La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/03/1998 | FRANCE | N°94NT00714

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3e chambre, 26 mars 1998, 94NT00714


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 11 juillet 1994, présentée pour la commune de Caule-Sainte-Beuve (Seine-Maritime), représentée par son maire en exercice, par Me Y..., avocat ;
La commune de Caule-Sainte-Beuve demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 91-1067, en date du 10 mai 1994, par lequel le Tribunal administratif de Rouen a, d'une part, annulé la décision en date du 14 septembre 1991, par laquelle le maire de la commune a licencié M. Henri X... de son emploi de cantonnier contractuel et, d'autre part, l'a condamnée à verser à M. X... la somme

de 80 280,27 F avec intérêts au taux légal à compter du 12 novemb...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 11 juillet 1994, présentée pour la commune de Caule-Sainte-Beuve (Seine-Maritime), représentée par son maire en exercice, par Me Y..., avocat ;
La commune de Caule-Sainte-Beuve demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 91-1067, en date du 10 mai 1994, par lequel le Tribunal administratif de Rouen a, d'une part, annulé la décision en date du 14 septembre 1991, par laquelle le maire de la commune a licencié M. Henri X... de son emploi de cantonnier contractuel et, d'autre part, l'a condamnée à verser à M. X... la somme de 80 280,27 F avec intérêts au taux légal à compter du 12 novembre 1991 ;
2 ) de rejeter les demandes présentées par M. X... devant le Tribunal administratif de Rouen ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée ;
Vu le décret n 88-145 du 15 février 1988 modifié ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 février 1998 :
- le rapport de M. CHAMARD, conseiller,
- et les conclusions de Mme COËNT-BOCHARD, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par jugement du 10 mai 1994, le Tribunal administratif de Rouen a, d'une part, annulé la décision du 14 septembre 1991, par laquelle le maire de la commune de Caule-Sainte-Beuve a licencié M. Henri X... de son emploi de cantonnier à temps partiel, d'autre part, condamné cette commune à verser à M. X..., avec intérêts au taux légal, la somme de 80 280,27 F correspondant à la réparation des préjudices nés de l'illégalité de la décision susvisée du 14 septembre 1991 et de la modification unilatérale du contrat liant M. X... à la commune, intervenue en juin 1989 ; que la commune de Caule-Sainte-Beuve relève appel principal de ce jugement dont elle demande l'annulation en toutes ses dispositions ; que M. X... a conclu au rejet de la requête de la commune et, par la voie de l'appel incident, demande à ce que la somme de 80 280,27 F soit portée à 187 909,25 F, outre les intérêts de droit ;
Sur le licenciement ;
En ce qui concerne la légalité de la décision du 14 septembre 1991 :
Considérant que M. X... avait la qualité d'agent non titulaire de la fonction publique territoriale ; qu'aux termes de l'article 36 du décret du 15 février 1988, pris pour application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : "Les sanctions disciplinaires susceptibles d'être appliquées aux agents non titulaires sont : ( ...) 4 le licenciement sans préavis ni indemnité de licenciement" ;
Considérant, en premier lieu, que si la commune soutient que le contrôle du travail effectué par M. X... était impossible, il ressort des pièces du dossier que, conformément aux directives qui lui avaient été données, celui-ci avait déposé en mairie des relevés de travail ; qu'en deuxième lieu, en se bornant à invoquer le mécontentement des habitants de la commune à l'égard des activités de cantonnier de l'intéressé, la commune n'établit pas la mauvaise qualité ou l'insuffisance du travail accompli ; qu'enfin si la non exécution, à la date du 26 juin 1989, d'une tâche qui lui avait été confiée le 8 juin 1989, seul manquement attesté par les pièces du dossier, était de nature à justifier une sanction disciplinaire, ce manquement ne pouvait, à lui-seul, entraîner, sans erreur manifeste d'appréciation, une mesure de licenciement ; que, dès lors, c'est à juste titre que le Tribunal administratif de Rouen a annulé la décision susvisée ;
En ce qui concerne les droits à indemnités de M. X... à raison de son licenciement :
Considérant que, par un mémoire enregistré au greffe du tribunal administratif le 20 janvier 1994, la commune de Caule-Sainte-Beuve a conclu au rejet au fond des différentes demandes indemnitaires de M. X... ; qu'ainsi, elle a lié le contentieux et ne pouvait utilement invoquer, ultérieurement, l'irrecevabilité desdites conclusions pour défaut de demande préalable ;

Considérant qu'en raison de l'annulation de la décision susvisée de licenciement du 14 septembre 1991, qui emporte droit à réintégration à cette date, les indemnités de préavis, de licenciement et de perte des allocations de chômage, demandées par M. X..., ne sauraient, ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal administratif, être accordées ; que, dans les circonstances de l'espèce, il sera fait une juste appréciation des troubles de toute nature dans les conditions d'existence de M. X..., résultant de son licenciement illégal, en portant de 4 000 F à 10 000 F l'indemnité qui lui avait été accordée, à ce titre, par le tribunal ;
Sur les indemnités pour modification des conditions d'emploi de M. X... entre le 6 juin 1989 et le 14 septembre 1991 :
Considérant que si, par une délibération du 13 juin 1983, le conseil municipal de la commune de Caule-Sainte-Beuve a décidé que M. X... serait embauché à l'essai, pour un mois, à raison de trois jours par semaine et que si ces conditions de travail ont été tacitement maintenues pendant plusieurs années, l'autorité municipale a pu néanmoins légalement décider, le 6 juin 1989, que, dorénavant, M. X... ne travaillerait plus que pour certaines tâches qui lui seraient attribuées par le maire ; qu'ainsi, en fixant ces nouvelles modalités, au demeurant non contestées à l'époque par l'intéressé, l'autorité municipale n'a commis aucune faute de nature à engager la responsabilité de la commune ; que, par suite, c'est à tort que le tribunal administratif a accordé à M. X... une somme de 76 280,27 F représentant la différence entre les rémunérations calculées sur la base de trois jours par semaine et celles qu'il a perçues en fonction de ces nouvelles modalités, pour la période courant du 6 juin 1989 au 14 septembre 1991, date de son licenciement ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de Caule-Sainte-Beuve est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen l'a condamnée à verser à M. X... une somme supérieure à 10 000 F ; qu'en revanche, M. X... n'est pas fondé à demander, par la voie de l'appel incident, à ce que lui soit allouée une somme supérieure à 10 000 F, outre les intérêts de droit à compter du 12 novembre 1991 ;
Article 1er : La somme de quatre vingt mille deux cent quatre vingt sept francs vingt sept centimes (80 287,27 F) que la commune de Caule-Sainte-Beuve a été condamnée à verser à M. X... par le jugement du Tribunal administratif de Rouen du 10 mai 1994 est ramenée à dix mille francs (10 000 F), outre les intérêts de droit à compter du 12 novembre 1991.
Article 2 : L'article 2 du jugement susvisé est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la commune de Caule-Sainte-Beuve, ensemble le surplus des conclusions incidentes de M. X... sont rejetés.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Caule-Sainte-Beuve, à M. X... et au ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 94NT00714
Date de la décision : 26/03/1998
Type d'affaire : Administrative

Analyses

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - DISCIPLINE - SANCTIONS - ERREUR MANIFESTE D'APPRECIATION.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - FAITS SUSCEPTIBLES OU NON D'OUVRIR UNE ACTION EN RESPONSABILITE - RESPONSABILITE ET ILLEGALITE - ABSENCE D'ILLEGALITE ET DE RESPONSABILITE.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - FAITS SUSCEPTIBLES OU NON D'OUVRIR UNE ACTION EN RESPONSABILITE - RESPONSABILITE ET ILLEGALITE - ILLEGALITE ENGAGEANT LA RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE.


Références :

Décret 88-145 du 15 février 1988 art. 36
Loi 84-53 du 26 janvier 1984 art. 136


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. CHAMARD
Rapporteur public ?: Mme COËNT-BOCHARD

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;1998-03-26;94nt00714 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award