Vu, 1°) sous le n° 02NT00912, la requête enregistrée au greffe de la Cour le 6 juin 2002, présentée pour la commune de Locmariaquer (Morbihan), représentée par son maire en exercice, par Me BOIS, avocat au barreau de Rennes ;
La commune de Locmariaquer demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n°s 96-2992 et 96-2326 du 4 avril 2002 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a annulé, à la demande de M. et Mme , d'une part, l'arrêté du 3 octobre 1996 par lequel le préfet du Morbihan a déclaré d'utilité publique le projet d'aménagement d'un chemin rural au lieudit Kerpenhir, d'autre part, l'arrêté du 18 juin 1999 par lequel ledit préfet a déclaré cessible, une partie des parcelles B 186 et 187, situées au lieudit Liorh er Plantec appartenant aux susnommés ;
2°) de rejeter les demandes présentées par M. et Mme devant le Tribunal administratif de Rennes ;
3°) de condamner M. et Mme à lui verser la somme de 1 525 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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C CNIJ n° 34-02-02-02
Vu, 2°) sous le n° 02NT00922, le recours enregistré au greffe de la Cour le 7 juin 2002, présenté par le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales ;
Le ministre demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n°s 96-2992 et 99-2326 du 4 avril 2002 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a annulé, à la demande de M. et Mme , d'une part, l'arrêté du 3 octobre 1996 par lequel le préfet du Morbihan a déclaré d'utilité publique le projet d'aménagement d'un chemin rural, au lieudit Kerpenhir sur le territoire de la commune de Locmariaquer, d'autre part, l'arrêté du 18 juin 1999 par lequel ledit préfet a déclaré cessible, au profit de cette même commune, une partie des parcelles BP 186 et 187, situées au lieudit Liorh er Plantec, appartenant aux susnommés ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. et Mme devant le Tribunal administratif de Rennes ;
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Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 avril 2003 :
- le rapport de M. DUPUY, président,
- les observations de Me Le DIRAC'H, substituant Me BOIS, avocat de la commune de Locmariaquer,
- les observations de Me GOURDIN, substituant Me MARTIN, avocat de M. et Mme ,
- et les conclusions de M. LALAUZE, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la requête n° 02NT00912 de la commune de Locmariaquer (Morbihan) et le recours n° 02NT00922 du ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sont dirigés contre un même jugement du 4 avril 2002 du Tribunal administratif de Rennes ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier produit devant la Cour que l'arrêté du 1er février 1996 du préfet du Morbihan portant délégation de signature à M. Gabriel X..., secrétaire général de la préfecture, a fait l'objet d'une publication par voie d'insertion au recueil des actes administratifs de la préfecture du 31 mars 1996 ; que, dès lors, c'est à tort que pour annuler, par le jugement attaqué, l'arrêté préfectoral du 3 octobre 1996 déclarant d'utilité publique le projet d'aménagement d'un chemin rural au lieudit Kerpenhir sur le territoire de la commune de Locmariaquer et l'arrêté préfectoral du 18 juin 1999 déclarant cessibles les terrains nécessaires à la réalisation de ce projet, le Tribunal administratif de Rennes s'est fondé sur ce que les arrêtés contestés avaient été pris par une autorité incompétente, faute pour l'arrêté de délégation précité d'avoir été l'objet, préalablement, d'une mesure de publicité collective ;
Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M. et Mme devant le Tribunal administratif de Rennes ;
En ce qui concerne l'arrêté déclaratif d'utilité publique du 3 octobre 1996 :
Sur la légalité externe :
Considérant, en premier lieu, que l'insertion au recueil des actes administratifs de la préfecture du Morbihan du 31 mars 1996, de l'arrêté préfectoral du 1er février 1996 portant délégation de signature à M. Gabriel X..., secrétaire général de la préfecture, a constitué une mesure de publicité suffisante qui était de nature à le rendre opposable aux tiers ; que, dès lors, à supposer même que, comme le soutiennent les requérants, cet arrêté n'aurait pas fait l'objet d'un affichage dans les locaux de la préfecture, le moyen tiré de ce que l'arrêté déclaratif d'utilité publique du 3 octobre 1996 aurait été pris par une autorité incompétente, faute pour l'arrêté de délégation précité d'avoir fait l'objet d'une publicité régulière, ne peut qu'être écarté ;
Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté du 3 octobre 1996 contesté a pour objet de déclarer d'utilité publique le projet de création d'un chemin rural destiné à désenclaver le village de Kerpenhir et nullement, comme le soutiennent M. et Mme , de trancher une question de propriété ayant donné lieu à des divergences entre les intéressés et la commune de Locmariaquer et sur laquelle le préfet du Morbihan se serait incompétemment prononcé ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aucune des inexactitudes alléguées portant sur le contenu de la notice explicative figurant au dossier soumis à l'enquête d'utilité publique n'a pu, compte-tenu des indications étayant l'ensemble du dossier, conduire à une inexacte appréciation de la consistance et de la portée du projet de voirie soumis à l'enquête ; que la circonstance qu'une autre enquête ayant le même objet aurait été précédemment mise en oeuvre et n'aurait pas eu de suite, s'avère dépourvue d'influence sur la régularité de la procédure propre à la présente enquête diligentée préalablement à l'arrêté contesté ;
Considérant, en dernier lieu, que l'appréciation sommaire des dépenses, qui n'a pas à comprendre le détail des éléments concourant au coût prévisionnel du projet soumis à l'enquête, n'avait nullement à mentionner des indemnités qui auraient été prononcées dans le cadre de la phase judiciaire de l'expropriation ;
Sur la légalité interne :
Considérant, en premier lieu, qu'une opération ne peut être légalement déclarée d'utilité publique que si les atteintes portées à la propriété privée, le coût financier et éventuellement les inconvénients d'ordre social qu'elle comporte ne sont pas excessifs, eu égard à l'intérêt qu'elle présente ; que le coût du projet déclaré d'utilité publique, évalué à 210 000 F (32 014,29 euros), n'apparaît pas manifestement hors de proportion avec les avantages qui en sont attendus en vue de favoriser l'accès au village de Kerpenhir par de meilleures conditions de desserte pour ses habitants et les usagers de la voie future dont l'utilité ne saurait être remise en cause par l'existence d'accès à des chemins vicinaux ; qu'en outre, la faible emprise de l'opération projetée sur la propriété des requérants ne saurait occasionner à cette dernière, dont un échange avec des terrains communaux avait mis fin à sa séparation en deux parties, une atteinte excessive au regard de l'utilité générale du projet ;
Considérant, en deuxième lieu, que les documents du plan d'occupation des sols communal applicable à la zone incluant l'emprise du projet de voirie en cause mentionnaient un emplacement réservé à la voie projetée dont le tracé soumis à l'enquête pouvait ne pas recouvrir exactement cet emplacement, sans que l'opération déclarée d'utilité publique exigeât la mise en compatibilité préalable de ce document d'urbanisme ;
Considérant, enfin, que le détournement de pouvoir allégué par les requérants n'est pas établi par les pièces du dossier ;
En ce qui concerne l'arrêté de cessibilité du 18 juin 1999 :
Considérant, d'une part, que la circonstance que, sur la liste des propriétaires figurant au dossier soumis à l'enquête parcellaire, puis jointe en annexe de l'arrêté de cessibilité du 18 juin 1999, les parcelles BP 186 et 187 appartenant à M. et Mme seraient inexactement désignées comme étant en nature de pré, s'avère sans influence sur la régularité de l'enquête et, par suite, sur la légalité dudit arrêté, dès lors que ce même document comporte une désignation précise et non ambiguë des parcelles en cause, énonçant leurs références cadastrales complètes et la contenance des emprises à exproprier ;
Considérant, d'autre part, qu'il résulte des développements qui précèdent que l'arrêté déclaratif d'utilité publique du 3 octobre 1996, n'est pas entaché d'illégalité ; qu'il s'ensuit que les époux ne sauraient valablement soutenir que l'arrêté de cessibilité contesté serait illégal comme reposant sur une déclaration d'utilité publique elle-même illégale ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de Locmariaquer est fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 4 avril 2002, le Tribunal administratif de Rennes a annulé les arrêtés préfectoraux du 3 octobre 1996 et du 18 juin 1999 portant, respectivement, déclaration d'utilité publique du projet d'aménagement d'un chemin rural au lieudit Kerpenhir et cessibilité des terrains nécessaires à la réalisation de ce projet ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant, d'une part, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions dudit article L. 761-1, de condamner M. et Mme à verser à la commune de Locmariaquer une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par cette dernière et non compris dans les dépens ; que, d'autre part, ces mêmes dispositions font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions que M. et Mme présentent sur ce même fondement à l'encontre de la commune de Locmariaquer et de l'Etat ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 4 avril 2002 du Tribunal administratif de Rennes est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. et Mme devant le Tribunal administratif de Rennes et leurs conclusions présentées devant la Cour en vue d'obtenir le bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.
Article 3 : M. et Mme verseront à la commune de Locmariaquer (Morbihan) la somme de 1 000 euros (mille euros) au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Locmariaquer, à M. et Mme et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
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