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30/04/2025 | FRANCE | N°22NC00583

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 3ème chambre, 30 avril 2025, 22NC00583


Vu la procédure suivante :



Par une requête et un mémoire, enregistrés le 7 mars 2022 et le 3 août 2023, la société Supermarchés Match, représentée par Me Meillard, demande à la cour :



1°) d'annuler l'arrêté du 4 novembre 2021 par lequel le maire de la commune de Gambsheim a accordé un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale à la SA Madina, sur un terrain situé 120 A Route Nationale, pour la restructuration et l'extension de l'ensemble commercial " Super U ", accompagnées de diverses démolitions, en tant

qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale ;



2°) de mettre à la charge d...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 7 mars 2022 et le 3 août 2023, la société Supermarchés Match, représentée par Me Meillard, demande à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 4 novembre 2021 par lequel le maire de la commune de Gambsheim a accordé un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale à la SA Madina, sur un terrain situé 120 A Route Nationale, pour la restructuration et l'extension de l'ensemble commercial " Super U ", accompagnées de diverses démolitions, en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale ;

2°) de mettre à la charge de la SA Madina, la SCI Groll, la commune de Gambsheim et l'Etat la somme de 5 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa requête est recevable dès lors qu'elle a intérêt à agir, qu'elle a saisi préalablement la Commission nationale d'aménagement commercial, qu'elle n'est pas tardive et qu'elle a été notifiée en application de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;

- le permis contesté est entaché d'incompétence ;

- l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial est insuffisamment motivé ;

- le dossier de demande est incomplet et insuffisant ;

- le projet est incompatible avec le schéma de cohérence territoriale de la Bande Rhénane Nord ;

- il est insuffisamment desservi par les modes de transports alternatifs ;

- sa végétalisation est insuffisante et il est consommateur d'espace ;

- il méconnaît les objectifs de développement durable dès lors notamment que le projet d'installation de panneaux photovoltaïques n'a pas été précédée d'une évaluation environnementale ;

- son intégration paysagère et architecturale est insuffisante ;

- il emporte des impacts négatifs sur la vue urbaine et la préservation des commerces de proximité.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 juin 2022, la SA Madina, représentée par Me Jourdan, conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la société Supermarchés Match en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le moyen tiré de ce que le permis de construire n'a pas été précédé d'une évaluation environnementale est irrecevable ;

- les autres moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 19 septembre 2022 et le 16 août 2023, la commune de Gambsheim, représentée par Me Benech, conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 3 500 euros soit mise à la charge de la société Supermarchés Match en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le moyen tiré de ce que le permis de construire n'a pas été précédé d'une évaluation environnementale est irrecevable ;

- les autres moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Berthou,

- les conclusions de M. Meisse, rapporteur public,

- et les observations de Me Domain, représentant la société Supermarchés Match, de Me Benech, représentant la commune de Gambsheim et de Me Jourdan, représentant la SA Madina.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 4 novembre 2021 le maire de la commune de Gambsheim a accordé à la SA Madina un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale pour la restructuration et l'extension de l'ensemble commercial " Super U ", accompagnées de diverses démolitions, sur un terrain situé 120 A, route Nationale. La société Supermarchés Match, qui exploite un magasin à l'enseigne éponyme situé 1, rue de l'Industrie à Kilstett, dans la zone de chalandise, demande à la cour d'annuler cet arrêté en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le moyen tiré de l'absence d'évaluation environnementale :

2. Aux termes de l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet est soumis à autorisation d'exploitation commerciale au sens de l'article L. 752-1 du code de commerce, le permis de construire tient lieu d'autorisation dès lors que la demande de permis a fait l'objet d'un avis favorable de la commission départementale d'aménagement commercial ou, le cas échéant, de la Commission nationale d'aménagement commercial. (...) ". Aux termes de l'article L. 600-1-4 de ce code : " Lorsqu'il est saisi par une personne mentionnée à l'article L. 752-17 du code de commerce d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le permis de construire mentionné à l'article L. 425-4 du présent code, le juge administratif ne peut être saisi de conclusions tendant à l'annulation de ce permis qu'en tant qu'il tient lieu d'autorisation d'exploitation commerciale. Les moyens relatifs à la régularité de ce permis en tant qu'il vaut autorisation de construire sont irrecevables à l'appui de telles conclusions. (...) ". Aux termes de l'article L. 752-17 du code de commerce : " I.- Conformément à l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme, le demandeur, le représentant de l'Etat dans le département, tout membre de la commission départementale d'aménagement commercial, tout professionnel dont l'activité, exercée dans les limites de la zone de chalandise définie pour chaque projet, est susceptible d'être affectée par le projet ou toute association les représentant peuvent, dans le délai d'un mois, introduire un recours devant la Commission nationale d'aménagement commercial contre l'avis de la commission départementale d'aménagement commercial. (...) ".

3. La société requérante, qui fait exclusivement état de sa qualité de professionnel dont l'activité est susceptible d'être affectée par le projet, soutient que l'arrêté attaqué aurait été pris au vu d'un dossier de permis de construire incomplet dès lors qu'il ne comporte pas d'évaluation environnementale ni de décision de l'autorité chargée de l'examen au cas par cas dispensant le projet d'évaluation environnementale, en méconnaissance de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme et du tableau annexé à l'article R. 122-2 du code de l'environnement. Ce moyen n'est toutefois relatif à la régularité du permis de construire qu'en tant qu'il vaut autorisation de construire. Il est, par suite, irrecevable à l'appui du présent recours.

En ce qui concerne les autres moyens de légalité externe :

4. En premier lieu, par arrêté en date du 7 juin 2020 pris sur le fondement de l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales, le maire de la commune de Gambsheim a délégué ses fonctions à M. A... B..., quatrième adjoint, en matière d'urbanisme et de gestion immobilière. La commune de Gambsheim produit par ailleurs en défense un certificat daté du 8 août 2023 signé de son maire attestant de l'affichage continu en mairie de cet arrêté entre le 29 juillet et le 20 septembre 2020. Par suite, le moyen d'incompétence doit être écarté.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 752-38 du code de commerce relatif à l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial (CNAC) : " (...) L'avis ou la décision est motivé, signé par le président et indique le nombre de votes favorables et défavorables ainsi que le nombre d'abstentions. (...) ". Si, eu égard à la nature, à la composition et aux attributions de la CNAC, les décisions qu'elle prend doivent, en vertu de ces dispositions, être motivées, cette obligation n'implique pas que la commission soit tenue de prendre explicitement parti sur le respect, par le projet qui lui est soumis, de chacun des objectifs et critères d'appréciation fixés par les dispositions législatives applicables.

6. Il ressort des pièces du dossier que l'avis de la CNAC du 15 décembre 2021 est suffisamment motivé au regard des objectifs et critères de l'article L. 752-6 du code de commerce. Notamment, si la société Supermarchés Match relève que cet avis ne se prononce pas sur les effets que le projet est susceptible d'avoir sur l'animation de la vie urbaine et la contribution à l'animation des principaux secteurs existants, cette circonstance est insuffisante à caractériser, en l'espèce, un défaut de motivation.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 431-33-1 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet relève de l'article L. 425-4, la demande est accompagnée d'un dossier comprenant les éléments mentionnés à l'article R. 752-6 du code de commerce. ". Aux termes de l'article L. 752-6 du code de commerce : " (...) III.- La commission se prononce au vu d'une analyse d'impact du projet, produite par le demandeur à l'appui de sa demande d'autorisation. Réalisée par un organisme indépendant habilité par le représentant de l'Etat dans le département, cette analyse évalue les effets du projet sur l'animation et le développement économique du centre-ville de la commune d'implantation, des communes limitrophes et de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont la commune d'implantation est membre, ainsi que sur l'emploi, en s'appuyant notamment sur l'évolution démographique, le taux de vacance commerciale et l'offre de mètres carrés commerciaux déjà existants dans la zone de chalandise pertinente, en tenant compte des échanges pendulaires journaliers et, le cas échéant, saisonniers, entre les territoires. (...) ". Aux termes de l'article R. 752-6 de ce même code : " I.- La demande est accompagnée d'un dossier comportant les éléments mentionnés ci-après ainsi que, en annexe, l'analyse d'impact définie au III de l'article L. 752-6. / 1° Informations relatives au projet : / (...) c) Pour les projets de création ou d'extension d'un point permanent de retrait : / - une description du point de retrait ; / - le nombre de pistes de ravitaillement, y compris les places de stationnement dédiées ; / - les mètres carrés d'emprise au sol, bâtis ou non, affectés au retrait des marchandises ; / (...) 3° Effets du projet en matière d'aménagement du territoire. / Le dossier comprend une présentation des effets du projet sur l'aménagement du territoire, incluant les éléments suivants : / (...) b) Evaluation des flux journaliers de circulation des véhicules générés par le projet sur les principaux axes de desserte du site, ainsi que des capacités résiduelles d'accueil des infrastructures de transport existantes ; / c) Evaluation des flux journaliers de circulation des véhicules de livraison générés par le projet et description des accès au projet pour ces véhicules ; (...) / II.- L'analyse d'impact comprend, après un rappel des éléments mentionnés au 1° du I, les éléments et informations suivants : / (...) 2° Présentation de la contribution du projet à l'animation des principaux secteurs existants, notamment en matière de complémentarité des fonctions urbaines et d'équilibre territorial ; en particulier, contribution, y compris en termes d'emploi, à l'animation, la préservation ou la revitalisation du tissu commercial des centres-villes de la commune d'implantation et des communes limitrophes incluses dans la zone de chalandise définie pour le projet, avec mention, le cas échéant, des subventions, mesures et dispositifs de toutes natures mis en place sur les territoires de ces communes en faveur du développement économique ; (...) 4° Présentation des effets du projet en matière d'artificialisation des sols et, pour tout projet engendrant une artificialisation des sols : / a) La justification de l'insertion du projet dans l'urbanisation environnante, (...) ".

8. D'une part, en l'espèce, le dossier de demande d'autorisation d'exploitation commerciale a été complété, avant son examen par la CNAC, par une étude de trafic. Si cette étude porte exclusivement sur la circulation sur la route départementale n° 468, il ressort des pièces du dossier que cette voie constitue le principal axe de desserte du site depuis le Nord et le Sud, alors notamment que l'accès par la départementale n° 2 faisant la liaison avec l'Allemagne et empruntant la route d'Offendorf ne constitue qu'un accès secondaire qui n'avait ainsi pas à faire l'objet d'une évaluation des flux journaliers de circulation en application des dispositions précitées. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier que le point permanent de retrait par la clientèle d'achats au détail (ci-après " point de retrait ") a été pris en compte dans cette étude de trafic. Par suite, la branche du moyen tiré de l'insuffisance de cette étude doit être écarté.

9. D'autre part, contrairement aux allégations de la société Supermarchés Match, l'analyse d'impact produite au dossier de demande d'autorisation d'exploitation commerciale comporte des développements conséquents sur la contribution du projet à la préservation et à la revitalisation des commerces de centre-ville. De même, cette étude d'impact prend en compte le point de retrait, qu'elle évoque dans la description du projet et dans la partie relative à la protection des consommateurs. Dès lors et en l'absence de critique précise sur l'insuffisance éventuelle de ces développements, cette seconde branche du moyen tiré de l'incomplétude et de l'insuffisance du dossier doit être écartée.

10. Enfin, le dossier de demande comporte un ensemble de cartes et de plans du projet, notamment un plan et un schéma de la façade de la station-service et de son auvent rénové, ainsi que de la cellule dite " bâtiment C " d'une surface d'environ 22 mètres carrés destinée à assurer un accueil de la clientèle à la station de lavage, qui suffisent en l'espèce à justifier l'insertion de ces parties du projet dans l'urbanisation environnante.

11. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'incomplétude et de l'insuffisance du dossier de demande doit être écarté.

En ce qui concerne les moyens de légalité interne :

12. En premier lieu, aux termes de l'article L. 752-6 du code de commerce : " I.- L'autorisation d'exploitation commerciale mentionnée à l'article L. 752-1 est compatible avec le document d'orientation et d'objectifs des schémas de cohérence territoriale ou, le cas échéant, avec les orientations d'aménagement et de programmation des plans locaux d'urbanisme intercommunaux comportant les dispositions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 151-6 du code de l'urbanisme. (...) ".

13. Il appartient aux commissions d'aménagement commercial, non de vérifier la conformité des projets d'exploitation commerciale qui leur sont soumis aux énonciations des schémas de cohérence territoriales (SCOT), mais d'apprécier la compatibilité de ces projets avec les orientations générales et les objectifs qu'ils définissent pris dans leur ensemble, y compris ceux se présentant formellement comme régissant des actes distincts des autorisations d'exploitation commerciale, tels que par exemple des documents d'urbanisme.

14. D'une part, il ressort des pièces du dossier que le projet est situé au sein de la zone d'aménagement commercial (ZACOM) de la commune de Gambsheim, principalement dédiée à l'accueil d'équipements commerciaux qu'il est difficile d'implanter en tissu urbain en raison du trafic de véhicules légers et lourds qu'ils engendrent, comme c'est le cas de l'hypermarché, de l'espace électroménager et des principales cellules commerciales projetées. Par ailleurs, l'ensemble de ces cellules ont vocation à accueillir des activités correspondant aux achats hebdomadaires et occasionnels lourds et légers que le document d'orientation et d'objectifs (DOO) du SCOT cible comme devant permettre préférentiellement l'offre commerciale à Gambsheim. D'autre part, le projet prévoit des aménagements permettant sa bonne insertion visuelle et notamment la végétalisation des espaces extérieurs et répond ainsi précisément à l'exigence du SCOT en la matière. Si le DOO prescrit enfin que les nouveaux développements commerciaux dans les ZACOM doivent s'accompagner d'une mise en place, " dans la mesure du possible ", d'une desserte en transports en commun réguliers, l'absence d'une telle desserte ne suffit pas, en l'espèce et au vu notamment de l'augmentation limitée du trafic induite, à caractériser une incompatibilité du projet avec le SCOT alors que, par ailleurs, le projet répond globalement aux autres orientations générales de ce document. Par suite, le moyen tiré de l'incompatibilité du projet au SCOT doit être écarté.

15. En second lieu, aux termes de l'article L. 752-6 du code de commerce : " (...) La commission départementale d'aménagement commercial prend en considération : / 1° En matière d'aménagement du territoire : / a) La localisation du projet et son intégration urbaine ; / b) La consommation économe de l'espace, notamment en termes de stationnement ; / c) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et dans les zones de montagne et du littoral; / d) L'effet du projet sur les flux de transports et son accessibilité par les transports collectifs et les modes de déplacement les plus économes en émission de dioxyde de carbone ; / e) La contribution du projet à la préservation ou à la revitalisation du tissu commercial du centre-ville de la commune d'implantation, des communes limitrophes et de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont la commune d'implantation est membre ;

f) Les coûts indirects supportés par la collectivité en matière notamment d'infrastructures et de transports ; / 2° En matière de développement durable : / a) La qualité environnementale du projet, notamment du point de vue de la performance énergétique et des émissions de gaz à effet de serre par anticipation du bilan prévu aux 1° et 2° du I de l'article L. 229-25 du code de l'environnement, du recours le plus large qui soit aux énergies renouvelables et à l'emploi de matériaux ou procédés éco-responsables, de la gestion des eaux pluviales, de l'imperméabilisation des sols et de la préservation de l'environnement ; / b) L'insertion paysagère et architecturale du projet, notamment par l'utilisation de matériaux caractéristiques des filières de production locales ; / c) Les nuisances de toute nature que le projet est susceptible de générer au détriment de son environnement proche. / Les a et b du présent 2° s'appliquent également aux bâtiments existants s'agissant des projets mentionnés au 2° de l'article L. 752-1 ; / 3° En matière de protection des consommateurs : (...) ".

16. L'autorisation d'aménagement commercial ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet contesté compromet la réalisation des objectifs énoncés par la loi. Il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles statuent sur les dossiers de demande d'autorisation, d'apprécier la conformité du projet à ces objectifs, au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du code de commerce.

S'agissant des insuffisances alléguées du projet en termes d'aménagement du territoire :

17. L'opération projetée porte, d'une part, sur l'extension de la surface de vente du supermarché " Super U " existant afin de permettre l'amélioration de l'agencement des rayonnages ainsi qu'un agrandissement des rayons existants notamment alimentaires, d'autre part, sur la création de neuf cellules commerciales dont deux accueilleront des activités déjà existantes de coiffure et de restauration, deux seront affectées à l'Espace U Electroménager et cinq seront destinées à l'accueil de nouvelles activités de moins de 300 mètres carrés chacune et, enfin, sur la création d'un point de retrait.

18. Il ressort des pièces du dossier que la vacance des locaux commerciaux est globalement faible dans la commune de Gambsheim et les communes proches et que, quand elle existe, elle est liée à des facteurs structurels locaux sans lien avec un déséquilibre entre centre et périphérie. Notamment, dans les quatre communes de Weyersheim, Offendorf, Kilstett et La Wantzenau, seuls six locaux commerciaux sont vacants. Par ailleurs, ces communes présentent des structurations commerciales comparables, avec un centre-ville assez faiblement équipé et peu diversifié, avec des petits magasins alimentaires et de services, et sans centralité commerciale forte. Ainsi, si le projet comporte des cellules susceptibles d'accueillir des commerces qui pourraient s'implanter ailleurs dans le tissu urbain et alors même qu'il a vocation à mieux satisfaire la demande locale résidentielle, son impact sur l'animation de la vie urbaine et la préservation et le développement des commerces de centre-ville restera nécessairement limité.

19. Par ailleurs, si la création du point de retrait a pour effet une consommation d'espace, le projet prévoit également la démolition de plusieurs parties de bâtiments conduisant à la diminution de l'emprise au sol. S'agissant des places de stationnement, il est prévu qu'elles occuperont une surface totale réduite à 6 196 mètres carrés, pour une surface actuelle de 6 570 mètres carrés. Les surfaces affectées aux espaces verts passeront quant à elles de 22 825 mètres carrés à 23 761 mètres carrés. Il en résulte que le projet est économe en matière de consommation de l'espace, y compris en termes de stationnement.

20. Enfin, si le centre commercial est principalement desservi par la route départementale n° 468 et n'est desservi par aucune ligne de bus, il ressort des pièces du dossier qu'il est accessible par des cheminements cyclables et piétons suffisants, y compris depuis les habitations implantées à proximité, par au moins trois points d'accès.

21. Il résulte de ce qui précède que la CNAC n'a pas commis d'erreur d'appréciation en considérant que le projet ne méconnaissait pas les objectifs fixés par les dispositions de l'article L. 752-6 du code de commerce en matière d'aménagement du territoire.

S'agissant des insuffisances alléguées du projet en matière de développement durable :

22. Il ressort des pièces du dossier que le projet prévoit la désimperméabilisation de 4 629 mètres carrés de terrain, pour une surface totale imperméabilisée de 15 777 mètres carrés, soit 27 % de la surface totale de la parcelle, ainsi que, comme il a déjà été dit, l'augmentation de la surface dédiée aux espaces verts de 22 825 mètres carrés à 23 761 mètres carrés, avec notamment la plantation de dix-sept arbres supplémentaires. Des panneaux photovoltaïques, couvrant 24% des besoins annuels d'électricité du site, seront par ailleurs installés en ombrière sur une surface de 2 476 mètres carrés, prenant la place d'un bâtiment démoli de plus grande envergure. Comme il ressort des documents graphiques produits au dossier, l'insertion paysagère du site s'en trouve améliorée, de même que par le remplacement de la couleur gris-métallique actuelle des façades par des tonalités boisées et plus sombres.

23. La commune de Gambsheim fait encore valoir que la rénovation des bâtiments entraînera la mise en place de meubles froids positifs fermés, pour une économie d'énergie moyenne de 18 % sur ce poste, que l'installation d'une pompe à chaleur réversible et la récupération de chaleur sur groupe froid permettront de réduire la consommation d'énergie d'environ 50 % sur ce poste, que la gestion technique centralisée conduira à une économie d'énergie de 2 à 5 % et que le projet s'accompagne de la mise en place d'un éclairage LED. Elle relève enfin que les eaux issues des toitures seront utilisées pour l'arrosage.

24. Il résulte de ce qui précède que la CNAC n'a pas commis d'erreur d'appréciation en considérant que le projet ne méconnaissait pas les objectifs fixés par les dispositions de l'article L. 752-6 du code de commerce en matière de développement durable.

25. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation présentées par la société Supermarchés Match doivent être rejetées.

Sur les frais de l'instance :

26. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Gambsheim, de la SA Madina, de la SCI Groll et de l'Etat, qui ne sont pas parties perdantes dans la présente instance, la somme que la société Supermarchés Match demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la société Supermarchés Match une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la SA Madina et non compris dans les dépens et une somme de 2 000 euros au bénéfice de la commune de Gambsheim à ce même titre.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société Supermarchés Match est rejetée.

Article 2 : La société Supermarchés Match versera à la SA Madina la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La société Supermarchés Match versera à la commune de Gambsheim la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Supermarchés Match, à la commune de Gambsheim, à la SA Madina, à la SCI Groll et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin et à la Commission nationale d'aménagement commercial.

Délibéré après l'audience du 27 mars 2025, à laquelle siégeaient :

- M. Wurtz, président,

- Mme Bauer, présidente-assesseure,

- M. Berthou, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 avril 2025.

Le rapporteur,

Signé : D. BERTHOULe président,

Signé : Ch. WURTZLe greffier,

Signé : F. LORRAIN La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier :

F. LORRAIN

N° 22NC00583 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NC00583
Date de la décision : 30/04/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: M. David BERTHOU
Rapporteur public ?: M. MEISSE
Avocat(s) : MEILLARD

Origine de la décision
Date de l'import : 04/05/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-30;22nc00583 ?
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