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30/12/2003 | FRANCE | N°00NT00725

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2eme chambre, 30 décembre 2003, 00NT00725


Vu 1°, sous le n° 00NT00725, la requête enregistrée au greffe de la Cour le 18 avril 2000, présentée par M. Cyril X et Mme Sylviane Y demeurant ..., par Me Le MAPPIAN, avocat au barreau de Nantes ;

M. X et Mme Y demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 99-1250 et 99-2288 du 3 février 2000 par lequel le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision du 13 avril 1999 du maire de Lamotte-Beuvron de préempter un immeuble situé 104, avenue de Vierzon et à la condamnation de la commune à leur verser la somme d

e 100 000 F à titre de dommages-intérêts en réparation des préjudices subis ;...

Vu 1°, sous le n° 00NT00725, la requête enregistrée au greffe de la Cour le 18 avril 2000, présentée par M. Cyril X et Mme Sylviane Y demeurant ..., par Me Le MAPPIAN, avocat au barreau de Nantes ;

M. X et Mme Y demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 99-1250 et 99-2288 du 3 février 2000 par lequel le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision du 13 avril 1999 du maire de Lamotte-Beuvron de préempter un immeuble situé 104, avenue de Vierzon et à la condamnation de la commune à leur verser la somme de 100 000 F à titre de dommages-intérêts en réparation des préjudices subis ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) de condamner la commune de Lamotte-Beuvron à leur verser la somme de 100 000 F à titre de dommages-intérêts ;

C+ CNIJ n° 68-02-01-01-01

4°) d'enjoindre à la commune de Lamotte-Beuvron de saisir le juge judiciaire, dans un délai de deux mois, pour faire constater la nullité des contrats de vente intervenus entre la commune et la société civile immobilière de La Guide d'une part, et entre la commune et la société Porcelaine de Limoges d'autre part ;

5°) de condamner la commune de Lamotte-Beuvron à leur verser la somme de 10 000 F au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.............................................................................................................

Vu 2° sous le n° 02NT01050, la requête enregistrée au greffe de la Cour le 2 juillet 2002, présentée pour M. Cyril X et Mme Sylviane Y demeurant ..., par Me Le MAPPIAN, avocat au barreau de Nantes ;

M. X et Mme Y demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 99-3099 du 6 mai 2002 par lequel le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la délibération du 7 octobre 1999 du conseil municipal de Lamotte-Beuvron portant création d'un budget annexe opération immobilière industrielle Porcelaine de Sologne et décidant la souscription d'un emprunt de 635 000 F, l'acquisition d'un terrain cadastré AM 120 et AM 168 au prix de 620 000 F et d'autoriser le maire à signer un bail avec la société Porcelaine de Sologne ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite délibération ;

3°) de condamner la commune de Lamotte-Beuvron à leur verser la somme de 1 524,49 euros à titre de dommages-intérêts ;

4°) d'enjoindre à la commune de saisir, dans un délai de deux mois, le juge judiciaire pour faire constater la nullité des contrats de vente entre la commune de Lamotte-Beuvron et la SCI de La Guide, d'une part, et entre ladite commune et la société Porcelaine de Sologne, d'autre part ;

5°) de condamner la commune de Lamotte-Beuvron à leur verser une somme de 2 286,74 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.............................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 décembre 2003 :

- le rapport de Mme BUFFET, premier conseiller,

- les observations de Me LEMEUNIER des GRAVIERS, substituant Me Le MAPPIAN, avocat de M. Cyril X et Mme Sylviane Y,

- et les conclusions de M. COËNT, commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes de M. X et Mme Y, enregistrées sous les n°s 00NT00725 et 02NT01050, présentent à juger les mêmes questions et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la décision du 13 avril 1999 du maire de Lamotte-Beuvron :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme : Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-I, à l'exception de ceux visant à sauvegarder ou à mettre en valeur les espaces naturels, ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement. Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que les communes ne peuvent décider d'exercer leur droit de préemption urbain que si elles justifient, à la date à laquelle elles exercent ce droit, d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement suffisamment précis et certain ;

Considérant que, par la décision contestée du 13 avril 1999, prise sur le fondement d'une délégation du conseil municipal, le maire de Lamotte-Beuvron (Loir-et-Cher) a exercé le droit de préemption urbain de la commune sur un terrain cadastré AN 120 et AN 168, appartenant à la société civile immobilière de La Guide et dont M. X et Mme Y s'étaient portés acquéreurs ; qu'il résulte des termes même de cette décision que le maire n'a exercé ce droit qu'en vue de permettre l'extension des installations de la société Porcelaine de Sologne, importante entreprise de la commune ayant des projets de développement ; qu'ainsi, la commune de Lamotte-Beuvron n'envisageait la réalisation d'aucune opération d'aménagement sur ledit terrain, à l'égard duquel le droit de préemption communal n'a été exercé qu'à seule fin de le rétrocéder, en l'état, à la société anonyme Porcelaine de Sologne dans un délai de deux mois suivant son acquisition par cette collectivité publique ; que, par suite, la décision contestée du 13 avril 1999 est entachée d'erreur de droit ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme : Lorsqu'elle annule pour excès de pouvoir un acte intervenu en matière d'urbanisme ou en ordonne la suspension, la juridiction administrative se prononce sur l'ensemble des moyens de la requête qu'elle estime susceptibles de fonder l'annulation ou la suspension, en l'état du dossier ; qu'aucun des autres moyens invoqués à l'encontre de la décision précitée du 13 avril 1999 n'est susceptible d'en fonder l'annulation ;

En ce qui concerne la délibération du 7 octobre 1999 du conseil municipal de Lamotte-Beuvron :

Considérant que M. X et Mme Y, qui sont habitants de la commune de Lamotte-Beuvron, ont intérêt à agir contre la délibération susmentionnée ;

Considérant que par la délibération contestée du 7 octobre 1999, le conseil municipal de Lamotte-Beuvron a décidé la création d'un budget annexe intitulé opérations immobilières individuelles Porcelaine de Sologne, l'acquisition du terrain objet de la décision de préemption du 13 avril 1999 et a autorisé le maire à consentir à la société anonyme Porcelaine de Sologne, un bail portant sur ledit terrain avec promesse d'achat ; que la décision du 13 avril 1999 par laquelle le maire a exercé le droit de préemption communal étant, comme il est dit plus haut, entachée d'illégalité, il s'ensuit que la délibération du 7 octobre 1999 que le conseil municipal a prise aux fins susindiquées est dépourvue de base légale et, par voie de conséquence, encourt l'annulation ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X et Mme Y sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués du 3 février 2000 et du 6 mai 2002, le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté, respectivement, leur demande tendant à l'annulation de la décision du 13 avril 1999 par laquelle le maire de Lamotte-Beuvron a exercé le droit de préemption communal sur le terrain cadastré AN 120 et AN 168 et leur demande dirigée contre la délibération du 7 octobre 1999 du conseil municipal ;

Sur les conclusions à fin d'indemnité :

Considérant que devant le Tribunal administratif d'Orléans, M. X et Mme Y avaient demandé la condamnation de la commune de Lamotte-Beuvron à leur verser une somme de 100 000 F (15 244,90 euros) en réparation des conséquences dommageables de l'illégalité fautive entachant la décision de préemption du 13 avril 1999 ; que dans le jugement du 3 février 2000 attaqué, le tribunal administratif n'a pas répondu à ces conclusions ; qu'il y a lieu, dès lors, d'annuler ledit jugement en tant qu'il a omis de statuer sur ces conclusions ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande d'indemnité présentée par M. X et Mme Y devant le Tribunal administratif d'Orléans ;

Considérant que l'illégalité de la décision du 13 avril 1999 par laquelle le maire de Lamotte-Beuvron a décidé d'exercer le droit de préemption de la commune est constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de cette collectivité publique à l'égard de M. X et Mme Y ; que ceux-ci peuvent prétendre à la réparation du préjudice direct et certain qui en est résulté pour eux ;

Considérant, toutefois, qu'en se bornant à soutenir qu'ils ont dû souscrire deux emprunts pour financer l'acquisition du terrain en cause, immobiliser à titre de dépôt de garantie, une somme de 63 850 F (9 733,87 euros) lors de la signature de la promesse de vente et qu'ils continuent de verser un loyer mensuel d'un montant de 5 166,77 F (787,67 euros), les requérants ne justifient nullement du préjudice pour lequel ils demandent l'allocation d'une somme globale de 100 000 F (15 244,90 euros) à titre de dommages et intérêts ; que leurs conclusions présentées à cette fin ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie des conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ;

Considérant, d'une part, qu'il n'appartient pas au juge administratif, lorsqu'il est saisi de conclusions tendant à ce qu'il prescrive les mesures qu'impliquent nécessairement l'annulation de la décision de préemption, d'ordonner à l'auteur de la décision annulée, de saisir le juge judiciaire pour faire constater la nullité de la vente conclue à son profit ;

Considérant, d'autre part, que lorsque le bien préempté a été revendu, ni les dispositions précitées de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, ni aucune autre disposition ne permettent à la juridiction administrative saisie en vue de faire exécuter l'annulation de la seule décision de préemption, de prescrire des mesures qui, tendant à la remise en cause de la revente du bien, se rattachent ainsi à un litige distinct portant sur la légalité de cette décision de revente et ne sauraient, dès lors, être regardées comme étant au nombre de celles qu'implique l'annulation de la décision de préemption ; que les conclusions présentées par les requérants tendant à ce que la Cour ordonne à la commune de Lamotte-Beuvron de saisir le juge judiciaire pour faire constater la nullité des ventes ultérieures, d'une part, entre la SCI de La Guide et la commune, d'autre part, entre cette dernière et la société Porcelaine de Sologne, ne peuvent donc être accueillies ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant, d'une part, que ces dispositions font obstacle à ce que M. X et Mme Y, qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance, soient condamnés à verser à la commune de Lamotte-Beuvron la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Considérant, d'autre part, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces mêmes dispositions, de condamner la commune de Lamotte-Beuvron à verser à M. X et Mme Y une somme de 1 000 euros au titre des frais de même nature exposés par ces derniers ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les jugements du 3 février 2000 et du 6 mai 2002 du Tribunal administratif d'Orléans, l'arrêté du 13 avril 1999 du maire de Lamotte-Beuvron (Loir-et-Cher) et la délibération du 7 octobre 1999 du conseil municipal de Lamotte-Beuvron, sont annulés.

Article 2 : La commune de Lamotte-Beuvron versera à M. X et Mme Y une somme de 1 000 euros (mille euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions indemnitaires présentées par M. X et Mme Y devant le Tribunal administratif d'Orléans et le surplus des conclusions de leur requête sont rejetés.

Article 4 : Les conclusions de la commune de Lamotte-Beuvron tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administratives sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Cyril X, à Mme Sylviane Y, à la commune de Lamotte-Beuvron et au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2eme chambre
Numéro d'arrêt : 00NT00725
Date de la décision : 30/12/2003
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. DUPUY
Rapporteur ?: Mme Catherine BUFFET
Rapporteur public ?: M. COENT
Avocat(s) : LE MAPPIAN ; LE MAPPIAN ; LE MAPPIAN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2003-12-30;00nt00725 ?
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