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14/05/1998 | FRANCE | N°96NT01598

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3e chambre, 14 mai 1998, 96NT01598


Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 19 juillet 1996, présenté par le ministre de l'intérieur ;
Le ministre demande à la Cour :
1 ) d'annuler l'article 1er du jugement n s 95-1247 - 96-637, en date du 14 juin 1996, par lequel le Tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté du 13 juin 1995, prononçant l'expulsion du territoire français de M. Houcine X... ;
2 ) de rejeter la demande d'annulation de l'arrêté susvisé, présentée par M. X... devant le Tribunal administratif de Rouen ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Convention européen

ne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'or...

Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 19 juillet 1996, présenté par le ministre de l'intérieur ;
Le ministre demande à la Cour :
1 ) d'annuler l'article 1er du jugement n s 95-1247 - 96-637, en date du 14 juin 1996, par lequel le Tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté du 13 juin 1995, prononçant l'expulsion du territoire français de M. Houcine X... ;
2 ) de rejeter la demande d'annulation de l'arrêté susvisé, présentée par M. X... devant le Tribunal administratif de Rouen ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 avril 1998 :
- le rapport de M. CHAMARD, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme COËNT-BOCHARD, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 23 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France : "Sous réserve des dispositions de l'article 25, l'expulsion peut être prononcée par arrêté du ministre de l'intérieur si la présence sur le territoire français d'un étranger constitue une menace grave pour l'ordre public ( ...)" ; que l'article 25 de la même ordonnance dispose : "Ne peuvent faire l'objet d'un arrêté d'expulsion, en application de l'article 23 : ( ...) 3 L'étranger qui justifie par tous moyens résider en France habituellement depuis plus de quinze ans ainsi que l'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans ( ...) ; 4 L'étranger, marié depuis au moins un an avec un conjoint de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé et que le conjoint ait conservé la nationalité française ; 5 L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français, résidant en France, à la condition qu'il exerce, même partiellement, l'autorité parentale à l'égard de cet enfant ou qu'il subvienne effectivement à ses besoins ; ( ...) Par dérogation aux dispositions du présent article, l'étranger entrant dans l'un des cas énumérés aux 3 , 4 , 5 et 6 peut faire l'objet d'un arrêté d'expulsion en application des articles 23 et 24 s'il a été condamné définitivement à une peine d'emprisonnement ferme au moins égale à cinq ans" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X... a été condamné définitivement à des peines d'emprisonnement ferme de cinq et sept ans ; que, dès lors, le ministre de l'intérieur qui était défendeur en première instance, est, contrairement à ce que soutient M. X..., recevable à invoquer en appel, la méconnaissance, par les premiers juges, des dispositions précitées du dernier alinéa de l'article 25 ; que le ministre est également fondé, compte tenu desdites dispositions, et alors même que l'intéressé remplirait les conditions mentionnées aux 3 , 4 et 5 du même article 25, à soutenir que c'est à tort que, pour annuler son arrêté du 13 juin 1995 prononçant l'expulsion du territoire français de celui-ci, le Tribunal administratif de Rouen a estimé qu'il aurait commis une erreur de droit en fondant sa décision sur les dispositions des articles 23 à 25 de l'ordonnance de 1945 ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X... tant devant la Cour que devant le tribunal administratif ;
Considérant, en premier lieu, que, pour prononcer l'expulsion contestée, le ministre s'est fondé sur les faits ayant entraîné les condamnations précitées, à savoir : coups et blessures volontaires avec préméditation ou port d'arme, vol simple, viol commis par un ascendant ou une personne ayant autorité sur la victime, viol commis sur la personne d'un mineur de quinze ans, et sur le comportement général de l'intéressé ; que, dès lors, le moyen invoqué par celui-ci, fondé sur ce que le ministre aurait commis une erreur de droit en ne se fondant que sur ses condamnations pénales, manque en fait ;

Considérant, en deuxième lieu, que le ministre n'était pas lié par l'avis défavorable à l'expulsion formulé par la commission d'expulsion et que cet avis n'est pas de nature, compte tenu de la gravité des faits susrappelés, à établir que le ministre aurait commis une erreur manifeste d'appréciation sur le caractère de gravité de la menace pour l'ordre public que constituait la présence de l'intéressé sur le territoire français ;
Considérant, en troisième lieu, qu'alors même que M. X... est en France depuis 1973, qu'il est marié à une française, père de six enfants et qu'il n'aurait plus de famille en Tunisie, la mesure d'expulsion prise à son encontre ne constitue pas, eu égard à la gravité de ses actes rappelés ci-dessus, une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie familiale et n'est pas intervenue, contrairement à ce qu'il allègue, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté du 13 juin 1995 ;
Article 1er : L'article 1er du jugement du Tribunal administratif de Rouen, en date du 14 juin 1996, est annulé.
Article 2 : La demande de M. X... tendant à l'annulation de l'arrêté du ministre de l'intérieur du 13 juin 1995, prononçant son expulsion du territoire français, est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. X....


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 96NT01598
Date de la décision : 14/05/1998
Type d'affaire : Administrative

Analyses

ETRANGERS - EXPULSION - MOTIFS.

ETRANGERS - EXPULSION - DROIT AU RESPECT DE LA VIE FAMILIALE.


Références :

Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 8
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 23, art. 25


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. CHAMARD
Rapporteur public ?: Mme COËNT-BOCHARD

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;1998-05-14;96nt01598 ?
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