancieux à verser à Mme X la somme de 750 euros que cette dernière demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Considérant, d'autre part, que ces dispositions font obstacle à ce que Mme X, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser à la commune de Lancieux et à la SCI Lancieux les sommes que celles-ci demandent au titre des frais de même nature qu'elles ont exposés ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 20 juin 2002 du Tribunal administratif de Rennes et l'arrêté du 4 septembre 1997 du maire de Lancieux (Côtes d'Armor) sont annulés.
Article 2 : La commune de Lancieux versera à Mme X la somme de 750 euros (sept cent cinquante euros) en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions présentées par la commune de Lancieux et par la société civile immobilière (SCI) Lancieux tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Anne X, à la commune de Lancieux, à la SCI Lancieux et au ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer.
Une copie en sera, en outre, adressée au procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Saint-Brieuc.
N° 02NT01456
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N° «Numéro»
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