Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 4 juillet 1996, présentée pour M. Jean-Pierre Y..., demeurant ..., par Me X..., avocat ;
M. Y... demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 94-510, en date du 4 juin 1996, par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant, à titre principal, à l'annulation de la décision du préfet de l'Eure, en date du 21 février 1994, prononçant son exclusion définitive du revenu de remplacement à compter du 1er mars 1993, à titre subsidiaire, à l'annulation de ladite décision en tant qu'elle porte sur la période postérieure au 22 juin 1993 ;
2 ) d'annuler la décision du 21 février 1994 précitée ou, à titre subsidiaire, de l'annuler en tant qu'elle porte sur la période postérieure au 22 juin 1993 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu la loi n 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 mai 1998 :
- le rapport de M. CHAMARD, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme COËNT-BOCHARD, commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par le jugement attaqué, en date du 4 juin 1996, le Tribunal administratif de Rouen a rejeté la demande de M. Jean-Pierre Y... tendant, à titre principal, à l'annulation de la décision en date du 21 février 1994, par laquelle le préfet de l'Eure a confirmé, sur recours gracieux, sa décision du 8 décembre 1993 de l'exclure définitivement du bénéfice du revenu de remplacement prévu par l'article L.351-1 du code du travail et, à titre subsidiaire, à l'annulation de ladite décision, en tant qu'elle porte sur la période postérieure au 22 juin 1993 ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant, que le tribunal administratif n'a pas répondu au moyen du requérant tiré de ce qu'il n'aurait pas perçu indûment son revenu de remplacement dès lors que celui-ci ne dépassait pas, comme cela est admis, 80 % de son ancien revenu ; qu'ainsi, le jugement, qui est entaché de défaut de réponse à un moyen, doit, sans qu'il soit besoin de statuer sur l'autre moyen relatif à sa régularité, être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. Y... devant le Tribunal administratif de Rouen ;
Sur la légalité de la décision contestée :
Considérant qu'en vertu de l'article L.351-17 du code du travail, le droit au revenu de remplacement institué par l'article L.351-1 au profit des travailleurs involontairement privés d'emploi s'éteint, notamment, en cas de fraude ou de fausse déclaration et les sommes indûment perçues donnent lieu à répétition ; qu'aux termes de l'article R.351-28 du même code : "Sont exclues à titre temporaire ou définitif, du revenu de remplacement ... les personnes qui ...3. Ont fait des déclarations inexactes ou présenté des attestations mensongères en vue de toucher indûment le revenu de remplacement ..., ou ont, en toute connaissance de cause, perçu indûment ledit revenu" et qu'aux termes de l'article R.311-3-2 du même code : "Les changements de situation que les demandeurs d'emploi sont tenus de porter à la connaissance de l'Agence nationale pour l'emploi (A.N.P.E) et qui, affectant leur situation, sont susceptibles d'avoir une incidence sur leur inscription ou leur classement comme demandeurs d'emploi sont les suivants : 1. L'exercice de toute activité professionnelle, même occasionnelle ou réduite et quelle que soit sa durée ..." ;
Considérant, en premier lieu, qu'en se référant à sa décision antérieure, qui faisait état de l'exercice par M. Y... depuis le 1er mars 1993 d'une activité rémunérée de vacataire enquêteur pour le compte du cabinet A.P.R Investigations et en indiquant que ladite décision était confirmée, sur recours gracieux, pour "reprise d'activité salariée non déclarée", le préfet de l'Eure a suffisamment motivé sa décision du 21 février 1994, au regard des dispositions de l'article 3 de la loi susvisée du 11 juillet 1979 modifiée ;
Considérant, en second lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que M. Y..., qui a été employé de fin février 1993 au 22 juin 1993 comme vacataire enquêteur "stagiaire" par le cabinet A.P.R Investigations, s'est abstenu, en méconnaissance des dispositions de l'article R.311-3-2 précité du code du travail, de déclarer à l'A.N.P.E cette nouvelle activité professionnelle ; que, dans ces conditions, et alors même que, d'une part, il n'est pas établi qu'il aurait perçu, ainsi qu'il l'allègue, une rémunération autre que le remboursement de ses frais de déplacements et que, d'autre part, cette rémunération ne dépasserait pas 80 % de sa rémunération brute mensuelle antérieure, circonstance pouvant lui permettre de conserver momentanément le bénéfice du versement d'un revenu de remplacement calculé sur des bases réduites, l'intéressé a continué de percevoir, sciemment et indûment, son revenu de remplacement à taux plein ; que, dès lors, le préfet de l'Eure, en l'excluant du bénéfice dudit revenu n'a pas commis d'erreur de droit, ni, compte tenu de la durée et de la nature de l'emploi exercé, d'erreur manifeste d'appréciation en donnant à cette exclusion un caractère définitif ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, que M. Y... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision susvisée du préfet de l'Eure ni même, à titre subsidiaire, l'annulation de ladite décision en tant qu'elle porte sur une période postérieure au 22 juin 1993 ;
Article 1er : Le jugement en date du 4 juin 1996 du Tribunal administratif de Rouen est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. Y... devant le Tribunal administratif de Rouen est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Y... et au ministre de l'emploi et de la solidarité.