Vu, I) la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la Cour les 13 mars et 12 juin 1998 sous le n 98NT00623, présentés pour le Centre hospitalier (C.H.) de Saint-Brieuc, représenté par son directeur en exercice à ce dûment habilité par délibération du conseil d'administration en date du 13 mars 1998, dont le siège est à Saint-Brieuc (22023), par Me LE PRADO, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ;
Le C.H. de Saint-Brieuc demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 94-1833 du 12 novembre 1997 par lequel le Tribunal administratif de Rennes l'a déclaré entièrement responsable des conséquences dommageables de l'accouchement de Mme Valérie X... pour son fils Thibaud, a alloué à M. et Mme X..., en qualité d'administrateurs légaux de leur fils Thibaud, une provision de 100 000 F et l'a condamné à verser à la Caisse primaire d'assurance maladie (C.P.A.M.) des Côtes d'Armor une somme de 270 632,17 F ;
2 ) de rejeter les demandes présentées par M. et Mme X... et la C.P.A.M. des Côtes d'Armor devant le Tribunal administratif de Rennes ;
Vu, II) l'ordonnance, enregistrée le 3 septembre 1999, par laquelle le Président de la Cour administrative d'appel de Nantes, en application des articles L.8-4 et R.222 et suivants du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, a ouvert la procédure juridictionnelle d'exécution du jugement susvisé du Tribunal administratif de Rennes du 12 novembre 1997 ;
Vu la demande, enregistrée au greffe de la Cour le 9 juillet 1998 sous le n 99NT02291, présentée pour M. et Mme X..., par Me BERTHAULT, et tendant à ce que la Cour prenne les mesures nécessaires à l'exécution du jugement du Tribunal administratif de Rennes du 12 novembre 1997 rendu en leur faveur ;
M. et Mme X... demandent à la Cour d'assurer, conformément à l'article L.8-4 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, l'exécution du jugement, au besoin en condamnant le C.H. de Saint-Brieuc au paiement d'une astreinte ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la loi n 80-539 du 16 juillet 1980 relative aux astreintes, prononcées en matière administrative et à l'exécution des jugements par les personnes morales de droit public ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 janvier 2000 :
- le rapport de M. MILLET, premier conseiller,
- les observations de Me LE PRADO, avocat du Centre hospitalier
de Saint-Brieuc,
- les observations de Me BERTHAULT, avocat de M. et Mme X... et de la Caisse primaire d'assurance maladie des Côtes d'Armor,
- et les conclusions de Mme COËNT-BOCHARD, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la requête n 98NT00623, présentée par le Centre hospitalier (C.H.) de Saint-Brieuc et la demande d'exécution, enregistrée sous le n 99NT02291, présentée par M. et Mme X... sont relatives à un même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Considérant que, par jugement du 12 novembre 1997, le Tribunal administratif de Rennes a déclaré le C.H. de Saint-Brieuc entièrement responsable des conséquences dommageables de l'accouchement de Mme Valérie X... pour son fils Thibaud, a alloué à M. et Mme X..., en qualité d'administrateurs légaux de leur fils, une provision de 100 000 F, et condamné le C.H. de Saint-Brieuc à verser à la Caisse primaire d'assurance maladie (C.P.A.M.) des Côtes d'Armor une somme de 270 632,17 F ; que le C.H. de Saint-Brieuc demande l'annulation de ce jugement et le rejet de la demande présentée par M. et Mme X... devant le Tribunal administratif et, que, par la voie du recours incident, la C.P.A.M. des Côtes d'Armor demande la réévaluation du montant de sa créance ;
Sur l'appel du C.H. de Saint-Brieuc ;
En ce qui concerne la responsabilité :
Considérant que Mme X... a accouché le 29 septembre 1992 par voie basse au C.H. de Saint-Brieuc par ventouse puis forceps, d'un enfant de 4,240 kilogrammes, prénommé Thibaud ; que cet enfant présentait à la naissance une paralysie du membre supérieur droit due à une lésion du plexus brachial ; que si le C.H. de Saint-Brieuc se borne à alléguer que le médecin accoucheur n'a pas commis de geste clairement contraire aux règles de l'art, et que la dystocie des épaules qui s'est produite au moment de l'extraction constitue une complication bien connue, imprévisible et très difficile à éviter, il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expertise ordonnée par jugement du Tribunal administratif de Rennes du 18 octobre 1995, que l'extraction d'un gros f tus d'un bassin légèrement transversalement rétréci laissait prévoir une dystocie des épaules, qui n'a pas été correctement traitée par une man uvre comportant une traction et une rotation trop importante du cou ; que ces erreurs de man uvre constituent, dès lors, une faute de nature à engager la responsabilité du C.H. de Saint-Brieuc ; qu'ainsi, celui-ci n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, lequel est suffisamment motivé, le Tribunal administratif de Rennes l'a déclaré responsable de la lésion constatée chez le jeune Thibaud et l'a condamné à verser à M. et Mme X..., en qualité d'administrateurs légaux de leur fils, une provision de 100 000 F ;
En ce qui concerne les conclusions d'appel incident de la C.P.A.M. des Côtes d'Armor relatives au montant des prestations versées :
Considérant que si la C.P.A.M. des Côtes d'Armor demande que la somme que le C.H. de Saint-Brieuc a été condamné à lui verser par le jugement du 12 novembre 1997, soit portée de 270 632,17 F à 304 497,33 F, elle ne justifie pas devant la Cour par la seule production d'une attestation de paiement des prestations, avoir versé depuis ledit jugement une somme supplémentaire de 33 865,16 F en remboursement de prestations en lien avec la faute commise par le C.H. de Saint-Brieuc ; que les conclusions de la C.P.A.M. des Côtes d'Armor ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;
En ce qui concerne les conclusions de la C.P.A.M. des Côtes d'Armor tendant à la condmnation du C.H. de Saint-Brieuc à lui verser une indemnité forfaitaire de 5 000 F en application des 5ème et 6ème alinéas de l'article L.376-1 du code de la sécurité sociale :
Considérant que la C.P.A.M. des Côtes d'Armor ne conteste pas en appel les motifs du rejet qui lui avaient été opposées sur ce point en première instance ; que, par suite, ses conclusions sont irrecevables et doivent être rejetées ;
En ce qui concerne les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner le C.H. de Saint-Brieuc à verser à M. et Mme X... une somme de 6 000 F au titre des frais exposés par ceux-ci et non compris dans les dépens ;
Sur l'exécution du jugement attaqué du Tribunal administratif de Rennes du 12 novembre 1997 :
Considérant qu'aux termes de l'article L.8-4 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt définitif, la partie intéressée peut demander au tribunal administratif ou à la cour administrative d'appel qui a rendu la décision d'en assurer l'exécution. En cas d'inexécution d'un jugement frappé d'appel, la demande d'exécution est adressée à la juridiction d'appel" ;
Considérant, toutefois, qu'aux termes du II de l'article 1er de la loi du 16 juillet 1980 susvisée : "Lorsqu'une décision juridictionnelle passée en force de chose jugée condamne une collectivité locale ou un établissement public au paiement d'une somme d'argent dont le montant est fixé par la décision elle-même, cette somme doit être mandatée ou ordonnancée dans un délai de quatre mois à compter de la notification de la décision de justice. A défaut de mandatement ou d'ordonnancement dans ce délai, le représentant de l'Etat dans le département ou l'autorité de tutelle procède au mandatement d'office ( ...)" ; que, dès lors que la disposition législative précitée permet à M. et Mme X..., en cas d'inexécution dans le délai prescrit du jugement, confirmé par le présent arrêt, d'obtenir le mandatement d'office de la somme que le C.H. de Saint-Brieuc est condamné à lui verser, il y a lieu de rejeter les conclusions aux fins d'injonction présentées par M. et Mme X... ;
Article 1er : La requête du Centre hospitalier de Saint-Brieuc, et les conclusions de l'appel incident de la Caisse primaire d'assurance maladie des Côtes d'Armor sont rejetées.
Article 2 : La requête de M. et Mme X..., enregistrée sous le n 99NT02291, est rejetée.
Article 3 : Le Centre hospitalier de Saint-Brieuc versera à M. et Mme X... une somme de six mille francs (6 000 F) au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au Centre hospitalier de Saint-Brieuc, à M. et Mme X..., à la Caisse primaire d'assurance maladie des Côtes d'Armor et au ministre de l'emploi et de la solidarité.