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28/06/2004 | FRANCE | N°00NT01693

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ere chambre, 28 juin 2004, 00NT01693


Vu I, sous le n° 00NT01693, la requête enregistrée au greffe de la Cour le 5 octobre 2000, présentée pour M. et Mme X, demeurant ..., par Me Raymond PRIGENT, avocat au barreau de Laval ;

M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 98.252-98.253-98.255 en date du 3 août 2000 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a rejeté leurs demandes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu qui leur ont été assignées au titre des années 1992 à 1994 et des pénalités correspondantes ;

2°) de prononcer la d

écharge de ces impositions ;

C

3°) de condamner l'Etat à leur verser une somme de 15...

Vu I, sous le n° 00NT01693, la requête enregistrée au greffe de la Cour le 5 octobre 2000, présentée pour M. et Mme X, demeurant ..., par Me Raymond PRIGENT, avocat au barreau de Laval ;

M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 98.252-98.253-98.255 en date du 3 août 2000 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a rejeté leurs demandes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu qui leur ont été assignées au titre des années 1992 à 1994 et des pénalités correspondantes ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;

C

3°) de condamner l'Etat à leur verser une somme de 15 000 F au titre de l'article R.222 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

.............................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu, II, sous le n° 00NT01726, le recours enregistré au greffe de la Cour le 13 octobre 2000, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;

Le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 96.1152 en date du 16 juin 2000 du Tribunal administratif de Nantes en tant qu'il a fait droit à la demande de M. et Mme X tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu qui leur a été assignée au titre de l'année 1989, ainsi que les pénalités correspondantes ;

2°) de rétablir les contribuables au rôle de l'impôt sur le revenu au titre de l'année 1989 à concurrence de la somme de 58 691 F (8 947,39 euros) en droits et 6 603 F (1 006,62 euros) au titre des intérêts de retard ;

.............................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 juin 2004 :

- le rapport de Mme MAGNIER, président,

- et les conclusions de M. LALAUZE, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la requête et le recours susvisés concernent les mêmes contribuables et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre afin de statuer par un seul arrêt ;

Sur le recours du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie :

En ce qui concerne la fin de non recevoir opposée par les contribuables :

Considérant qu'aux termes de l'article R.200-18 du livre des procédures fiscales : A compter de la notification du jugement du tribunal administratif qui a été faite au directeur du service de l'administration des impôts... qui a suivi l'affaire, celui-ci dispose d'un délai de deux mois pour transmettre, s'il y a lieu, le jugement et le dossier au ministre chargé du budget. Le délai imparti pour saisir la cour administrative d'appel court, pour le ministre, de la date à laquelle expire le délai de transmission prévu à l'alinéa précédent ou de la date de la signification faite au ministre ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le jugement attaqué a été notifié au directeur du service de l'administration des impôts le 19 juin 2000 ; que le recours du ministre a été enregistré au greffe de la Cour le 13 octobre 2000, soit dans le délai imparti par les dispositions précitées de l'article R.200-18 du livre des procédures fiscales pour saisir la Cour quant bien même il a été adressé par télécopie ; que, par ailleurs, les contribuables ne peuvent utilement se prévaloir, dans un litige relatif à l'assiette de l'impôt sur le revenu, et pour contester l'applicabilité des dispositions de l'article R.200-18, des stipulations de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors que celles-ci ne visent que les procès portant sur des droits ou obligations de caractère civil ou sur des accusations pénales ;

En ce qui concerne la régularité et le bien fondé de l'imposition de l'année 1989 :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. et Mme X ont fait l'objet d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle qui a notamment porté sur l'année 1989 ; qu'ils font valoir que le vérificateur s'est refusé à tout débat oral et contradictoire préalable à l'envoi de la lettre de demande de justifications qui leur a été adressée le 25 juillet 1991, en application de l'article L.16 du livre des procédures fiscales ;

Considérant que le caractère contradictoire que doit revêtir l'examen de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu en vertu des articles L.47 à L.50 du livre des procédures fiscales interdit au vérificateur d'adresser la notification de redressements qui, selon l'article L.48, marquera l'achèvement de son examen, sans avoir au préalable engagé un dialogue contradictoire avec le contribuable sur les points qu'il envisage de retenir ; que si, par ailleurs, dans sa version remise à M. et Mme X, la Charte des droits et obligations du contribuable vérifié rendue opposable à l'administration par l'article L.10 du livre des procédures fiscales, exige que le vérificateur ait recherché un tel dialogue avant même d'avoir recours à la procédure écrite et contraignante de l'article L.16 du livre des procédures fiscales, sauf à constituer une irrégularité substantielle portant atteinte aux droits et garanties reconnus par la Charte au contribuable vérifié, cette irrégularité ferait toutefois seulement obstacle à ce que le service puisse, en application de l'article L.69 du livre des procédures fiscales, taxer d'office les revenus restés inexpliqués ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que d'une part, le vérificateur a proposé aux contribuables une première rencontre qui s'est tenue le 26 mars 1991 ; qu'un deuxième entretien a eu lieu le 14 novembre suivant, soit avant l'envoi de la notification de redressements en date du 10 août 1992 ; que les contribuables ne sont par suite pas fondés à soutenir que le vérificateur aurait refusé d'engager tout dialogue contradictoire avec eux avant l'envoi de la notification de redressements ; que par ailleurs, il est constant que le redressement litigieux, qui ne concerne que la réintégration dans le revenu global des contribuables du déficit occasionné par leur activité de loueur en meublé, ne résulte pas de la mise en oeuvre de l'article L.69 ; que la circonstance que les contribuables n'aient pas pu rencontrer le vérificateur avant l'envoi de la lettre qui leur a été adressée en application de l'article L.16 est par suite sans influence sur la régularité de la procédure d'imposition ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur le défaut de débat oral et contradictoire pour prononcer la décharge de cette imposition au titre de l'année 1989 ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. et Mme X devant le Tribunal administratif de Nantes ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.12 du livre des procédures fiscales : ... sous peine de nullité de l'imposition, un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle ne peut s'étendre sur une période supérieure à un an à compter de la réception de l'avis de vérification. Cette période... est... prorogée des trente jours prévus à l'article L.16 A et des délais nécessaires à l'administration pour obtenir les relevés de comptes lorsque le contribuable n'a pas usé de sa faculté de les produire dans un délai de soixante jours à compter de la demande de l'administration... ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration a demandé à M. et Mme X de produire leurs relevés de comptes bancaires, demande à laquelle ils n'ont pas donné suite ; que le vérificateur a alors dû rechercher lui-même lesdites informations ; qu'il a découvert à cette occasion qu'il existait d'autres comptes bancaires que ceux qu'il avait déjà décelés, ce qui, compte tenu des délais de communication des banques, supposait une prolongation de la durée du contrôle ; qu'il a ainsi dû adresser aux contribuables quatre lettres successives en date des 25 février, 25 juillet, 9 décembre 1991 et 6 mars 1992, les informant de ce qu'il lui était nécessaire de proroger les délais de l'examen afin d'obtenir ces éléments supplémentaires portant sur un total de 17 comptes ; qu'il n'a obtenu le dernier relevé de compte que le 1er juillet 1992 et a adressé la notification de redressements le 20 août suivant ; que, par suite, et alors même que ledit contrôle s'est étendu sur plus de 21 mois, et que l'administration n'a pas notifié de redressements en matière de revenus d'origine indéterminée, M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que la procédure aurait été irrégulière ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 156 du code général des impôts dans sa rédaction applicable à l'année d'imposition, le revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal est déterminé sous déduction du déficit constaté pour une année dans une catégorie de revenus... Toutefois n'est pas autorisée l'imputation : ... 4° des déficits réalisés par des personnes, autres que les loueurs professionnels au sens de l'article 151 septiès, dernier alinéa, louant directement ou indirectement des locaux d'habitation meublés ou destinés à être meublés ; ces déficits s'imputent exclusivement sur les bénéfices retirés de cette activité au cours des années suivantes jusqu'à la cinquième inclusivement et qu'aux termes du dernier alinéa de l'article 151 septiès du même code : Les loueurs professionnels s'entendent des personnes inscrites en cette qualité au registre du commerce et de sociétés qui réalisent plus de 150 000 F de recettes annuelles ou retirent de cette activité au moins 50 pour cent de leur revenu ;

Considérant que M. X est l'unique associé et le gérant de l'EURL X, propriétaire de 7 appartements situés dans des résidences de tourisme à Antibes et Juan-les-Pins (Alpes Maritimes) ; qu'il a entendu déduire de son revenu global le montant du déficit de cette activité qu'il a comptabilisé au titre de l'année 1989 ; que l'administration a réintégré ce déficit au motif que l'EURL ne pouvait être regardée comme loueur professionnel au sens des dispositions précitées de l'article 151 septies du code général des impôts dès lors qu'elle n'était pas inscrite en cette qualité au registre du commerce et des sociétés, que son activité ne procurait pas aux contribuables 50 pour cent de leur revenu ou que les recettes déclarées à ce titre n'atteignaient pas le seuil de 150 000 F ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les appartements meublés donnés en location par l'EURL X sont destinés à l'habitation ; qu'en outre, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie admet, au vu de pièces produites en appel, que la société satisfait à la condition relative à l'inscription au registre du commerce et des sociétés ; que M. et Mme X ne sauraient cependant soutenir que l'EURL X doit être considérée comme ayant atteint le seuil de recettes de 150 000 F qui caractérise un loueur professionnel en faisant valoir que, si celles-ci n'atteignaient pas ce montant c'est au motif que l'activité n'avait été développée que sur une partie de l'année 1989, dès lors que les dispositions du code général des impôts ne prévoient pas un ajustement des recettes pour correspondre à une année pleine ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué en date du 13 octobre 2000, le Tribunal administratif de Nantes a fait droit à la demande des contribuables en tant qu'elle portait sur la réintégration du déficit né en 1989 de leur activité de loueur en meublé ;

Sur la requête de M. et Mme X :

En ce qui concerne l'étendue du litige :

Considérant que, par une décision en date du 30 avril 2002, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux de la Mayenne a prononcé le dégrèvement, en droits et pénalités, à concurrence de la somme de 2 831,58 euros, de l'impôt sur le revenu auquel les requérants ont été assujettis au titre de l'année 1992 ; que les conclusions de la requête de M. et Mme X relatives à cette imposition sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;

En ce qui concerne le surplus des conclusions de la requête :

Considérant que, comme il vient d'être dit, le déficit comptabilisé par l'EURL X au titre des exercices 1993 et 1994 ne peut être déduit du revenu global de M. et Mme X en application du 1 de l'article 156 du code général des impôts que si la société peut être regardée comme loueur professionnel au sens des dispositions du dernier alinéa de l'article 151 septiès du code général des impôts ; que si M. et Mme X ont déclaré au titre de ces deux années un déficit inférieur à 150 000 F, ce qui ferait obstacle à ce que la qualité de loueur professionnel soit reconnue à l'EURL, ils font cependant valoir que cette somme déclarée est inférieure aux recettes brutes réalisées par la société ;

Considérant que, pour apporter la preuve dont ils ont la charge de ce que l'EURL X a réalisé un chiffre d'affaires supérieur à 150 000 F, M. et Mme X soutiennent en premier lieu que ce seuil a été atteint en 1991 alors que les conditions d'exploitation étaient identiques ; que cette circonstance, à la supposer établie, ne suffit pas toutefois pour démontrer que les recettes auraient atteint après cette année-là, le seuil en question ; que s'il est vrai que les recettes doivent être retenues pour leur valeur brute, comprenant les commissions venant, le cas échéant, en déduction et doivent correspondre aux créances acquises dont le montant est calculé toutes taxes comprises, les contribuables n'établissent pas, par les documents qu'ils produisent, qu'ils n'auraient pas calculé ainsi les recettes qu'ils ont déclarées ; que, par ailleurs, la circonstance que les recettes de l'année 1994 seraient anormalement minorées à raison de ce qu'elles ne couvrent pas une année entière est, comme pour ce qui concerne l'année 1989, sans influence sur la qualification de l'activité de l'EURL X ; que, par suite, M. et Mme X n'établissent pas que l'activité de loueur en meublé de l'EURL X aurait été exercée, en 1993 et 1994, à titre professionnel ; que l'administration était par suite fondée à refuser l'imputation du déficit correspondant à cette activité sur le revenu global des contribuables de ces deux années ;

Considérant, par ailleurs que les contribuables ne peuvent utilement invoquer, sur le fondement de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales, les instructions 4 F-1-83 du 11 février 1983 et 4 F-1113 du 1er décembre 1993, dès lors que ces instructions ne font pas de la loi une interprétation différente de celle dont il a été fait application ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, s'agissant des impositions restant en litige, M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir c'est à tort que, par le jugement attaqué en date du 3 août 2000, le Tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande ;

Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de condamner l'Etat à payer à M. et Mme X la somme que ceux-ci demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er :

A concurrence de la somme de 2 831,58 euros (deux mille huit cent trente et un euros cinquante huit centimes), en ce qui concerne l'impôt sur le revenu auquel M. et Mme X ont été assujettis au titre de l'année 1992, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. et Mme X.

Article 2 :

M. et Mme X sont rétablis au rôle de l'impôt sur le revenu auquel ils ont été assujettis au titre de l'année 1989 à concurrence des sommes de 8 947,39 euros (huit mille neuf cent quarante sept euros trente neuf centimes) en droits et 1 006,62 euros (mille six euros soixante deux centimes) en intérêts de retard.

Article 3 :

Le jugement du Tribunal administratif de Nantes en date du 13 octobre 2000 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 :

La requête de M. et Mme X est rejetée.

Article 5 :

Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Hedi X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ere chambre
Numéro d'arrêt : 00NT01693
Date de la décision : 28/06/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. LEMAI
Rapporteur ?: Mme Françoise MAGNIER
Rapporteur public ?: M. LALAUZE
Avocat(s) : PRIGENT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2004-06-28;00nt01693 ?
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