Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Etablissements Leonard DRM a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la délibération du 27 janvier 2020 par laquelle le conseil métropolitain de l'Eurométropole de Metz a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune de la Maxe.
Par un jugement n° 2002473 du 24 février 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 5 avril 2022, la société Etablissements Leonard DRM, représentée par Me Tasciyan, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 24 février 2022 ;
2°) d'annuler la délibération du 27 janvier 2020 par laquelle le conseil métropolitain de l'Eurométropole de Metz a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune de la Maxe ;
3°) de mettre à la charge de l'Eurométropole de Metz une somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la délibération du 27 janvier 2020 méconnaît l'article L. 153-19 du code de l'urbanisme dès lors que le commissaire enquêteur n'a pas examiné les avis des personnes publiques associées et que par conséquent, il ne peut être regardé comme ayant émis un avis personnel et motivé sur le projet soumis à enquête publique ;
- l'avis du commissaire enquêteur n'est pas suffisamment motivé ;
- le classement en zone 1 AUX des parcelles 49, 153, 256, 157, 167, 250 et 251 est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;
- le classement en zone A des parcelles 123, 253 et 254 est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 janvier 2024, l'Eurométropole de Metz, représentée par Me De Zolt conclut :
1°) à titre principal, au rejet de la requête ;
2°) à titre subsidiaire à ce que la cour annule la délibération du 27 janvier 2020 en tant seulement qu'elle classe les parcelles cadastrées Section 7, n° 123, 253 et 254 en zone agricole ou en tant seulement qu'elle classe les parcelles cadastrées Section 7, n° 49, 153, 156, 157, 167 et 250 en zone à urbaniser ;
3°) à titre très subsidiaire, à ce qu'elle annule la délibération du 27 janvier 2020 en tant seulement qu'elle classe les parcelles cadastrées Section 7, n° 123, 253 et 254 en zone agricole et les parcelles cadastrées Section 7, n° 49, 153, 156, 157, 167 et 250 en zone à urbaniser ;
4°) à titre infiniment subsidiaire, qu'elle sursoie à statuer sur le fondement de l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme ;
5°) de mettre à la charge de la société Etablissements Leonard DRM une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens soulevés par la société Etablissements Leonard DRM ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Sibileau, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Antoniazzi, rapporteure publique,
- et les observations de Me Tascyan, pour la société Etablissements Leonard DRM et de Me Richard, substituant Me De Zolt, pour l'Eurométropole de Metz.
Considérant ce qui suit :
1. Par une délibération du 28 avril 2016, le conseil municipal de La Maxe a prescrit la révision de son plan local d'urbanisme. L'enquête publique s'est déroulée du 4 octobre 2019 au 4 novembre 2019 et le commissaire enquêteur a rendu son rapport le 4 décembre 2019. Par une délibération du 27 janvier 2020, le conseil métropolitain de l'Eurométropole de Metz a approuvé la révision du plan local d'urbanisme de La Maxe. La société Etablissements Leonard DRM, spécialisée dans l'exploitation de terrains à usage de sablières sur le territoire de la commune, a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler cette délibération. Par un jugement du 24 février 2022 dont la société Etablissements Leonard DRM relève appel, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté le recours qu'elle a formé contre la délibération du 27 janvier 2020.
Sur la légalité de la délibération du 27 janvier 2020 :
En ce qui concerne la régularité de l'enquête publique :
2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 123-19 du code de l'environnement : " Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête établit un rapport qui relate le déroulement de l'enquête et examine les observations recueillies. / Le rapport comporte le rappel de l'objet du projet, plan ou programme, la liste de l'ensemble des pièces figurant dans le dossier d'enquête, une synthèse des observations du public, une analyse des propositions produites durant l'enquête et, le cas échéant, les observations du responsable du projet, plan ou programme en réponse aux observations du public. / Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête consigne, dans une présentation séparée, ses conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables, favorables sous réserves ou défavorables au projet. (...) ". Si ces dispositions n'imposent pas au commissaire enquêteur de répondre à chacune des observations présentées lors de l'enquête publique, elles l'obligent à indiquer, au moins sommairement, en donnant son avis personnel, les raisons qui déterminent le sens de cet avis. Toutefois, aucun texte législatif ou réglementaire non plus qu'aucun principe général du droit n'impose aux commissaires enquêteurs d'analyser ou de donner un avis sur le contenu des avis des personnes publiques associées. Par suite, la société Etablissements Leonard DRM ne peut utilement se prévaloir de la circonstance, à la supposer établie, que le commissaire enquêteur n'aurait pas répondu aux observations d'une personne publique associée, à savoir le syndicat mixte du schéma de cohérence territoriale de l'agglomération messine.
3. En second lieu, les premiers juges n'ont pas commis d'erreur en écartant, par des motifs qu'il convient d'adopter, le moyen tiré par la société Etablissements Leonard DRM de ce que le commissaire enquêteur aurait insuffisamment motivé son avis.
En ce qui concerne le classement en zone A des parcelles cadastrées section 7 n°s 123, 253 et 254 :
4. En premier lieu, en vertu de l'article L. 151-5 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors en vigueur, le projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme définit notamment " Les orientations générales des politiques d'aménagement, d'équipement, d'urbanisme, de paysage, de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers, et de préservation ou de remise en bon état des continuités écologiques " et " fixe des objectifs chiffrés de modération de la consommation de l'espace et de lutte contre l'étalement urbain ". Aux termes de l'article L. 151-9 du même code : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger. / Il peut préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être faits ou la nature des activités qui peuvent y être exercées et également prévoir l'interdiction de construire. / Il peut définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées ". Aux termes de l'article R. 151-22 du code de l'urbanisme : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles ". L'article R. 151-23 du même code précise : " Peuvent être autorisées, en zone A : / 1°-Les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole ou au stockage et à l'entretien de matériel agricole par les coopératives d'utilisation de matériel agricole agréées au titre de l'article L. 525-1 du code rural et de la pêche maritime ; / 2° Les constructions, installations, extensions ou annexes aux bâtiments d'habitation, changements de destination et aménagements prévus par les articles L. 151-11, L. 151-12 et L. 151-13, dans les conditions fixées par ceux-ci. ". Il résulte de ces dispositions qu'une zone agricole, dite " zone A ", du plan local d'urbanisme a vocation à couvrir, en cohérence avec les orientations générales et les objectifs du projet d'aménagement et de développement durables, un secteur, équipé ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles.
5. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Ils peuvent être amenés, à cet effet, à modifier le zonage ou les activités autorisées dans une zone déterminée, pour les motifs énoncés par les dispositions citées ci-dessus. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.
6. Il ressort des pièces du dossier que l'unité foncière dans laquelle sont situées les parcelles cadastrées section 7 n°s 123, 253 et 254 se trouve elle-même dans un espace délimité par la Moselle, l'autoroute A 31 et la rue de Thury. Cet espace composé de plusieurs unités foncières comprend une zone déjà construite et une zone agricole. Les parcelles dont s'agit assurent une transition harmonieuse et clairement définie entre les deux parties de cette unité foncière largement naturalisée. Dans ces conditions, le classement des parcelles cadastrées section 7 n°s 123, 253 et 254 en zone agricole n'est entaché d'aucune erreur manifeste d'appréciation.
7. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que les parcelles dont s'agit sont situées dans une zone blanche du plan de prévention des risques d'inondation de la Moselle et que ce document n'y prévoit aucune prescription particulière. Cette circonstance de fait ne saurait constituer un obstacle au classement de ces parcelles en zone A.
8. En troisième et dernier lieu, pour apprécier la cohérence exigée au sein du plan local d'urbanisme entre le règlement et le projet d'aménagement et de développement durables, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle du territoire couvert par le document d'urbanisme, si le règlement ne contrarie pas les orientations générales et objectifs que les auteurs du document ont définis dans le projet d'aménagement et de développement durables, compte tenu de leur degré de précision. Par suite, l'inadéquation d'une disposition du règlement du plan local d'urbanisme à une orientation ou un objectif du projet d'aménagement et de développement durables ne suffit pas nécessairement, compte tenu de l'existence d'autres orientations ou objectifs au sein de ce projet, à caractériser une incohérence entre ce règlement et ce projet.
9. Il ressort des pièces du dossier que le projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme de l'Eurométropole de Metz détermine quatre grandes orientations pour le document d'urbanisme qui sont de conforter la qualité de vie et le cadre naturel, de définir un cadre de développement cohérent et réfléchi, de placer l'environnement au cœur des enjeux et de maintenir l'activité économique et commerciale. Le classement des parcelles en litige en zone agricole, dans les conditions rappelées au point 6 ci-dessus, s'inscrit dans les orientations du projet d'aménagement et de développement durables visant à conforter la qualité de vie et le cadre naturel, à définir un cadre de développement cohérent et réfléchi ainsi que placer l'environnement au cœur des enjeux sans contrevenir à la dernière orientation, qui insiste sur le maintien de l'activité économique et commerciale. Par suite, le moyen tiré de l'incohérence du zonage choisi avec les objectifs fixés par le projet d'aménagement et de développement durables comme avec le rapport de présentation doit être écarté.
10. Il résulte de ce qui a été exposé des points 4 à 9 ci-dessus que la société Etablissements Leonard DRM n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont écarté les moyens tirés de l'illégalité du classement en zone A des parcelles cadastrées section 7 n°s 123, 253 et 254.
En ce qui concerne le classement en zone 1 AUXb des parcelles section 6 n°s 49, 153, 156, 157, 167, 250 et 251 :
11. En premier lieu, aux termes de l'article R. 151-20 du code de l'urbanisme : " Les zones à urbaniser sont dites "zones AU". Peuvent être classés en zone à urbaniser les secteurs destinés à être ouverts à l'urbanisation. / Lorsque les voies ouvertes au public et les réseaux d'eau, d'électricité et, le cas échéant, d'assainissement existant à la périphérie immédiate d'une zone AU ont une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans l'ensemble de cette zone et que des orientations d'aménagement et de programmation et, le cas échéant, le règlement en ont défini les conditions d'aménagement et d'équipement, les constructions y sont autorisées soit lors de la réalisation d'une opération d'aménagement d'ensemble, soit au fur et à mesure de la réalisation des équipements internes à la zone prévus par les orientations d'aménagement et de programmation et, le cas échéant, le règlement. / Lorsque les voies ouvertes au public et les réseaux d'eau, d'électricité et, le cas échéant, d'assainissement existant à la périphérie immédiate d'une zone AU n'ont pas une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans l'ensemble de cette zone, son ouverture à l'urbanisation est subordonnée à une modification ou à une révision du plan local d'urbanisme comportant notamment les orientations d'aménagement et de programmation de la zone. ".
12. Il résulte des dispositions citées au point précédent que les secteurs destinés à être ouverts à l'urbanisation peuvent être ouverts à l'urbanisation selon des modalités différentes en fonction du caractère suffisant ou insuffisant des voies publiques et des réseaux d'eau, d'électricité et, le cas échéant, d'assainissement existant à la périphérie immédiate de la zone à urbaniser - dite zone AU - pour desservir les constructions à implanter dans l'ensemble de cette zone. Lorsque les voies et réseaux existant à la périphérie immédiate des terrains ont une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans l'ensemble de la zone, celle-ci est ouverte à l'urbanisation et les constructions y sont autorisées dans les conditions fixées par le deuxième alinéa de l'article R. 151-20. Au cas contraire, en application du troisième alinéa du même article, le plan local d'urbanisme peut soit subordonner l'ouverture à l'urbanisation de la zone à une modification ou à une révision de ce plan, soit fixer immédiatement les règles de constructibilité applicables dans la zone en subordonnant la possibilité d'autoriser des constructions à la réalisation des voies et réseaux nécessaires à la périphérie immédiate de la zone.
13. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir de former sa conviction sur les points en litige au vu des éléments versés au dossier par les parties. S'il peut écarter des allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées, il ne saurait exiger de l'auteur du recours que ce dernier apporte la preuve des faits qu'il avance. Le cas échéant, il revient au juge, avant de se prononcer sur une requête assortie d'allégations sérieuses non démenties par les éléments produits par l'administration en défense, de mettre en œuvre ses pouvoirs généraux d'instruction des requêtes et de prendre toutes mesures propres à lui procurer, par les voies de droit, les éléments de nature à lui permettre de former sa conviction, en particulier en exigeant de l'administration compétente la production de tout document susceptible de permettre de vérifier les allégations du demandeur.
14. Si la société Etablissements Leonard DRM ne conteste pas que les parcelles dont s'agit ne supportent que des hangars, elle soutient toutefois que ses terrains sont suffisamment desservis par les différents réseaux d'eau, d'électricité et, le cas échéant, d'assainissement ainsi que par la voirie. Toutefois, la société Etablissements Leonard DRM n'apporte à l'appui de ses affirmations aucun élément factuel de nature à remettre en cause le constat contraire opéré par l'Eurométropole de Metz dès le rapport de présentation du plan local d'urbanisme. Par conséquent, l'appelante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont écarté le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions citées au point 11 ci-dessus.
15. En second lieu, si la société Etablissements Leonard DRM soutient que ses parcelles, déjà classées en zone 1 AUX sous l'empire du précédent document d'urbanisme auraient dû être classées en zone UX dès lors qu'elles supportent une activité économique, le moyen tiré de la méconnaissance des orientations du projet d'aménagement et de développement durables doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 9 ci-dessus.
16. Il résulte de ce qui a été exposé des points 11 à 15 ci-dessus que la société Etablissements Leonard DRM n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont écarté les moyens tirés de l'illégalité du classement en zone 1 AUXb des parcelles section 6 n°s 49, 153, 156, 157, 167, 250 et 251.
Sur les frais d'instance :
17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Eurométropole de Metz, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société Etablissements Leonard DRM demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la société Etablissements Leonard DRM une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par l'Eurométropole de Metz et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la société Etablissements Leonard DRM est rejetée.
Article 2 : La société Etablissements Leonard DRM versera à l'Eurométropole de Metz la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Etablissements Leonard DRM et à l'Eurométropole de Metz.
Copie en sera adressée au préfet de la Moselle et à la commune de La Maxe.
Délibéré après l'audience du 6 juin 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Guidi, présidente,
- M. Sibileau, premier conseiller,
- Mme Peton, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 27 juin 2024.
Le rapporteur,
Signé : J.-B. SibileauLa présidente,
Signé : L. Guidi
La greffière,
Signé : S. Robinet
La République mande et ordonne au préfet de la Moselle en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
S. Robinet
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N° 22NC00869