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27/06/2024 | FRANCE | N°22NC02564

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 1ère chambre, 27 juin 2024, 22NC02564


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 22 avril 2022 par lequel le préfet de l'Aube a refusé de lui accorder un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite à défaut d'exécution volontaire.



Par un jugement n° 2201163 du 16 septembre 2022, le tribunal administratif de Châlons-en

-Champagne a rejeté ce recours.



Procédure devant la cour :



Par une requête enregistré...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 22 avril 2022 par lequel le préfet de l'Aube a refusé de lui accorder un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite à défaut d'exécution volontaire.

Par un jugement n° 2201163 du 16 septembre 2022, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté ce recours.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 18 octobre 2022, Mme B... A..., représentée par Me Gaffuri, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 16 septembre 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 22 avril 2022 par lequel le préfet de l'Aube a refusé de lui accorder un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite à défaut d'exécution volontaire ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Aube, de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation dans le même délai et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler pour la durée de l'instruction ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, moyennant la renonciation de son avocat à percevoir la contribution versée par l'État au titre de l'aide juridictionnelle.

Elle soutient que :

S'agissant du refus de titre de séjour :

- il est insuffisamment motivé ;

- le préfet de l'Aube n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;

- il méconnaît les articles L. 435-1 et L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet de l'Aube a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision sur sa situation personnelle ;

- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 mars 2024, le préfet de l'Aube, représenté par Me Termeau, conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 9 janvier 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Sibileau, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... A..., ressortissante angolaise née le 6 novembre 1995, est entrée en France selon ses dires le 13 juin 2014. L'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a rejeté le 31 août 2016 sa demande d'admission au statut de réfugié. Le 2 mai 2017 la Cour nationale du droit d'asile a confirmé la décision de l'OFPRA. Elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour temporaire sur le fondement de l'admission exceptionnelle au séjour le 13 décembre 2021. Par un arrêté du 22 avril 2022, le préfet de l'Aube lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination. Par un jugement du 16 septembre 2022 dont Mme A... relève appel, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté ce recours.

2. En premier lieu, l'arrêté litigieux, qui n'avait pas à reprendre tous les éléments de la situation personnelle de la requérante, précise les dispositions légales sur lesquelles il s'appuie et rappelle de manière non stéréotypée les principales considérations relatives à la situation de Mme A..., notamment ses conditions d'entrée et de séjour en France, sa situation familiale et la scolarité de ses enfants. Par suite le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision doit être écarté. En outre, il ressort des termes mêmes de l'arrêté litigieux que le préfet a procédé à un examen sérieux de la situation individuelle de l'intéressée en prenant notamment en compte sa situation administrative et familiale.

3. En second lieu, d'une part aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

4. D'autre part, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 (...) ". Aux termes de l'article L. 423-23 du même code : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 (...) ".

5. Mme A... soutient que le centre de ses intérêts privés et familiaux se situe désormais en France où elle est entrée en 2014 et où elle séjourne depuis de manière ininterrompue. Elle invoque également la naissance sur le territoire national de ses deux enfants, la contribution du père du fils aîné de ses enfants, un réfugié angolais, à l'éducation et à l'entretien de son enfant, la scolarisation de son fils aîné et la présence en France de ses sœurs et demi-frères. Elle ajoute qu'elle n'a plus aucun lien avec son pays d'origine. Il ressort des pièces du dossier qu'elle est hébergée depuis 2020 par une structure associative et elle n'établit pas une insertion particulière en France. De surcroît, il n'est pas établi que les pères de ses enfants participent à l'entretien et à l'éducation des enfants mineurs de l'intéressée. Les autorités en charge de l'asile ont rejeté les 31 août 2016 et 2 mai 2017 ses demandes de protection internationale. L'appelante ne pouvait ignorer la précarité de sa situation au regard de la règlementation sur le séjour. Compte tenu de son jeune âge, la scolarisation de son fils aîné en école maternelle sur le territoire français à la date de l'arrêté attaqué n'est pas de nature à faire obstacle à la poursuite et au bon déroulement de sa scolarité en Angola. Par suite, compte tenu des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de séjour de l'intéressée en France, l'arrêté du 22 avril 2022 n'a pas porté au droit de l'appelante au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris. Ainsi, le préfet de l'Aube n'a ni méconnu les stipulations et dispositions précitées, ni commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement sur la situation personnelle de l'intéressée.

6. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté ses demandes. Par voie de conséquence, les conclusions présentées à fin d'injonction et celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'intérieur et des Outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète de l'Aube.

Délibéré après l'audience du 6 juin 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Guidi, présidente,

- M. Sibileau, premier conseiller,

- Mme Peton, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 27 juin 2024.

Le rapporteur,

Signé : J.-B. SibileauLa présidente,

Signé : L. Guidi

La greffière,

Signé : S. Robinet

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des Outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

S. Robinet

2

N° 22NC02564


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22NC02564
Date de la décision : 27/06/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme GUIDI
Rapporteur ?: M. Jean-Baptiste SIBILEAU
Rapporteur public ?: Mme ANTONIAZZI
Avocat(s) : GAFFURI

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-06-27;22nc02564 ?
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