Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Nantes le 5 décembre 1989 sous le n° 89NT01510, présentée pour la Société nationale des chemins de fer français (S.N.C.F.) représentée par ses représentants légaux en exercice, domiciliés en cette qualité au siège social, ..., 9ème ;
La S.N.C.F. demande que la Cour :
1°) annule l'ordonnance en date du 21 novembre 1989 du président du tribunal administratif de Nantes statuant en référé sur la demande de M. X..., entrepreneur, en ce qu'elle décide qu'il sera procédé à une expertise en présence de la S.N.C.F.,
2°) rejette la demande de référé de M. X...,
3°) suspende, à titre provisoire, l'exécution de l'ordonnance ci-dessus visée du Président du tribunal administratif de Nantes ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience du 21 mars 1990 :
- le rapport de M. Saluden, conseiller,
- les observations de Me Gautier, avocat de la S.N.C.F., de Me Lauriot, avocat de M. X... et de Me Houssin, avocat de la société "Entreprise Industrielle",
- et les conclusions de M. Cadenat, commissaire du gouvernement,
Sur l'intervention des sociétés "Spie Centre Ouest" et "EGTP Le Guillou" :
Considérant que les sociétés "Spie Centre Ouest" et "EGTP Le Guillou" ne se prévalent pas d'un droit auquel l'arrêt à rendre est susceptible de préjudicier ; que, dès lors, leur intervention n'est pas recevable ;
Sur les conclusions tendant à la réformation de l'ordonnance de référé en ce qu'elle décide qu'il sera procédé à une expertise en présence de M. X... et de la S.N.C.F. :
Considérant que la S.N.C.F. a, par lettre de commande du 7 avril 1988, attribué certains lots des travaux de construction de la nouvelle gare ferroviaire pour voyageurs dite "gare Sud" de Nantes à un groupement d'entreprises dont fait partie la société "Entreprise Industrielle" ; que celle-ci a sous-traité les lots "carrelage-faïence" et "sols minces" à M. Perera, bénéficiaire d'un paiement direct par le maître de l'ouvrage ; qu'à la suite de la constatation en juillet 1989 de désordres affectant les sols et carrelages, un litige a surgi entre ces deux entreprises et a été porté devant les tribunaux de l'ordre judiciaire ; que la société "Entreprise Industrielle" s'est opposée au paiement direct par la S.N.C.F. à M. Perera notamment d'une facture établie par celui-ci, d'un montant de 53 765,28 F, relative à une situation de travaux du lot "sols minces" ; que, saisi d'une demande d'expertise par M. X..., le président du tribunal administratif de Nantes, statuant en référé, le 21 novembre 1989, a ordonné que celle-ci ait lieu en présence de la S.N.C.F. mais a rejeté les conclusions du demandeur tendant à ce que la société "Entreprise Industrielle" soit présente aux opérations d'expertise ; que la S.N.C.F. et, par la voie du recours incident, la société "Entreprise Industrielle" font appel de cette ordonnance en ce qu'elle décide une expertise ;
Considérant qu'aux termes de l'article R.102 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel dans sa rédaction applicable à la date de l'ordonnance attaquée : "Le président du tribunal administratif ou de la cour administrative d'appel ou le magistrat que l'un d'eux délègue peut, sur simple requête qui, devant le tribunal administratif, sera recevable même en l'absence d'une décision administrative préalable, prescrire toutes mesures utiles d'expertise ou d'instruction" ;
Considérant que les litiges relatifs au paiement direct par le maître de l'ouvrage public d'un sous-traitant qui a été accepté et dont les conditions de paiement ont été agréées, mettent en cause l'exécution d'un marché de travaux publics ; que, par suite, ces litiges relèvent de la compétence du juge administratif, même si ce marché n'a pas été conclu entre le maître de l'ouvrage et le sous-traitant ;
Considérant que la demande de M. X... ne tendait qu'à voir ordonner une mesure d'instruction ; que, contrairement à ce que soutient la S.N.C.F., un litige l'oppose à M. X..., relatif au paiement direct ; qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le règlement de ce litige est de nature à ressortir à la compétence de la juridiction administrative ; que le moyen tiré par la S.N.C.F. de ce que le président du tribunal administratif de Nantes aurait fait une application inexacte des dispositions de l'article R.46 du code précité dans sa rédaction alors applicable est inopérant, dès lors que cet article est relatif à une règle de détermination de la compétence territoriale des tribunaux administratifs ; que ni l'existence de procédures en cours devant les tribunaux de l'ordre judiciaire, ni l'absence de la société "Entreprise Industrielle" à l'expertise, ne sauraient suffire à enlever à celle-ci son caractère d'utilité ; que l'ordonnance prise le 21 novembre 1989 ne préjudicie pas au principal ;
Considérant que, si dans un mémoire produit après l'expiration du délai de recours, la S.N.C.F. fait valoir que, faute de rejeter la demande de M. X..., le président du tribunal administratif devait, pour donner à l'expertise réclamée sa pleine utilité, y associer la société "Entreprise Industrielle", elle ne peut être regardée comme concluant ainsi à l'annulation de la partie de l'ordonnance attaquée rejetant la demande de M. X... en ce qu'elle tendait à ce que la société "Entreprise Industrielle" soit présente aux opérations d'expertise, dès lors que, en tout état de cause, de telles conclusions nouvelles présentées tardivement, seraient irrecevables ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la S.N.C.F. et la société "Entreprise Industrielle" ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président du tribunal administratif de Nantes a décidé qu'il sera procédé à une expertise en présence de M. X... et de la S.N.C.F. ;
Sur les conclusions du recours incident de la société "Entreprise Industrielle" tendant à la réformation de l'ordonnance de référé en ce qu'elle ne concerne pas les sociétés "Spie Centre Ouest" et "EGTP Le Guillou" :
Considérant que ces conclusions soulèvent un litige différent de celui qui résulte de l'appel principal ; que, dès lors, elles ne sont pas recevables ;
Sur les conclusions de la société "Entreprise Industrielle" tendant, à titre subsidiaire, à ce que la Cour lui donne acte de son accord pour s'associer aux opérations d'expertise décidées par l'ordonnance attaquée :
Considérant que de telles conclusions sont irrecevables devant le juge administratif ; qu'elles doivent, par suite, être rejetées ;
Article 1 - Les interventions des sociétés "Spie Centre Ouest" et "EGTP Le Guillou" ne sont pas admises.
Article 2 - La requête de la S.N.C.F. et le recours incident de la société "Entreprise Industrielle" sont rejetés.
Article 3 - Le présent arrêt sera notifié à la S.N.C.F., à la société "Entreprise Industrielle", à Me Y..., syndic à la liquidation judiciaire de M. X..., entrepreneur, ainsi qu'aux sociétés "Spie Centre Ouest" et "EGTP Le Guillou".