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30/11/1999 | FRANCE | N°98NT01216;99NT02290

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3e chambre, 30 novembre 1999, 98NT01216 et 99NT02290


Vu, I) le recours et le mémoire complémentaire, enregistrés respectivement au greffe de la Cour les 9 juin et 31 juillet 1998 sous le n 98NT01216, présentés par le ministre de l'agriculture et de la pêche ;
Le ministre demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 96-1612 du 12 mars 1998 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a annulé, à la demande de M. Robert X..., son arrêté du 25 juin 1996 le licenciant pour insuffisance professionnelle caractérisée à compter du 1er août 1996 ;
2 ) de décider qu'il sera sursis à l'exécution de ce jugement ;
Vu, I

I) la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 12 août 1998 sous le n 99N...

Vu, I) le recours et le mémoire complémentaire, enregistrés respectivement au greffe de la Cour les 9 juin et 31 juillet 1998 sous le n 98NT01216, présentés par le ministre de l'agriculture et de la pêche ;
Le ministre demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 96-1612 du 12 mars 1998 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a annulé, à la demande de M. Robert X..., son arrêté du 25 juin 1996 le licenciant pour insuffisance professionnelle caractérisée à compter du 1er août 1996 ;
2 ) de décider qu'il sera sursis à l'exécution de ce jugement ;
Vu, II) la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 12 août 1998 sous le n 99NT02290, présentée par M. Robert X... qui saisit la Cour d'une demande tendant à obtenir l'exécution du jugement n 96-1612 rendu le 12 mars 1998 par le Tribunal administratif de Rennes annulant, à sa demande, l'arrêté du ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation du 25 juin 1996 le licenciant pour insuffisance professionnelle à compter du 1er août 1996 ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la loi n 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
Vu le décret n 94-1017 du 18 novembre 1994 fixant les dispositions statutaires communes applicables aux corps des secrétaires administratifs des administrations de l'Etat et à certains corps analogues ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 novembre 1999 :
- le rapport de M. RENOUF, premier conseiller,
- les observations de Me BASCOULERGUE, avocat de M. Robert X...,
- et les conclusions de Mme COËNT-BOCHARD, commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes du ministre de l'agriculture et de la pêche et de M. Robert X... concernent la situation administrative de ce dernier et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'une seule décision ;
Considérant que, par arrêté du 25 juin 1996, le ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation a licencié pour insuffisance professionnelle caractérisée M. X..., à l'issue du stage complémentaire de six mois accompli en qualité de secrétaire administratif stagiaire des services déconcentrés du ministère ; que le ministre de l'agriculture et de la pêche fait appel du jugement du 12 mars 1998 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a annulé pour erreur manifeste d'appréciation cet arrêté, tandis que M. X... demande à la Cour d'ordonner son exécution et, à défaut, d'enjoindre à l'administration de le réintégrer à compter du 10 avril 1998 ;
Sur la légalité de l'arrêté du ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation du 25 juin 1996 :
Considérant qu'aux termes de l'article 7 du décret susvisé n 94-1017 du 18 novembre 1994 : "Les candidats reçus aux concours interne et externe sont nommés fonctionnaires stagiaires et accomplissent un stage d'une durée d'une année au cours duquel ils peuvent recevoir une formation particulière ... - A l'issue du stage, les stagiaires dont les services ont donné satisfaction sont titularisés. - Les stagiaires qui n'ont pas été titularisés à l'issue du stage peuvent être autorisés à accomplir un stage complémentaire d'une durée maximale d'un an. - Les stagiaires qui n'ont pas été autorisés à effectuer un stage complémentaire ou dont le stage complémentaire n'a pas donné satisfaction sont soit licenciés s'ils n'avaient pas préalablement la qualité de fonctionnaire, soit réintégrés dans leur corps d'origine ..." ;
Considérant que M. X..., reçu aux épreuves du concours externe de secrétaire administratif des services déconcentrés du ministère de l'agriculture a été nommé dans ce corps, en qualité de stagiaire, le 1er février 1995 et affecté à la Direction départementale de l'agriculture et de la forêt (D.D.A.F.) de la Dordogne à compter de cette même date dans le service d'économie agricole, assurant notamment l'instruction des dossiers des quotas laitiers ; qu'il n'est pas contesté que ce service ne disposait ni d'un personnel suffisant d'encadrement, ni d'un matériel informatique convenable ; que M. X... a ensuite été affecté successivement dans trois services de la direction départementale pour des périodes d'un mois après que le directeur départemental de l'agriculture et de la forêt de la Dordogne a demandé au ministre de muter géographiquement l'intéressé ; que ce dernier, par décision du 30 août 1995, a été muté à compter du 1er septembre 1995 à la Direction régionale de l'agriculture et de la forêt (D.R.A.F.) de Bretagne pour poursuivre son stage, qui devait initialement, en application des dispositions précitées de l'article 7 du décret du 18 novembre 1994, se terminer le 31 janvier 1996, mais avait été prolongé pour une période de six mois, expirant le 31 juillet 1996 ;

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment du rapport du directeur départemental de l'agriculture et de la forêt de la Dordogne du 26 juin 1995, que la mutation de M. X... à la D.R.A.F. de Bretagne a été motivée de manière déterminante en raison d'une fragilité psychologique de l'intéressé, qui n'est cependant établie par aucune pièce du dossier ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'étant affecté à la D.R.A.F. de Bretagne depuis le 1er septembre 1995, le directeur régional de l'agriculture, par lettre du 25 septembre 1995 adressée à l'ingénieur général de mission permanente d'inspection interrégionale, estimant que la période de stage que M. X... effectuait dans ses services comme une tentative ultime de rattrapage et demandant que celui-ci ne soit pas compris dans les effectifs de son service ;
Considérant, en troisième lieu, que, par un avis du 23 novembre 1995, date à laquelle M. X... n'avait pas encore effectué trois mois de stage dans les services de la D.R.A.F. de Bretagne, la commission administrative paritaire compétente émettait, au vu d'un rapport sur le seul travail accompli dans ce service, un avis négatif à sa titularisation mais favorable à la prolongation de son stage, décidée ensuite par un arrêté ministériel du 29 décembre 1995 ; que si le ministre pour justifier son arrêté de licenciement du 25 juin 1996, reproche à M. X... d'avoir essentiellement assumé à la D.R.A.F. de Bretagne des tâches correspondant à celles confiées à des agents de catégorie C alors qu'il avait vocation à être titularisé en catégorie B, il ne ressort pas des pièces du dossier que les fonctions attribuées à l'intéressé auprès du délégué régional à la formation professionnelle continue aient comporté de nombreuses attributions correspondant à un emploi de la catégorie B ;
Considérant, enfin, qu'il n'est pas contesté que M. X... n'a pas été convoqué aux sessions de formation organisées par son ministère pour les stagiaires, et qui, conformément à la lettre circulaire du ministre de l'agriculture et de la pêche en date du 22 décembre 1994 adressée à toutes les personnes admises au concours externe de secrétaire administratif des services déconcentrés, présentaient un caractère obligatoire ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... n'a jamais été placé en situation d'effectuer un stage dans les conditions prévues par les dispositions précitées de l'article 7 du décret n 94-1017 du 18 novembre 1994, pour permettre à l'administration de porter une appréciation objective sur son aptitude professionnelle ; qu'ainsi, le ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation ne pouvait légalement licencier l'intéressé pour insuffisance professionnelle caractérisée ; qu'il n'est, par suite, pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rennes a annulé son arrêté du 25 juin 1996 ;
Sur les conclusions de M. X... tendant à l'exécution du jugement attaqué du Tribunal administratif de Rennes :

Considérant que, dès lors qu'il est statué par le présent arrêt sur l'appel formé par le ministre de l'agriculture et de la pêche contre le jugement attaqué, les conclusions de M. X... tendant à ce que la Cour assure l'exécution dudit jugement sont devenues sans objet et il n'y a pas lieu d'y statuer ;
Sur les conclusions à fin de réintégration à compter du 10 avril 1998 présentées par M. X... :
Considérant que les conclusions susvisées doivent être regardées comme tendant à l'application des dispositions du premier alinéa de l'article L.8-2 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel aux termes desquelles : "Lorsqu'un jugement ou un arrêt implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, le tribunal administratif ou la cour administrative d'appel, saisi de conclusions en ce sens, prescrit cette mesure, assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution, par le même jugement ou le même arrêt" ;
Considérant que l'annulation de l'arrêté du ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation du 25 juin 1996 licenciant M. X... impose nécessairement au ministre l'obligation de le réintégrer pour qu'il effectue un stage conforme aux dispositions précitées de l'article 7 du décret n 94-1017 du 18 novembre 1994, jusqu'à ce qu'il soit de nouveau statué sur sa situation administrative ; que, par suite, M. X..., ainsi qu'il le demande, a droit à obtenir sa réintégration au ministère de l'agriculture et de la pêche, à compter cependant de la date à laquelle son licenciement a lui-même pris effet, soit le 1er août 1996 ; que, dès lors, contrairement à ce que demande M. X..., la Cour ne peut enjoindre au ministre de prononcer une réintégration qui ne prendrait effet qu'à compter du 10 avril 1998 ; que, par suite, les conclusions susvisées ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions de M. X... présentées dans les deux requêtes et tendant à l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'aux termes de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens" ; que l'article 43 de la loi susvisée du 10 juillet 1991, autorise le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle à demander au juge de condamner, dans les conditions prévues à l'article L.8-1 précité, la partie perdante au paiement d'une somme au titre des frais qu'il a exposés ; qu'en l'espèce, en l'absence des frais exposés par M. X..., autres que ceux pris en charge par l'Etat dans le cadre de l'aide juridictionnelle totale qui lui a été accordée par décision du 4 mai 1999, en ce qui concerne l'instance n 98NT01216, et par décision du 12 octobre 1999, en ce qui concerne l'instance n 99NT02290, ses conclusions tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser respectivement les sommes de 6 000 F et 5 000 F, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens des deux instances en litige, doivent être rejetées ;
Article 1er : Le recours du ministre de l'agriculture et de la pêche, enregistré sous le n 98NT01216 est rejeté.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. Robert X..., enregistrée sous le n 99NT02290, tendant à l'exécution du jugement du Tribunal administratif de Rennes du 12 mars 1998.
Article 3 : Les conclusions de M. Robert X... tendant à l'application, d'une part, des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel dans les requêtes n s 98NT01216 et 99NT02290, et, d'autre part, des dispositions de l'article L.8-2 du même code dans la requête n 98NT01216 sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'agriculture et de la pêche et à M. Robert X....


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 98NT01216;99NT02290
Date de la décision : 30/11/1999
Type d'affaire : Administrative

Analyses

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - CESSATION DE FONCTIONS - LICENCIEMENT - STAGIAIRES.

PROCEDURE - JUGEMENTS - FRAIS ET DEPENS - REMBOURSEMENT DES FRAIS NON COMPRIS DANS LES DEPENS.

PROCEDURE - JUGEMENTS - EXECUTION DES JUGEMENTS - PRESCRIPTION D'UNE MESURE D'EXECUTION.


Références :

Arrêté du 29 décembre 1995
Arrêté du 25 juin 1996
Arrêté du 10 avril 1998
Circulaire du 22 décembre 1994
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-2, L8-1
Décret 94-1017 du 18 novembre 1994 art. 7
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 43


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. RENOUF
Rapporteur public ?: Mme COËNT-BOCHARD

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;1999-11-30;98nt01216 ?
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