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30/12/2003 | FRANCE | N°01NT00146

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ere chambre a, 30 décembre 2003, 01NT00146


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 26 janvier 2001, présentée pour Mme Annick X, demeurant ..., par Me DUPOUX, avocat au barreau de Paris ;

Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 96-1293 en date du 5 octobre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle-même et son époux ont été assujettis au titre des années 1987, 1988 et 1989 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y

afférentes ;

............................................................................

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 26 janvier 2001, présentée pour Mme Annick X, demeurant ..., par Me DUPOUX, avocat au barreau de Paris ;

Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 96-1293 en date du 5 octobre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle-même et son époux ont été assujettis au titre des années 1987, 1988 et 1989 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;

............................................................................................................

C CNIJ n° 19-01-03-01-03

n 19-01-04

n 19-01-03-01-02-01

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 décembre 2003 :

- le rapport de M. HERVOUET, premier conseiller,

- et les conclusions de M. LALAUZE, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. X, qui exerçait la profession d'huissier de justice à Douarnenez (Finistère) et effectuait accessoirement des ventes aux enchères publiques, a fait l'objet de deux vérifications de comptabilité qui ont porté, pour la première, sur les années 1987 et 1988, et, pour la seconde, sur l'année 1989 ; que M. et Mme X ont fait l'objet d'un examen de leur situation fiscale personnelle des années 1987, 1988 et 1989 ; qu'à l'issue de ces contrôles, des suppléments d'impôt sur le revenu leur ont été notifiés ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie :

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

En ce qui concerne l'examen de la situation fiscale personnelle :

Considérant que Mme X soutient que l'examen de la situation fiscale personnelle a été entrepris en méconnaissance des prescriptions de l'article L.47 du livre des procédures fiscales, aux termes duquel : un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu (...) ne peut être engagé sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. (...) L'examen au fond des documents comptables ne peut commencer qu'à l'issue d'un délai raisonnable permettant au contribuable de se faire assister par un conseil. (...) ;

Considérant que, par un avis qui lui a été adressé le 5 février 1990, M. et Mme X ont été informés que l'administration allait entreprendre un examen de leur situation fiscale personnelle pour les années 1987 à 1989 ; que les notifications de redressements qui ont été ensuite envoyées aux intéressés le 10 décembre 1990 précisent qu'elles font suite, notamment, à l'examen de la situation fiscale personnelle qui a eu lieu du 6 février au 25 avril 1990 ; qu'il résulte toutefois de l'instruction, ainsi que le soutient le ministre, que cette vérification n'a pas débuté le 6 février 1990, mais le 25 avril 1990, date à laquelle le vérificateur a été en possession d'une partie des relevés bancaires demandés au contribuable ; que, dans ces conditions, Mme X n'est pas fondée à soutenir qu'à défaut d'un délai suffisant entre la notification de l'avis de vérification et le début des opérations de contrôle, elle n'aurait pas été mise à même de se faire assister d'un conseil de son choix ;

En ce qui concerne les vérifications de comptabilité :

Considérant que s'il incombe à l'administration d'informer le contribuable, dont elle envisage de rectifier les bases d'imposition dans le cadre d'une procédure de redressement contradictoire, de la teneur des renseignements qu'elle a pu recueillir dans l'exercice de son droit de communication ou à toute autre occasion afin que l'intéressé soit mis à même de demander, avant la mise en recouvrement des impositions, que ces documents soient mis à sa disposition, elle n'est tenue à cette obligation qu'en ce qui concerne ceux de ces renseignements qu'elle a effectivement utilisés pour procéder aux redressements ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, selon les termes des notifications de redressements et réponses aux observations du contribuable, la prise de position du vérificateur concernant l'existence d'une activité de ventes réalisées pour le compte de M. X par le recours à des prête-noms trouve sa motivation dans l'analyse des factures mentionnant des vendeurs non présents sur les procès-verbaux des enchères publiques, dans les énonciations d'un accusé de réception à l'en-tête de l'étude mentionnant Tableaux remis à M. Y, pour être vendus aux prix fixés par les propriétaires et d'une lettre à MM. Y et Z mentionnant que ces personnes n'acceptaient d'alimenter les ventes en tableaux qu'à la condition que M. X leur octroie un prêt de 150 000 F ; que, par suite, la circonstance que l'administration n'aurait pas informé M. X que M. Y aurait déclaré avoir agi pour son compte en qualité de son prête-nom n'est pas de nature à entacher d'irrégularité la procédure d'imposition dès lors que cette déclaration présente un caractère surabondant par rapport aux éléments susmentionnés retenus par le vérificateur et ne peut être regardée comme ayant été effectivement utilisée pour procéder aux redressements ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

Considérant, en premier lieu, que le vérificateur a constaté, au titre de l'ensemble de la période vérifiée, des globalisations d'écritures et des omissions de comptabilisation d'espèces, de chèques ou d'encaissements ; que le livre journal n'a pas été tenu au jour le jour ; que de nombreuses pièces justificatives des recettes et des dépenses n'ont pas été présentées ; que, dans ces conditions, il était fondé à considérer la comptabilité comme dépourvue de caractère probant et à procéder à une reconstitution du chiffre d'affaires ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'en vertu de l'article L.192 du livre des procédures fiscales, l'administration supporte en principe la charge de la preuve du bien-fondé de l'imposition quel que soit l'avis rendu par la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires sauf si, ayant suivi cet avis, elle établit que la comptabilité comporte de graves irrégularités ; que l'administration s'étant conformée à l'avis de la commission et la comptabilité comportant de graves irrégularités, la requérante supporte la charge de la preuve de l'exagération des impositions mises à sa charge ;

Considérant, en troisième lieu, que, pour procéder à la reconstitution des honoraires facturés aux vendeurs, le vérificateur a déterminé le montant des ventes, par addition des encaissements ventes portés sur le livre comptable du contribuable et des omissions de comptabilisation reconnues par lui, déduction faite des honoraires facturés aux acheteurs, et compte tenu de la double circonstance que certains encaissements correspondaient à des ventes antérieures à la période contrôlée et que des honoraires étaient restés impayés ; que les recettes ainsi déterminées ont été multipliées par un coefficient d'honoraires déterminé, pour chaque année en litige, sur la base d'échantillons significatifs, par division des honoraires hors taxe facturés par le prix de vente ; que, ce faisant et contrairement à ce que soutient la requérante, le vérificateur n'a pas méconnu les principes de la comptabilité de caisse ; que, par ailleurs, Mme X ne peut se prévaloir de coefficients extraits de la comptabilité, celle-ci étant non probante et assortie d'une partie seulement des factures émises ;

Considérant, en quatrième lieu, que le vérificateur a mis en évidence l'existence de recettes non déclarées sur des comptes qualifiés par le contribuable de comptes Etude bis, et réintégré la totalité de celles-ci dans les recettes imposables ; que si Mme X soutient qu'une partie de ces sommes provient de la caisse professionnelle, elle-même exclusivement alimentée par les ventes aux enchères publiques, et que le reste est constitué de remboursements de prêts et acomptes octroyés à des tiers et d'avances sur ventes futures, elle n'apporte pas, en l'absence d'enregistrement comptable et eu égard à l'absence de fiabilité des listes d'emplois espèces produites pour les trois années litigieuses, la preuve de ses allégations ; qu'ainsi, les méthodes de reconstitutions retenues par le vérificateur ne peuvent être regardées, contrairement à ce que soutient la contribuable, comme radicalement viciées ou excessivement sommaires ;

Sur la substitution de base légale :

Considérant que le ministre, qui est en droit, à tout moment de la procédure contentieuse, pour justifier le bien-fondé d'une imposition, de substituer une base légale à celle qui a été primitivement invoquée dès lors que cette substitution peut être faite sans priver le contribuable des garanties qui lui sont reconnues en matière de procédure d'imposition, fait valoir devant la Cour que les redressements relevant de l'activité d'achat revente exercée par M. X doivent être rattachés à la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, et non à celle des bénéfices non commerciaux ; que cette substitution peut être opérée, en l'espèce, dès lors que l'administration a respecté les règles de la procédure de redressement contradictoire prévue aux articles L.55 et suivants du livre des procédures fiscales, les rehaussements dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux n'étant subordonnés au respect d'aucune autre procédure ;

Sur les pénalités :

En ce qui concerne les intérêts de retard :

Considérant qu'aux termes de l'article 1727 du code général des impôts : Le défaut ou l'insuffisance dans le paiement ou le versement tardif de l'un des impôts (...) établis ou recouvrés par la direction générale des impôts donnent lieu au versement d'un intérêt de retard qui est dû indépendamment de toutes sanctions. (...) Le taux de l'intérêt de retard est fixé à 0,75 p. 100 par mois. (...) ;

Considérant, en premier lieu, que la mise à la charge d'un contribuable d'intérêts de retard, qui ne constituent pas une sanction au sens de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979, n'est pas au nombre des décisions qui doivent, en vertu dudit article, être motivées ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales que le droit qu'elles reconnaissent au contribuable, de se prévaloir, à l'encontre de l'administration, de l'interprétation donnée par celle-ci d'un texte fiscal, a pour seul objet de lui permettre de contester le bien-fondé d'une imposition à l'établissement de laquelle l'administration a procédé en faisant usage de ses pouvoirs de contrôle et de reprise, et ne peut, en revanche, fonder une contestation du bien-fondé propre des intérêts de retard ou majorations dont a été assortie cette imposition ; que, par suite, Mme X ne peut, en tout état de cause, utilement invoquer, sur le fondement des dispositions de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales, l'interprétation que, selon lui, comporterait, quant à l'application des intérêts de retard, l'instruction 13 N-3-88 du 6 mai 1988 ;

Considérant, enfin, que la requérante ne peut, en tout état de cause, utilement soutenir devant le juge de l'impôt, qui n'est pas le juge de la constitutionnalité des lois, que les dispositions de l'article 1727 du code général des impôts seraient contraires au principe de l'égalité devant les charges publiques en tant qu'elles prévoient un taux d'intérêt supérieur au taux légal auquel sont calculés les intérêts versés par l'Etat en cas de dégrèvement ;

En ce qui concerne les pénalités pour mauvaise foi :

Considérant que l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment le caractère important et systématique des minorations des recettes qui ressortent des propres relevés bancaires du contribuable durant l'ensemble de la période vérifiée, caractérisent l'intention d'éluder l'impôt et ne permettent pas d'admettre la bonne foi de celui-ci ; que c'est, par suite, à bon droit que les droits rappelés ont été assortis d'une majoration de 40 % en application de l'article 1729 du code général des impôts ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande ;

DÉCIDE :

Article 1er :

La requête de Mme X est rejetée.

Article 2 :

Le présent arrêt sera notifié à Mme Annick X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ere chambre a
Numéro d'arrêt : 01NT00146
Date de la décision : 30/12/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. LEMAI
Rapporteur ?: M. Christophe HERVOUET
Rapporteur public ?: M. LALAUZE
Avocat(s) : DUPOUX

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2003-12-30;01nt00146 ?
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