Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 10 septembre 1996, présentée pour le Département du Cher, représenté par le président du Conseil général dûment habilité à cet effet, par Me Y..., avocat au barreau de Bourges ;
Le Département du Cher demande que la Cour :
1 ) annule le jugement n 9586 du 11 juillet 1996 par lequel le Tribunal administratif d'Orléans a, à la demande de M. Joël X..., annulé la délibération du Conseil général en date du 11 janvier 1994 en tant qu'elle accorde des subventions d'investissement à des établissements privés d'enseignement primaire à Bourges, Saint-Martin d'Auxigny, Sancerre, Sancoins et Vierzon ;
2 ) rejette la demande présentée par M. X... devant le Tribunal administratif ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 30 octobre 1886 sur l'organisation de l'enseignement primaire ;
Vu la loi n 59-1557 du 31 décembre 1959 sur les rapports entre l'Etat et les établissements d'enseignement privés ;
Vu la loi n 82-213 du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions ;
Vu la loi d'orientation n 92-125 du 6 février 1992 relative à l'administration territoriale de la République ;
Vu le décret n 93-1121 du 20 septembre 1993 relatif aux recueils des actes administratifs des communes, des départements, des régions, de la collectivité territoriale de Corse et des établissements publics de coopération ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 janvier 2000 :
- le rapport de M. LEMAI, président,
- et les conclusions de Mme COËNT-BOCHARD, commissaire du gouvernement ;
Sur la recevabilité de la demande de M. Joël X... et la légalité de la délibération du 11 janvier 1994 :
Considérant que l'extrait de la délibération du Conseil général du Cher en date du 11 janvier 1994, relative au financement du programme 1994 des équipements scolaires du premier degré publié au recueil des actes administratifs du Département mis à la disposition du public le 30 mai 1994 donnait le détail des subventions accordées par le Département sans faire apparaître que certaines de ces subventions étaient versées au profit d'établissements d'enseignement privés ; que la circonstance que la dernière page du recueil des actes administratifs rappelait, d'une manière générale, que les délibérations du Conseil général pouvaient être consultées à l'Hôtel du Département, ne pouvait suffire à pallier le caractère incomplet de la publication ; que, par suite, en admettant même que les conditions de mise à disposition du public du recueil concerné auraient été conformes aux prescriptions du décret susvisé du 20 septembre 1993, relatif aux recueils des actes administratifs des collectivités territoriales, la délibération litigieuse du 11 janvier 1994 n'a pas fait l'objet d'une publication susceptible de faire courir le délai de recours contentieux ; que si le Département du Cher soutient, en reprenant les déclarations de M. X... dans la presse locale, que ce dernier avait eu connaissance, au plus tard, en octobre 1994, de la portée exacte de la délibération litigieuse du 11 janvier 1994, cette circonstance n'était pas de nature à faire courir le délai de recours contentieux ouvert à celui-ci ; que c'est, dès lors, à bon droit que le Tribunal administratif a écarté la fin de non-recevoir opposée par le Département du Cher et tirée de la prétendue tardiveté de la demande de M. X..., dirigée contre ladite délibération, enregistrée au greffe du Tribunal administratif le 18 janvier 1995 ;
Considérant que le Département du Cher ne conteste pas que, comme l'a jugé le Tribunal administratif, l'aide financière accordée à des écoles primaires privées violent les dispositions de la loi susvisée du 30 octobre 1886 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le Département du Cher n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Orléans a annulé la délibération du Conseil général du Cher du 11 janvier 1994 en tant qu'elle accorde des subventions d'investissement à des organismes de gestion d'établissements privés d'enseignement primaire situés à Bourges, Saint-Martin d'Auxigny, Sancerre, Sancoins et Vierzon ;
Sur les conclusions de M. X... tendant à l'application des dispositions des articles L.8-2 et L.8-3 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L.8-2 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Lorsqu'un jugement ou un arrêt implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, le tribunal administratif ou la cour administrative d'appel, saisi de conclusions en ce sens, prescrit cette mesure, assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution, par le même jugement ou le même arrêt." ; qu'aux termes de l'article L.8-3 du même code : "Saisi de conclusions en ce sens, le tribunal ou la cour peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application de l'article L.8-2 d'une astreinte qu'il prononce dans les conditions prévues au quatrième alinéa de l'article L.8-4 et dont il fixe la date d'effet." ;
Considérant que l'exécution de l'arrêt confirmant l'annulation de la délibération du Conseil général du 11 janvier 1994 en tant qu'elle a accordé des subventions aux organismes de gestion desdits établissements privés d'enseignement primaire au motif que ces subventions étaient contraires à la loi implique nécessairement que le président du Conseil général du Cher ordonne le reversement des sommes encaissées par les organismes de gestion concernés ; qu'ainsi, il y a lieu, en application des dispositions précitées de l'article L.8-2, d'enjoindre au président du Conseil général du Cher, d'ordonner ce reversement dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; que, cependant, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction de l'astreinte prévue à l'article L.8-3 ;
Sur les conclusions de M. X... tendant à l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel de condamner le Département du Cher à payer à M. X... une somme de 1 000 F au titre des frais exposés par celui-ci et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête du Département du Cher est rejetée.
Article 2 : Il est enjoint au président du Conseil général du Cher d'ordonner, aux organismes de gestion concernés dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, de reverser des subventions accordées, en application de la délibération du Conseil général du 11 janvier 1994, aux établissements privés d'enseignement primaire situés à Bourges, Saint-Martin d'Auxigny, Sancerre, Sancoins et Vierzon.
Article 3 : Le Département du Cher versera à M. Joël X... une somme de mille francs (1 000 F) au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au Département du Cher, à M. Joël X... et au ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.