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11/04/2002 | FRANCE | N°98NT01118

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3e chambre, 11 avril 2002, 98NT01118


Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 20 mai 1998, présenté par le ministre des affaires étrangères ;
Le ministre demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 96-1773 du 23 février 1998 du Tribunal administratif de Nantes en ce que ce jugement a annulé les titres de perception émis les 23 novembre 1995 et 21 novembre 1995 par le trésorier-payeur général pour l'étranger à l'encontre de Mme Yvette X... pour avoir paiement au profit de l'Etat des sommes de, respectivement, 114 405,02 F et 32 718,10 F, correspondant à des traitements versés à tort à l'in

téressée alors qu'elle était détachée auprès de la Commission des communa...

Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 20 mai 1998, présenté par le ministre des affaires étrangères ;
Le ministre demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 96-1773 du 23 février 1998 du Tribunal administratif de Nantes en ce que ce jugement a annulé les titres de perception émis les 23 novembre 1995 et 21 novembre 1995 par le trésorier-payeur général pour l'étranger à l'encontre de Mme Yvette X... pour avoir paiement au profit de l'Etat des sommes de, respectivement, 114 405,02 F et 32 718,10 F, correspondant à des traitements versés à tort à l'intéressée alors qu'elle était détachée auprès de la Commission des communautés européennes ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme X... devant le Tribunal administratif de Nantes ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
Vu le décret n° 62-1187 du 29 décembre 1962 ;
Vu le décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 ;
Vu le décret n° 92-1369 du 29 décembre 1992 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 mars 2002 :
- le rapport de M. MARGUERON, président,
- et les conclusions de M. MILLET, commissaire du gouvernement ;

Sur la recevabilité du recours du ministre des affaires étrangères :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier de première instance que le ministre des affaires étrangères a reçu notification du jugement attaqué le 20 mars 1998 ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient Mme X..., son recours, enregistré le 20 mai 1998, n'est pas tardif ;
Sur la recevabilité des conclusions de la demande de première instance dirigées contre le titre de perception émis le 23 novembre 1993 :
Considérant qu'aux termes de l'article 6 du décret du 29 décembre 1992 susvisé : "Les titres de perception mentionnés à l'article 85 du décret du 29 décembre 1962 ... peuvent faire l'objet de la part des redevables, soit d'une opposition à l'exécution en cas de contestation de l'existence de la créance, de son montant ou de son exigibilité, soit d'une opposition à poursuites en cas de contestation de la validité en la forme d'un acte de poursuite ..." ; qu'aux termes de l'article 7 de ce décret : "Avant de saisir la juridiction compétente, le redevable doit ... adresser sa réclamation appuyée de toutes justifications au comptable qui a pris en charge l'ordre de recettes" ; qu'une telle réclamation est distincte de la demande de remise gracieuse qui, pour des raisons d'équité, peut être formulée auprès du comptable en vertu de l'article 10 du même décret ;
Considérant que si Mme X... a formulé, par lettre du 11 janvier 1996, une demande de remise gracieuse de la somme de 114 405, 02 F, correspondant à un rappel de traitement indûment versé pour la période du 1er décembre 1993 au 31 décembre 1994 dont le versement lui était réclamé par le titre de perception émis le 23 novembre 1995 par le trésorier-payeur général pour l'étranger, cette demande à caractère purement gracieux n'a constitué ni par son objet, ni par les motifs invoqués à son soutien la réclamation prévue par l'article 7 du décret du 29 décembre 1992 ; qu'ainsi, faute d'avoir été précédées d'une réclamation contestant l'existence de la créance, son montant ou son exigibilité, les conclusions de la demande de Mme X... dirigées contre le titre de perception émis le 23 novembre 1995 étaient irrecevables ; que le jugement attaqué doit, par suite, être annulé en tant qu'il a fait droit auxdites conclusions ;
Sur le titre de perception émis le 21 novembre 1995 :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme X..., adjoint administratif de chancellerie, avait été mise à disposition de la Commission des communautés européennes par le ministre des affaires étrangères depuis le 1er décembre 1990 et jusqu'au 1er décembre 1993 ; que le maintien en mise à disposition de Mme X... n'étant plus possible au-delà de cette dernière date, dès lors qu'elle avait signé le 30 novembre 1993 un contrat d'engagement en qualité d'auxiliaire qui prévoyait sa rémunération par la Commission, l'intéressée a été placée en position de détachement auprès de cette dernière pour une durée d'un an à compter du 1er décembre 1993 par un arrêté du 22 novembre 1994 ; que Mme X... a été maintenue en position de détachement jusqu'au 30 juin 1996 par trois arrêtés ultérieurs ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 81 du décret du 29 décembre 1962 susvisé : "Tout ordre de recettes doit indiquer les bases de la liquidation" ; qu'ainsi, tout titre de perception doit indiquer les bases de liquidation de la créance pour le recouvrement de laquelle il a été émis, à moins que ces bases n'aient été préalablement portées à la connaissance du débiteur ;
Considérant que le titre de perception émis le 21 novembre 1995 par le trésorier-payeur général pour l'étranger à l'encontre de Mme X..., pour avoir reversement, pour un montant de 32 718, 10 F, des traitements indûment perçus par l'intéressée pendant la période du 1er janvier au 31 juillet 1995 durant laquelle elle se trouvait placée en position de détachement auprès de la Commission des communautés européennes, mentionnait : "Emoluments perçus en trop pour la période du 1er janvier au 31 juillet 1995 ... Agent non rémunéré par le MAE" ; que Mme X..., qui savait ne plus pouvoir être rémunérée par le ministère des affaires étrangères, dès lors qu'elle avait été placée en position de détachement, a eu connaissance des bases de liquidation de la créance dont l'Etat se prévalait à son égard pour la période concernée par les bulletins de salaire qui lui avaient été adressés par la trésorerie générale pour l'étranger ; que, dans ces conditions, elle était à même de discuter utilement les bases de calcul de la somme qui lui était réclamée ; qu'il suit de là que c'est à tort que, pour annuler le titre de perception émis le 21 novembre 1995, le Tribunal administratif de Nantes s'est fondé sur ce que ce titre n'aurait pas répondu aux exigences des dispositions susmentionnées de l'article 81 du décret du 29 décembre 1962 ; Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen soulevé par Mme X... ;
Considérant que si, comme il a été dit, l'administration, qui était tenue de donner à sa décision la rétroactivité nécessaire pour placer l'intéressée en situation juridique régulière, n'a placé Mme X... en position de détachement à compter du 1er décembre 1993 que par un arrêté du 22 novembre 1994 et ne lui a adressé cet arrêté que le 17 mars 1995, ces circonstances sont sans influence sur l'obligation qu'avait l'administration de poursuivre le recouvrement des rémunérations qui avaient été versées à tort jusqu'à l'intervention de cette mesure de régularisation ; que la requérante ne peut, par suite, utilement les invoquer pour contester le bien-fondé de la somme mise à sa charge par le titre de perception litigieux ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre des affaires étrangères est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nantes a annulé les titres de perception émis à l'encontre de Mme X... ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment des pièces produites par le ministre des affaires étrangères en première instance que Mme X... avait été informée dès le mois d'octobre 1993 que la signature d'un contrat d'enga-gement avec la Commission des communautés européennes impliquait qu'elle soit placée en position de détachement ; qu'elle n'a adressé à son administration la copie de ce contrat, nécessaire à la prise de l'arrêté de détachement, qu'en juillet 1994 ; que, dans ces conditions, Mme X... n'est pas fondée à soutenir que les paiements indus qui ont motivé les titres de perception des 21 et 23 novembre 1995 n'auraient été rendus possibles que par une faute tenant au retard mis à régulariser sa situation administrative ; que ses conclusions tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser une indemnité correspondant au montant total des sommes réclamées par ces deux titres ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Nantes du 23 février 1998 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme X... devant le Tribunal administratif de Nantes est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre des affaires étrangères, à Mme Yvette X... et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 98NT01118
Date de la décision : 11/04/2002
Type d'affaire : Administrative

Analyses

COMPTABILITE PUBLIQUE - CREANCES DES COLLECTIVITES PUBLIQUES - RECOUVREMENT - PROCEDURE.

COMPTABILITE PUBLIQUE - REGLES DE PROCEDURE CONTENTIEUSE SPECIALES A LA COMPTABILITE PUBLIQUE - INTRODUCTION DE L'INSTANCE - NECESSITE D'UNE ACTION PREALABLE.

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - POSITIONS - DETACHEMENT ET MISE HORS CADRE - DETACHEMENT - SITUATION DU FONCTIONNAIRE DETACHE.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - FAITS SUSCEPTIBLES OU NON D'OUVRIR UNE ACTION EN RESPONSABILITE - AGISSEMENTS ADMINISTRATIFS SUSCEPTIBLES D'ENGAGER LA RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RETARDS.


Références :

Décret 62-1187 du 29 décembre 1962 art. 81
Décret 92-1369 du 29 décembre 1992 art. 6, art. 7, art. 10


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. MARGUERON
Rapporteur public ?: M. MILLET

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2002-04-11;98nt01118 ?
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