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23/07/2024 | FRANCE | N°24NC00396

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 3ème chambre, 23 juillet 2024, 24NC00396


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 18 octobre 2022 par lequel le maire de Seebach a suspendu ses indemnités de fonction jusqu'à la fourniture d'une attestation de capacité.



Par un jugement n° 2208535 du 21 décembre 2023, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête et un mémoire, enregistrés le 21 f

évrier 2024 et le 12 juin 2024, Mme B... A..., représentée par Me Maetz, demande à la cour :



1°) d'annuler le jug...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 18 octobre 2022 par lequel le maire de Seebach a suspendu ses indemnités de fonction jusqu'à la fourniture d'une attestation de capacité.

Par un jugement n° 2208535 du 21 décembre 2023, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 21 février 2024 et le 12 juin 2024, Mme B... A..., représentée par Me Maetz, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 21 décembre 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté n° 043/2022 du 18 octobre 2022 par lequel le maire de Seebach a suspendu ses indemnités de fonction jusqu'à la fourniture d'une attestation de capacité ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Seebach la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier en l'absence de signature ;

- le maire n'était pas compétent, en vertu des articles L. 2123-23 et L. 2123-19 du code général des collectivités territoriales, pour suspendre ses indemnités de maire délégué ; le maire aurait dû solliciter le conseil municipal pour suspendre ses indemnités de maire délégué ;

- l'arrêté contesté n'est pas exécutoire, en l'absence de transmission au contrôle de légalité ;

- l'arrêté contesté méconnaît les articles L. 2123-25-1 et D. 2123-23-1 du code général des collectivités territoriales alors que la suspension des indemnités par l'arrêté n °43/2022 concerne également celles qui devaient lui être versées pendant son congé de maladie ;

- le maire ne peut pas contrôler l'effectivité de l'exercice de ses fonctions sur le fondement de l'article L. 2123-21 du code général des collectivités territoriales en exigeant une attestation, ni a fortiori subordonner le versement de l'indemnité de maire délégué à la production d'un tel document ;

- l'arrêté contesté est entaché d'une erreur de fait dès lors qu'elle a exercé ses fonctions durant son congé de maladie et a repris ses fonctions à l'issue de celui-ci le 31 août 2022 ;

- il est entaché d'un détournement de pouvoir.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 juin 2024, la commune de Seebach, représentée par Me Loctin, conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de Mme A... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- à supposer que le motif tiré de l'absence de production d'une attestation de capacité à exercer les fonctions du mandat de maire-délégué soit illégal, l'arrêté peut être justifié par le motif tiré de l'absence d'exercice des fonctions ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Barteaux,

- les conclusions de M. Marchal, rapporteur public,

- et les observations de Me Picoche, représentant Mme A... et de Me Barbier-Renard, représentant la commune de Seebach.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... exerce les fonctions de maire déléguée de la commune de Niederseebach, commune associée à la commune de Seebach, dont elle est également adjointe au maire. Par un arrêté du 18 octobre 2022, le maire de la commune de Seebach a suspendu les indemnités de fonction de l'intéressée jusqu'à ce qu'elle lui fournisse une attestation de sa capacité à reprendre ses fonctions de maire délégué. Mme A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler cet arrêté. Par un jugement du 21 décembre 2023, dont Mme A... fait appel, le tribunal a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ".

3. Il ressort des pièces du dossier que la minute du jugement attaqué a été signée par le président, par le magistrat rapporteur et par la greffière d'audience. La circonstance que la copie de ce jugement, qui a été notifiée aux parties, ne comportait pas ces signatures est sans incidence sur sa régularité. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué ne serait pas conforme aux exigences de l'article R. 741-7 du code de justice administrative manque en fait.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. Aux termes de l'article L. 2113-11 du code général des collectivités territoriales : " La création au sein d'une commune nouvelle de communes déléguées entraîne de plein droit pour chacune d'entre elles : / 1° L'institution d'un maire délégué (...) ". Aux termes de l'article L. 2113-12-2 de ce code : " Le maire délégué est élu par le conseil municipal de la commune nouvelle parmi ses membres (...) ". Aux termes de l'article L. 2113-13 de ce code : " Le maire délégué remplit dans la commune déléguée les fonctions d'officier d'état civil et d'officier de police judiciaire. Il peut être chargé, dans la commune déléguée, de l'exécution des lois et règlements de police et recevoir du maire les délégations prévues aux articles L. 2122-18 à L. 2122-20. / Le maire délégué exerce également les fonctions d'adjoint au maire de la commune nouvelle, sans être comptabilisé au titre de la limite fixée à l'article L. 2122-2 ".

5. Aux termes de l'article L. 2123-21 du code général des collectivités locales : " Le maire délégué, visé à l'article L. 2113-13, perçoit l'indemnité correspondant à l'exercice effectif des fonctions de maire, fixée conformément aux articles L. 2123-20 et L. 2123-23 en fonction de la population de la commune associée. (...) ". Aux termes de l'article L. 2113-19 du même code : " Les dispositions du chapitre III du titre II du livre Ier de la présente partie relatives au maire et à ses adjoints sont également applicables respectivement aux maires délégués et à leurs adjoints. / Toutefois, pour l'application des articles L. 2123-23 et L. 2123-24, les indemnités maximales pour l'exercice effectif des fonctions de maire délégué et d'adjoint au maire délégué sont votées par le conseil municipal en fonction de la population de la commune déléguée et l'indemnité versée au titre des fonctions d'adjoint au maire de la commune nouvelle ne peut être cumulée avec l'indemnité de maire délégué ou d'adjoint au maire délégué. Le montant cumulé des indemnités des adjoints de la commune nouvelle et des maires délégués ne peut excéder le montant cumulé des indemnités maximales susceptibles d'être allouées aux adjoints d'une commune appartenant à la même strate démographique que la commune nouvelle et des indemnités maximales susceptibles d'être allouées aux maires de communes appartenant aux mêmes strates démographiques que les communes déléguées ". L'article L. 2123-20-1 du même code dispose que : " I. - Lorsque le conseil municipal est renouvelé, les indemnités de ses membres, à l'exception de l'indemnité du maire, sont fixées par délibération (...) ".

6. Il ressort des motifs de l'arrêté en litige qu'après avoir rappelé notamment que depuis la fin de son congé de maladie le 31 août 2022, Mme A... n'avait pas repris ses fonctions, ni produit l'attestation personnelle d'aptitude qu'il lui avait demandé, le maire de la commune de Seebach a décidé de subordonner le versement de l'indemnité de fonction à la production par l'intéressée d'une attestation personnelle spécifiant qu'elle n'était plus en arrêt de maladie, que rien ne s'opposait à ce qu'elle exerce sa mission de maire déléguée et précisant qu'elle reprenait officiellement ses fonctions. Toutefois, il résulte des dispositions précitées que le versement de l'indemnité de fonction à un maire délégué, également adjoint de droit au maire, est subordonné au seul exercice effectif des fonctions correspondant à ce mandat. Ainsi, en suspendant le versement de cette indemnité à la production d'une attestation d'aptitude, alors qu'une telle exigence n'est prévue par aucune disposition législative ou réglementaire, le maire de Seebach a entaché sa décision d'une erreur de droit. La circonstance que l'intéressée n'aurait pas effectivement repris ses fonctions électives à l'issue de son congé maladie ne saurait par ailleurs justifier la suspension pour l'avenir du versement de ses indemnités de fonction, lesquelles ne peuvent être remises en cause qu'a postériori en cas d'absence de service fait. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, Mme A... est fondée à demander l'annulation de l'arrêté contesté.

7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 octobre 2022.

Sur les frais de l'instance :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme A..., qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par la commune de Seebach au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. En revanche, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Seebach la somme demandée par Mme A..., au même titre.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 21 décembre 2023 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 18 octobre 2022 est annulé.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A... est rejeté.

Article 4 : Les conclusions présentées par la commune de Seebach au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la commune de Seebach.

Délibéré après l'audience du 25 juin 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Bauer, présidente,

- M. Meisse, premier conseiller,

- M. Barteaux, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 juillet 2024.

Le rapporteur,

Signé : S. BARTEAUXLa présidente,

Signé : S. BAUERLe greffier,

Signé : F. LORRAIN La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des Outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier :

F. LORRAIN

N° 24NC00396 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 24NC00396
Date de la décision : 23/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BAUER
Rapporteur ?: M. Stéphane BARTEAUX
Rapporteur public ?: M. MARCHAL
Avocat(s) : LEONEM AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 27/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-23;24nc00396 ?
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