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11/04/2002 | FRANCE | N°01NT00006

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3e chambre, 11 avril 2002, 01NT00006


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 2 janvier 2001, présentée pour la Société nationale des chemins de fer français (S.N.C.F.), dont le siège est ..., par Me Alain HUC, avocat au barreau de Nantes ;
La S.N.C.F. demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 99-528 du 5 décembre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme, outre intérêts, de 349 328 F en réparation du préjudice qu'elle a subi du fait des entraves à la circulation des trains provoquée par des manifest

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 2 janvier 2001, présentée pour la Société nationale des chemins de fer français (S.N.C.F.), dont le siège est ..., par Me Alain HUC, avocat au barreau de Nantes ;
La S.N.C.F. demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 99-528 du 5 décembre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme, outre intérêts, de 349 328 F en réparation du préjudice qu'elle a subi du fait des entraves à la circulation des trains provoquée par des manifestants en gare de Surdon, sur le territoire de la commune du Château d'Almenêches (Orne) ;
2°) de faire droit auxdites conclusions de sa demande présentée devant le Tribunal administratif de Caen ;
3°) d'ordonner la capitalisation des intérêts échus ;
4°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 10 000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 15 juillet 1845 sur la police des chemins de fer ;
Vu le décret n° 730 du 22 mars 1942 ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 mars 2002 :
- le rapport de M. MARGUERON, président,
- les observations de Me BUTTIER, substituant Me HUC, avocat de la Société nationale des chemins de fer français,
- et les conclusions de M. MILLET, commissaire du gouvernement ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :
Considérant qu'il résulte des pièces versées au dossier que, contraire-ment à ce qu'a soutenu le préfet de l'Orne devant le Tribunal administratif de Caen, la Société nationale des chemins de fer français a suffisamment justifié de la qualité du signataire de sa demande préalable adressée à l'administration et n'était pas tenue dans sa demande au Tribunal administratif, qui tendait expressément à la condamnation de l'Etat, à présenter des conclusions dirigées contre la décision par laquelle avait été rejetée cette demande préalable ;
Sur la responsabilité de l'Etat :
Considérant qu'aux termes de l'article L.2216-3 du code général des collectivités territoriales : "L'Etat est civilement responsable des dégâts et dommages résultant des crimes et délits commis, à force ouverte ou par violence, par des attroupements ou rassemblements armés ou non armés, soit contre les personnes, soit contre les biens ..." ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que du 29 mai au 3 juin 1997 la circulation des convois sur les lignes ferroviaires Paris-Granville et Caen-Tours a été entravée par des manifestants qui entendaient protester contre un projet de réorganisation de la desserte ferroviaire locale et qui, chacun de ces jours, ont occupé les voies en gare de Surdon sur le territoire de la commune du Château d'Almenêches ; que ces faits ont été constitutifs du délit, commis à force ouverte, d'entrave à la circulation des trains prévu et réprimé par les dispositions de l'article 21 de la loi du 15 juillet 1845 et de l'article 73 du décret du 22 mars 1942, susvisés ; que la circonstance que leurs auteurs, qui ont été identifiés, n'aient formé à chaque fois qu'un groupe de quelques personnes seulement, issu du groupe plus important, de vingt à trente personnes, des manifestants qui se rendaient à la gare de Surdon, ne fait pas obstacle à ce que ces mêmes faits soient regardés comme ayant été commis par un attroupement ou rassemblement au sens des dispositions susmentionnées de l'article L.2216-3 du code général des collectivités territoriales ; qu'il suit de là que, contrairement à ce qu'a estimé le Tribunal administratif de Caen, ils sont de nature à engager la responsabilité de l'Etat à l'égard de la Société nationale des chemins de fer français sur le fondement de ces dispositions ;
Sur le préjudice :
Considérant que les manifestations ci-dessus décrites ont eu pour conséquences directes des coûts supplémentaires de fonctionnement des convois qui circulaient sur les lignes concernées, des frais de transbordement des voyageurs par des moyens de transport de substitution et des frais de consommations offertes à ces voyageurs, dont la Société nationale des chemins de fer français est fondée à obtenir réparation ; que les sommes réclamées de ces différents chefs, s'élevant au total à 346 640, 61 F (52 845, 02 euros) sont complètement et précisément justifiées par les pièces qui ont été produites au dossier et dont le ministre de l'intérieur ne conteste d'ailleurs pas la teneur ;

Considérant que si la Société nationale des chemins de fer français a exposé des frais d'huissier pour faire constater l'entrave à la circulation des convois, ces dépenses ont été seulement supportées à l'occasion des faits dont elle a été victime et ne peuvent être regardées comme des dommages résultant directement de délits commis par des attroupements ou rassemblements au sens des dispositions de l'article L.2216-3 du code général des collectivités territoriales ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la Société nationale des chemins de fer français est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Caen a entièrement rejeté sa demande et à demander la condamnation de l'Etat à lui payer la somme de 52 845, 02 euros ;
Sur les intérêts et les intérêts des intérêts :
Considérant que la Société nationale des chemins de fer français a droit, comme elle le demande, aux intérêts de la somme de 52 845, 02 euros précitée à compter du 1er avril 1999, date d'enregistrement de sa demande devant le Tribunal administratif de Caen ;
Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée les 1er avril 1999 et 2 janvier 2001 ; qu'à la première de ces dates il n'était pas dû une année d'intérêts et que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de rejeter la demande dans cette mesure ; qu'en revanche, dès lors qu'il était dû au moins une année d'intérêts, il y a lieu d'y faire droit au 2 janvier 2001 ;
Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, de condamner l'Etat à payer à la Société nationale des chemins de fer français une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par celle-ci et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Caen du 5 décembre 2000 est annulé.
Article 2 : L'Etat est condamné à verser à la Société nationale des chemins de fer français la somme de 52 845, 02 euros (cinquante deux mille huit cent quarante cinq euros et deux centimes). Cette somme portera intérêts à compter du 1er avril 1999. Les intérêts échus le 2 janvier 2001 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la Société nationale des chemins de fer français est rejeté.
Article 4 : L'Etat versera à la Société nationale des chemins de fer français une somme de 1 000 euros (mille euros) au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la Société nationale des chemins de fer français et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 01NT00006
Date de la décision : 11/04/2002
Type d'affaire : Administrative

Analyses

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - MOTIFS - POUVOIRS ET OBLIGATIONS DE L'ADMINISTRATION.

AIDE SOCIALE - INSTITUTIONS SOCIALES ET MEDICO-SOCIALES - DISPOSITIONS SPECIALES RELATIVES AUX ETABLISSEMENTS PRIVES.

60 RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE.

60 RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE.


Références :

Code civil 1154
Code de justice administrative L761-1
Code général des collectivités territoriales L2216-3
Décret 730 du 22 mars 1942 art. 73
Loi du 15 juillet 1845 art. 21


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. MARGUERON
Rapporteur public ?: M. MILLET

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2002-04-11;01nt00006 ?
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