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07/05/2025 | FRANCE | N°24NC03092

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 1ère chambre, 07 mai 2025, 24NC03092


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 18 novembre 2024 par lequel le préfet Bas-Rhin lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de cinq ans.



Par un jugement n° 2408698 du 28 novembre 2024, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Strasbourg a annulé

la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de cinq ans et ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 18 novembre 2024 par lequel le préfet Bas-Rhin lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de cinq ans.

Par un jugement n° 2408698 du 28 novembre 2024, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de cinq ans et a rejeté le surplus des conclusions.

Procédure devant la cour :

I - Par une requête, enregistrée le 19 décembre 2024 sous le n° 24NC03092, le préfet du Bas-Rhin demande à la cour de sursoir à l'exécution de ce jugement en tant qu'il a annulé la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de cinq ans.

Il soutient que :

- les moyens invoqués dans la requête d'appel sont sérieux et de nature à justifier l'annulation du jugement attaqué et le rejet des conclusions en annulation accueillies par ce jugement ;

- contrairement à ce que le tribunal administratif de Strasbourg a estimé la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de cinq ans n'est pas entachée d'erreur d'appréciation ;

- les autres moyens soulevés en première instance n'étaient pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 mars 2025, M. B..., représenté par Me Elsaesser, conclut au rejet de la requête et à ce que la cour mette à la charge de l'Etat, la somme de 1 000 euros hors taxe, à verser à son conseil, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserves que ce dernier renonce à percevoir la contribution de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle en application de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- l'autorité préfectorale ne présente pas de moyens de nature à justifier le prononcé du sursis à exécution du jugement de première instance, en ce qu'il annule la décision portant interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de cinq ans ;

- la décision préfectorale interdisant le retour sur le territoire français a été prise sur le fondement de l'obligation de quitter le territoire français, décision entachée de plusieurs illégalités devant être sanctionnées ;

- elle méconnaît l'intérêt supérieur des enfants ;

- elle porte une atteinte disproportionnée au droit de mener une vie privée et familiale normale ;

- elle est entachée d'une erreur de droit ;

- elle méconnaît le droit d'être entendu.

M. B... a été admis à l'aide juridictionnelle totale par une décision du 27 février 2025.

Vu :

- la requête n° 24NC03091 enregistrée au greffe de la cour, le 19 décembre 2024, par laquelle le préfet du Bas-Rhin demande l'annulation du même jugement ;

- les autres pièces du dossier ;

II - Par une requête, enregistrée le 6 mars 2025, sous le n° 25NC00546 M. B... demande à la cour :

1°) de l'admettre à l'aide juridictionnelle ;

2°) de sursoir à l'exécution de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de ses conclusions ;

3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin d'organiser son retour sur le territoire français dans un délai de cinq jours, et sous astreinte de trois cents euros par jour de retard, à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros hors taxes à verser à son conseil au titre des frais d'instance.

Il soutient que :

- il est nécessaire de rétablir le caractère suspensif du recours contre l'arrêté préfectoral du 18 novembre 2024, eu égard aux graves conséquences qu'emportent, par nature, une mesure d'éloignement du territoire français ;

- les moyens invoqués dans la requête d'appel sont sérieux et de nature à justifier l'annulation du jugement attaqué ;

- les décisions attaquées sont entachées d'un vice d'incompétence, d'un défaut de motivation, d'un défaut d'examen, d'une erreur de droit, d'une erreur manifeste d'appréciation, méconnaissent le principe du respect des droits de la défense et portent atteinte à son droit de mener une vie privée et familiale normale ;

- la décision de refus de séjour est entachée d'une erreur de droit, d'une erreur de qualification juridique des faits, d'une erreur d'appréciation quant à la menace qu'il représente, d'un défaut d'examen sérieux, d'une irrégularité de procédure, méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant et celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions des articles L. 611-1 et L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est entachée d'un défaut d'examen, méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant et celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, de plusieurs erreurs de fait, d'un vice de procédure et d'une insuffisance de motivation ;

- la décision refusant un délai de départ volontaire est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français, est entachée d'une erreur de droit car le préfet s'est cru en situation de compétence liée, méconnaît les dispositions des articles L. 612-1 et L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant, est entachée d'erreur manifeste d'appréciation, de défaut d'examen et d'insuffisance de motivation ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français, est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et d'une insuffisance de motivation ;

- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français, méconnaît l'intérêt supérieur de ses enfants, porte atteinte à sa vie privée et familiale, est entachée d'erreurs de fait, d'un défaut d'examen, d'une erreur d'appréciation, méconnaît le droit d'être effectivement entendu, les dispositions des articles L. 612-6 et L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est disproportionnée et entachée d'une insuffisance de motivation.

Par un mémoire en défense enregistré le 18 mars 2025, le préfet du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens ne sont pas fondés alors que les conséquences irréparables ne sont pas démontrées.

M. B... a été admis à l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 avril 2025.

Vu :

- la requête n° 25NC00024 enregistrée au greffe de la cour, le 7 janvier 2025, par laquelle M. B... demande l'annulation du même jugement ;

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Wallerich, président, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant marocain né en 1985, est entré en France en 2010. Il a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 18 novembre 2024 par lequel le préfet Bas-Rhin lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de cinq ans. Par un jugement du 28 novembre 2024, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de cinq ans et a rejeté le surplus des conclusions. Le préfet du Bas-Rhin demande à la cour sur le fondement de l'article R. 811-15 du code de justice administrative de sursoir à l'exécution de ce jugement en tant qu'il a annulé la décision portant interdiction de retour d'une durée de cinq ans. M. B... demande à la cour sur le fondement de l'article R. 811-17 du code de justice de sursoir à l'exécution de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de ses conclusions.

2. Aux termes de l'article R. 811-15 du code de justice administrative : " Lorsqu'il est fait appel d'un jugement de tribunal administratif prononçant l'annulation d'une décision administrative, la juridiction d'appel peut, à la demande de l'appelant, ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement si les moyens invoqués par l'appelant paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation ou la réformation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement ". Aux termes de l'article R. 811-17 du même code : " Dans les autres cas, le sursis peut être ordonné à la demande du requérant si l'exécution de la décision de première instance attaquée risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables et si les moyens énoncés dans la requête paraissent sérieux en l'état de l'instruction ". Aux termes de l'article R. 222-25 du code de justice administrative : " Les affaires sont jugées soit par une chambre siégeant en formation de jugement, soit par une formation de chambres réunies, soit par la cour administrative d'appel en formation plénière, qui délibèrent en nombre impair. / Par dérogation à l'alinéa précédent, le président de la cour ou le président de chambre statue en audience publique et sans conclusions du rapporteur public sur les demandes de sursis à exécution mentionnées aux articles R. 811-15 à R. 811-17 ".

Sur les conclusions du préfet du Bas-Rhin :

En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée en défense :

3. La requête du préfet ne se borne pas à reprendre les termes de sa requête au fond mais vise les dispositions de l'article R. 811-15 du code de justice administrative et invoque des moyens qui répondent aux prévisions de ces dispositions. La fin de non-recevoir opposée en défense par M. B... ne peut dès lors qu'être écarter.

En ce qui concerne les moyens du préfet du Bas-Rhin :

4. Le moyen tiré de ce que la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de cinq ans n'est pas entachée d'erreur d'appréciation, ne paraît pas en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement. Dans ces conditions, les conclusions aux fins de sursis à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 28 novembre 2024 en tant qu'il a annulé la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de cinq ans présentées par le préfet du Bas-Rhin sont rejetées.

Sur les conclusions de M. B... :

5. Les moyens visés ci-dessus de la requête de M. B... ne paraissent pas en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a rejeté le surplus de ses conclusions. Dans ces conditions, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la première condition relative aux conséquences difficilement réparables de son exécution, les conclusions aux fins de sursis à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 28 novembre 2024 présentées par M. B... sont rejetées.

Sur les frais de l'instance :

6. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme demandée par le conseil de M. B... dans les deux instances au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

D E C I D E :

Article 1er : La requête du préfet du Bas-Rhin est rejetée.

Article 2 : La requête de M. B... est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées par le conseil de M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, à M. A... B... et à Me Elsaesser.

Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 mai 2025.

Le président de la 1ère chambre, La greffière,

Signé : M. C... : F. Dupuy

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

I. Legrand

2

N° 24NC03092-25NC00546


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 24NC03092
Date de la décision : 07/05/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Marc WALLERICH
Avocat(s) : ELSAESSER

Origine de la décision
Date de l'import : 18/05/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-05-07;24nc03092 ?
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