La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/09/1989 | FRANCE | N°89NT00663

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1e chambre, 27 septembre 1989, 89NT00663


VU la décision en date du 5 janvier 1989 enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Nantes le 6 janvier 1989, par laquelle le président de la 1ère sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la Cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-9O6 du 2 septembre 1988, la requête présentée contre l'ordonnance du juge des référés du Tribunal administratif de Rouen en date du 29 août 1988 par M. Joël X... et enregistrée au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat le 15 septembre 1988, sous le n° 1O1975 ;
VU la

requête susmentionnée enregistrée au greffe de la Cour administrati...

VU la décision en date du 5 janvier 1989 enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Nantes le 6 janvier 1989, par laquelle le président de la 1ère sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la Cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-9O6 du 2 septembre 1988, la requête présentée contre l'ordonnance du juge des référés du Tribunal administratif de Rouen en date du 29 août 1988 par M. Joël X... et enregistrée au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat le 15 septembre 1988, sous le n° 1O1975 ;
VU la requête susmentionnée enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Nantes le 6 janvier 1989, sous le n° 89NTOO663, présentée par M. Joël X..., demeurant "Hameau de Radicatel", à Lillebonne (7617O) et tendant à ce que la Cour :
- annule l'ordonnance du 29 août 1988 par laquelle le juge des référés du Tribunal administratif de Rouen lui a enjoint de libérer le terrain dit "lot n° 29" dont le port autonome du Havre est propriétaire à la Cerlangue (Seine-Maritime) et ce, sous peine d'avoir à payer une astreinte de 1OO F par jour de retard ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code rural ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987, le décret n° 88-7O7 du 9 mai 1988 et le décret n° 88-9O6 du 2 septembre 1988 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience du 12 septembre 1989 :
- le rapport de M. DUPUY, conseiller,
- et les conclusions de M. MARCHAND, commissaire du gouvernement,

Sur la compétence de la juridiction administrative :
Considérant que par une convention du 11 juin 1987, le port autonome du Havre a concédé à M. Joël X..., conformément aux clauses du cahier des charges annexé à cette convention, l'usage "à titre essentiellement précaire et révocable", pour une durée de trois ans à compter du 1er janvier 1987 et moyennant le paiement d'une redevance annuelle de 763 F l'hectare, d'un terrain de 21 ha 49 a 6O ca dénommé "lot n° 29", faisant partie de son domaine privé sis à La Cerlangue (Seine-Maritime) ; qu'en application de l'article 2 dudit cahier des charges, la résiliation de la concession a été prononcée d'office par décision du port autonome en date du 5 février 1988, avec effet à compter du 31 janvier 1988 ;
Considérant que si l'article L.415-11 du code rural prévoit que les baux du domaine des établissements publics, lorsqu'ils portent sur des biens ruraux constituant ou non une exploitation agricole complète, sont soumis aux dispositions du statut du fermage, il résulte de l'instruction que le cahier des charges de concession d'usage temporaire dont M. X... a accepté les stipulations en signant la convention à laquelle il est annexé, précise en son article 2, que la concession est accordée à titre essentiellement précaire et révocable et que le port autonome se réserve le droit de la résilier, à tout moment, moyennant un préavis de trois mois et sans aucune indemnité au profit du preneur lorsque les terrains concédés sont repris en vue de leur utilisation définitive ; que, d'ailleurs, les nécessités du fonctionnement du port autonome du Havre justifient le caractère précaire donné à cette convention ;
Considérant qu'en raison de la présence, dans le cahier des charges, de clauses exorbitantes du droit commun et, notamment, de la possibilité de résiliation d'office prévue à l'article 2, la convention passée entre le port autonome du Havre et M. X... revêtait le caractère d'un contrat administratif ; qu'il n'appartient, dès lors, qu'à la juridiction administrative de statuer sur les litiges nés de son exécution ; qu'il suit de là que, contrairement à ce que soutient M. X..., le juge administratif et, notamment, le juge administratif des référés, était compétent pour connaître de la demande du port autonome du Havre ;
Sur le fond :
Considérant qu'aux termes de l'article R.1O2 du code des tribunaux administratifs, dans sa rédaction alors en vigueur : "Dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il délègue peut, sur simple requête qui sera recevable même en l'absence d'une décision administrative préalable, ordonner toutes mesures utiles sans faire préjudice au principal et sans faire obstacle à l'exécution d'aucune décision administrative" ;

Considérant que M. X... n'ayant pas obtempéré à l'injonction qui lui a été faite par le port autonome le 27 avril 1988 de libérer les lieux dans le délai de huit jours, le juge des référés du Tribunal administratif de Rouen a, par l'ordonnance attaquée, estimé que la demande d'expulsion présentée par cet établissement public à l'encontre du susnommé ne se heurtait à aucune contestation sérieuse dès lors que le port autonome s'était borné à faire application de la convention d'occupation et, après avoir reconnu un caractère urgent à la libération du terrain occupé, a enjoint M. X... de libérer ledit terrain sous peine d'avoir à payer une astreinte de 1OO F par jour de retard ; que, contrairement aux motifs qui constituent le support inséparable du dispositif de cette ordonnance, la demande présentée par le port autonome du Havre se heurte à une contestation sérieuse de M. X... basée sur les stipulations de la convention précitée du 11 juin 1987 et relative, d'une part, au caractère de manquement à ses obligations contractuelles des négligences qui lui sont reprochées, d'autre part, à l'application, en l'espèce, des modalités de résiliation de la concession en cas de reprise du terrain concédé en vue de son utilisation définitive, fixées par le paragraphe 2.3 de l'article 2 du cahier des charges annexé à cette convention ; qu'ainsi ladite ordonnance impliquait nécessairement, outre que les négligences reprochées à M. X... étaient contraires à ses obligations contractuelles, que le port autonome du Havre avait fait une exacte application des clauses de résiliation appliquées en l'espèce ; que la question ainsi tranchée par le juge des référés est de nature à préjudicier au principal ; qu'il suit de là que le requérant qui, en contestant les modalités d'application de la convention du 11 juin 1987 par le port autonome du Havre, doit être regardé comme ayant soulevé ce moyen, est fondé à demander l'annulation de l'ordonnance du 29 août 1988 par laquelle le juge des référés du Tribunal administratif de Rouen lui a enjoint, sous astreinte, de libérer le terrain mis contractuellement à sa disposition par cet établissement public ;
Article 1 - L'ordonnance en date du 29 août 1988 par laquelle le juge des référés du Tribunal administratif de Rouen a enjoint à M. Joël X... de libérer le terrain dénommé "lot n° 29" dont le port autonome du Havre est propriétaire à La Cerlangue (Seine-Maritime) sous peine d'avoir à payer une astreinte de 1OO F par jour de retard, est annulée.
Article 2 - Le présent arrêt sera notifié à M. Joël X... et au port autonome du Havre.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 89NT00663
Date de la décision : 27/09/1989
Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Référé

Analyses

- RJ1 COMPETENCE - REPARTITION DES COMPETENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - COMPETENCE DETERMINEE PAR UN CRITERE JURISPRUDENTIEL - CONTRATS - CONTRATS ADMINISTRATIFS - CONTRATS COMPORTANT DES CLAUSES EXORBITANTES DU DROIT COMMUN - Bail autorisant l'exploitation d'une parcelle de terrain appartenant au domaine privé d'un établissement public - Clauses de résiliation unilatérale sans indemnité (1).

17-03-02-03-02-02, 24-02-03-01-02, 39-01-02-01-03 Si l'article L.415-11 du code rural prévoit que les baux du domaine des établissements publics, lorsqu'ils portent sur des biens ruraux constituant ou non une exploitation agricole complète, sont soumis aux dispositions du statut du fermage, il résultait du cahier des charges annexé à la convention que le port autonome du Havre avait passée avec l'appelant pour l'autoriser à exploiter temporairement une parcelle de terrain dépendant de son domaine privé, que cette autorisation était accordée à titre essentiellement précaire et révocable et que la convention pouvait être résiliée à tout moment par le propriétaire, moyennant un préavis de trois mois et sans aucune indemnité au profit du preneur lorsque les terrains concédés étaient repris en vue de leur utilisation définitive. Compte-tenu de ces clauses exorbitantes du droit commun, cette convention présentait le caractère d'un contrat administratif. Dès lors, il n'appartenait qu'à la juridiction administrative de statuer sur les litiges nés de son exécution.

DOMAINE - DOMAINE PRIVE - CONTENTIEUX - COMPETENCE DE LA JURIDICTION ADMINISTRATIVE - CONTENTIEUX DE LA GESTION - Litige relatif à une convention concédant à un agriculteur l'exploitation de terrains appartenant à un établissement public de l'Etat en vertu d'un contrat administratif.

54-03-01-03-01 Ordonnance d'expulsion du concessionnaire de l'exploitation d'une dépendance du domaine privé d'un établissement public rendue alors que le concessionnaire avait opposé une contestation sérieuse à la demande d'expulsion. Cette contestation étant relative, d'une part, au caractère de manquement à ses obligations contractuelles des négligences qui lui étaient reprochées, d'autre part, à l'application en l'espèce des clauses de résiliation de la concession, l'ordonnance attaquée en impliquant nécessairement, outre que lesdites négligences contrevenaient aux obligations contractuelles, que l'établissement public avait fait une exacte application des clauses de résiliation appliquées en l'espèce, a tranché une question de nature à préjudicier au principal.

- RJ1 MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - NOTION DE CONTRAT ADMINISTRATIF - NATURE DU CONTRAT - CONTRATS AYANT UN CARACTERE ADMINISTRATIF - CONTRATS CONTENANT DES CLAUSES EXORBITANTES DU DROIT COMMUN - Clauses de résiliation unilatérale sans indemnité (1).

PROCEDURE - PROCEDURES D'URGENCE - REFERE TENDANT AU PRONONCE D'UNE MESURE URGENTE - POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE DES REFERES - IMPOSSIBILITE D'ORDONNER DES MESURES QUI PREJUDICIERAIENT AU PRINCIPAL - Mesure préjudiciant au principal - Demande d'expulsion se heurtant à une contestation sérieuse.


Références :

Code des tribunaux administratifs R102
Code rural L415-11

1.

Cf. TC, 1975-11-27, Leclert, p. 800


Composition du Tribunal
Président : M. Capion
Rapporteur ?: M. Dupuy
Rapporteur public ?: M. Marchand

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;1989-09-27;89nt00663 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award