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17/02/1999 | FRANCE | N°96NT02103

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2e chambre, 17 février 1999, 96NT02103


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 15 octobre 1996, présentée par M. Guy X..., demeurant "Le Chemin Vert" 41100 Areines (Loir-et-Cher) ;
M. X... demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 94-1314 en date du 6 août 1996 par lequel le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande dirigée contre la décision en date du 5 mai 1994 par laquelle la commission départementale d'aménagement foncier de Loir-et-Cher a rejeté sa réclamation relative aux opérations de remembrement de la commune d'Ouzouer-le-Doyen ;
2 ) d'annuler ladite décision ;
V

u les autres pièces du dossier ;
Vu la Convention européenne de sauvegarde...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 15 octobre 1996, présentée par M. Guy X..., demeurant "Le Chemin Vert" 41100 Areines (Loir-et-Cher) ;
M. X... demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 94-1314 en date du 6 août 1996 par lequel le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande dirigée contre la décision en date du 5 mai 1994 par laquelle la commission départementale d'aménagement foncier de Loir-et-Cher a rejeté sa réclamation relative aux opérations de remembrement de la commune d'Ouzouer-le-Doyen ;
2 ) d'annuler ladite décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code rural ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 janvier 1999 :
- le rapport de M. MARGUERON, premier conseiller,
- les observations de M. X...,
- et les conclusions de M. LALAUZE, commissaire du gouvernement ;

En ce qui concerne le compte des biens de communauté, n 222 :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens invoqués :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L.123-1 du code rural : "Sauf accord des propriétaires et exploitants intéressés, le nouveau lotissement ne peut allonger la distance moyenne des terres au centre d'exploitation principal, si ce n'est dans la mesure nécessaire au regroupement parcellaire" ;
Considérant qu'en ce qui concerne le compte des biens de communauté de M. et Mme X..., n 222, la distance moyenne pondérée appréciée par rapport au centre d'exploitation a été portée de 930 mètres à 1 549 mètres; que cet important éloignement ne trouve pas sa justification dans le regroupement parcellaire des biens de communauté, le compte n 222 ayant reçu 2 lots en échange d'apports consistant en 3 lots, dont 2, qui représentaient l'essentiel des apports, situés à proximité du centre d'exploitation ; qu'il suit de là que le requérant est fondé à soutenir que la décision attaquée est intervenue en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L.123-1 du code rural en ce qui concerne ce compte ;
En ce qui concerne le compte des biens propres de M. X..., n 220 :
Sur les moyens relatifs à la composition irrégulière de la commission départementale d'aménagement foncier, à l'enquête sur le projet d'un nouveau remembrement dans la commune, à la nécessité d'établir de nouvelles conventions entre propriétaires et locataires avant que le remembrement puisse être ordonné et à l'irrégularité des enquêtes publiques relatives au périmètre de remembrement et au classement des biens soumis à celui-ci :
Considérant qu'à l'appui de sa demande présentée devant le Tribunal administratif d'Orléans et dirigée contre la décision en date du 5 mai 1994 de la commission départementale d'aménagement foncier de Loir-et-Cher rejetant sa réclamation relative aux opérations de remembrement d'Ouzouer-le-Doyen, en ce qui concerne le compte de ses biens propres, n 220, M. X... n'a invoqué que des moyens de légalité interne, tirés de la violation des règles de fond du remembrement rural ; que, par suite, il n'est pas recevable à soulever pour la première fois en appel les moyens susmentionnés, qui ne sont pas d'ordre public et reposent sur une cause juridique distincte de celle sur laquelle étaient fondés les moyens qu'il avait présentés devant le tribunal administratif ;
Sur les moyens tirés de la méconnaissance de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du code civil :

Considérant que M. X... n'est pas fondé à soutenir que les dispositions du code rural relatives au remembrement seraient contraires à l'article 1er du protocole additionnel n 1 à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, selon lequel : "nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international ..." ; que, par ailleurs, il n'appartient pas au juge administratif d'apprécier la conformité à d'autres dispositions de valeur législative, qui figurent dans le code civil, des règles édictées par les dispositions législatives du code rural et sur le fondement desquelles a été prise la décision attaquée ; que, par suite, les moyens ci-dessus analysés doivent être rejetés ;
Sur les moyens relatifs aux modifications apportées à la voirie à l'occasion du remembrement :
Considérant, d'une part, que le conseil municipal est seul compétent pour décider la création, la suppression ou la modification des chemins ruraux ; qu'il ressort des pièces du dossier que, par une délibération du 5 juin 1990, le conseil municipal d'Ouzouer-le-Doyen a approuvé le réseau des chemins ruraux qui résultait du remembrement, tel que proposé par la commission départementale d'aména-gement foncier et indiqué sur le plan annexé à ladite délibération ; que la circonstance qu'il n'en ait pas pris l'initiative, mais ait approuvé la proposition qui lui était faite par la commission départementale d'aménagement foncier est sans incidence sur la légalité de cette modification ; qu'il suit de là que M. X... n'est pas fondé à soutenir que l'établissement des chemins ruraux de la commune aurait été décidé par la commission départementale d'aménagement foncier, en méconnaissance de la compétence du conseil municipal en la matière ;
Considérant, d'autre part, que les dispositions de l'article L.123-8 du code rural, qui donnent entière compétence aux commissions de remembrement tant pour créer que pour supprimer les chemins d'exploitation, font obstacle à ce que s'appliquent aux décisions prises par ces mêmes commissions les dispositions de l'article L.162-3 du même code, en vertu desquelles les chemins d'exploitation ne peuvent être supprimés que du consentement de tous les propriétaires qui ont le droit de s'en servir ; qu'en outre, les dispositions de l'article R.123-16 du code rural autorisent l'intégration au réseau des chemins ruraux de la commune des chemins d'exploitation créés à l'occasion des opérations de remembrement ; que cette intégration, ainsi qu'il ressort des pièces du dossier, a été demandée et acceptée par délibérations prises, respectivement, par le bureau de l'association foncière de remembrement d'Ouzouer-le-Doyen et le conseil municipal de cette commune ; que M. X... n'est, dès lors, en tout état de cause, pas fondé à soutenir que la propriété des chemins d'exploitation compris dans le périmètre du remembrement aurait fait l'objet d'une transmission irrégulière à la commune en l'absence d'accord des propriétaires concernés ;
Sur le moyen tiré de l'existence d'un reliquat de masse commune et de son attribution illégale à la commune et à l'association foncière de remembrement :

Considérant que la circonstance que la commune d'Ouzouer-le-Doyen, qui était propriétaire de terres comprises dans le périmètre du remembrement, a reçu des attributions supérieures à ses apports, au demeurant en valeur de productivité et non en superficie, n'est pas par elle-même de nature à établir l'existence d'un reliquat de masse commune et une attribution illégale de celui-ci à la commune ; qu'il résulte des indications, non contestées dans leur teneur par le requérant, données par le ministre de l'agriculture et de la pêche en ce qui concerne l'affectation des terrains attribués à l'association foncière de remembrement que ces terrains étaient destinés à des travaux ou ouvrages de la nature de ceux, connexes aux opérations de remembrement, visés à l'article L.123-8 du code rural dans sa rédaction applicable en l'espèce ; qu'en particulier, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'aménagement d'une aire d'enrouleurs pour l'irrigation sur la parcelle ZM 11 n'aurait pas le caractère d'un travail collectif ayant pour objet la distribution des eaux utiles, au sens des dispositions de cet article ;
Sur le moyen tiré de la violation de l'article L.123-1 du code rural :
Considérant que M. X... ne peut se prévaloir, pour soutenir que les dispositions susmentionnées de l'article L.123-1 du code rural auraient été méconnues, de ce que le remembrement de ses biens situées aux environs du lieudit "Bouillonville" aurait dû être effectué en prenant en compte, non son centre d'exploitation, qui est situé dans le bourg d'Ouzouer-le-Doyen, mais une grange qu'il possède dans ce lieudit et qui ne constituait par elle-même un centre d'exploitation ; qu'il ressort, par ailleurs, des pièces du dossier que le remembrement des biens du requérant a eu pour effet de ramener la distance moyenne pondérée de ceux-ci par rapport à son centre d'exploitation précité de 1 649 mètres à 1 494 mètres ; qu'ainsi, la règle sus-énoncée n'a pas été méconnue ;
Sur le moyen tiré de la violation de l'article L.123-2 du code rural :
Considérant qu'aux termes de l'article L.123-2 du code rural : "Les bâtiments, ainsi que les terrains qui en constituent des dépendances indispensables et immédiates, peuvent être inclus dans le périmètre de remembrement. Toutefois ...ces bâtiments et terrains doivent, sauf accord exprès de leur propriétaire, être réattribués sans modification de limites" ;

Considérant que la grange, mentionnée ci-dessus, appartenant à M. X... ainsi que sa parcelle d'assiette cadastrée B n 49 ont été exclues du périmètre du remembrement ; que si le requérant soutient que sa parcelle d'apport cadastrée B n 50 aurait dû lui être réattribuée en totalité, en raison de sa proximité de ladite grange, d'une part il ne peut utilement faire valoir à cet égard la circonstance que ce bâtiment aurait été un complément utile pour le fonctionnement de l'exploitation au regard de la localisation de ses biens propres avant le remembrement, d'autre part il ne ressort pas des pièces du dossier que la parcelle B n 50 aurait constitué, du seul fait de sa proximité, une dépendance indispensable et immédiate de la grange, au sens des dispositions de l'article L.123-2 du code rural ;
Sur le moyen tiré de la violation de l'article L.123-4 du code rural :
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L.123-4 du code rural : "Chaque propriétaire doit recevoir, par la nouvelle distribution, une superficie globale équivalente, en valeur de productivité réelle, à celle des terrains qu'il a apportés, déduction faite de la surface nécessaire aux ouvrages collectifs mentionnés à l'article L.123-8 et compte-tenu des servitudes maintenues ou créées" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'en échange d'apports réduits de 27 hectares 88 ares et 45 centiares, représentant une valeur de 267 044 points, M. X... a reçu des terres d'une surface de 29 hectares 02 ares et 85 centiares, représentant 268 186 points ; que M. X... soutient que la règle d'équivalence n'en aurait pas moins été méconnue, dès lors que ses attributions consisteraient, dans une proportion beaucoup plus importante que ses apports, dans des terres classées dans des catégories inférieures et que le classement de ces terres d'attributions serait, au surplus, entaché d'erreurs en sa défaveur ;

Considérant, toutefois, qu'il ressort des documents produits au dossier, relatifs aux apports et attributions du compte, que si la superficie attribuée en terres de classe 1, dont la valeur culturale à l'hectare est de 10 000 points, est sensiblement inférieure à celle apportée dans la même classe, cette diminution est compensée aux trois-quarts par un surcroît d'attributions en classe 2, dont la valeur est de 9 300 points ; que, compte-tenu tant de cette faible différence entre les valeurs culturales respectives des deux premières classes que des circonstances que M. X... a également bénéficié d'un surcroît d'attributions en classe 3, dont la valeur est de 7 800 points, et qu'aussi bien les apports et les attributions dans les classes inférieures ont été de peu d'importance, les modifications ainsi apportées à la répartition des biens de l'intéressé entre les différentes classes ne peuvent être regardées comme ayant entraîné un déséquilibre grave dans les conditions d'exploitation ; qu'en outre, il n'est pas établi, en l'absence, notamment, d'éléments de comparaison avec les terres d'apport ou bien avec les parcelles étalons retenues pour l'établissement du projet de remembrement, que la répartition qui a été faite entre les cinq premières classes de terre de la parcelle ZA 10, qui représente la quasi-totalité de la surface attribuée, aurait fait l'objet d'erreurs au détriment du requérant ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... est seulement fondé à demander l'annulation de la décision attaquée de la commission départementale d'aménagement foncier de Loir-et-Cher en tant qu'elle rejette sa réclamation relative au compte n 222 ;
Article 1er : Le jugement en date du 6 août 1996 du Tribunal administratif d'Orléans est annulé entant qu'il rejette les conclusions de la demande de M. X... dirigées contre la décision en date du 5 mai 1994 de la commission départementale d'aménagement foncier de Loir-et-Cher en ce qui concerne le compte n 222 du remembrement d'Ouzouer-le-Doyen. La décision du 5 mai 1994 est annulée dans la même mesure.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X... est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. X... et au ministre de l'agriculture et de la pêche.


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