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27/05/1999 | FRANCE | N°97NT00227

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3e chambre, 27 mai 1999, 97NT00227


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 14 février 1997, présentée pour M. Eric X..., demeurant 35, bis rue du Général de Gaulle à Pont de l'Arche (27340), par Me AGUERA, avocat au barreau de Rouen ;
M. X... demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n s 96-298 - 96-643 du 29 novembre 1996 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté ses demandes tendant à l'annulation et au sursis à exécution de la décision du directeur régional des services pénitentiaires de Lille du 8 novembre 1995 mettant fin à ses fonctions de médecin généraliste au Cent

re de détention de Val de Reuil et à la condamnation de l'Etat à lui vers...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 14 février 1997, présentée pour M. Eric X..., demeurant 35, bis rue du Général de Gaulle à Pont de l'Arche (27340), par Me AGUERA, avocat au barreau de Rouen ;
M. X... demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n s 96-298 - 96-643 du 29 novembre 1996 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté ses demandes tendant à l'annulation et au sursis à exécution de la décision du directeur régional des services pénitentiaires de Lille du 8 novembre 1995 mettant fin à ses fonctions de médecin généraliste au Centre de détention de Val de Reuil et à la condamnation de l'Etat à lui verser sa rémunération jusqu'à la régularisation de la procédure ;
2 ) d'annuler la décision du 8 novembre 1995 et de condamner l'Etat à lui verser sa rémunération jusqu'à la régularisation de la procédure, ainsi qu'une somme de 50 000 F en réparation du préjudice subi ;
3 ) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 15 000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs ;
Vu la loi n 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
Vu la loi n 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;
Vu le décret n 78-1308 du 13 décembre 1978 fixant la rémunération des médecins, chirurgiens-dentistes, dentistes, vétérinaires et pharmaciens qui apportent leur concours au fonctionnement des services médicaux relevant des administrations de l'Etat et de ses établissements publics à caractère administratif ou à caractère culturel et scientifique ;
Vu le décret n 86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents non titulaires de l'Etat pris pour l'application de l'article 7 de la loi n 84-16 du 11 janvier 1984 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 avril 1999 :
- le rapport de Mme LISSOWSKI, premier conseiller,
- les observations de Me DELAPORTE, substituant Me AGUERA, avocat de M. Eric X..., requérant,
- et les conclusions de Mme COËNT-BOCHARD, commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du directeur régional des services pénitentiaires de Lille du 8 novembre 1995 mettant fin aux fonctions de M. X... à compter du 31 décembre 1995 :
Considérant que M. X..., a été recruté en qualité de médecin généraliste au Centre de détention de Val de Reuil, par une décision du ministre de la justice du 9 février 1990, "pour une durée renouvelable (par reconduction expresse) de trois années à compter du 5 septembre 1989" ; qu'en vertu de cette même décision, il lui était alloué deux cents vacations annuelles d'une heure ; que, pour soutenir que la décision du 8 novembre 1995 mentionnée ci-dessus serait irrégulière, M. X... fait valoir qu'il était titulaire d'un contrat à durée indéterminée ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'en raison des conditions mentionnées ci-dessus, figurant dans la décision de recrutement de M. X... en date du 9 février 1990, ce dernier doit être regardé comme ayant été engagé par un contrat à durée déterminée ; que le 5 septembre 1992, le contrat initial de M. X... étant venu à expiration et l'intéressé ayant néanmoins poursuivi l'exercice de ses fonctions sans que l'administration ait pris une décision expresse de renouvellement, il se trouvait ainsi titulaire d'un contrat, dont l'administration n'établit pas qu'il aurait dû y être mis fin légalement le 31 décembre 1995, date à laquelle la décision du 8 novembre 1995 du directeur régional des services pénitentiaires de Lille devait prendre effet ; que, par suite, M. X... est fondé à soutenir qu'il a fait l'objet d'une mesure de licenciement qui devait respecter les dispositions de l'article 47 du décret susvisé du 17 janvier 1986 ;
Considérant qu'aux termes de l'article 47 du décret du 17 janvier 1986 : "Le licenciement est notifié à l'intéressé par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Cette lettre précise le ou les motifs du licenciement et la date à laquelle celui-ci doit intervenir compte tenu des droits à congés annuels restant à courir et de la durée du préavis" ;
Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que la décision du 8 novembre 1995 le licenciant de ses fonctions comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et satisfait ainsi aux prescriptions de l'article 3 de la loi susvisée du 11 juillet 1979 ;
Considérant, en second lieu, que M. X... soutient que cette décision n'aurait pas respecté le préavis de deux mois prévu par les dispositions de l'article 46 du décret du 17 janvier 1986 au profit des agents "qui ont au moins deux ans de services" ; qu'il est constant que la décision litigieuse n'a été assortie d'aucun délai de préavis alors que l'intéressé, ce que l'administration ne conteste d'ailleurs pas, était en droit d'en bénéficier ; que toutefois la méconnaissance du délai de préavis institué par l'article 46 du décret n'est pas de nature à entraîner l'annulation en soi de la décision de licenciement, mais à rendre seulement celle-ci illégale en tant qu'elle prend effet avant l'expiration du délai de deux mois décompté à partir du jour où l'intéressé a reçu notification de la décision de licenciement ; qu'ainsi, la décision du 8 novembre 1995 licenciant M. X... était illégale en tant qu'elle prenait effet le 31 décembre 1995 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen a rejeté dans sa totalité sa demande d'annulation de la décision du 8 novembre 1995 ;
Sur les conclusions indemnitaires présentées par M. X... :
Considérant qu'il est constant que M. X... n'a pas saisi l'administration d'une réclamation relative à ses droits à indemnité, en méconnaissance des dispositions de l'article R.102 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Considérant que l'administration ayant en première instance opposée une fin de non-recevoir aux conclusions indemnitaires présentées par M. X..., celui-ci n'est pas fondé à soutenir que le contentieux aurait été lié sur ce point ; que ces conclusions tendant à ce que l'Etat soit condamné à réparer le préjudice qu'il a subi à la suite de son licenciement sont irrecevables et doivent, par suite, être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que les dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel font obstacle à ce que M. X..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à l'Etat la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des mêmes dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, de condamner l'Etat à payer à M. X... une somme de 6 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La décision du 8 novembre 1995 du directeur régional des services pénitentiaires de Lille mettant fin aux fonctions de M. Eric X... est annulée en tant que cette décision a pris effet le 31 décembre 1995.
Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Rouen du 29 novembre 1996 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à M. Eric X... une somme de six mille francs (6 000 F) au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. Eric X... et les conclusions de l'Etat tendant à l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont rejetés.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Eric X... et au Garde des Sceaux, ministre de la justice.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 97NT00227
Date de la décision : 27/05/1999
Sens de l'arrêt : Annulation partielle réformation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - CESSATION DE FONCTIONS - LICENCIEMENT - AUXILIAIRES - AGENTS CONTRACTUELS ET TEMPORAIRES - Méconnaissance du préavis - Effets.

36-10-06-02, 36-12-03-01 La circonstance qu'un agent contractuel recruté pour une durée indéterminée et ayant au moins deux ans de service ait été licencié sans avoir bénéficié du préavis de deux mois prévu par l'article 46 du décret du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents non titulaires de l'Etat est de nature, non pas à entraîner l'annulation totale de la décision de licenciement, mais seulement à rendre celle-ci illégale en tant qu'elle prend effet avant l'expiration du délai de deux mois décompté à partir du jour où l'intéressé a reçu notification de la décision de licenciement.

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - AGENTS CONTRACTUELS ET TEMPORAIRES - FIN DU CONTRAT - LICENCIEMENT - Méconnaissance du préavis - Effets.


Références :

Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R102, L8-1
Décret 86-83 du 17 janvier 1986 art. 47, art. 46
Loi 79-587 du 11 juillet 1979 art. 3


Composition du Tribunal
Président : M. Chevalier
Rapporteur ?: Mme Lissowski
Rapporteur public ?: Mme Coënt-Bochard

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;1999-05-27;97nt00227 ?
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