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08/07/1999 | FRANCE | N°97NT01396

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3e chambre, 08 juillet 1999, 97NT01396


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 9 juillet 1997, présentée pour :
- M. Kaci A..., demeurant ...,
- et Z... Fatma Zohra Y..., épouse A..., demeurant à Chettia (Algérie),
par Me X..., avocat au barreau de Lille ;
M. et Mme A... demandent que la Cour :
1 ) annule le jugement n 96-3271 du 28 avril 1997 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision du 15 avril 1996 du Bureau des visas Algérie (ministère des affaires étrangères) refusant de délivrer à Mme A... un visa de long séjour ;<

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3 ) ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 9 juillet 1997, présentée pour :
- M. Kaci A..., demeurant ...,
- et Z... Fatma Zohra Y..., épouse A..., demeurant à Chettia (Algérie),
par Me X..., avocat au barreau de Lille ;
M. et Mme A... demandent que la Cour :
1 ) annule le jugement n 96-3271 du 28 avril 1997 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision du 15 avril 1996 du Bureau des visas Algérie (ministère des affaires étrangères) refusant de délivrer à Mme A... un visa de long séjour ;
2 ) annule pour excès de pouvoir la décision susvisée du 15 avril 1996 ;
3 ) enjoigne au ministre des affaires étrangères de délivrer un visa de long séjour à Mme A... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n 45-2658 du 2 novembre 1945, notamment son article 5 ;
Vu le décret n 47-77 du 13 janvier 1947 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 juin 1999 :
- le rapport de M. LEMAI, président,
- et les conclusions de Mme JACQUIER, commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision attaquée :
Considérant que les dispositions de l'article 4 du décret susvisé du 13 janvier 1947 relatif aux attributions des consuls en matière de passeports donnent aux consuls compétence pour viser, en se conformant aux instructions du ministre des affaires étrangères, les passeports, ou tous titres en tenant lieu, délivrés à des étrangers pour les territoires français ; qu'aux termes de l'article 6 bis de ce décret, dans sa rédaction issue du décret n 95-1005 du 5 septembre 1995 : "Dans des cas de circonstances exceptionnelles survenues dans les Etats de résidence des consuls, le ministre des affaires étrangères peut provisoirement conférer tout ou partie des attributions prévues aux articles 1 à 4 au directeur des Français à l'étranger et des étrangers en France du ministère des affaires étrangères." ;
Considérant que la décision attaquée du 15 avril 1996, qui rejette la demande de délivrance d'un visa de long séjour présentée par Mme A..., ressortissante algérienne, résidant en Algérie, émane du "Bureau visas Algérie", dépendant de la Direction des Français à l'étranger et des étrangers en France du ministère des affaires étrangères ; que le directeur des Français à l'étranger et des étrangers en France ne justifie d'aucune décision du ministre des affaires étrangères prise sur le fondement des dispositions précitées de l'article 6 bis du décret du 13 janvier 1947 lui conférant, pour statuer sur la demande de Mme A..., les attributions confiées par l'article 4 du même décret aux services consulaires français en Algérie ; que la décision du 15 avril 1996 est dès lors illégale pour avoir été prise par une autorité incompétente ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens de la requête, les requérants sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif a rejeté leur demande tendant à l'annulation de ladite décision ;
Sur les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de délivrer un visa de long séjour à Mme A... :
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L.8-2 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Lorsqu'un jugement ou un arrêt implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, le tribunal administratif ou la cour administrative d'appel, saisi de conclusions en ce sens, prescrit cette mesure, assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution, par le même jugement ou le même arrêt." ;
Considérant, en premier lieu, que l'exécution du présent arrêt qui annule le refus de délivrer un visa à Mme A... pour un motif tiré de l'incompétence de l'auteur de cette décision n'implique pas nécessairement la délivrance du visa sollicitée ;

Considérant, en second lieu, que si les requérants ont également fait valoir à l'appui de leurs conclusions en annulation de la décision litigieuse que le refus opposé méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le ministre des affaires étrangères a estimé, pour refuser à Mme A..., qui a épousé en Algérie en 1992, un ressortissant français avec lequel elle a eu un enfant né en 1993 et vivant également en Algérie, le visa de long séjour qu'elle sollicitait, que la présence sur le territoire de l'intéressée constituerait une menace pour l'ordre public ; que le ministre soutient sur ce point que M. A... est connu des services de police pour ses activités militantes en faveur des mouvements extrémistes islamistes et que Mme A... arbore elle-même les signes extérieurs d'un engagement religieux extrémiste de nature à troubler l'ordre public ; que, dans les circonstances de l'espèce, la décision attaquée, dont les motifs ne reposent pas sur des faits matériellement inexacts ni ne sont entachés d'une erreur manifeste d'appréciation, n'a pas porté au droit des intéressés au respect de leur vie familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel elle a été prise ; que l'annulation du refus de visa ne peut donc trouver également son fondement dans la méconnaissance de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions susmentionnées à fin d'injonction n'entrent pas dans le champ d'application de l'article L.8-2 précité du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et ne sont donc pas recevables ;
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Nantes du 28 avril 1997 et la décision du 15 avril 1996 refusant de délivrer un visa à Mme Fatma Zohra A... sont annulés.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme A... est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Kaci A..., à Mme Fatma Zohra A... et au ministre des affaires étrangères.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 97NT01396
Date de la décision : 08/07/1999
Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

ETRANGERS - ENTREE EN FRANCE - VISAS - a) Délivrance - Autorité compétente - Directeur des Français à l'étranger - Absence sauf attribution de compétence par le ministre en cas de circonstances exceptionnelles dans l'Etat de résidence du consul normalement compétent - b) Annulation du refus de visa pour incompétence - Annulation impliquant la délivrance du visa - Absence.

335-005-01 a) L'article 4 du décret du 13 janvier 1947 relatif aux attributions des consuls en matière de passeports leur donne compétence pour délivrer les visas, tandis que l'article 6 bis du même décret prévoit que, dans des cas de circonstances exceptionnelles survenues dans les Etats de résidence des consuls, le ministre des affaires étrangères peut provisoirement conférer tout ou partie des attributions des consuls au directeur des Français à l'étranger et des étrangers en France. En l'absence de décision du ministre des affaires étrangères procédant à un transfert d'attributions au profit du directeur des Français à l'étranger et des étrangers en France, le "Bureau visas Algérie", dépendant de la direction des Français à l'étranger et des étrangers en France du ministère des affaires étrangères, est incompétent pour statuer sur une demande de visa présentée par une Algérienne, résidant en Algérie. b) En cas d'annulation, pour un motif tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte, de la décision refusant la délivrance d'un visa à un étranger, les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 8-2 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, tendant à ce que soit prescrite la délivrance du visa demandé sont rejetées, le motif d'annulation n'impliquant pas nécessairement la délivrance du visa et, en l'espèce, le moyen de légalité interne tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ayant été écarté.

PROCEDURE - JUGEMENTS - EXECUTION DES JUGEMENTS - PRESCRIPTION D'UNE MESURE D'EXECUTION - Absence - Annulation - pour incompétence de l'auteur de l'acte - d'un refus de visa.

54-06-07-008 En cas d'annulation, pour un motif tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte, de la décision refusant la délivrance d'un visa à un étranger, les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 8-2 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, tendant à ce que soit prescrite la délivrance du visa demandé sont rejetées, le motif d'annulation n'impliquant pas nécessairement la délivrance du visa et, en l'espèce, le moyen de légalité interne tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ayant été écarté.


Références :

Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-2
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 8
Décret 47-77 du 13 janvier 1947 art. 4, art. 6 bis
Décret 95-1005 du 05 septembre 1995


Composition du Tribunal
Président : M. Chevalier
Rapporteur ?: M. Lemai
Rapporteur public ?: Mme Jacquier

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;1999-07-08;97nt01396 ?
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