Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 22 mai 1997, présentée pour M. Hugues Z..., demeurant au lieu-dit Châlet de La Moinie à Thorigny (85480), par Me X..., avocat au barreau de Poitiers ;
M. Z... demande que la Cour :
1 ) annule le jugement n 96330 du 8 avril 1997 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 4 décembre 1995 du garde des Sceaux, ministre de la justice, le déclarant démissionnaire d'office de sa charge de notaire à la résidence de Tinchebray (Orne) ;
2 ) annule l'arrêté ministériel susvisé du 4 décembre 1995 ;
3 ) condamne l'Etat à lui verser une somme de 20 000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n 45-1418 du 28 juin 1945 relative à la discipline des notaires et de certains officiers ministériels ;
Vu le décret n 73-609 du 5 juillet 1973 relatif à la formation professionnelle dans le notariat et aux conditions d'accès aux fonctions de notaire ;
Vu le décret n 88-814 du 12 juillet 1988 relatif à la nomination et à la cessation de fonctions des officiers publics et ministériels ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 février 2000 :
- le rapport de M. LEMAI, président,
- les observations de Me HAIE, avocat de M. Hugues Z...,
- les observations de M. Hubert Y...,
- et les conclusions de Mme COËNT-BOCHARD, commissaire du gouvernement ;
Sur l'intervention de M. Hubert Y... :
Considérant que M. Y..., précédent titulaire de l'office notarial, qui a conclu une nouvelle convention avec un autre candidat à la succession après la défaillance de M. Hugues Z..., a intérêt au maintien de l'arrêté attaqué par ce dernier ; que son intervention en défense doit donc être admise ;
Sur les conclusions de M. Z... tendant à l'annulation de l'arrêté du garde des Sceaux, ministre de la justice du 4 décembre 1995 :
Considérant qu'en vertu des articles 45 à 48 du décret susvisé du 5 juillet 1973, la nomination du successeur d'un notaire fait l'objet d'un arrêté du garde des Sceaux, ministre de la justice, pris au vu d'un dossier comportant notamment les conventions intervenues entre le titulaire de l'office ou ses ayants droit et le candidat à la succession et les éléments relatifs au financement de ces conventions ; qu'en vertu de l'article 57 du même décret, les notaires ne peuvent exercer leurs fonctions qu'à compter du jour de leur prestation de serment devant le Tribunal de grande instance, laquelle doit intervenir dans le mois de leur nomination ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article 45 de l'ordonnance susvisée du 28 juin 1945 : "Tout officier public ou ministériel qui ne prête pas le serment professionnel dans le mois de la publication de sa nomination au Journal officiel est déclaré démissionnaire d'office de ses fonctions sauf s'il peut justifier d'un cas de force majeure." ; qu'il résulte de ces dispositions, que l'existence d'un cas de force majeure ne peut être utilement invoquée pour s'opposer à la démission d'office que dans l'hypothèse où le notaire intéressé n'entend pas renoncer au bénéfice de sa nomination ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté ministériel du 16 octobre 1995, publié au Journal officiel du 19 octobre 1995, nommant M. Z..., notaire à la résidence de Tinchebray (Orne), en remplacement de M. Y... a été pris au vu d'un dossier comportant une justification suffisante des modalités de financement de la convention intervenue entre M. Z... et M. Y... ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'illégalité de l'arrêté de nomination au motif qu'il aurait été pris au vu d'un dossier incomplet manque, en tout état de cause, en fait ;
Considérant que, par lettres en dates des 16 et 26 octobre 1995, M. Z... a informé le ministère de la justice de son incapacité à exercer les fonctions de notaire en raison de son état de santé ; que, dès lors que M. Z... ne sollicitait pas une prorogation du délai d'un mois imparti pour prêter serment, le ministre était tenu de le déclarer démissionnaire d'office, alors même que l'état de santé de l'intéressé aurait été constitutif d'un cas de force majeure ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de sa demande, que M. Z... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté ministériel du 4 décembre 1995 le déclarant démissionnaire d'office de la charge de notaire à la résidence de Tinchebray ;
Considérant qu'aux termes de l'article R.88 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans le cas de requête jugée abusive, son auteur encourt une amende qui ne peut excéder 20 000 F" ; qu'en l'espèce, la requête de M. Z... présentant un caractère abusif, il y a lieu de le condamner à payer une amende de 5 000 F ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que les dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. Z... la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Considérant que M. Y..., qui est intervenant et non partie au litige, ne peut se prévaloir des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel pour demander la condamnation de M. Z... à lui payer une somme de 5 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'intervention de M. Hubert Y... est admise.
Article 2 : La requête de M. Hugues Z... est rejetée.
Article 3 : M. Hugues Z... est condamné à payer une amende de cinq mille francs (5 000 F).
Article 4 : Les conclusions de M. Hubert Y... tendant à l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Hugues Z..., à M. Hubert Y..., au garde des Sceaux, ministre de la justice et au Trésorier-payeur général de la Vendée.