Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la Cour les 5 et 9 juin 1998, présentés pour la Chambre des métiers du Loiret, dont le siège est ..., par Me X..., avocat au barreau d'Orléans ;
La Chambre des métiers du Loiret demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 96-64 du 7 avril 1998 par lequel le Tribunal administratif d'Orléans l'a condamnée à verser à Mme Mauricette Y... une indemnité de 80 000 F en réparation du préjudice résultant de la faute commise par son président pour l'avoir licenciée irrégulièrement par décision du 3 mars 1995, et une somme de 4 000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
2 ) d'ordonner le sursis à l'exécution de ce jugement ;
3 ) de rejeter la demande présentée par Mme Y... devant le Tribunal administratif d'Orléans tendant à sa condamnation à lui verser une indemnité
totale de 567 145,25 F en réparation des différents préjudices causés par son licenciement et une somme de 18 090 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu l'arrêté du 19 juillet 1971 portant statut du personnel administratif des chambres des métiers ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 novembre 1999 :
- le rapport de M. RENOUF, premier conseiller,
- et les conclusions de M. MILLET, commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions de la Chambre des métiers du Loiret et de Mme Y... relatives à l'indemnité principale :
Considérant qu'aux termes de l'article 46 du statut du personnel administratif des chambres de métiers susvisé : "Après trois ans de congés continus ou trois ans de congés successifs pour cause de maladie ou accident sur une période de six ans comptés à partir de la première constatation médicale, l'agent qui ne peut reprendre ses fonctions peut être, au vu d'un certificat médical établi par le médecin de travail, reclassé dans un emploi pouvant lui convenir, ou licencié pour inaptitude physique ou, s'il en remplit les conditions, admis à la retraite. - En cas de litige, sur le point de savoir si l'emploi offert au titre du reclassement convient ou non à l'agent, la commission paritaire régionale visée à l'article 48 est appelée à émettre un avis, sauf en ce qui concerne les agents de la première catégorie, conformément à l'article 53. - Dans le cas où l'emploi offert ne peut convenir à l'agent, celui-ci est licencié. - En cas de licenciement, la décision est prise et notifiée dans les conditions prévues pour la nomination de l'agent. En cas de licenciement, l'agent bénéficiaire des dispositions de l'article 41 a droit à une indemnité égale à un mois de traitement par année de présence, sans que cette indemnité puisse excéder seize mois, ni être supérieure au traitement que l'agent aurait perçu s'il avait exercé ses fonctions jusqu'à l'âge de la retraite prévu à l'article 36. - Dans le cas où les agents visés aux alinéas précédents sont en état de reprendre un autre emploi au sein de la chambre de métiers, aucune indemnité ne leur est due." ;
Considérant qu'il est constant que la décision de licencier pour inaptitude physique Mme Y..., agent de service, a été prise par le président de la Chambre des métiers du Loiret le 3 mars 1995, sans que le médecin du travail ni, le cas échéant, la commission paritaire régionale aient été consultés dans les conditions prévues par l'article 46 précité du statut du personnel administratif des chambres des métiers ; qu'ainsi que l'a jugé à bon droit le Tribunal administratif d'Orléans, ni la circonstance que la Caisse primaire d'assurance maladie du Loiret avait, par lettre du 18 février 1994, informé Mme Y... qu'elle présentait une invalidité réduisant au moins des 2/3 sa capacité de travail ou de gain justifiant son classement dans la 2ème catégorie définie à l'article L.341-4 du code de la sécurité sociale, en qualité d'"invalides absolument incapables d'exercer une profession quelconque", et lui a attribué à titre temporaire et à compter du 14 janvier 1994, une pension d'invalidité, ni la circonstance que, par lettre du 23 février 1994, Mme Y... avait fait savoir qu'elle était dans l'impossibilité de reprendre son emploi, ne dispensaient la Chambre des métiers du Loiret de l'obligation de respecter les dispositions réglementaires précitées ; que l'illégalité ainsi commise était constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de la Chambre des métiers du Loiret ; que Mme Y..., était, dès lors, en droit d'obtenir réparation du préjudice direct et certain résultant de l'application de cette décision illégale ;
Considérant, toutefois, qu'il résulte de l'instruction que Mme Y... n'établit, ni même n'allègue, qu'elle aurait eu des chances sérieuses de bénéficier d'un reclassement au cas où la procédure imposée par l'article 46 précité du statut du personnel administratif des chambres des métiers aurait été régulièrement mise en uvre ; que, par suite, la Chambre des métiers du Loiret est fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'article 2 du jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Orléans l'a condamnée à payer à Mme Y... la somme de 80 000 F au titre du préjudice résultant de l'illégalité de la décision du 3 mars 1995 ; que, par voie de conséquence, les conclusions de l'appel incident présentées sur ce point par Mme Y... doivent être rejetées ;
Sur les conclusions de Mme Y... relatives à la prime légale de licenciement :
Considérant que les conclusions tendant à l'augmentation du montant de la prime légale de licenciement ont été présentées par Mme Y... en dehors du délai d'appel et se rapportent à un litige distinct de celui de l'appel formé dans les délais par la Chambre des métiers du Loiret ; que, par suite, ces conclusions sont irrecevables ;
Sur les conclusions relatives à l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant, en premier lieu, que Mme Y..., qui conserve le bénéfice de l'indemnité légale de licenciement, demeure, en ce qui concerne la première instance, une partie qui n'est pas perdante pour l'essentiel ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que le Tribunal administratif d'Orléans aurait fait une inexacte appréciation des circonstances de l'espèce en condamnant la Chambre des métiers du Loiret à payer à Mme Y... une somme de 4 000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; qu'ainsi, la Chambre des métiers du Loiret n'est pas fondée à demander l'annulation de l'article 3 du jugement attaqué ;
Considérant, en second lieu, que les dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel font obstacle à ce que la Chambre des métiers du Loiret, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante pour l'essentiel, soit condamnée à payer à Mme Y... la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par celle-ci et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'article 2 du jugement du Tribunal administratif d'Orléans du 7 avril 1998 est annulé.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la Chambre des métiers du Loiret est rejeté.
Article 3 : Les conclusions incidentes présentées par Mme Mauricette Y... et ses conclusions tendant à l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la Chambre des métiers du Loiret, à Mme Mauricette Y... et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.