Vu la requête et les mémoires, enregistrés respectivement les 12 avril 2002, 21 mai 2002 et 12 mai 2003 au greffe de la Cour, présentés pour Mme Loredana X, demeurant ..., par Me LECLERC, avocat au barreau de Paris ;
Mme X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 99-2518 du 24 janvier 2002 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 29 mai 1998, confirmée sur recours gracieux le 24 décembre 1998, par laquelle le ministre de l'emploi et de la solidarité a rejeté sa demande de naturalisation ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir lesdites décisions ;
3°) d'enjoindre à l'administration de lui délivrer une carte nationale d'identité ;
...............................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;
C CNIJ n° 26-01-01-01-03
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 mai 2003 :
- le rapport de M. PÉANO, premier conseiller,
- et les conclusions de M. MORNET, commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que si Mme X soutient que la minute du jugement n'aurait pas été signée, elle n'apporte aucune précision à l'appui de cette allégation alors qu'il ressort de l'examen de l'expédition du jugement attaqué versée au dossier par la requérante elle-même qu'elle a été signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le secrétaire-greffier ;
Sur la légalité de la décision contestée :
En ce qui concerne la légalité externe :
Considérant que, par jugement du 16 mars 1998 devenu définitif, le Tribunal administratif de Nantes a annulé pour excès de pouvoir la décision du 21 mars 1994 rejetant une première demande de naturalisation présentée par Mme X au motif qu'elle était entachée d'un vice de procédure ; qu'à la suite de ce jugement, si le ministre n'était pas tenu de prononcer la naturalisation demandée, il lui appartenait de statuer à nouveau sur la demande de Mme X, dont il restait saisi, même hors de toute démarche de sa part, au vu des circonstances de fait et de droit existant à la date de sa nouvelle décision ; qu'ainsi en statuant le 29 mai 1998, avant d'avoir été saisi d'une nouvelle demande de naturalisation par Mme X, le ministre n'a entaché sa décision d'aucun vice de procédure ; que la circonstance que cette décision a été notifiée seulement le 28 octobre 1998 est sans influence sur sa légalité ;
Considérant que la décision du 29 mai 1998, confirmée sur recours gracieux le 24 décembre 1998, a été signée par Mme Y, administrateur civil, agissant par empêchement du directeur de la population et des migrations et du sous-directeur des naturalisations, pour le ministre et par délégation ; qu'il est constant que Mme Y avait reçu, par décret du 20 juin 1997 publié au Journal officiel de la République française du 22 juin 1997, délégation de signature du ministre pour signer tous actes, arrêtés, décisions ou conventions, à l'exclusion des décrets, en cas d'absence ou d'empêchement simultané de M. Z, directeur de la population et des migrations et de M. A, sous-directeur des naturalisations ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. Z et M. A n'auraient pas été simultanément absents ou empêchés à la date de signature de la décision contestée ; qu'ainsi, Mme X n'est pas fondée à soutenir que ladite décision a été signée par une autorité incompétente ;
Considérant qu'il ressort des termes mêmes de la décision du 29 mai 1998 que, pour refuser, sur le fondement de l'article 49 du décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993, d'accorder la naturalisation sollicitée, le ministre s'est fondé sur les motifs de fait que le mari de la requérante avait appartenu à une organisation terroriste et s'était rendu auteur de violence organisée contre un Etat étranger et que, de plus, elle avait aidé son mari à demeurer irrégulièrement sur le territoire national pendant au moins six ans ; que cette décision contient l'énoncé des motifs de fait et de droit sur lesquels elle est fondée ; que, dès lors, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision contestée doit être écarté ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le ministre n'ait pas examiné l'ensemble des éléments relatifs à la situation personnelle de Mme X avant de rejeter la demande que celle-ci avait présentée ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que la décision contestée aurait été prise au vu des seules condamnations pénales dont M. X a fait l'objet manque en fait ;
En ce qui concerne la légalité interne :
Considérant que dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation de l'intérêt d'accorder la naturalisation à l'étranger qui la sollicite, le ministre a pu retenir le motif tiré de ce que M. X avait appartenu à une organisation terroriste et s'était rendu auteur de violence organisée contre un Etat étranger sans commettre d'erreur de droit ; qu'eu égard à la durée de la communauté de vie effective entre les époux, le ministre n'a pas davantage commis d'erreur de droit ou d'erreur manifeste d'appréciation des circonstances de l'espèce en retenant des faits imputables à son mari pour refuser la naturalisation sollicitée par Mme X ; qu'en dépit de l'ancienneté des faits qui ont motivé la décision contestée, eu égard à leur nature et à leur gravité, le ministre n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en rejetant, pour ce motif, la demande de naturalisation de Mme X ;
Considérant que si Mme X conteste avoir aidé son mari à demeurer irrégulièrement sur le territoire national pendant au moins six ans, il résulte de l'instruction que le ministre aurait pris la même décision à son encontre s'il n'avait retenu que le premier motif tiré de ce que celui-ci avait appartenu à une organisation terroriste et s'était rendu auteur de violence organisée contre un Etat étranger ;
Considérant qu'eu égard au motif retenu par le ministre pour fonder la décision contestée, Mme X ne peut utilement invoquer la circonstance qu'elle est insérée dans la communauté française ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, à supposer même qu'elle aurait rempli les autres conditions prévues par les articles 21-16 et suivants du code civil, que Mme X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Considérant que le présent arrêt qui rejette la requête de Mme X n'implique aucune mesure d'exécution à prendre sur le fondement de l'article L.911-1 du code de justice administrative ; qu'ainsi les conclusions tendant à ce que, sur le fondement de cet article, il soit enjoint à l'administration de délivrer une carte nationale d'identité à Mme X sont irrecevables et ne peuvent être que rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme X est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme X et au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
1
- 4 -