Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les décisions tacites du 13 mars 2021 et du 1er août 2021 par lesquelles le maire de la commune d'Ogy-Montoy Flanville ne s'est pas opposé aux déclarations préalables déposées par la SCI Ramos et M. A... relatives, respectivement, à un changement de destination d'un local à usage professionnel d'entrepôt-bureau situé sur la parcelle cadastrée section 18 n° 136 sur le territoire de cette commune vers un usage d'habitation et à la rénovation de la maison et la modification des ouvertures.
Par un jugement n° 2201140 du 20 avril 2023, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé les décisions contestées.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 12 juin 2023 et le 20 juillet 2023, M. D... A... , représenté par Me Bourchenin, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 20 avril 2023 ;
2°) de rejeter les demandes présentées par M. B... devant le tribunal administratif de Strasbourg ;
3°) de mettre à la charge de M. B... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- M. B... n'a pas intérêt à agir contre les décisions litigieuses ;
- M. B... ne justifie pas avoir accompli les formalités prévues à l'article L. 600-1 du code de l'urbanisme ;
- sa demande est tardive ;
- l'avis de la chambre d'agriculture n'était pas nécessaire ;
- la règle de distance de 50 mètres prévue par le règlement sanitaire départemental n'est pas applicable et elle n'a, en tout état de cause, pas été méconnue ;
- aucun risque pour la salubrité publique n'est établi pour l'application de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;
- en l'absence de changement de destination et en l'absence d'illégalité de la première non opposition, les travaux, objet de la seconde déclaration préalable, n'étaient pas soumis à permis de construire ;
- la règle de distance de 50 mètres prévue par le règlement sanitaire départemental n'est pas applicable à la seconde déclaration préalable.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 novembre 2023, M. C... B..., représenté par Me Seyve, conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. A... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 12 novembre 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 29 novembre 2024 à 12 heures.
Les parties ont été informées, par un courrier du 28 mai 2025, qu'en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que les moyens de légalité soulevés par M. A... dans son mémoire complémentaire sont fondés sur des causes juridiques distinctes de ceux invoqués dans sa requête et constituent, par suite, une demande nouvelle qui, présentée après l'expiration du délai d'appel, est tardive et donc irrecevable.
Par un mémoire, enregistré le 5 juin 2025, M. A..., représenté par Me Bourchenin, a présenté ses observations sur le moyen relevé d'office.
Par un mémoire, enregistré le 11 juin 2025, M. B..., représenté par Me Seyve, a présenté ses observations sur le moyen relevé d'office.
Un mémoire, présenté par M. A..., a été enregistré le 13 juin 2025.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Berthou,
- les conclusions de M. Meisse, rapporteur public,
- et les observations de Me Seyve, représentant M. B....
Considérant ce qui suit :
1. La SCI Ramos a déposé, le 9 décembre 2020, une déclaration préalable portant sur le changement de destination d'un local à usage professionnel d'entrepôt-bureau situé sur la parcelle cadastrée section 18 n° 136 sur le territoire de la commune d'Ogy-Montoy Flanville vers un usage d'habitation. Le maire de la commune ne s'est pas opposé à la déclaration préalable et, par un arrêté du 29 avril 2021, a délivré un certificat de non-opposition à la déclaration préalable. Le 1er juillet 2021, M. A..., acquéreur de l'immeuble, a déposé une nouvelle déclaration préalable portant sur la rénovation de la maison et la modification des ouvertures. Le maire ne s'est pas opposé à cette déclaration préalable et, par un arrêté du 28 septembre 2021, lui a délivré un certificat de non-opposition à cette déclaration préalable. M. A... demande à la cour d'annuler le jugement du 20 avril 2023 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a annulé les deux décisions tacites de non-oppositions.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la recevabilité des demandes de première instance :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation ".
3. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.
4. Il ressort des pièces du dossier que l'immeuble objet des déclarations litigieuses est situé à quelques mètres seulement d'un bâtiment appartenant à M. B..., agriculteur, et servant à la stabulation de ses bovins et que les nuisances sonores et olfactives inhérentes à cette activité professionnelle et subies à proximité immédiate des bâtiments de stabulations sont à l'origine de conflits de voisinage avec les propriétaires et occupants de l'ancien couvent situé à l'Ouest de la ferme. Par ailleurs, eu égard à la nature d'habitation du projet autorisé par les décisions attaquées et de la proximité de son exploitation agricole, M. B... se prévaut d'une atteinte aux règles de distance minimale réciproque applicables aux constructions agricoles et non agricoles, édictées par le règlement sanitaire départemental. Dans ces conditions, M. B... justifie d'une atteinte aux conditions de jouissance de ses parcelles de nature à lui conférer un intérêt à agir contre les décisions tacites de non opposition ayant pour objet le changement de destination de la construction immédiatement voisine et sa rénovation.
5. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que M. B... a notifié son recours à la commune d'Ogy-Montoy Flanville, à la SCI Ramos et à M. A... par lettre recommandée le 21 février 2022, soit dans le délai prévu à l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme.
6. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 600-3 du code de l'urbanisme : " Aucune action en vue de l'annulation d'un permis de construire ou d'aménager ou d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable n'est recevable à l'expiration d'un délai de six mois à compter de l'achèvement de la construction ou de l'aménagement. / Sauf preuve contraire, la date de cet achèvement est celle de la réception de la déclaration d'achèvement mentionnée à l'article R. 462-1. ".
7. M. A... ne justifie ni d'une date de réception en mairie de la déclaration d'achèvement des travaux litigieux, ni d'une date effective de changement de destination. Il n'est, par suite, pas fondé à soutenir que la demande formée par M. B... contre la première décision tacite de non-opposition du 13 mars 2021 aurait été introduite tardivement eu égard aux dispositions de l'article R. 600-3 précité du code de l'urbanisme.
8. En quatrième lieu, aux termes de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme : " Le délai de recours contentieux à l'encontre d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15. ". Aux termes de son article R. 424-15 : " Mention du permis explicite ou tacite ou de la déclaration préalable doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l'arrêté ou dès la date à laquelle le permis tacite ou la décision de non-opposition à la déclaration préalable est acquis et pendant toute la durée du chantier. Cet affichage n'est pas obligatoire pour les déclarations préalables portant sur une coupe ou un abattage d'arbres situés en dehors des secteurs urbanisés. (...) / Un arrêté du ministre chargé de l'urbanisme règle le contenu et les formes de l'affichage. " et aux termes de son article A. 424-16 : " Le panneau prévu à l'article A. 424-15 indique le nom, la raison sociale ou la dénomination sociale du bénéficiaire, le nom de l'architecte auteur du projet architectural, la date de délivrance, le numéro du permis, la nature du projet et la superficie du terrain ainsi que l'adresse de la mairie où le dossier peut être consulté. (...) ".
9. Il ressort des pièces du dossier que le panneau d'affichage de la décision tacite de non-opposition du 1er août 2021 ne comportait aucune autre mention que le numéro de la déclaration et une date de délivrance du 28 septembre 2021 correspondant en réalité à la date du certificat de non-opposition. Par suite, au regard de ces lacunes et informations erronées, l'affichage n'a pas déclenché le délai de recours contentieux à l'encontre de cette seconde décision.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont admis la recevabilité des demandes formées par M. B....
En ce qui concerne la légalité des décisions contestées :
11. L'appelant doit énoncer, dans le délai d'appel, la ou les causes juridiques sur lesquelles il entend fonder sa requête. Il suit de là que, postérieurement à l'expiration dudit délai et hors le cas où il se prévaudrait d'un moyen d'ordre public, l'appelant n'est recevable à invoquer un moyen nouveau que pour autant que celui-ci repose sur la même cause juridique qu'un moyen ayant été présenté dans le délai d'introduction de l'appel.
12. M. A..., qui n'a soulevé dans sa requête enregistrée le 12 juin 2023 au greffe de la cour que des moyens tirés de l'irrecevabilité de la demande de première instance, n'invoque que dans un mémoire complémentaire enregistré le 20 juillet 2023 des moyens de légalité externe et interne à l'encontre des décisions attaquées. Ces moyens, fondés sur des causes juridiques distinctes de ceux invoqués dans sa requête, constituent une demande nouvelle qui, présentée après l'expiration du délai d'appel, est tardive et, par suite, irrecevable.
13. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé les décisions contestées.
Sur les frais de l'instance :
14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. B..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. A... une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : M. A... versera à M. B... la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A..., à M. C... B... et à la commune d'Ogy-Montoy Flanville.
Délibéré après l'audience du 3 juillet 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Wurtz, président,
- Mme Bauer, présidente-assesseure,
- M. Berthou, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juillet 2025.
Le rapporteur,
Signé : D. BERTHOULe président,
Signé : Ch. WURTZ
Le greffier,
Signé : F. LORRAIN La République mande et ordonne au préfet de la Moselle en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier :
F. LORRAIN
N° 23NC01881 2