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27/05/2004 | FRANCE | N°01NT01673

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3eme chambre, 27 mai 2004, 01NT01673


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la Cour, respectivement, les 13 août et 24 septembre 2001, présentés pour Mme Séverine X, demeurant ...n, par Me LAUNAY, avocat au barreau de Caen ;

Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 01-01 du 27 juin 2001 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 septembre 2000 par lequel le garde des sceaux, ministre de la justice a fixé à la somme de 1 700 000 F l'indemnité que Mme Evelyne Y devra verser à Mme X

la suite de la suppression de l'office du greffier du Tribunal de commerce de...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la Cour, respectivement, les 13 août et 24 septembre 2001, présentés pour Mme Séverine X, demeurant ...n, par Me LAUNAY, avocat au barreau de Caen ;

Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 01-01 du 27 juin 2001 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 septembre 2000 par lequel le garde des sceaux, ministre de la justice a fixé à la somme de 1 700 000 F l'indemnité que Mme Evelyne Y devra verser à Mme X à la suite de la suppression de l'office du greffier du Tribunal de commerce de Flers ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

C+ CNIJ n° 37-04-04-02

Vu le décret n° 69-389 du 18 avril 1969, modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 avril 2004 :

- le rapport de M. GUALENI, premier conseiller,

- et les conclusions de M. MILLET, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X a reçu, le 7 juin 2001, communication du mémoire produit ce même jour par le garde des sceaux, ministre de la justice qui contenait des développements nouveaux en tant qu'il répondait à des moyens soulevés par celle-ci dans un précédent mémoire ; que le Tribunal ayant néanmoins examiné, au cours de l'audience qu'il a tenue le mardi 12 juin 2001, la demande de Mme X, alors qu'en application des dispositions de l'article R.613-2 du code de justice administrative l'instruction était close trois jours francs avant la date de l'audience, soit le samedi 9 juin, l'intéressée n'a pas disposé d'un délai suffisant pour répondre à ce mémoire, sur lequel le Tribunal s'est fondé pour rejeter sa demande ; que, dans ces conditions, la requérante est fondée à soutenir que le caractère contradictoire de la procédure n'a pas été respecté ; que, par suite, le jugement attaqué doit être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions présentées par Mme X devant le Tribunal administratif de Caen ;

Sur la légalité externe de la décision :

Considérant qu'aux termes de l'article 12 du décret du 18 avril 1969, dans sa rédaction issue du décret n° 99-1018 du 7 décembre 1999 : Les indemnités qui peuvent être dues, par suite de modifications de ressorts prévues à l'article 1er, entre les greffiers des tribunaux de commerce, et les anciens greffiers de tribunaux de commerce non remplacés ou leurs ayants droit sont évaluées et réparties après la deuxième année civile suivant celle au cours de laquelle sont intervenues ces modifications. Le montant et la répartition de ces indemnités sont fixés par le garde des sceaux, ministre de la justice, soit après accord des parties qui en avisent le procureur général près la cour d'appel, soit sur proposition d'une commission dont la composition est fixée à l'article 12-1. A défaut d'accord amiable, la partie la plus diligente ou le procureur général près la cour d'appel saisit la commission par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. La commission doit se prononcer dans le délai de trois mois à compter du dépôt de la demande accompagnée de l'ensemble des pièces nécessaires à l'instruction du dossier. Le président de la commission transmet la proposition de celle-ci, qui est motivée, au ministre de la justice, dans le délai de quinze jours à compter de son adoption. Il la notifie également, dans le même délai, à chacun des créanciers et débiteurs d'indemnité, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Ceux-ci peuvent, dans le délai de quinze jours à compter de la notification et dans la même forme, faire connaître au ministre de la justice que la proposition ne reçoit pas leur agrément. Lorsque le ministre de la justice refuse d'approuver l'accord des parties intervenu dans les conditions définies au deuxième alinéa ci-dessus, il saisit la commission et fixe le montant et la répartition des indemnités sur la proposition de celle-ci ; la commission procède comme il est dit au troisième alinéa. ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 12 que la décision du ministre se substitue à la décision de la commission chargée d'évaluer l'indemnité qui peut être due en cas de modification du ressort d'un greffe de tribunal de commerce, lorsque celle-ci est saisie à défaut d'accord amiable entre les parties ; qu'il suit de là que Mme X ne peut exciper utilement, à l'encontre de la décision du ministre, des vices de forme ou de procédure dont serait éventuellement entachée la décision de la commission ;

Considérant, en deuxième lieu, que la décision par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice fixe le montant et la répartition de l'indemnité due au greffier d'un tribunal de commerce supprimé n'est pas au nombre des décisions qui doivent être obligatoirement motivées en application de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ; qu'une telle obligation ne résulte pas davantage du décret susvisé du 18 avril 1969 ; qu'il suit de là que le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision attaquée ne peut qu'être écarté ;

Considérant, enfin, que la seule circonstance que le signataire de la décision attaquée soit également celui de la circulaire du 21 décembre 1999 relative à la mise en oeuvre de modifications du ressort des tribunaux de commerce, qui contenait une formule de calcul de l'indemnité due au greffier titulaire d'un greffe supprimé, n'est pas de nature à établir que l'auteur de la décision attaquée aurait fait preuve de partialité dans la fixation de l'indemnité due à Mme X ;

Sur la légalité interne de la décision :

Considérant qu'aux termes de l'article 12-2-I du décret susvisé du 18 avril 1969, modifié : Pour déterminer le montant de l'indemnité, la commission apprécie la valeur de l'office en tenant compte de la recette nette moyenne au cours des cinq derniers exercices connus précédant le dépôt de la demande d'indemnisation et du solde moyen d'exploitation de l'office au cours de la même période. La recette nette est égale à la recette encaissée par l'office, telle que retenue pour le calcul de l'imposition des bénéfices, diminuée des débours payés pour le compte des clients et des honoraires rétrocédés. Le solde d'exploitation est égal à la recette nette augmentée des frais financiers et des pertes diverses et diminuée du montant des produits financiers, des gains divers et de l'ensemble des dépenses nécessitées pour l'exercice de la profession, telles que retenues pour le calcul de l'imposition des bénéfices en application des articles 93 et 93 A du code général des impôts. Les données utilisées sont celles qui figurent sur la déclaration fiscale annuelle et dans la comptabilité de l'office. La commission tient également compte, dans son appréciation, des éléments propres à la situation de l'office et de son titulaire. ;

Considérant, en premier lieu, que, comme il est indiqué ci-dessus la décision du ministre se substituant à celle de la commission, la requérante ne peut utilement soutenir que la commission aurait méconnu les dispositions précitées de l'article 12-2-I, ni que celle-ci s'est estimée liée par la méthode de calcul préconisée par la circulaire du 21 décembre 1999 susmentionnée, ni davantage que la commission n'a pas tenu compte, pour la détermination du solde d'exploitation des charges sociales personnelles du greffier, des frais de véhicules et des frais d'enregistrement exposés pour l'acquisition du greffe ;

Considérant, en deuxième lieu, que, contrairement à ce que soutient la requérante, il résulte des dispositions précitées du I de l'article 12-2 que les données dont le ministre peut tenir compte au titre des éléments propres à la situation de l'office et de son titulaire auxquels fait référence cet article peuvent, notamment, concerner tant les conditions de fonctionnement que l'évolution de l'activité de l'office ; qu'ainsi, le ministre a pu, sans méconnaître ces dispositions, corriger l'évaluation de la valeur de l'office résultant du calcul de la recette nette moyenne et du solde moyen d'exploitation sur la période 1994 à 1998 pour tenir compte, d'une part, d'informations, relevées à l'occasion de l'inspection de ce greffe en 1996, mettant en évidence une augmentation anormale des recettes liée au non respect du tarif des ordonnances du juge-commissaire, d'autre part, de la baisse d'activité de ce greffe, en se référant à la faiblesse du nombre des immatriculations au registre du commerce rapporté au nombre des radiations ;

Considérant, en troisième lieu, que, contrairement à ce que soutient Mme X, il ne ressort pas de la décision attaquée, ni des pièces du dossier, que le ministre se soit cru lié par les termes de la circulaire susmentionnée du 21 décembre 1999 pour fixer l'indemnité qui lui était due ;

Considérant, en quatrième lieu, que, dès lors que le titulaire d'un office de greffier de tribunal de commerce cédant le droit de présentation de celui-ci à la suite de sa suppression n'est pas dans la même situation que celle d'un greffier qui cède librement ce droit de présentation, les dispositions précitées du décret ont pu, sans revêtir un caractère discriminatoire, limiter les cas d'intervention de la commission prévue à l'article 12 dudit décret aux cessions intervenant dans le cadre de modifications du ressort d'un tribunal ; qu'eu égard au rôle imparti à la commission dans l'évaluation de l'office et aux pouvoirs d'appréciation accordés au ministre de la justice, ces mêmes dispositions ont pu également prévoir, sans être entachées d'erreur manifeste d'appréciation, ni revêtir un caractère discriminatoire, qu'en cas d'accord entre les parties sur la valeur d'office, le ministre dispose de la liberté de saisir la commission, alors que l'intervention de celle-ci est obligatoire en cas de désaccord entre les parties ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 12-2-II du décret susvisé du 18 avril 1969, modifié : - Lorsque les activités d'un greffe supprimé sont reprises par plusieurs greffes, la charge de l'indemnité, dont le montant est déterminé dans les conditions prévues au I, est répartie entre ceux-ci en fonction de l'avantage résultant pour chacun d'eux de cette suppression, en prenant en compte notamment le nombre moyen d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés et de modifications apportées à ce registre au cours des cinq années précédant la demande d'indemnisation. ; que le ministre a pu, sans méconnaître ces dispositions, décider qu'en raison du caractère marginal de l'activité liée aux procédures collectives du régime général dans l'activité du greffe de Flers, reprise par le greffe d'Alençon, il n'y avait pas lieu de répartir la charge de l'indemnité due à Mme X entre les greffiers de ce Tribunal et celui du Tribunal de Condé-sur-Noireau ;

Considérant, enfin, qu'il ressort des pièces du dossier qu'en fixant à 1 700 000 F l'indemnité due à Mme X le ministre n'a pas commis d'erreur de fait, ni d'erreur manifeste d'appréciation, alors même que l'intéressée aurait acheté l'office du greffe du Tribunal de commerce de Flers en 1995 pour un montant de 2 000 000 F ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de rejeter la demande de Mme X ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Caen du 17 juin 2001 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme Séverine X devant le Tribunal administratif de Caen et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Séverine X, à Mme Evelyne Y et au garde des sceaux, ministre de la justice.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3eme chambre
Numéro d'arrêt : 01NT01673
Date de la décision : 27/05/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. SALUDEN
Rapporteur ?: M. Christian GUALENI
Rapporteur public ?: M. MILLET
Avocat(s) : LAUNAY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2004-05-27;01nt01673 ?
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