Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler, d'une part, l'arrêté du 1er février 2023 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, laquelle fixe le pays de renvoi en cas de reconduite d'office à l'issue de ce délai et, d'autre part, l'arrêté du 11 avril 2023 par lequel la préfète du Bas-Rhin l'a assigné à résidence.
Par un jugement n°s 2302399, 2302624 du 28 avril 2023, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg, après avoir renvoyé devant une formation collégiale les conclusions dirigées contre la décision du 1er février 2023 refusant la délivrance d'un titre de séjour et les conclusions accessoires, a rejeté les conclusions de la demande de M. B... en annulation des décisions du 1er février 2023 lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ainsi que de l'arrêté du 11 avril 2023 l'assignant à résidence.
Par un jugement n° 2302399 du 31 mai 2023, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande de M. B... en annulation de la décision du 1er février 2023 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et les conclusions accessoires s'y rapportant.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête, enregistrée le 12 septembre 2023 sous le n° 23NC02880, M. A... B..., représenté par Me Berry, demande à la cour :
1°) avant dire droit, d'appeler l'Office français de l'immigration et de l'intégration dans l'instance et de lui enjoindre de produire les éléments sur lesquels il s'est fondé pour considérer que M. B... pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié en Géorgie ou, à défaut, d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de produire ces éléments ;
2°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 28 avril 2023 ;
3°) de faire droit à sa demande présentée devant le tribunal administratif de Strasbourg ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale dès lors que le refus de titre de séjour méconnaît l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnaît le 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision fixant le pays de renvoi est illégale en conséquence ;
- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- l'assignation à résidence méconnaît le principe du contradictoire et l'article 41 de la charte des droits fondamentaux ;
- elle n'est pas suffisamment motivée ;
- sa situation individuelle n'a pas été examinée ;
- elle est illégale par suite de l'illégalité de l'arrêté du 1er février 2023 ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 août 2023.
II. Par une requête, enregistrée le 4 octobre 2023 sous le n° 23NC03045, M. A... B..., représenté par Me Berry, demande au tribunal :
1°) avant dire droit d'appeler l'Office français de l'immigration et de l'intégration dans l'instance et de lui enjoindre de produire les éléments sur lesquels il s'est fondé pour considérer que M. B... pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié en Géorgie ou, à défaut, d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de produire ces éléments ;
2°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 31 mai 2023 ;
3°) de faire droit à sa demande présentée devant le tribunal administratif de Strasbourg ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le refus de lui délivrer un titre de séjour méconnaît l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le tribunal ayant commis une erreur d'appréciation et une erreur de droit ;
- il ne peut voyager sans risque vers la Géorgie ;
- ce refus méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 septembre 2023.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le traité sur l'Union européenne ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Il y a lieu de joindre les requêtes présentées par M. B... pour statuer par un seul arrêt.
2. La demande d'asile présentée par M. B..., ressortissant géorgien né en 1963, entré sur le territoire français le 23 septembre 2019, a été rejetée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 30 juin 2020. Par un arrêté du 18 octobre 2020, la préfète du Bas-Rhin lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. S'étant maintenu sur ce territoire, M. B... a, le 17 mars 2022, sollicité la délivrance d'une carte de séjour temporaire en se prévalant de son état de santé. Par un arrêté du 1er février 2023, la préfète du Bas-Rhin lui a refusé cette délivrance et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, laquelle obligation fixe le pays de destination en cas de reconduite d'office à l'issue de ce délai. Par un arrêté du 11 avril 2023, la préfète du Bas-Rhin a assigné M. B... a résidence dans le département du Bas-Rhin pour une durée de quarante-cinq jours, en lui prescrivant de se présenter une fois par semaine, le mercredi à 14 h 30 hors jours fériés, à la direction interdépartementale de la police aux frontières de Strasbourg.
3. M. B... relève appel des jugements du 28 avril 2023 et du 31 mai 2023 par lesquels le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg et ce tribunal ont rejeté ses demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés du 1er février 2023 et du 11 avril 2023.
Sur le bien-fondé des jugements attaqués :
En ce qui concerne l'arrêté du 1er février 2023 :
4. Aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. / (...) ".
5. Il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance du titre de séjour prévu par l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de vérifier, au vu de l'avis émis par le collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'étranger, et en particulier d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire. Lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'étranger, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine. Si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si cet étranger peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine.
6. Pour déterminer si un étranger peut bénéficier effectivement dans le pays dont il est originaire d'un traitement médical approprié, au sens de l'article L. 425-9 précité, il convient de s'assurer, eu égard à la pathologie de l'intéressé, de l'existence d'un traitement approprié et de sa disponibilité dans des conditions permettant d'y avoir accès, et non de rechercher si les soins dans le pays d'origine sont équivalents à ceux offerts en France.
7. Il ressort des pièces du dossier que, pour refuser de délivrer à M. B... la carte de séjour temporaire prévue par l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la préfète du Bas-Rhin a pris en considération, ainsi qu'il lui appartenait de le faire, l'avis émis par un collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 19 juillet 2022 selon lequel l'état de santé de M. B... nécessite une prise en charge médicale à défaut de laquelle il peut en résulter pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié et son état de santé lui permet de voyager sans risque vers son pays d'origine.
8. Il ressort des pièces du dossier que M. B... présente une insuffisance rénale chronique, nécessitant une prise en charge en hémodialyse. Il bénéficie d'une telle prise en charge en France, à raison de trois séances hebdomadaires. Il en ressort également, notamment des documents que présente le requérant, qu'une prise en charge de l'insuffisance rénale chronique par dialyse existe en Géorgie, mais que, de moindre qualité, elle n'est pas équivalente à celle dont M. B... bénéficie en France. Contrairement à ce qui est soutenu, il ne ressort pas des documents de l'Organisation mondiale de la santé que la prise en charge par dialyse n'existerait pas en Géorgie. Il ne ressort pas du dossier que cette prise en charge médicale, quand bien même ne serait-elle pas équivalente, quant à son bénéfice médical et à son coût pour les patients, à celle disponible en France, ne serait pas accessible à la généralité de la population en Géorgie, alors même qu'elle serait très coûteuse pour les patients et leurs familles. En outre, le requérant, qui est né en Géorgie en 1963 et y a vécu habituellement pendant plus de cinquante-cinq ans, ne justifie pas de circonstances exceptionnelles tirées de particularités de sa situation personnelle qui l'empêcheraient d'accéder effectivement en Géorgie à une prise en charge de l'insuffisance rénale chronique par dialyse, alors que son insuffisance rénale y a été diagnostiquée en 2014. Si M. B... fait en outre valoir qu'il ne pourrait effectivement bénéficier d'une greffe de rein en Géorgie, il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que son état de santé nécessiterait effectivement à brève échéance une greffe de rein ou qu'une telle greffe serait effectivement programmée. La circonstance qu'une greffe de rein serait propre à procurer à la personne affectée d'une insuffisance rénale chronique une espérance de vie plus importante que dans le cas d'une prise en charge par hémodialyse ne permet pas d'estimer qu'une telle prise en charge ne serait pas un traitement approprié, l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne subordonnant pas la possibilité de refuser la délivrance du titre de séjour qu'il prévoit à la condition que le traitement le plus approprié soit effectivement disponible dans le pays dont est originaire le demandeur. Enfin, si l'état de santé de M. B... justifie une surveillance périodique de cardiologie vasculaire, les pièces du dossier font état, au 20 octobre 2021, d'un bilan cardio-vasculaire satisfaisant, de l'absence de signe d'insuffisance cardiaque ou coronaire comme de surcharge vasculaire et d'une tension bien maîtrisée. Le certificat médical confidentiel établi par le médecin néphrologue prenant M. B... en charge en France adressé au service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ne fait pas état d'une pathologie effective autre que l'insuffisance rénale chronique. Dès lors, eu égard à l'ensemble de ces éléments et sans qu'il y ait lieu de prescrire une mesure d'instruction, la préfète du Bas-Rhin ne s'est pas livrée à une inexacte application de cet article en refusant à M. B... la délivrance de cette carte de séjour temporaire.
9. Si une interruption du traitement par dialyse dispensé à M. B..., à raison de trois séances hebdomadaires ainsi qu'il a été dit, pourrait engager son pronostic vital, il ne ressort toutefois pas du dossier, compte tenu de la distance entre la France métropolitaine et la Géorgie, qu'un voyage vers ce pays impliquerait nécessairement une rupture dans cette prise en charge néphrologique, alors que l'avis du 19 juillet 2022 estime que l'état de santé de l'intéressé lui permet de voyager sans risque vers son pays d'origine. Il suit de là que le moyen tiré de ce qu'à tort la préfète a considéré qu'il peut voyager sans risque vers la Géorgie, moyen que le requérant soulève de manière inopérante pour contester la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour mais qui doit être regardé comme dirigé contre celle portant obligation de quitter le territoire français, doit être écarté.
10. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
11. Le séjour de M. B... en France, remontant au mois de septembre 2019, n'est pas ancien, alors qu'il est arrivé dans ce pays à l'âge de cinquante-six ans. Il a fait l'objet en 2020, après le rejet de sa demande d'asile, d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, dont il ne ressort pas du dossier ni même n'est allégué qu'il l'aurait respectée. Il ne justifie pas de liens personnels particuliers, notamment familiaux, anciens et stables, en France, alors qu'il a déclaré être marié et que son épouse et leurs cinq enfants, majeurs, ainsi que ses deux frères et sa sœur, résident en Géorgie. Dès lors, compte tenu de la durée et des conditions du séjour de M. B... en France, la préfète du Bas-Rhin, en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et en assortissant ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts dans lesquels ont été prises ces décisions, qui, par suite, ne méconnaissent pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
12. Compte tenu de ce qui a été dit quant à la légalité de la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour, dont le requérant n'excipe pas de l'illégalité dès lors que, la contestant par voie d'action, il en demande l'annulation, il n'est pas fondé à soutenir que celle portant obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité de ce refus.
13. Compte tenu de ce qui a été dit quant aux conditions d'application de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au cas de M. B..., ce dernier n'est pas fondé à soutenir que les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile faisaient obstacle à ce qu'il lui soit fait obligation de quitter le territoire français.
14. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la préfète du Bas-Rhin aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences d'une obligation de quitter le territoire français sur la situation personnelle de M. B....
15. Compte tenu de ce qui a été dit quant à la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français, M. B... n'est pas fondé à soutenir que celle fixant le pays de destination est illégale en raison de l'illégalité de cette obligation.
16. Aux termes de l'article L. 721-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative fixe, par une décision distincte de la décision d'éloignement, le pays à destination duquel l'étranger peut être renvoyé en cas d'exécution d'office d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une décision de mise en œuvre d'une décision prise par un autre État, d'une interdiction de circulation sur le territoire français, d'une décision d'expulsion, d'une peine d'interdiction du territoire français ou d'une interdiction administrative du territoire français. ". Aux termes de l'article L. 721-4 du même code : " L'autorité administrative peut désigner comme pays de renvoi : / 1° Le pays dont l'étranger a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu la qualité de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; / 2° Un autre pays pour lequel un document de voyage en cours de validité a été délivré en application d'un accord ou arrangement de réadmission européen ou bilatéral ; / 3° Ou, avec l'accord de l'étranger, tout autre pays dans lequel il est légalement admissible. / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ". Selon cet article 3 : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ".
17. Les dispositions des articles L. 721-3 et L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'investissent pas le préfet d'un pouvoir discrétionnaire pour fixer le pays à destination duquel un ressortissant étranger faisant l'objet d'une obligation de quitter le territoire français assortie d'un délai de départ volontaire est susceptible d'être reconduit d'office à l'issue de ce délai. Dès lors, en décidant que M. B..., s'il n'a pas quitté le territoire français à l'expiration de ce délai, sera éloigné à destination du pays dont il a la nationalité ou de tout pays dans lequel il est légalement admissible, la préfète du Bas-Rhin, qui ne s'est pas livrée à une inexacte application de ces dispositions, n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation.
18. Il ne ressort pas du dossier qu'il y aurait des raisons sérieuses de croire que la vie ou la liberté de M. B..., dont la demande d'asile a été rejetée, seraient menacées en Géorgie, où il peut bénéficier d'une prise en charge médicale appropriée à son état de santé, ou qu'il risquerait d'être exposé dans ce pays à la torture ou à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. Il n'en ressort pas davantage qu'il serait à brève échéance exposé, en cas de retour dans son pays, à une réduction significative de son espérance de vie par rapport à celle, d'ailleurs non précisée, qui serait la sienne en France ou qui aurait été la sienne lorsqu'il a quitté la Géorgie et a gagné la France en 2019. Dès lors, en fixant le pays de destination, la préfète du Bas-Rhin n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
19. M. B..., qui a vécu pendant plusieurs dizaines d'années en Géorgie, où réside l'ensemble de sa famille, notamment son épouse et leurs enfants majeurs, peut y poursuivre sa vie privée et familiale. Dès lors, la décision fixant le pays de destination ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
En ce qui concerne l'arrêté du 11 avril 2023 :
20. Le champ d'application de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne couvre seulement les institutions et organes de cette union, mais non les Etats membres. La préfète du Bas-Rhin n'est pas au nombre de ces institutions et organes. Il en résulte que M. B... ne peut utilement se prévaloir de cet article 41 à l'appui de ses conclusions en annulation de l'arrêté du 11 avril 2023. Le moyen tiré de sa méconnaissance est, par suite, inopérant.
21. Il ressort des pièces du dossier que le requérant a été mis à même de faire part de ses observations sur l'éventualité d'une assignation à résidence par un courrier du 31 mars 2023, auquel il a répondu par des observations écrites du 4 avril 2023, adressées le 4 avril 2023 par voie électronique à la préfecture du Bas-Rhin. La circonstance que l'arrêté du 11 avril 2023 indique que ce courrier du 31 mars 2023 n'a fait l'objet de la réception d'aucun retour est sans incidence. Il en résulte que le moyen tiré de la méconnaissance du principe du contradictoire ou du droit d'être entendu manque en fait et doit, par suite, être écarté.
22. L'arrêté du 11 avril 2023 comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait constituant le fondement de la décision d'assigner M. B... à résidence et de lui prescrire de se présenter une fois par semaine à la police aux frontières. Dès lors et conformément à l'article L. 732-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, cet arrêté est motivé.
23. Compte tenu de ce qui été dit quant à la légalité de l'arrêté du 1er février 2023, M. B... n'est pas fondé à soutenir que celui du 11 avril 2023 est illégal en raison de l'illégalité de cet arrêté du 1er février 2023.
24. Il ressort des pièces du dossier que les séances de dialyse dont bénéficie M. B... en France lui sont dispensées à Strasbourg, dans le département du Bas-Rhin, dans lequel l'arrêté du 11 avril 2023 l'assigne à résidence. S'il allègue qu'il lui est impossible de se rendre une fois par semaine auprès de la police aux frontières au lieu indiqué par cet arrêté, il n'en justifie pas, alors qu'il lui est possible de se rendre trois fois par semaine dans une unité de dialyse à Strasbourg et qu'il est domicilié auprès d'un centre communal d'action sociale à Schiltigheim. Dès lors, il n'est pas établi que la préfète du Bas-Rhin se serait livrée à une inexacte application des dispositions de l'article L. 733-1 et du 2° de l'article R. 733-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en prescrivant à M. B... de se présenter une fois par semaine, le mercredi à 14 h 30, à la police aux frontières de l'aéroport de Strasbourg à Entzheim.
25. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg et ce tribunal ont rejeté sa demande. Par suite, les conclusions à fin d'injonction qu'il présente ne peuvent être accueillies.
Sur les frais liés au litige :
26. Les dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'a pas dans la présente instance la qualité de partie perdante, le versement d'une somme à ce titre.
D E C I D E :
Article 1er : Les requêtes de M. B... sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au ministre de l'intérieur et à Me Claude Berry.
Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.
Délibéré après l'audience du 3 décembre 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Antoine Durup de Baleine, président,
- M. Axel Barlerin, premier conseiller,
- Mme Nolwenn Peton, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 décembre 2024.
Le président-rapporteur,
Signé : A. C...L'assesseur le plus ancien
dans l'ordre du tableau,
Signé : A. Barlerin
Le greffier,
Signé : A. Betti
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier,
A. Betti
2
N°s 23NC02880, 23NC03045