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28/03/2001 | FRANCE | N°98NT01924

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2e chambre, 28 mars 2001, 98NT01924


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 27 juillet 1998, présentée pour la société Immogest, dont le siège social est au lieudit "La Duonardière" 72210 La Suze-sur-Sarthe (Sarthe), représentée par son président en exercice, par Me PAGE, avocat au barreau de Nantes ;
La société Immogest demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 98-1643 et 98-1644 du 16 juin 1998 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande du préfet de la Sarthe, l'arrêté du 11 mai 1998 par lequel le maire de La Suze-sur-Sarthe lui a accordé un permis de cons

truire un supermarché ;
2 ) de rejeter la demande présentée par le préfe...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 27 juillet 1998, présentée pour la société Immogest, dont le siège social est au lieudit "La Duonardière" 72210 La Suze-sur-Sarthe (Sarthe), représentée par son président en exercice, par Me PAGE, avocat au barreau de Nantes ;
La société Immogest demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 98-1643 et 98-1644 du 16 juin 1998 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande du préfet de la Sarthe, l'arrêté du 11 mai 1998 par lequel le maire de La Suze-sur-Sarthe lui a accordé un permis de construire un supermarché ;
2 ) de rejeter la demande présentée par le préfet de la Sarthe devant le Tribunal administratif de Nantes ;
3 ) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 10 000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n 73-1193 du 27 décembre 1973 modifiée ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 février 2001 :
- le rapport de Mme STEFANSKI, premier conseiller,
- les observations de Me PAGE, avocat de la société Immogest,
- les observations de Me MARTIN-SOL, substituant Me LE CORRE, avocat de la commune de La Suze-sur-Sarthe,
- et les conclusions de M. LALAUZE, commissaire du gouvernement ;

Sur l'intervention de l'Association "Bien vivre à La Suze-sur-Sarthe" :
Considérant que l'Association "Bien vivre à La Suze-sur-Sarthe" a intérêt à l'annulation de la décision attaquée ; qu'ainsi son intervention est recevable ;
Sur les conclusions à fin de non-lieu :
Considérant que la requête de la société Immogest tend à l'annulation du jugement du 16 juin 1998 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a annulé l'arrêté du 11 mai 1998 par lequel le maire de La Suze-sur-Sarthe lui a accordé un permis de construire un centre commercial ; que la circonstance que la société a obtenu, pour le même projet, un nouveau permis de construire qui lui a été accordé le 21 août 1998 n'est pas de nature à rendre sans objet les conclusions ci-dessus analysées de sa requête ;
Sur la légalité de la décision attaquée :
Considérant qu'aux termes de l'article L.451-5 du code de l'urbanisme : "Ainsi qu'il est dit à l'article 29 de la loi n 73-1193 du 27 décembre 1973 d'orientation du commerce et de l'artisanat : ...VI. - L'autorisation d'exploitation commerciale doit être délivrée préalablement à l'octroi du permis de construire ... Une nouvelle demande est nécessaire lorsque le projet, en cours d'instruction ou dans sa réalisation, subit des modifications substantielles dans la nature du commerce ou des surfaces de vente ..." ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'autorisation, donnée les 21 janvier et 18 février 1997 à la société Immogest par la commission nationale d'équipement commercial, portait sur la création d'un supermarché d'une surface de vente de 1800 m et d'une station de distribution de carburants de 225 m de surface de vente dans la commune de La Suze-sur-Sarthe ; que le permis de construire contesté, délivré le 11 mai 1998 à la société Immogest par le maire de La Suze-sur-Sarthe, autorise la construction d'un supermarché de 1793 m de même enseigne, d'une station service de 225 m, et d'une allée de 435 m comprenant un "espace service" de surface réduite ainsi qu'un espace de jeux pour les enfants et desservant, outre le supermarché, un "mini-snack" de 67 m ; que de tels aménagements, d'ampleur limitée, n'ont pas eu pour effet d'apporter des modifications substantielles à la nature du commerce autorisé par la commission nationale d'équipement commercial ; que si le permis de construire contesté prévoit que l'allée en cause puisse également desservir un autre commerce, appelé à s'installer ultérieurement dans le même bâtiment en vertu d'un autre permis de construire et d'une autorisation de la commission départementale d'équipement commercial en date du 1er septembre 1995, il ressort des pièces du dossier que ce commerce aura une activité différente, ne sera pas exploité sous la même enseigne et ne fera pas l'objet d'une gestion commune ; qu'ainsi, cette circonstance n'a pas davantage pour conséquence de modifier substantiellement la nature du projet soumis à la commission nationale, qui a d'ailleurs eu connaissance du projet d'installation d'un autre commerce quand elle a statué sur la demande de la société Immogest ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le Tribunal administratif de Nantes s'est fondé sur ce que des modifications substantielles avaient été apportées au projet soumis à la commission nationale d'équipement commercial pour annuler le permis de construire délivré le 11 mai 1998 à la société Immogest par le maire de La Suze-sur-Sarthe ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par le préfet de la Sarthe tant devant la Cour que devant le Tribunal administratif de Nantes, ainsi que ceux soulevés par l'Association "Bien vivre à La Suze-sur-Sarthe" qui est intervenue en première instance et en appel ;
Considérant que, contrairement à ce que soutient l'Association "Bien vivre à La Suze-sur-Sarthe" le permis de construire contesté est signé par le maire de La Suze-sur-Sarthe et non par un adjoint ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence du signataire manque en fait ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du bâtiment projeté, situé au sein du lotissement constituant la zone d'activité Les Trunetières, ne comporte pas d'accès à une voie publique ; qu'ainsi, l'Association "Bien vivre à La Suze-sur-Sarthe" ne peut utilement se prévaloir de l'article R. 421-15 du code de l'urbanisme selon lequel la consultation du service gestionnaire de la voie doit être recueilli, lorsque la délivrance du permis de construire aurait pour effet la création ou la modification d'un accès à une voie publique ; que l'association ne saurait utilement invoquer la méconnaissance des dispositions de l'article NAz 3-2 du plan d'occupation des sols qui ne concernent que les projets de création de voies publiques ;
Considérant que si la demande de permis de construire a été complétée au cours de l'instruction par la production du certificat prévu par les dispositions de l'article R.315-36 du code de l'urbanisme constatant que l'ensemble des travaux autorisés par l'autorisation de lotir avaient été réalisés, cette circonstance, qui n'a pas affecté le projet de construction, a été sans incidence sur la portée des avis précédemment délivrés par les commissions départementales de sécurité et d'accessibilité ; que le moyen tiré de ce que ces commissions devaient être consultées à nouveau ne peut, dès lors, qu'être rejeté ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.111-1-4 du code de l'urbanisme : "En dehors des espaces urbanisés des communes, les constructions ou installations sont interdites dans une bande de cent mètres de part et d'autre de l'axe des autoroutes, des routes express et des déviations au sens du code de la voirie routière et de soixante-quinze mètres de part et d'autre de l'axe des autres routes classées à grande circulation ... Les dispositions des alinéas précédents ne s'appliquent pas dès lors que les règles concernant ces zones, contenues dans le plan d'occupation des sols, ou dans un document d'urbanisme en tenant lieu, sont justifiées et motivées au regard notamment des nuisances, de la sécurité, de la qualité architecturale, ainsi que de la qualité de l'urbanisme et des paysages" ; qu'il ressort des pièces du dossier que le plan d'occupation des sols modifié de la commune autorise l'implantation des bâtiments à moins de soixante quinze mètres d'une route à grande circulation ; qu'il n'est pas contesté que ces dispositions ont été justifiées et motivées dans les conditions prévues à l'article L.111-1-4 précité ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la construction méconnaîtrait les dispositions de l'article NAz 10 du plan d'occupation des sols prévoyant qu'en principe la hauteur des constructions ne doit pas excéder 6 mètres à l'égout du toit ;
Considérant qu'aux termes de l'article 2.3 du règlement du lotissement relatif à l'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives : "Toute construction doit être implantée en retrait par rapport aux limites séparatives à une distance au moins égale à la moitié de sa hauteur et jamais inférieure à 5 m. Toutefois ce recul peut être supprimé pour tout bâtiment lorsque les mesures appropriées sont prises pour éviter la propagation des incendies ..." ; qu'il ressort des pièces du dossier et notamment de la notice descriptive des matériaux et moyens de lutte contre l'incendie jointe à la demande de permis de construire ainsi que des observations de la commission départementale de sécurité, que le pétitionnaire a prévu les mesures propres à éviter la propagation des incendies ; que, dès lors, le projet pouvait, en application de l'article 2.3 du règlement du lotissement, être implanté en limite séparative ;
Considérant que contrairement à ce que soutient l'Association "Bien vivre à La Suze-sur-Sarthe", les façades de la construction projetée ne comporteront que deux couleurs, conformément aux dispositions de l'article 2.5 du règlement du lotissement ;
Considérant que si l'association soutient que le permis de construire attaqué autorise la création d'une réserve de 134 m qui ne serait séparée de la surface de vente que par un dispositif amovible, cette réserve ne figure pas au présent permis ;
Considérant que la circonstance qu'à la suite d'ordonnances du président du Tribunal administratif de Nantes ordonnant la suspension provisoire de permis de construire accordés à la société Immogest, le maire de La Suze-sur-Sarthe ait délivré à cette société de nouveaux permis de construire ayant pour objet de corriger les illégalités relevées par le tribunal administratif, n'est pas de nature à établir que ces permis ont été accordés dans le seul but de permettre la poursuite des travaux ; qu'ainsi, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Immogest est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande du préfet de la Sarthe, le permis de construire contesté en date du 11 mai 1998 ;
Sur les conclusions tendant au remboursement des frais non compris dans les dépens :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative de condamner l'Etat à payer à la société Immogest une somme de 6 000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'intervention de l'Association "Bien vivre à La Suze-sur-Sarthe" est admise.
Article 2 : Le jugement en date du 16 juin 1998 du Tribunal administratif de Nantes est annulé.
Article 3 : La demande présentée par le préfet de la Sarthe devant le Tribunal administratif de Nantes est rejetée.
Article 4 : L'Etat versera à la société Immogest une somme de six mille francs (6 000 F) au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société Immogest, au préfet de la Sarthe, à la commune de La Suze-sur-Sarthe, à l'Association "Bien vivre à La Suze-sur-Sarthe" et au ministre de l'équipement, des transports et du logement.


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