Vu la procédure suivante :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 28 novembre 2022, par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office.
Par un jugement n° 2300532 du 15 juin 2023, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 21 septembre 2023, M. B..., représenté par la SCP A. Lévi-Cyferman et L. Cyferman, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de Meurthe-et-Moselle du 28 novembre 2022 ;
3°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour temporaire l'autorisant à travailler ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;
- il est entaché d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;
- il a été édicté à l'issue d'une procédure irrégulière, en méconnaissance de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ;
- il a été pris par une autorité incompétente ;
- le préfet n'a pas renversé la présomption de validité des actes d'état civil ;
- la décision de refus de titre de séjour est insuffisamment motivée ;
- elle méconnaît l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
- elle méconnait l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'illégalité en conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;
- la mesure d'éloignement a été prise en méconnaissance de son droit à être entendu, en méconnaissance de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la décision fixant le délai de départ volontaire a méconnu le paragraphe 2 de l'article 7 de la directive 2008/115/CE et les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet s'est cru en situation de compétence liée pour refuser de lui accorder un délai de départ volontaire supérieur à 30 jours.
Par un mémoire en défense, enregistré le 8 novembre 2023, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 août 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la convention consulaire entre la France et le Mali signée le 3 février 1962 ;
- l'accord franco-malien de coopération en matière de justice du 9 mars 1962 ;
- le code civil ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience publique.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bourguet-Chassagnon,
- et les observations de M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., qui déclare être un ressortissant malien, né le 20 mars 2003, entré sur le territoire français le 22 décembre 2018 et confié aux services de l'aide sociale à l'enfance du département de Meurthe-et-Moselle le 7 mars 2019, a demandé au préfet de Meurthe-et-Moselle la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 28 novembre 2022, le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer le titre demandé, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office. Par un jugement du 15 juin 2023, dont M. B... relève appel, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement :
2. Il résulte des motifs mêmes du jugement que le tribunal administratif de Nancy a expressément répondu aux moyens contenus dans la requête introduite par le requérant. En particulier, le tribunal administratif, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, n'a pas omis de répondre au moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté contesté. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le jugement serait entaché d'irrégularité en raison d'une insuffisance de motivation.
Sur la légalité des décisions contestées :
3. En premier lieu, par un arrêté n° 22.BCI.26 du 8 août 2022, régulièrement publié au recueil des actes administratifs du même jour, le préfet de Meurthe-et-Moselle a donné délégation de signature à M. Julien Le Goff, secrétaire général de la préfecture, à l'effet de signer tous les arrêtés, décisions, circulaires, rapports, documents et correspondances relevant des attributions de l'Etat dans le département de Meurthe-et-Moselle, à l'exception des arrêtés de conflit. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de M. C... pour signer l'acte attaqué doit être écarté.
4. En deuxième lieu, le refus de titre de séjour contesté vise les textes dont il fait application et mentionne les faits qui en constituent le fondement, le préfet indiquant de manière détaillée les anomalies et irrégularités affectant les documents d'état civil produits par l'intéressé l'ayant conduit à les regarder comme contrefaits. Le requérant n'est, par suite, pas fondé à soutenir que la décision de refus de titre de séjour est insuffisamment motivée.
5. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que le préfet a pris en considération les éléments invoqués tenant à la vie personnelle et à la vie professionnelle de M. B... dont il avait connaissance, et qui apparaissent dans la motivation de la décision attaquée. Il s'est prononcé sur la demande de titre de séjour présentée par le requérant et a notamment examiné d'office la possibilité de régulariser la situation de l'intéressé sur le fondement des dispositions des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet ne se serait pas livré à un examen réel et sérieux de la demande de titre de séjour qui lui était présentée.
6. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable ".
7. Il ressort des dispositions du livre VI du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français, et des décisions relatives au délai de départ volontaire, fixant le pays de destination et portant interdiction de retour sur le territoire français. Dès lors, l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration, qui fixe les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées en vertu de l'article L. 211-2 du même code, ne saurait être utilement invoqué à l'encontre des décisions contestées portant obligation de quitter le territoire français, fixant le délai de départ volontaire et fixant le pays de destination.
8. En cinquième lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou s'il entre dans les prévisions de l'article L. 421-35, l'étranger qui a été confié au service de l'aide sociale à l'enfance ou à un tiers digne de confiance au plus tard le jour de ses seize ans se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Cette carte est délivrée sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de la formation qui lui a été prescrite, de la nature des liens de l'étranger avec sa famille restée dans son pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil ou du tiers digne de confiance sur son insertion dans la société française ".
9. D'autre part, selon l'article R. 431-10 du même code : " L'étranger qui demande la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour présente à l'appui de sa demande : / 1°Les documents justifiants de son état civil ; / 2° Les documents justifiants de sa nationalité ; / (...) La délivrance du premier récépissé et l'intervention de la décision relative au titre de séjour sollicité sont subordonnées à la production de ces documents. (...) ". Aux termes de l'article L. 811-2 du même code : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil ". L'article 47 du code civil prévoit que : " Tout acte de l'état civil des français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ". La force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties.
10. Aux termes de l'article 24 de l'accord franco-malien de coopération en matière de justice du 9 mars 1962 : " Seront admis, sans légalisation, sur les territoires respectifs de la République française et de la République du Mali les documents suivants établis par les autorités administratives et judiciaires de chacun des deux Etats : / Les expéditions des actes de l'état civil ; / Les expéditions des décisions, ordonnances, jugements, arrêts et autres actes judiciaires ; (...) ". L'article 23 de cet accord stipule : " Par acte de l'état civil, (...) il faut entendre : / Les actes de naissance ; / (...) Les transcriptions des ordonnances, jugements ou arrêts en matière d'état civil ; (...) ". Aux termes de l'article 25 de la convention consulaire entre la France et le Mali signée le 3 février 1962 : " L'Etat de résidence devra admettre, sans légalisation, les signatures apposées par les consuls sur les documents (...) dont ils certifient l'expédition conforme à l'original délivré par l'autorité compétente lorsque ces documents seront revêtus de leur sceau officiel et établis matériellement de manière à faire apparaître leur authenticité ".
11. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a transmis à l'administration un extrait conforme du jugement supplétif n° 115 du 24 janvier 2019, un acte de naissance n° 517 établi le 12 février 2019, un certificat de nationalité n° 1251 du 14 octobre 2020, une carte d'identité consulaire n° 1654 du 28 décembre 2020 regardés comme frauduleux par le préfet et verse au dossier, à hauteur d'appel, un passeport délivré le 13 septembre 2023 par le département de la police aux frontières de Bamako. Ces documents indiquent qu'il est né le 20 mars 2003 au Mali. Pour remettre en cause l'authenticité de l'état civil résultant de ces actes, le préfet s'est appuyé sur un rapport d'expertise technique documentaire du 16 février 2021, établi par un analyste en fraude documentaire et à l'identité de la direction zonale de la police aux frontières (Zone Est). Ce rapport indique que l'extrait conforme du jugement supplétif, qui ne permet pas d'apprécier la régularité du jugement supplétif, ne comporte pas la mention de la qualité et de la signature du président ayant siégé en audience publique, ne désigne pas l'identité des parties civiles, ne respecte pas le délai d'opposition à exécution pour la transcription dans les registres de l'état civil et présente une erreur dans la typographie de la devise du pays. Le rapport relève que l'acte de naissance, document qui n'est pas sécurisé, comporte des traces de découpe sur son bord gauche effectuées au moyen de ciseaux alors que les actes de naissance établis au Mali font partie de souches séparées de leur matrice au moyen d'une ligne de pré-découpe laissant subsister des dentelures, que la société d'impression n'est pas identifiée, que l'acte est dépourvu du numéro de série à 7 chiffres, que les cadres verticaux sont imprimés avec un surlignage en gris trop foncé par comparaison avec un acte de naissance authentique, que la rubrique n° 25 comporte un formalisme erroné en mentionnant " Signature et Sceau et l'Officier d'Etat Civil " en lieu et place de " Signature et sceau de l'Officier d'Etat Civil ", que la rubrique n° 24 relative à la date comporte une surcharge et que ces différentes anomalies et irrégularités se retrouvent de manière récurrente sur des documents vierges en série d'impression, écartés pour ce motif du système de production et de délivrance officiel mais détournés et mis en circulation sur le marché des faux. Par ailleurs, s'agissant de la carte d'identité consulaire et du certificat de nationalité malienne, ces documents ne constituent pas des actes d'état civil et ne sont donc pas de nature à justifier de l'identité d'un étranger dès lors qu'ils ont été établis sur le fondement d'actes d'état civil non probants. Il n'est, à cet égard, pas démontré que ces documents auraient été rédigés sur la foi d'actes d'état civil distincts de ceux précédemment mentionnés et exempts de vices mettant en cause leur authenticité. Enfin, il n'apparaît pas que le passeport versé au dossier aurait été établi sur la base d'autres documents que ceux dont il a été question. Alors que M. B... se borne à reprocher au rapport d'expertise l'absence de comparaison avec des documents authentifiés et à se prévaloir de l'ensemble des documents qu'il a produits et notamment de la délivrance par les autorités maliennes de son passeport, et au regard des anomalies précédemment détaillées, le préfet de Meurthe-et-Moselle a pu légalement estimer que les éléments en sa possession étaient suffisants pour écarter comme dépourvus de valeur probante les documents d'état civil fournis par le requérant.
12. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet n'aurait pas valablement renversé la présomption de validité des actes qu'il avait produits pour établir son identité.
13. En sixième lieu, compte tenu de ce qui a été dit précédemment relativement à l'absence de justification par M. B... de son état civil, le préfet de Meurthe-et-Moselle pouvait, pour le seul motif tiré de ce que l'intéressé ne justifiait pas de l'âge auquel il avait été confié à l'aide sociale à l'enfance, refuser de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions ne peut qu'être écarté.
14. En septième lieu, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ". Aux termes de l'article L. 431-5 du même code : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
15. Il ressort des pièces du dossier, qu'à la date de la décision attaquée, l'intéressé, qui séjourne en France depuis moins de 4 ans, est célibataire, sans charges de famille en France et n'établit pas y disposer d'attaches stables et anciennes. S'il ressort des pièces du dossier que l'intéressée a obtenu un certificat d'aptitude professionnelle de boulanger et a conclu le 1er août 2022, à l'issue de son apprentissage, un contrat de travail à durée indéterminée pour un emploi de boulanger, ces seules circonstances ne suffisent pas à établir que le refus de titre de séjour porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Le préfet de Meurthe-et-Moselle n'a, par suite, en prenant cette décision, méconnu ni les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision de refus de titre de séjour contestée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. Ces circonstances n'étant pas de nature à caractériser l'existence de motifs exceptionnels ou de considérations humanitaires, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 431-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit également être écarté.
16. En huitième lieu, pour les motifs précédemment exposés, le refus de délivrance d'un titre de séjour opposé à M. B... n'est pas entaché d'illégalité. Par suite, l'exception d'illégalité du refus de titre invoquée à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire doit être écartée.
17. En neuvième lieu, aux termes de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union. / Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre. (...) ", il résulte de la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union européenne que cet article s'adresse non pas aux Etats membres mais uniquement aux institutions, organes et organismes de l'Union. Ainsi, le moyen tiré de leur violation par une autorité d'un Etat membre est inopérant.
18. Toutefois, il résulte également de la jurisprudence de la Cour de justice que le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union. Il appartient aux Etats membres, dans le cadre de leur autonomie procédurale, de déterminer les conditions dans lesquelles le respect de ce droit est assuré. Ce droit se définit comme celui de toute personne de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours d'une procédure administrative avant l'adoption de toute décision susceptible d'affecter de manière défavorable ses intérêts. Il ne saurait cependant être interprété en ce sens que l'autorité nationale compétente est tenue, dans tous les cas, d'entendre l'intéressé lorsque celui-ci a déjà eu la possibilité de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur la décision en cause.
19. Le droit d'être entendu implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne. Toutefois, dans le cas prévu par l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, où la décision faisant obligation de quitter le territoire français est prise concomitamment au refus de délivrance d'un titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français découle nécessairement du refus de titre de séjour. Le droit d'être entendu n'implique alors pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu avant que n'intervienne la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour.
20. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que la décision obligeant M. B... à quitter le territoire a été prise concomitamment à la décision portant refus de titre de séjour. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait été privé de son droit à être entendu.
21. En dixième lieu, M. B... ne peut utilement se prévaloir à l'encontre de la décision fixant le délai de départ volontaire à 30 jours des dispositions de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 dès lors que cette directive a été transposée en droit interne par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 et le décret n° 2011-820 du 8 juillet 2011 pris pour son application. Par ailleurs, les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, désormais reprises à l'article L. 612-1 ne présentent pas un caractère plus restrictif que ceux prévus par les dispositions de la directive 2008/115/CE, de sorte qu'elles ne sont pas contraires à ses objectifs. Dès lors, le moyen doit être écarté.
22. En dernier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment de la motivation de cette décision, que le préfet se serait estimé en situation de compétence liée pour prononcer un délai de départ volontaire d'une durée de trente jours.
23. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à la SCP A. Lévi-Cyferman et L. Cyferman et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.
Délibéré après l'audience du 13 juin 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Bauer, présidente,
- Mme Bourguet-Chassagnon, première conseillère,
- Mme Roussaux, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 juillet 2024.
La rapporteure,
Signé : M. Bourguet-ChassagnonLa présidente,
Signé : S. Bauer
La greffière,
Signé : N. Basso
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
N. Basso
2
N° 23NC02958