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04/07/2024 | FRANCE | N°23NC01539

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 4ème chambre, 04 juillet 2024, 23NC01539


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 4 octobre 2021 par lequel le préfet de la Marne l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de vingt-quatre mois.





Par un jugement n° 2102203 du 17 mars 2022, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a

rejeté sa demande.





Procédure devant la cour :



Par une requête enregistrée le 17 mai 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 4 octobre 2021 par lequel le préfet de la Marne l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de vingt-quatre mois.

Par un jugement n° 2102203 du 17 mars 2022, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 17 mai 2023, M. A..., représenté par Me Bricout, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 17 mars 2022 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;

2°) d'annuler l'arrêté du 4 octobre 2021 par lequel le préfet de la Marne l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de vingt-quatre mois ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision portant obligation de quitter le territoire est dépourvue de motivation ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen sérieux de sa situation personnelle ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant interdiction de retour n'est pas justifiée.

La requête a été communiquée au préfet de la Marne qui n'a pas produit de mémoire en défense.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 27 mars 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Bauer a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant marocain né le 19 août 1991, est entré régulièrement en France le 28 novembre 2016 sous couvert d'un visa de long séjour portant la mention " étudiant " valable jusqu'au 28 octobre 2017. Par un arrêté du 7 janvier 2019, le préfet de la Marne a refusé de renouveler son titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours. M. A... s'est maintenu sur le territoire et indique avoir entrepris des démarches de régularisation auprès des services préfectoraux en février 2020, qui n'ont pas abouti. A la suite de son interpellation en raison de la commission d'une infraction routière le 4 octobre 2021, le préfet de la Marne, par arrêté du même jour, l'a obligé à quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de destination et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de vingt-quatre mois. Par un jugement du 17 mars 2022, dont l'intéressé relève appel, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de ces décisions.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire :

2. En premier lieu, ainsi que l'ont retenu à bon droit les premiers juges, l'arrêté attaqué vise les textes dont il fait application, notamment l'article L. 611-1 et l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que les stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il mentionne également les éléments de fait relatifs à la situation du requérant, notamment que ce dernier n'a pas déféré à une première mesure d'éloignement assortissant le refus de renouvellement de son titre de séjour portant la mention " étudiant ", que son comportement délictuel représente une menace pour l'ordre public et qu'il est sans emploi et sans ressources. Alors que le préfet n'est pas tenu de mentionner tous les éléments relatifs à la situation de l'étranger auquel il fait obligation de quitter le territoire français, cet arrêté comporte ainsi l'ensemble des considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de son insuffisante motivation doit être écarté.

3. En deuxième lieu, il ne ressort pas de la motivation de l'arrêté attaqué que le préfet de la Marne n'aurait pas procédé à un examen sérieux de la situation personnelle du requérant.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : (...) 3° L'étranger s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour, le renouvellement du titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de l'autorisation provisoire de séjour qui lui avait été délivré ou s'est vu retirer un de ces documents ;(...) 5° Le comportement de l'étranger qui ne réside pas régulièrement en France depuis plus de trois mois constitue une menace pour l'ordre public ;(...) ".

5. Le préfet ayant, dans son arrêté, visé l'ensemble des dispositions de l'article L. 611-1, et non uniquement les dispositions du 5°, la circonstance que le préfet se serait fondé à tort sur l'alinéa 5 de cet article est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée dès lors que le requérant rentre dans les prévisions d'un autre alinéa de ce même article. Or, il est constant que M. A..., qui s'est maintenu irrégulièrement en France après le refus de renouvellement de son titre de séjour opposé par arrêté préfectoral du 7 janvier 2019 assorti d'une obligation de quitter le territoire français, entre dans les prévisions du 3° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, autorisant ainsi le préfet à édicter à son encontre la décision attaquée.

6. Si M. A... se prévaut de l'obtention à compter du 1er avril 2023 d'un contrat à durée indéterminée en qualité de technicien installateur de fibre, cette circonstance, postérieure à l'édiction de la décision attaquée, est sans incidence sur sa légalité. Ainsi qu'il a été dit, la durée du séjour de l'intéressé en France n'a été acquise que par son maintien irrégulier sur le territoire français en dépit de la mesure d'éloignement dont il a fait l'objet en janvier 2019. Enfin, il ne fait état d'aucune attache privée ou familiale en France alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait rompu tout lien dans son pays d'origine. Il n'est dès lors pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de la gravité de ses conséquences sur sa situation personnelle.

En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

7. Aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. ". L'article L. 612-10 du même code dispose : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ".

8. Ainsi qu'il a été développé au point 6, M. A... qui ne justifie ni même n'allègue de l'intensité de ses liens privés et familiaux en France, s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement et a commis une infraction routière, ne fait état d'aucune circonstance humanitaire qui justifierait que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour à son encontre, l'obtention, postérieurement à l'édiction de la décision attaquée, d'un contrat de travail à durée indéterminée ne pouvant être prise en compte pour apprécier sa légalité. Dans ces conditions, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que le préfet de la Marne n'avait pas commis d'erreur d'appréciation en l'interdisant de retour sur le territoire français pour une durée de vingt-quatre mois.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par un jugement du 17 mars 2022, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 4 octobre 2021 par lequel le préfet de la Marne l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de vingt-quatre mois. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Marne.

Délibéré après l'audience du 13 juin 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Bauer, présidente,

- Mme Bourguet-Chassagnon, première conseillère,

- Mme Roussaux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 juillet 2024.

La présidente-rapporteure,

Signé : S. Bauer L'assesseure la plus ancienne,

Signé : M. Bourguet-Chassagnon

La greffière,

Signé : N. Basso

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

N. Basso

2

N° 23NC01539


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NC01539
Date de la décision : 04/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BAUER
Rapporteur ?: Mme Sandra BAUER
Rapporteur public ?: M. MARCHAL
Avocat(s) : SCP MCMB

Origine de la décision
Date de l'import : 14/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-04;23nc01539 ?
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