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15/10/2024 | FRANCE | N°21NC02293

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 5ème chambre, 15 octobre 2024, 21NC02293


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société civile immobilière SCI KID a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler les délibérations du 20 décembre 2019 et 2 juin 2020 par laquelle le conseil municipal de Trévenans a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune.



Par un jugement nos 2000326, 2001259 du 17 juin 2021, le tribunal administratif de Besançon, après avoir décidé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions tendant à l'annulation de la délibé

ration du 20 décembre 2019, a rejeté le surplus des conclusions de la demande de la société civile immo...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière SCI KID a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler les délibérations du 20 décembre 2019 et 2 juin 2020 par laquelle le conseil municipal de Trévenans a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune.

Par un jugement nos 2000326, 2001259 du 17 juin 2021, le tribunal administratif de Besançon, après avoir décidé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions tendant à l'annulation de la délibération du 20 décembre 2019, a rejeté le surplus des conclusions de la demande de la société civile immobilière SCI KID.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 11 août 2021 et le 16 septembre 2024, la société civile immobilière SCI KID, représentée par Me Woldanski, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Besançon du 17 juin 2021 ;

2°) d'annuler la délibération du conseil municipal de la commune de Trévenans du 2 juin 2020 portant approbation du plan local d'urbanisme ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Trévenans le paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier en ce qu'il est insuffisamment motivé ;

- les auteurs du plan local d'urbanisme ont commis une erreur manifeste d'appréciation en classant les parcelles AK 98 et AK 99 en zone naturelle dès lors que ces parcelles ne sont pas en zone humide, que le parti pris d'aménagement est incohérent, que les parcelles sont reliées aux réseaux et qu'elles présentent un intérêt économique.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 novembre 2021, la commune de Trévenans, représentée par la SCP DSC Avocats, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de la SCI KID le versement d'une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Durup de Baleine, président,

- les conclusions de Mme Bourguet-Chassagnon, rapporteure publique,

- et les observations de Me Woldanski pour la SCI KID et celles de Me Naudin, substituant Me Suissa, pour la commune de Trévenans.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 20 décembre 2019, le conseil municipal de Trévenans a approuvé le plan local d'urbanisme de cette commune. A la suite d'un recours gracieux exercé par le préfet du Territoire de Belfort, le conseil municipal de Trévenans a décidé, en adoptant de nouvelles délibérations prises le 2 juin 2020, de retirer la délibération du 20 décembre 2019 et d'approuver à nouveau ce plan local d'urbanisme. La société civile immobilière SCI KID, propriétaire des parcelles cadastrées section AK n°s 98 et 99, d'une contenance ensemble de 3 865 m2, situées au lieudit En Errupeux à Trévenans, a sollicité l'annulation de ces délibérations des 20 décembre 2019 et 2 juin 2020. Par le jugement du 17 juin 2021 dont cette société relève appel, le tribunal administratif de Besançon, après avoir constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions dirigées contre la délibération du 20 décembre 2019, a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. "

3. Si la société requérante soutient que le tribunal n'aurait pas répondu à un moyen tiré d'une erreur manifeste d'appréciation entachant le classement en zone U de parcelles constituant la zone d'aménagement concerté de la Varonne, il ne ressort toutefois pas des écritures présentées par cette société devant les premiers juges qu'elle les aurait saisis d'un tel moyen qui, d'ailleurs sans influence sur l'appréciation du bien-fondé du classement en zone N des parcelles de la requérante, pour leur part localisées dans la zone d'aménagement concerté de la Verte Comtoise, eût été inopérant. Les premiers juges n'étant pas tenus de répondre à tous les arguments avancés par les parties, il ressort des motifs du jugement attaqué que le tribunal administratif de Besançon a répondu, avec une motivation suffisamment précise et circonstanciée, aux moyens opérants qui étaient invoqués devant lui. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que ce jugement serait irrégulier comme insuffisamment motivé. Il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 9 du code de justice administrative doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. Aux termes de l'article L. 151-1 du code de l'urbanisme : " Le plan local d'urbanisme comprend : / (...) / 2° Un projet d'aménagement et de développement durables ; / (...) / / 4° Un règlement ; / (...) ". L'article L. 151-9 du code de l'urbanisme dispose : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger. / Il peut préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être faits ou la nature des activités qui peuvent y être exercées et également prévoir l'interdiction de construire. / Il peut définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées. ". L'article R. 151-17 de ce code dispose : " Le règlement délimite, sur le ou les documents graphiques, les zones urbaines, les zones à urbaniser, les zones agricoles, les zones naturelles et forestières. / Il fixe les règles applicables à l'intérieur de chacune de ces zones dans les conditions prévues par la présente section. ".

5. Aux termes de l'article R. 151-24 du code de l'urbanisme : " Les zones naturelles et forestières sont dites " zones N ". Peuvent être classés en zone naturelle et forestière, les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison : / 1° Soit de la qualité des sites, milieux et espace naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique ; /2° Soit de l'existence d'une exploitation forestière ; / 3° Soit de leur caractère d'espaces naturels ; / 4° Soit de la nécessité de préserver ou restaurer les ressources naturelles ; / 5° Soit de la nécessité de prévenir les risques notamment d'expansion des crues ".

6. Il est de la nature de toute réglementation d'urbanisme de distinguer des zones où les possibilités de construire sont différentes. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par ce plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir mais sans être lié par les modalités existantes d'utilisation des sols, dont ils peuvent prévoir la modification dans l'intérêt de l'urbanisme, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. La légalité des dispositions du règlement d'un plan local d'urbanisme s'apprécie au regard du parti d'urbanisme retenu, défini notamment par les orientations générales et par les objectifs du projet d'aménagement et de développement durables. Ces auteurs peuvent être amenés à classer en zone naturelle, pour les motifs énoncés par les dispositions de l'article R. 151-24 du code de l'urbanisme, un secteur qu'ils entendent soustraire, pour l'avenir, à l'urbanisation. L'appréciation des auteurs du plan sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif que si elle est fondée sur des faits matériellement inexacts ou entachée d'une erreur manifeste ou d'un détournement de pouvoir.

7. Il ressort des pièces du dossier, en particulier du projet d'aménagement et de développement durables et du rapport de présentation, que les auteurs du plan local d'urbanisme de Trévenans ont fait le choix de limiter le développement économique de la zone d'aménagement concertée de la Verte Comtoise, où se situent les parcelles de la société requérante, afin notamment de préserver l'environnement, au profit d'autres zones du territoire de la commune telles que la zone d'aménagement concerté de la Varonne, en dépit de la réserve émise par l'avis simple de la chambre de commerce et d'industrie le 10 avril 2019. Le choix de classer ces parcelles en zone naturelle est, ainsi, cohérent avec le projet d'aménagement et de développement durables.

8. Il ressort également des pièces du dossier que ces deux parcelles, qui ne sont bâties d'aucune construction, sont en nature de boisement ou de taillis et présentent, ainsi, le caractère d'espaces naturels, à l'instar de nombreux autres terrains voisins ou proches au nord, à l'ouest et au sud. A supposer que ces parcelles ne présenteraient pas elles-mêmes les caractéristiques d'une zone humide, circonstance à laquelle n'est pas subordonnée la légalité de leur classement en zone naturelle par le plan local d'urbanisme, elles demeurent des espaces naturels, à proximité immédiate d'une zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique et elles présentent une valeur écologique, serait-elle seulement ordinaire. Les circonstances que ces deux parcelles sont également proches d'autres terrains, pour leur part bâtis, et qu'elles seraient susceptibles d'être desservies par des réseaux déjà présents à proximité, ne faisaient pas légalement obstacle à ce classement en zone N. Dès lors, ce classement n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

9. Si la société requérante fait valoir que les parcelles cadastrées section AK n°s 98 et 99 présentent un intérêt économique, de sorte qu'un classement autre qu'en zone naturelle permettrait une extension cohérente de la zone d'aménagement concerté de la Verte Comtoise, sans nuire à la préservation de l'environnement, il ne relève pas de l'office du juge de l'excès de pouvoir de vérifier qu'un autre classement était légalement possible, mais seulement de s'assurer que le classement retenu n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

10. La circonstance que le classement en zone urbaine d'autres terrains, localisés pour leur part dans la zone d'aménagement concerté de la Varonne, serait, selon la société requérante, empreint d'une erreur manifeste d'appréciation, est sans influence sur l'appréciation de la légalité du classement en zone naturelle des parcelles cadastrées section AK n°s 98 et 99. Il en résulte que le moyen tiré de l'illégalité de ce classement en zone urbaine doit être écarté comme inopérant.

11. Il résulte de tout ce qui précède que la société civile immobilière SCI KID n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 2 juin 2020.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Trévenans, qui n'a pas dans la présente instance la qualité de partie perdante, le versement d'une somme à ce titre. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire application de ces dispositions et de mettre au même titre à la charge de la société civile immobilière KID le versement à cette commune de la somme de 1 500 euros.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société civile immobilière SCI KID est rejetée.

Article 2 : La société civile immobilière SCI KID versera à la commune de Trévenans la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société civile immobilière SCI KID et à la commune de Trévenans.

Délibéré après l'audience du 24 septembre 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Durup de Baleine, président,

- M. Barlerin, premier conseiller,

- Mme Peton, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 15 octobre 2024.

Le président-rapporteur,

Signé : A. Durup de BaleineL'assesseur le plus ancien

dans l'ordre du tableau,

Signé : A. Barlerin

Le greffier,

Signé : A. Betti

La République mande et ordonne au préfet du Jura en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

A. Betti

2

N° 21NC02293


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NC02293
Date de la décision : 15/10/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DURUP DE BALEINE
Rapporteur ?: M. Antoine DURUP DE BALEINE
Rapporteur public ?: Mme BOURGUET-CHASSAGNON
Avocat(s) : WOLDANSKI

Origine de la décision
Date de l'import : 20/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-15;21nc02293 ?
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